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. 2020 Apr 15;204(6):589–597. [Article in French] doi: 10.1016/j.banm.2020.04.006

Développement professionnel continu (DPC) et émergence de la recertification en France. Évolution législative et commentaires

Continuing professional development and recertification process in France

D Bertrand a,b,c,, P Bouet b
PMCID: PMC7158780  PMID: 32296240

Abstract

Continuing medical education (CME) is an obligation in France. The evaluation of professional practices joined in 2004 the obligation to acquire knowledge, becoming the Continuing professional development (CPD) in 2009. Currently, the system is complete: definition, organization and validation. However, the individual obligation to validate the CPD has never been applied. The recertification process provided for by the 2019 law will not be operational until 2021, at the earliest. Its essential pillar is CPD. The recertification mission who prepared the law excludes all knowledge verification tests. Recertification is done by promoting the professional career path including, in addition to CPD, a maintained and regular activity, an improvement in the relationship with the patient, taking into account the doctor's health and the absence of undesirable events. Seeing that the French Medical Council oversees the professional skills of physicians, it is the Council that receives the validation of the CPD and will receive that of recertification.

Keywords: Continuing professional development (CPD), Continuing medical education (CME), Recertification

Introduction

Le médecin doit fournir des soins compétents, éclairés, utiles, conformes aux données de la science.

Le Code de déontologie médicale indique à l’article R.4127-11 : « Tout médecin entretient et perfectionne ses connaissances dans le respect de son obligation de développement professionnel continu » [1].

L’Association médicale mondiale mentionne dans la Déclaration de Genève mise à jour en 2019 : « Je partagerai mes connaissances médicales au bénéfice du patient et pour les progrès des soins de santé » [2].

L’article L.4021-1 (CSP) modifié par la loi en 2016 [3] précise les méthodes pour satisfaire l’obligation : « le développement professionnel continu a pour objectifs le maintien et l’actualisation des connaissances et des compétences ainsi que l’amélioration des pratiques. Il constitue une obligation pour les professionnels de santé ».

Pour parvenir à cette définition, l’organisation et les méthodes du DPC ont été sans cesse modifiées par des textes législatifs. En janvier 2020, une nouvelle période triennale de validation individuelle du DPC s’ouvre, mais jusqu’à présent le bilan est mitigé. La recertification obligatoire des professionnels de santé dont la pierre angulaire est le DPC, est peut-être, la meilleure solution pour obliger une validation de celui-ci, qui n’a jamais été réalisée.

L’évolution législative du développement professionnel continu depuis 1996

Des dispositifs avaient été mis en place antérieurement, par exemple, le service de la Formation Continue des Médecins créé à l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris en 1988, au sein de la Direction des affaires médicales. Cinq axes de formation avaient été progressivement identifiés :

  • des séminaires sur des thèmes innovants dont les intervenants étaient des médecins de l’AP-HP ;

  • des financements pour des congrès, des séjours à l’étranger selon des règles définies par l’Institution ;

  • des formations adaptées en informatique et en anglais pour faciliter les publications ;

  • une formation au management des chefs de service d’une durée de 15 jours par promotion appelée : école de management des medecins des hôpitaux (EMAMH) ;

  • une unité de recherche sur l’amélioration de la relation médecin-malade dans le cadre des services hospitaliers.

Les chemins étaient ambitieux et précurseurs mais basés, essentiellement, sur l’acquisition des connaissances. Quelques centres hospitaliers universitaires avaient suivi partiellement cette voie.

L’ordonnance du 24 avril 1996 « relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins »[4] impose la formation médicale continue (FMC) à tout médecin. Elle a créé un Conseil national de formation médicale continue (CNFMC) arrêtant la liste des thèmes nationaux prioritaires, évaluant les projets de formation et répartissant des fonds. Dans chaque région, un Conseil régional a, en plus, l’objectif de délivrer une attestation aux médecins libéraux qui ont satisfait à cette obligation ainsi que les Commissions Médicales d’Etablissement (CME) pour les médecins hospitaliers.

Deux éléments sont essentiels. Les médecins salariés non hospitaliers sont oubliés par le texte législatif, seuls les libéraux et les hospitaliers sont mentionnés. La formation continue est appréciée par l’impact sur l’évolution des pratiques professionnelles ; les actions de formations validées, doivent en quelque sorte permettre un retour sur investissement en rapport avec le titre même de l’ordonnance.

La loi du 4 mars 2002 « relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé » [5] conforte le dispositif dans une organisation nationale modifiée. Trois conseils nationaux de FMC concernant les libéraux, les salariés non hospitaliers et les hospitaliers sont créés pour tenir compte des spécificités de chaque statut, mais les décisions générales sont prises en commun tant pour les thèmes prioritaires que pour l’agrément des organismes de formation et les modes de validation de l’obligation de FMC. L’organisation régionale prévue n’est pas appliquée.

La loi du 13 août 2004 « relative à l’assurance maladie » [6], introduit un point essentiel, l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), obligation nouvelle plus contraignante complétant l’acquisition des connaissances. Le décret d’application est paru en 2006 [7].

Les trois Conseils Nationaux ont établi un dispositif concernant :

  • le périmètre de la formation comprenant quatre groupes réunis dans le Tableau 1 ;

  • l’agrément des organismes de formation sur des critères d’indépendance vis-à-vis des industriels des produits de santé ;

  • une grille de validation individuelle pendant une période quinquennale, basée sur 250 crédits à acquérir, dont un forfait de 100 points définis avec la Haute Autorité de Santé (HAS) sur l’évaluation des pratiques professionnelles.

Tableau 1.

Barème commun aux trois CNFMC en 2006.

Groupes Exemples de moyens Nombre maximal de crédits/5 ans dans les différents groupes
Groupe 1
Formations présentielles
Enseignement post universitaire (EPU), congrès à partie FMC, séminaires, staffs hospitaliers à protocole, diplôme universitaire… 100



Groupe 2
Formations individuelles
Revues à comité de lecture avec/sans test, livres et CD-Rom avec test, sites web médicaux agréés… 100



Groupe 3
Investissements collectifs dans des organismes professionnels ou de santé publique
–Fonctions coopératives, au sein de commissions officielles, institutions…
–Engagement dans l’enseignement, l’évaluation ou la recherche…
–Actions de santé publique et communautaires…
100



Groupe 4
Obligation EPP
–Évaluation individuelle ou collective ;
–Forfait de 100 points obligatoires
100

Source : conseils nationaux de FMC [8].

Le projet de décret fixant les champs et le barème avait été validé par les CNFMC et la Direction de l’hospitalisation et de l’offre de soins puis transmis au Conseil d’État, mais la période des élections présidentielles de 2007 n’a pas permis sa publication.

Seuls les agréments ont persisté jusqu’en 2010. En 2008, lors de la préparation de la loi santé, les CNFMC demandent la création du développement professionnel continu, constitué de la FMC (acquisition des connaissances) et de l’EPP (analyse et amélioration des pratiques).

La loi « hôpital, patients, santé et territoires » (HPST) du 21 juillet 2009 » [9]

La définition reprend le contexte en tenant compte « des priorités de santé publique et de la nature médicalisée des dépenses de santé ». La durée pour le contrôle est fixée à 5 ans mais l’obligation est annuelle. Les décrets d’application sont publiés en 2012. Une commission scientifique indépendante, agrée les organismes de formation, comme précédemment, mais elle est autonome dans l’organisme gestionnaire du DPC, qui est constitué sous la forme d’un Groupement d’Intérêt Public (GIP).

En janvier 2014, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), propose une remise à plat du dispositif, qui pour l’instant ne fonctionne que pour les agréments [10].

La loi « de modernisation de notre système de santé » du 26 janvier 2016 [11]

Elle modifie radicalement le dispositif : création d’une Agence nationale de développement professionnel continu (ANDPC) reprenant la forme d’un GIP constitué paritairement entre l’État et l’Union nationale des caisses d’assurances maladies. Elle assure le pilotage du DPC pour l’ensemble des professionnels de santé qu’ils soient hospitaliers, salariés non hospitaliers ou libéraux. Vingt-neuf professions sont concernées, allant de l’aide-soignant, infirmier, puéricultrice, sage-femme…, au médecin.

De nombreuses instances l’aident au pilotage [12].

Les principales missions, outre l’aspect opérationnel examiné par la suite, sont :

  • l’évaluation des organismes de DPC ;

  • la garantie de la qualité scientifique et pédagogique des actions et programmes ;

  • la mesure de l’impact du DPC sur l’amélioration et l’efficience du système de soins ;

  • la recherche des meilleures méthodes pour diffuser les messages du DPC, et améliorer ainsi les pratiques, etc.

Le financement de l’Agence est de l’ordre de 180 millions d’euros en 2018 dont environ la moitié est destinée aux médecins. Des contributions volontaires s’ajoutent aux apports de ses membres.

L’Agence participe à deux niveaux au DPC des médecins, d’une part, l’indemnisation du professionnel compensant le manque de revenus pendant la durée de la formation et d’autre part le financement des actions du DPC ; les formations conventionnelles ont été les prémices des formations indemnisées.

Les Conseils nationaux professionnels (CNP), innovation majeure du dispositif, regroupent pour chaque spécialité médicale, les organismes professionnels et les sociétés savantes. Ils permettent une représentation complète de la discipline.

Dans le cadre du DPC, les CNP proposent des orientations spécifiques à la spécialité, déterminent des parcours pluriannuels et élaborent des documents de traçabilité regroupant toutes les actions de DPC. Les missions en sus concernent les expertises notamment demandées par le ministère de la Santé, et la représentation de la spécialité au niveau institutionnel.

Une structure fédérative, en l’occurrence, pour les médecins, la Fédération des spécialités médicales (FSM) permet une concertation entre les CNP, et une représentation commune à l’extérieur. Seule la médecine générale garde une individualité au sein des CNP par son Collège.

Le Tableau 2 présente l’élément majeur de chaque loi au niveau du contenu des médecins concernés, de l’organisation, et de l’autorité validante prévue.

Tableau 2.

Les principaux apports des textes législatifs en 1996 et 2016.

Textes législatifs Contenu Médecins concernés Organisation Validation
Ordonnance 1994 Formation continue et définition de thèmes prioritaires Hospitaliers–libéraux Conseil national (principes) Conseils régionaux (application) CME pour les hospitaliers
Conseil régional pour les libéraux
Non opérationnel
Loi 2002 Identique Salariés hospitaliers libéraux 3 conseils nationaux, un pour chaque mode d’exercice
Conseils régionaux prévus
Par l’Ordre
Non opérationnel
Loi 2004 Formation continue et évaluation des pratiques professionnelles (EPP) Identique Définition de l’EPP par l’HAS Agrément des organismes formateurs : réalisé
Non opérationnel
Loi 2009 Développement professionnel continu = FCM + EPP Identique Organisme de gestion du DPC créé en 2012 Agrément des organismes formateurs : réalisé
Non opérationnel
Loi 2016 Thèmes généraux par le ministère
Thèmes choisis par chaque CNP
Thèmes spécifiques pour l’armée
DPC indemnisé pour les libéraux et salariés
Différence avec les hospitaliers
Création d’une agence d’État (GIP) ANDPC Individualisation des formations indemnisées Validation individuelle 2017/2019
Non opérationnel
Bilan 1er janvier 2020 Connaissances et pratiques Tous les médecins concernés Agence d’État et thèmes DPC établis par le ministère et les CNP Tous les trois ans (2020/2022)
Lien avec certification

L’obligation individuelle de DPC pour le médecin en 2020

Elle a évolué tout au long du chemin législatif, chaque étape tentant d’améliorer ou de remédier à certaines imperfections. Au premier janvier, débute une nouvelle période triennale de validation 2020–2022 effaçant toutes les obligations précédentes.

L’apposition d’éléments successifs ont construit le dispositif actuel :

  • la totalité des médecins actifs, inscrits à l’Ordre sont concernés par l’obligation du DPC ;

  • la période de validation est passée de 5 à 3 ans ;

  • le mode de validation a beaucoup évolué, mais le périmètre du DPC paraît encore non figé ;

  • les organismes de formation et les sessions sont soumis à agrément, à l’ANDPC. La précision rigoureuse de celui-ci est à la fois un indicateur de qualité mais bride sûrement la reconnaissance d’actions intéressantes mais n’obéissant pas à tous les critères de conformité ;

  • les CNP sont un élément clé dans le succès futur, dès que les missions pourront être entreprises par l’ensemble des CNP ;

La démarche

Pour satisfaire à son obligation de DPC, le professionnel de santé doit choisir une des trois possibilités suivantes :

  • s’engager dans une démarche d’accréditation, pour les professions exposées à des pratiques à risques comme le souhaite l’HAS qui définit d’ailleurs les méthodes. Cette accréditation équivaut à une validation complète du DPC ;

  • suivre le parcours recommandé et conçu par le Conseil national professionnel (CNP) de sa spécialité, respectant les orientations prioritaires triennales fixées par le ministère de la santé, ou par son CNP et le cas échéant par le service de santé des armées ;

  • réaliser un parcours libre comprenant deux actions au minimum pendant la période, parmi les trois groupes : évaluation et amélioration des pratiques, gestion des risques ou formation.

Les méthodes du DPC

Dix-neuf méthodes ont été proposées par l’HAS réparties dans ces groupes [13].

  • L’évaluation et l’amélioration des pratiques à intervalle régulier [11] :
    • audit clinique ;
    • bilan de compétences ;
    • chemin clinique ;
    • exercice coordonné et protocolé d’une équipe pluri professionnelle de soins en ambulatoire ;
    • patient traceur ;
    • registre, observatoire, base de données ;
    • réunion de concertation pluridisciplinaire ;
    • revue de pertinence des soins ;
    • staff d’une équipe médico-soignante, groupes d’analyse des pratiques ;
    • suivi d’indicateurs de qualité et de sécurité des soins ;
    • test de concordance de script ;
  • La gestion des risques [3] :
    • accréditation des médecins et des équipes médicales ;
    • gestion des risques en équipe ;
    • revue de mortalité et de morbidité (RMM) ;
  • La formation [5] :
    • formation en ligne ou e-learning ;
    • formation présentielle ;
    • encadrement de stages, la maîtrise de stage/le tutorat ;
    • réunion de revue bibliographique ou journal club ;
    • simulation en santé.

Les méthodes de gestion des risques peuvent également être validées dans le premier groupe des améliorations des risques.

La validation est résumée sur la Fig. 1 .

Figure 1.

Figure 1

Validation du DPC.

L’organisation du DPC en fonction des statuts des médecins

L’ANDPC peut prendre en charge officiellement tous les médecins de n’importe quel statut, mais de fait, seuls les médecins libéraux et salariés dans des centres de santé peuvent participer aux actions de formation. En effet, un financement dédié est attribué à l’ANDPC par les centres de santé basé sur les salaires des personnels médicaux pour bénéficier des actions des formations. Certains établissements hospitaliers ont conclu avec l’ANDPC une convention de prise en charge, et dans ce cas l’hôpital abonde le budget de l’ANDPC. Mais, beaucoup d’établissements sont restés indépendants et les recettes de la formation continue sont constituées d’un pourcentage de la masse salariale brute hors charge, de 0,5 % pour les centres hospitalo-universitaires et de 0,75 % pour les centres hospitaliers.

Outre l’ANDPC, les médecins libéraux peuvent bénéficier du Fonds d’action formation du personnel médical (FAF-PM). Le FAF-PM a pour mission de gérer des fonds issus de diverses origines, destinés à la formation continue des médecins exerçant à titre libéral. Il est habilité pour mobiliser les fonds de la formation professionnelle continue collectés en début d’année par l’URSSAF. Le FAF-PM est exclusivement réservé aux médecins exerçant à titre libéral ou à leur remplaçant, qui se sont acquittés de la cotisation pour la formation professionnelle (CFP) auprès de leur URSSAF [14].

Les libéraux bénéficient d’environ 3000€ par an, les hospitaliers de l’ordre de 1000€ par an ; à noter que certains établissements hospitaliers sont au-dessus de l’effort minimal prévu.

Cette différence de la somme allouée pour le DPC provient, peut-être, de l’organisation d’actions des trois groupes dans les établissements hospitaliers. Les actions organisées doivent suivre les recommandations de l’HAS, et peuvent donc être comptabilisées dans le DPC.

La validation

Dans la dernière période triennale, c’est le Conseil départemental de l’Ordre des médecins (CDOM) qui devait être destinataire des actions réalisées par les médecins. Le Secrétaire général du CDOM de la ville de Paris, indique que, environ 12 % des inscrits à ce conseil ont envoyé des justificatifs d’une ou plusieurs actions. C’est faible mais comme l’obligation n’a jamais été rappelée par le ministère de la santé, on peut considérer que c’est un acte volontaire des praticiens. De toute façon, aucune analyse complète des envois n’a été réalisée.

Le Président du Conseil national de l’Ordre des médecins, en partenariat avec les présidents du collège de médecine générale de la fédération des spécialités médicales, et de la conférence des doyens des facultés de médecine, a adressé en février 2020, à l’ensemble des médecins un questionnaire d’enquête sur les activités contribuant au maintien et à l’actualisation des connaissances et des compétences. Cette enquête a pour objectif de faire un état des lieux des différentes actions réalisées lors des trois dernières années, encore une fois, en l’absence de toute validation officielle.

Les thèmes retenus sont bien les plus larges que ceux du DPC actuel.

Le questionnaire comprend sept lignes d’actions :

  • les actions de formations présentielles (congrès, séminaires, ateliers, staffs, réunions d’association de FMC) individuelles (revue, e-learning), et enseignements suivis (DU, DIU capacités et autres formations) ;

  • les actions d’évaluation et de gestion des risques correspondant aux méthodes de l’HAS ;

  • l’accréditation ;

  • les actions d’enseignement en tant que formateur, expert, enseignant universitaire ou paramédical, suivi de rédaction de thèse et tutorat dans le cadre du maître de stage universitaire ;

  • les actions participant au rayonnement de la spécialité : publications scientifiques, articles de la presse professionnelle, conférences, participation active à des sociétés savantes, rédacteur des fiches d’informations patients…

  • les actions indemnisées par l’ANDPC ;

  • les autres actions.

L’analyse de l’enquête prévue au second trimestre 2020 permettra probablement de compléter le champ du DPC actuel. La concrétisation de cette analyse dans le périmètre actuel est très importante surtout pour les disciplines non cliniques.

La recertification

La certification initiale correspond à l’obtention du diplôme universitaire permettant l’exercice d’une spécialité après avoir acquis une pratique et des connaissances prévue par une maquette de la spécialité médicale. La recertification ou certification ultérieure est un processus qui permet de s’assurer que les compétences sont conservées ; elle impose une validation à intervalle régulier, sous des formes à définir.

Un questionnaire sur la recertification a été envoyé aux autorités compétentes au niveau européen par le CNOM ; le retour est cité dans le rapport ci-après : sur treize pays, six ont répondu négativement et sept ont déclaré des procédures variées.

Le rapport de la mission de recertification des médecins, intitulé : « Exercer une médecine de qualité grâce à des connaissances et des compétences entretenues » du Pr Serge UZAN, remis en novembre 2018 aux ministères chargé de la Santé, et chargé de l’enseignement supérieur a été transcrit à l’article 5 de la loi du 26 juillet 2019 [15]. Il prévoit que le gouvernement est autorisé à prendre par voie d’ordonnances, toute mesure visant à créer une procédure de certification. Elle vise à échéances réguliers au cours de la vie professionnelle, le maintien et l’actualisation des compétences, la qualité des pratiques professionnelles.

Actuellement, seul ce rapport propose les caractéristiques de cette recertification ; le texte de la première ordonnance n’est pas encore écrit et la représentation parlementaire pourrait modifier certains aspects.

L’objectif de cette recertification, selon le rapport est de resserrer les liens de confiance entre les médecins et les patients. L’Académie Nationale de Médecine a demandé à l’Institut de sondage OpinionWay, de réaliser une enquête d’opinion sur la perception de l’image des médecins généralistes et spécialistes [16]. Il en ressort que 92 % des sondés ont une bonne opinion des généralistes et 91 % une bonne opinion des spécialistes.

Tous les médecins doivent, à terme, passer cette certification. Toutefois elle ne concerne que les nouveaux diplômés inscrits au tableau de l’Ordre à partir de 2021.

Les médecins à diplôme hors union européenne rejoindront le dispositif dès l’acquisition du plein exercice, c’est-à-dire, à la date de la parution au journal officiel de leur réussite.

Il ne s’agit pas d’un contrôle par un examen mais d’une valorisation du parcours professionnel réalisé pendant les années précédentes.

Les universités participent au DPC de deux façons : la délivrance de formations diplômantes reconnues et la participation de médecins hospitalo-universitaires dans les CNP. La recertification ne correspond pas à un 4e cycle des études médicales (rapport Serge UZAN), l’université n’y participera que dans le cadre des commissions prévues.

Cinq items obligatoires sont proposés par le rapport

Le suivi du développement professionnel continu selon les règles précédemment décrites. Le rapport mentionne la formation tout au long de la vie, cela implique-t’il que soient pris en compte d’autres éléments permettant une mise à jour des connaissances et une amélioration de la qualité de l’exercice ?

Une activité maintenue et régulière dans le domaine de la spécialité. Le rapport mentionne 3 à 4 vacations/semaine comme activité minimum. En effet, en deçà de cette durée de pratique, la masse critique d’exercice est probablement insuffisante pour garantir la qualité des soins.

L’activité peut être exercée sur un champ partiel de la spécialité, sans remettre en cause une recertification complète ; mais si le médecin doit reprendre ultérieurement une partie différente de sa spécialité, il devra se reformer. Cette conception est adoptée par l’Angleterre et la Hollande.

L’amélioration de la relation avec le patient est systématiquement recherchée.

Le prise en compte par le médecin de sa propre santé. Dans le cadre du Serment du médecin de Genève, de 2019, il est indiqué : « Je veillerai à ma propre santé, à mon bien être et au maintien de ma formation afin de prodiguer des soins irréprochables ».

Les évènements indésirables, les plaintes, les conflits avec les patients ou les autres professionnels de santé, les condamnations éventuelles ordinales ou non ordinales sont recueillis, analysés puis considérés comme des éléments négatifs.

Une procédure d’insuffisance professionnelle suspend l’obtention de la certification.

Un Conseil national de certification et de valorisation (CNCV) garantit la qualité du processus général concernant les cinq items précédents.

En cas d’absence d’information par le médecin, un rappel lui sera envoyé. Si le médecin satisfait à la procédure, le CNCV lui donne une attestation de conformité. En cas d’avis négatif contesté par le médecin, celui-ci peut faire appel devant l’Ordre.

Peut-on envisager que l’obligation de s’inscrire dans la démarche de recertification, pallie l’absence de validation du DPC depuis 1996 ?

Bilan et perspectives

Un dispositif cohérent

L’évolution du dispositif est globalement satisfaisante ; certes, les fondamentaux sont posés par l’Ordonnance de 1996, mais l’intégration de l’évaluation des pratiques professionnelles en 2004 puis la création des Conseils nationaux professionnels, favorisent une approche par spécialités en 2016 complétant l’architecture de façon définitive.

Les orientations prioritaires, le parcours pluriannuel, tiennent compte des spécificités de chaque CNP ; en cas d’exercice sur une partie restreinte de la spécialité, les besoins de formations seront adaptés à cette pratique. Cela renforce l’obligation d’être au meilleur niveau dans son domaine.

Les CNP devront envisager particulièrement 3 problématiques :

  • le recensement et la validation des principaux congrès, séminaires et formations utiles au DPC de la spécialité ;

  • la reconnaissance du DPC, pour un médecin exerçant dans un domaine très pointu de sa spécialité ;

  • la prise en compte de formations plus généralistes plus ou moins proches de la spécialité ; les spécialités en tuyau d’orgue voulues en 2017 ont montré leur limite dans la crise du COVID-19. Cette réflexion devra être entreprise avec l’université ».

Une obligation virtuelle

L’obligation législative est restée un vœu pieux. La validation triennale de 2020 à 2022 doit impérativement être réalisée ; un bilan à mi exercice est nécessaire pour entraîner l’adhésion du corps médical et faire rentrer dans le dispositif les retardataires. Il faut profiter du lancement de la recertification en 2021 très probablement pour favoriser l’assentiment au DPC. Les CNP commencent seulement à être opérationnels et encore, pas complètement.

Un mode de validation à préciser

Devait-on progresser pas à pas ? c’est ce qui était prévu en 2006 avec une validation souple et facile permettant à tous les médecins de s’intégrer en faisant un effort réel mais variable selon les capacités et l’intérêt de chacun. Les exigences se seraient accrues à chaque période incontestablement. L’absence d’intégration de spécialité disciplinaire fut un manque. Ce point est résolu.

De nombreux pays ont gardé des crédits, plus faciles à mesurer ; en tout cas des progrès sont constatés au fil du temps. Les médecins français suivant une formation à l’étranger accréditée, demandent souvent à quoi servent ces crédits.

La validation individuelle peut-être par effectuée des crédits à acquérir ou par des actions définies, donc plutôt quantitatif ou qualitatif. Les deux systèmes ont chacun leurs avantages et leurs limites. Tout changement majeur paraît toutefois risqué.

Le champ du DPC à compléter

Le champ du développement professionnel continu doit être clarifié. Les médecins spécialistes européens souhaitent l’élargir vers l’enseignement donné à des professionnels de soins, la recherche et la diffusion de connaissances, l’expertise et l’organisation des soins….

L’Ordonnance no 2017-49 du 19 janvier 2017 indique que le financement ou la participation au financement d’actions de développement professionnel continu, par les personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé, sont autorisés, en particulier les congrès et les séminaires de formation [17]. À noter que pour certaines spécialités, l’amélioration de l’exercice ne peut être obtenue que par des formations en sciences humaines et sociales ou les sciences exactes.

Doit-on tenir compte des formations au management destinées aux chefs de pôle, chef de service ou responsable d’unité ? La crise hospitalière actuelle renforce le besoin qu’un responsable une compétence en ressources humaines en organisation, en qualité, en gestion financière…. mais elles sont peu compatibles avec une compétence dans son exercice de spécialiste. Peut-on envisager qu’elles soient reconnues à côté d’autres formations du DPC ?

Les actions pluriprofessionnelles devront être reconnues.

Comme l’évoque Jean Michel KLEIN, Président du Conseil scientifique indépendant de l’ANDPC, la définition du DPC est ambiguë : l’ANDPC a une définition, la formation tout au long de la vie est autre comme vu précédemment.

Le document de traçabilité

Il reste à construire par les CNP. La majeure partie doit être commune à tous les CNP. C’est un travail exigeant et complexe.

L’hébergement des données

Le CNOM avait prévu de créer pour chaque médecin un espace dédié personnel dans lequel toutes les informations concernant sa vie professionnelles auraient pu être contenues. Mais le volume des documents à stocker laisse présager qu’il faudrait un entrepôt de données.

Le lien de l’hébergement du document de traçabilité, c’est-à-dire, la collecte de l’ensemble des actions de DPC devra être choisi, l’ANDPC, l’Ordre des médecins, une direction du ministère, une autre agence ou institution.

La sécurité des données et l’accès aux documents déposés restent des points sensibles qu’il faut résoudre.

Conclusion

La nécessité de suivre des actions de DPC est une évidence qui s’impose à tous les professionnels de santé. Souvent on évoque l’obsolescence rapide des connaissances : 50 % des connaissances serait à actualiser en 7 ans, même si la sémiologie clique persiste plus longtemps, tandis que le diagnostic et les thérapeutiques évoluent plus rapidement.

La relation médecin-malade comporte deux aspects complémentaires : d’une part, l’humanisme indispensable du médecin, que celui-ci ait une fibre paternaliste et professionnelle, d’autre part la capacité à apporter les meilleurs soins soit individuels soit au sein d’une prise en charge collective. En toute circonstance, il faut apporter la meilleure qualité de soins, sans erreur !

Le titre d’un article paru en 2006 indiquait : « embarquement immédiat » pour le DPC. Quatorze ans pour un embarquement, c’est long ! [18].

Certes, la validation obligatoire est en retard, mais les médecins se forment heureusement volontairement et de façon permanente. Les chambres disciplinaires en tiennent compte actuellement, en utilisant l’article 11 du code de déontologie dans leur jugement.

Déclaration de liens d’intérêts

Les auteurs déclarent être conseillers nationaux de l’Ordre national des médecins.

Footnotes

Étant donné le contexte sanitaire épidémique lié au Covid-19 du mois de mars 2020, la présentation orale de cette communication en séance à l’Académie a été reportée.

Références


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