Résumé
Le but de cet article est de détailler les mesures prises dans les établissements publics pour faire face à l’épidémie de COVID-19. Sont détaillées la stratégie initiale, l’évolution organisationnelle vers le « tout-COVID », la coordination entre les différents intervenants ainsi que la stratégie de maintien de la continuité des soins. L’expérience au Québec est aussi prise en exemple. Enfin la sortie de crise doit être anticipée dès cette phase d’épidémie.
Mots clés: Pandémie, COVID-19, Coronavirus
Summary
The objective of this article is to detail the measures taken in public institutions to cope with the COVID-19 epidemic. It details the initial strategy, organizational evolution towards “all-COVID”, coordination between the various stakeholders and the strategy for maintaining continuity of care. The Quebec experience is also used as an example. Finally, an exit strategy must be anticipated at this phase of the epidemic.
Keywords: Pandemic, COVID-19, Coronavirus
L’épidémie de COVID-19 a amené la Fédération hospitalière de France à prendre des mesures rapides dès les premiers cas signalés. Le but de cet article est de détailler ces mesures préparatoires et leur évolution dans les établissements publics, en prenant les exemples français et canadien.
Préparation des établissements publics de santé à l’épidémie de la COVID-19
Stratégie initiale du dispositif « ORSAN REB »
La préparation à l’épidémie était fondée sur une stratégie initiale basée sur la concentration de la gestion de la COVID-19 dans quelques établissements. Ce programme était mis en place par le gouvernement français le 23 février 2020, c’est le dispositif « ORSAN REB ».
Ce dispositif permet de mobiliser le système de santé face à un risque infectieux émergent et de déterminer, au niveau national [1], puis région par région, plusieurs catégories d’établissements en première, deuxième et troisième ligne, dans une stratégie de gestion graduée de la crise. La stratégie annoncée est claire et énoncée dans le guide méthodologique « préparation au risque épidémique COVID-19 » publié le 20 février 2020 par le ministère de la Santé :
L’organisation sanitaire prévue sur le territoire français pour assurer la prise en charge des patients classés « cas possibles » et « cas confirmés » à COVID-19 s’appuie sur une hiérarchisation fonctionnelle des établissements de santé à deux niveaux. (…) Elle permet (…) de resserrer l’offre de soins autour d’établissements de santé pivots de première ligne en veillant à préserver le fonctionnement habituel de la médecine de ville et des autres établissements de santé. Une deuxième ligne de réponse s’appuierait sur des établissements de santé disposant des moyens nécessaires et permettra si celle-ci est activée, d’augmenter les capacités hospitalières de première ligne. Malgré la mise en œuvre de la stratégie d’endiguement, la probabilité de devoir faire face à une épidémie à COVID-19 (stade 3) existe.
La prise en charge de la COVID-19 reposait donc initialement sur 38 établissements « de première ligne », seuls établissements « habilités COVID-19 », dans le but de structurer les prises en charge et maintenir le plus possible les activités de soins en concentrant la prise en charge de la COVID-19 sur des établissements de santé de première puis deuxième ligne. Dès le 27 février, la liste des établissements habilités passait de 38 à 108, augmentant significativement le nombre d’hôpitaux mobilisés, même s’ils restaient tous publics (les 108 établissements étant essentiellement les établissements siège de SAMU).
Évolution vers un système « Tout-COVID-19 »
Devant l’avancée de l’épidémie, cette stratégie était partiellement remise en cause : le 12 mars, par courrier à tous les directeurs généraux d’Agence régionale de santé, le ministre de la Santé Olivier Véran formulait une demande assez inédite : tous les hôpitaux devaient activer le plan blanc « maximal » et engager les actions de déprogrammation afin de se préparer à la vague épidémique.
C’est cet ordre qui a engagé le mouvement de déprogrammation massive dans l’ensemble des établissements de santé, afin de préserver des capacités de réanimation « Je l’active par anticipation partout, y compris là où le virus n’est pas encore […] pour que nous ne se soyons pas pris à la gorge », déclarait alors Olivier Véran.
Depuis le 13 mars, les établissements ont donc dû réorganiser toute leur offre de soins pour se tourner uniquement vers la prise en charge de la COVID-19 et attendre l’arrivée massive de « patients COVID-19 ».
La mobilisation des établissements publics s’est faite autour d’une déprogrammation massive, non seulement des actes nécessitant des capacités de réanimation, mais également d’une grande partie d’actes nécessitant des soins critiques (unités de soins intensifs, unités de surveillance continue), ce qui avait pour but de transformer l’offre en une offre hospitalière spécialisée COVID-19.
C’est ce mouvement, impactant l’ensemble des filières de soins hospitalières, qui a permis l’augmentation massive des capacités en réanimation.
Gradation des soins et anticipation, les clés de la transformation
On peut à ce titre citer l’exemple du CHU de Nancy, qui a adapté ses capacités d’accueil en trois niveaux de gradation : 30 lits répartis dans les deux services de réanimation médicale au niveau 1 ; 28 lits supplémentaires avec la transformation des lits des unités de soins critiques de niveau 2 ; transformation des lits de l’unité de soins intensifs respiratoires et de l’unité de surveillance continue chirurgicale et coopération, au niveau 3.
Coordination et gestion de crise territoriale, des outils mobilisés par les établissements
Les établissements publics ont également pu compter sur leur structuration en groupements hospitaliers de territoire, ce qui a permis une approche territoriale et graduée de la prise en charge COVID-19 ; les filières créées et consolidées à l’occasion des projets médico-partagés de territoire ont pu trouver leur effectivité dans un certain nombre d’établissements : en témoigne l’expérience du GHT Cœur Grand Est (Verdun) qui a pu, à partir d’une cellule de crise territoriale, envisager une répartition des matériels, soignants et médicaments en fonction des besoins et capacités de traitement de la COVID-19.
Prévision et répartition des patients COVID-19 et non COVID-19, des innovations fortes et rapidement implémentées
Un autre exemple probant peut être trouvé autour du CHU de Besançon, où une cellule de gestion des lits s’est mise en place au plan territorial avec d’autres établissements de santé publics et privés.
Cela a permis de fluidifier la gestion des lits pour optimiser les capacités de prise en charge en hospitalisation conventionnelle ou en réanimation des patients COVID-19 et non COVID-19 grâce à un bilan quotidien sur les capacités d’accueil.
Territoire, gradation et coordination ont ainsi permis de fluidifier les filières COVID-19 dans les territoires ; les établissements ont pu construire des outils de gestion et de prévision avec une réactivité notable et dans un délai remarquable.
Ainsi, les établissements publics, en première ligne face au COVID-19, se sont très majoritairement réorientés vers la gestion de la crise sanitaire, au risque d’adopter un fonctionnement « 100 % COVID-19 ».
Maintien de la continuité et la qualité des soins en période de crise sanitaire majeure
Dans un contexte de crise sanitaire sans précédent, les établissements hospitaliers ont été amenés à déprogrammer massivement leurs activités pour se consacrer à la gestion des patients COVID-19, nécessitant des équipements de pointe et des ressources humaines en nombre et qualifiées. Or cette crise s’inscrit dans la durée, avec un nombre élevé de cas de patients hospitalisés et des durées de séjour en réanimation importantes — de l’ordre de trois semaines —. Dans ce contexte, l’impact sur l’organisation des soins et la continuité des soins pour les patients non COVID-19 se pose de manière criante. On assiste à deux phénomènes :
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d’une part, les établissements hospitaliers ont déprogrammé leurs activités et reporté leurs consultations/opérations de manière massive, quelle que soit la région et son exposition à l’épidémie, afin de disposer des ressources et équipements pour la gestion de la crise épidémique ;
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d’autre part, les arrivées à l’hôpital pour des pathologies non COVID-19 baissent pour différentes raisons : volonté de ne pas « déranger » alors que le personnel est débordé par la gestion des cas COVID-19, peur de se déplacer à l’hôpital ou encore report de rendez-vous jugés non urgents (dépistage, vaccination, etc.) suite au confinement. Or, un certain nombre de patients nécessiterait une prise en charge hospitalière du fait de leur état, du suivi de leur maladie chronique ou d’une urgence comme les accidents vasculaires cérébraux ou les infarctus du myocarde dont la prise en charge rapide est essentielle (survie, séquelles).
Il est donc primordial de ne pas tomber dans une « trappe à COVID-19 » avec un système de santé exclusivement tourné vers la gestion de la crise sanitaire. Cela pose une double question : celle de l’accès aux soins des patients non COVID-19 et celle des pertes de chance éventuelles du fait de prises en charge reportées comme pour les activités de greffe ou d’oncologie. Dans le cas de la chirurgie oncologique digestive (pancréas, foie, œsophage, etc.), les établissements publics sont en première ligne, car ils sont les seuls à disposer des compétences et équipes pluriprofessionnelles à même de prendre en charge ce type de cancers complexes. Or un report trop important d’une chirurgie oncologique digestive peut induire des pertes de chance. Les déprogrammations et reports nécessitent d’être analysés et priorisés afin de garantir aujourd’hui les opérations urgentes et d’organiser les reprogrammations dans des conditions optimales de pertinence et de sécurité.
Maintenir une continuité des soins pour les pathologies non COVID-19
Cela nécessite une réflexion graduée et organisée, tenant compte du degré d’atteinte de l’épidémie dans le territoire. L’émission de recommandations nationales sur des filières de prise en charge critiques comme les greffes ou encore l’IVG permettent d’appuyer de manière concrète les établissements et la ville dans leurs organisations. Avec une baisse d’activité de 50 %, l’activité de greffe a été très impactée ; les recommandations nationales (ABM, DGOS) incitent à la poursuite de cette activité à l’exception des greffes non vitales pouvant être différées (rein, pancréas).
Adaptation des établissements
Les HCL, en lien avec l’ARS, ont mis en place une cellule de gestion des lits territoriale permettant de porter une stratégie sur le territoire, de renforcer les coopérations et les adressages et d’avoir une organisation graduée.
Les CHU de Nancy et de Reims ont mis en place deux filières de soins critiques graduées en trois niveaux chacune visant à accueillir les patients COVID-19 et à maintenir la continuité des soins pour les patients reçus pour d’autres pathologies. Cela permet de sécuriser les prises en charge avec des circuits distincts et autant que possible sanctuarisés.
Certains services ont également raisonné par seuil et adapté leurs organisations et déprogrammations suivant l’atteinte de seuils correspondant à un nombre de patients COVID-19 pris en charge. C’est ainsi que le service de radiologie du CHU de Poitiers a adapté son activité afin de déprogrammer de façon concertée, avec une cellule dédiée, et en tenant compte de la montée en charge de l’activité COVID-19.
Toutes ces organisations innovantes, mises en place dans un contexte de crise, ont pour objectif de maintenir les soins et d’éviter le plus possible les ruptures/pertes de chance. C’est cette préoccupation qui anime les établissements publics : répondre à la crise sanitaire et continuer sans relâche à prendre en charge les autres pathologies.
Expérience québécoise
L’organisation et les procédures mises en place au Québec peuvent offrir un point de réflexion intéressant. Pour mémoire, le Québec affichait, au 7 avril 2020, 8500 cas de COVID-19 et 122 décès. Le Québec compte 8,5 millions d’habitants. Là comme ailleurs, le défi réside dans l’équilibre à trouver entre la nécessaire prise en charge de la COVID-19, qui demande des ressources lourdes et spécialisées, et le maintien d’une capacité d’accueil pour le reste de la population, ce qui suppose de garantir le mieux possible à celle-ci qu’elle ne court pas de risque en allant à l’hôpital. L’équilibre trouvé réside dans deux niveaux d’organisation : au niveau « national » et ensuite au niveau des établissements, avec une préparation graduée en fonction de l’avancée de l’épidémie.
Au niveau national au 20 mars, l’organisation repose sur quatre niveaux d’alerte [2]. Depuis le 6 avril, le Québec est au stade 3. Chaque niveau implique la désignation de centres désignés COVID-19 (4 au niveau 1, puis 4 + 11 au niveau 2, puis 21 au niveau 3, et enfin, tous les hôpitaux au niveau 4). Cela implique que tous hôpitaux qui ne sont pas désignés continuent à fonctionner normalement, même s’ils doivent conserver leurs patients COVID-19 suspectés, en attente du retour des tests. Si le test est positif, le patient doit être transféré dans un centre désigné, par une plate-forme nationale. Par ailleurs, à chaque niveau, les hôpitaux désignés dans la phase suivante commencent à organiser la prise en charge, notamment en déprogrammant des activités. Pour illustrer, dans la ville de Québec, au stade 2, seuls l’Institut de cardiologie et de pneumologie et le site de l’Enfant Jésus du CHU de Québec étaient des hôpitaux COVID-19. Tous les autres sites de la ville continuaient à fonctionner, même s’ils devaient se préparer à la phase 3. Dans cette phase, tous les centres hospitaliers (CH) de la région de Québec — sauf le pavillon adulte du CHU de Québec — accueillent des patients COVID-19, au fur et à mesure que les établissements de niveau 1 et 2 se remplissent, là encore grâce à un système de gestion des lits et des transferts centralisés au niveau national. Le principe est de « remplir » d’abord les établissements de niveau 1, puis niveau 2, puis niveau 3. Ce système permet de maintenir une activité « normale » le plus longtemps possible. Ainsi, le CH de Chicoutimi a été désigné centre COVID-19 le 7 avril, alors que le Québec a déclaré l’état d’urgence sanitaire le 14 mars dernier.
Au niveau des établissements, une organisation est mise en place pour éviter les contaminations et ainsi éviter aux patients « non COVID-19 », tout comme d’ailleurs au personnel hospitalier, d’être contaminés. Cette organisation repose sur un « pré-accueil » situé en dehors des murs de l’hôpital, et sur la division des aires d’attente et de traitement en trois zones. Pour les urgences ambulatoires par exemple, un agent trie les patients, selon qu’ils ne présentent pas de symptômes (zone froide), qu’ils présentent des symptômes (zone tiède) ou qu’ils soient confirmés (zone chaude).
Pour la chirurgie : jusqu’au passage au stade 3 (le 6 avril) qui mobilise 21 CH, les établissements « non COVID » devaient mettre en place les procédures suivantes en matière de chirurgie :
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mise en place, dans chaque établissement, d’un comité de surveillance des activités chirurgicales ;
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pour les cas suspectés ou confirmés de COVID-19, établir un protocole pour la prestation sécuritaire de soins chirurgicaux pour les patients et le personnel soignant ;
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cesser toutes les activités dans les centres de chirurgies hors établissements en lien avec des ententes ;
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utiliser les équipes minimales requises pour les interventions qui sont maintenues et de diminuer autant que possible la rotation du personnel pendant les interventions ;
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reporter toutes les procédures électives pour pathologies bénignes ;
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continuer à opérer les urgences chirurgicales et obstétricales ;
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limiter au maximum la prestation chirurgicale pour les cas jugés semi-urgents, incluant l’oncologie.
Anticipation de la sortie de crise
La gestion de la crise sanitaire liée au COVID-19 ne va pas s’arrêter lorsque le nombre de personnes contaminées, hospitalisées ou prises en charge en service de réanimation va diminuer.
Les établissements publics de santé vont en effet devoir faire face, en sortie de crise, à une phase très particulière et qui va poser des problématiques spécifiques, de rattrapage de l’activité déprogrammée volontairement ou de la baisse, spontanée ou incitée, de la fréquentation par la population des services d’urgences et des plateaux de consultations et d’exploration.
Ces reports d’activités programmées et ces diminutions drastiques du recours aux urgences et aux plateaux de consultations, avec pour objectif de se préparer au mieux à l’arrivée de la vague épidémique et de concentrer les moyens, humains et matériels, sur la prise en charge des patients COVID-19+, ont en effet pris des proportions majeures, y compris dans des régions ou des établissements pour le moment moins touchés et impactés par l’épidémie. Ce qui a amené les équipes hospitalières et les autorités de tutelles en région à se poser la question de la continuité des soins hors COVID-19 en période de crise sanitaire et implique d’anticiper la reprise progressive des activités hors COVID-19 et le rattrapage, en sortie de crise, des dépistages, suivis et prises en charges non réalisés pendant la phase aiguë de la crise.
Le constat de la baisse drastique de la fréquentation des services d’urgences et de consultations, y compris pour des cas nécessitant des prises en charges immédiates et ou lourdes (AVC, infarctus, cancers, pathologies chroniques…) fait craindre une dégradation de l’état de santé de la population, surtout dans le cadre d’une crise sanitaire qui dure plusieurs semaines, et nécessite d’anticiper des pics, décalés dans le temps, de détection et de dépistage de nombreuses pathologies. De nombreuses remontées du terrain, des territoires et des régions, font état de cette inquiétude face à une baisse importante des prises en charge hors COVID-19. Il est malheureusement difficile à ce stade, compte tenu du décalage dans le temps des remontées mensuelles d’activité et des potentiels retards et difficultés de codage et de facturation rencontrés par les équipes mobilisées sur des tâches plus prioritaires, de mesurer l’ampleur de ces diminutions et leur impact sur la santé publique des populations.
Se posera également, en période de sortie de crise, la nécessaire reprogrammation de toutes les prises en charge et interventions déprogrammées et reportées. La chirurgie, dont la chirurgie digestive, a été particulièrement impactée par ces déprogrammations, ces reports et ces baisses spontanées de fréquentation, étant une activité consommatrice de ressources d’anesthésie et de réanimation, essentiellement dédiées à la prise en charge des patients COVID-19+.
D’où la nécessité d’anticiper l’organisation de la reprise des activités, des reprogrammations d’interventions chirurgicales et la gestion des pics de dépistage (liés à l’arrêt des coloscopies, par exemple). Tout cela alors même que les équipes en première ligne dans la gestion de la crise, notamment en réanimation et en anesthésie, auront besoin d’un moment de répit et de prendre des congés, à l’approche de la période estivale, période habituelle de forte concentration de congés.
Les équipes hospitalières, chirurgiens, anesthésistes, réanimateurs, infirmiers, aides-soignants, secrétaires médicales, personnels administratifs et logistiques, directeurs doivent travailler ensemble pour affronter au mieux cette période post-crise qui risque d’être difficile pour les disciplines devant faire face à un accroissement d’activité. Et devront se reposer sur les travaux des sociétés savantes (anticipation des pics de diagnostic liés à l’arrêt puis à la reprise des dépistages, priorisation des reprogrammations d’interventions chirurgicales…) afin de s’organiser au mieux, sans pertes de chances pour les patients. Ces organisations devront être adaptées selon les régions, les territoires et les établissements, selon l’impact de la crise épidémique sur les activités programmées et les urgences hors COVID-19.
Dans cette période délicate, les équipes des hôpitaux publics devront être particulièrement vigilantes sur la prise en charge des patients les plus vulnérables, les plus démunis, les personnes en situation de handicap, les personnes atteintes de troubles psychiatriques… Ces populations, qui rencontrent déjà des problématiques d’accès aux soins, risquent en effet d’être particulièrement impactées par la crise sanitaire. Le secteur hospitalier public est particulièrement bien armé pour répondre à un tel défi, assurant déjà la majorité de ces prises en charge. Si l’hôpital public représente 57 % des séjours et 39 % des séjours en chirurgie (dont 46 % pour la chirurgie digestive), il prend en charge 78 % des séjours les plus lourds (sévérités 3 et 4), 84 % de l’activité de réanimation, 82 % des passages aux urgences et 69 % des séjours de patients précaires (source personnelle : PMSI ATIH-SAE-FHF data)
L’hôpital public dispose d’un atout complémentaire dans la gestion de cette phase post-crise, car il dispose de l’ensemble de la palette des niveaux de prise en charge : activités de proximité, activités de recours, activités de sur-recours. La structuration de l’offre de soins et la gradation des soins au sein des filières à travers l’organisation des GHT constitueront des points d’appui pour la gestion post-crise. En période de crise, les pouvoirs publics, au niveau national et régional, se sont d’ailleurs largement appuyé sur les GHT et leur ont délégué de nombreuses missions : réception et livraison de masques, gestion des lits sur les territoires (régions Occitanie, AURA…). Cette gradation des soins permettra aux équipes d’opérer dans des conditions et un environnement de soins (soins critiques, compétences des équipes médicales, soignantes et médicotechniques, plateaux techniques…) adaptés, pour une qualité et une sécurité optimale des soins.
Mais les hôpitaux publics ne pourront affronter cette période post-crise sans un soutien indéfectible et majeur des pouvoirs publics, nécessitant la continuité du plan de soutien des hôpitaux publics mis en place ne phase aiguë de crise. Au-delà de ce soutien en phase aiguë et en sortie de crise, un plan de relance et de soutien massif de l’investissement hospitalier public, une reconnaissance et une revalorisation significative des carrières et des rémunérations des équipes hospitalières publiques et une remise à plat de la construction et de la régulation des enveloppes nationales de financement du système de santé seront indispensables.
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Footnotes
Ne pas utiliser, pour citation, la référence française de cet article, mais celle de l’article original paru dans JournalofVisceralSurgery, en utilisant le DOI ci-dessus.