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. 2024 Jun 30;37(2):101–105. [Article in French]

BRÛLURES PAR CONTACT AVEC UNE BOUILLOTE DANS LES SUITES D’UNE ABDOMINOPLASTIE. CAS CLINIQUES ET REVUE DE LA LITTÉRATURE

CONTACT BURNS WITH A HOT WATER BOTTLE FOLLOWING AN ABDOMINOPLASTY. CASE REPORTS AND LITERATURE REVIEW

C Syras 1,, G Lacroix 1, P Guerreschi 1, A Dumont 2, L Pasquesoone 1
PMCID: PMC11225269  PMID: 38974786

SUMMARY

Loss of sensitivity in the operated area is common after some plastic surgery procedures and promotes accidental trauma on a daily basis. Several studies showed that a loss of sensitivity is constant after an abdominoplasty. We report here the cases of three 3rd degree burns by contact, at the subumbilical level, with a hot water bottle soon after an abdominoplasty, responsible for significant aesthetic sequelae.

Keywords: burn, skin graft, abdominoplasty, side effect, hot water bottle

Introduction

L’altération de la sensibilité de la zone opérée est courante dans les suites de nombreuses interventions de chirurgie plastique et favorise les traumatismes accidentels au quotidien. L’abdominoplastie en est le parfait exemple. En incisant la partie inférieure de l’abdomen, d’une crête iliaque à l’autre, pour pouvoir retirer l’excès cutanéo-graisseux sous-ombilical et en réalisant un lambeau sus-ombilical qui doit être décollé de la paroi abdominale puis tracté vers le bas, la sensibilité de l’abdomen va inévitablement être modifiée en post-opératoire. Plusieurs études montrent que cette perte de sensibilité est prédominante dans la région sous-ombilicale, et porte à la fois sur la sensibilité à la douleur, à la chaleur et à la pression.1-4 Cette perte de sensibilité survient de façon classique et habituelle au décours de l’intervention et a tendance à s’améliorer dans les mois qui suivent la cicatrisation, sans pour autant redevenir normale.2,3 On ne peut donc pas réellement parler de complication post-opératoire mais d’effet secondaire attendu. Cependant, cette anesthésie ou hypoesthésie de l’abdomen peut être source de traumatisme et de blessure accidentelle, telle qu’une brûlure, dans les suites de la chirurgie entraînant alors une complication indirecte de la chirurgie.

Observations

En l’espace d’un mois, notre Centre de Traitement des Brûlés (CTB) a eu à prendre en charge deux patientes pour des brûlures au 3ème degré par contact avec une bouillotte au niveau sous-ombilical dans les suites précoces d’une abdominoplastie. Il s’agissait de deux femmes de 25 et 35 ans. Aucune d’elles n’avaient de comorbidité et elles ne fumaient pas. Les deux patientes souffraient d’une brûlure profonde suite à un contact avec une bouillotte au niveau de l’abdomen, dans la région sous-ombilicale. Il s’agissait de brûlure au 3ème degré, de petite taille (intéressant moins de 2% de la surface corporelle totale). Il existait un délai de consultation dans les deux cas, les patientes se présentant en consultation au CTB plus de 10 jours après l’incident.

La première patiente (Fig. 1) avait bénéficié d’une abdominoplastie avec transposition de l’ombilic dans un contexte de traitement de séquelles de grossesses. Elle avait bénéficié d’une seule consultation préopératoire, lors de laquelle elle avait reçu des informations concernant les modalités et les risques de cette prise en charge chirurgicale. Elle avait reçu au cours de cette consultation une fiche d’information de la Société Française de Chirurgie Plastique Reconstructrice et Esthétique (SOFCPRE) concernant la chirurgie plastique et esthétique de la paroi abdominale. Elle avait conscience que la chirurgie était suivie d’un trouble de la sensibilité au toucher mais pas au chaud ni au froid. Les suites post-opératoires de l’abdominoplastie avaient été simples. La brûlure est survenue 4 semaines après la chirurgie suite à un contact prolongé avec une bouillotte pour soulager des douleurs abdominales après la pose d’un stérilet, dans un contexte d’endométriose.

Fig. 1.

Fig. 1

Evolution de la brûlure chez la première patiente. A) Lors de la première consultation ; B) Avant greffe de peau mince, après une période de cicatrisation dirigée ; C) Après greffe de peau mince ; D) Résultat à 2 mois

La seconde patiente (Fig. 2), âgée de 35 ans, avait bénéficié d’une abdominoplastie avec transposition de l’ombilic dans un contexte de séquelles d’amaigrissement après une chirurgie bariatrique. Elle avait bénéficié d’une consultation préopératoire avec explication des modalités et risques liés à l’intervention chirurgicale. Cependant, elle n’avait pas été informée de la perte de sensibilité au niveau de l’abdomen dans les suites opératoires et n’avait pas reçu de fiche d’information de la SOFCPRE. Les suites post-opératoires avaient été simples. La brûlure est survenue 2 mois après l’abdominoplastie, suite à un contact avec une bouillotte pour soulager des douleurs abdominales dans un contexte de dysménorrhée. Elle avait pour habitude d’appliquer une bouillotte régulièrement pour soulager ses douleurs.

Fig. 2.

Fig. 2

Evolution de la brûlure chez la seconde patiente. A) Lors de la première consultation ; B) Avant greffe de peau mince, après une période de cicatrisation dirigée ; C) Après greffe de peau mince ; D) Résultat à 1 mois

Les deux patientes ont bénéficié d’une prise en charge chirurgicale similaire de ces brûlures, en deux temps. Un premier temps d’avulsion de la brûlure jusqu’à l’aponévrose musculaire des muscles grands droits de l’abdomen a été réalisé, devant une atteinte de la graisse sous-cutanée sur toute son épaisseur. Devant l’aspect très creusant après l’avulsion, une période de cicatrisation dirigée avec un suivi en ambulatoire au minimum hebdomadaire a était réalisée, afin de combler cette perte de substance avant la réalisation d’une greffe de peau mince. Au décours de la cicatrisation, les deux patientes ont présenté des séquelles esthétiques majeures au niveau de l’abdomen avec des cicatrices inflammatoires, creusantes et rétractiles dans la région sous ombilicale.

Durant la même période, une troisième patiente, âgée de 42 ans, a été prise en charge dans un centre hospitalier général à proximité de notre CTB, pour une brûlure sous-ombilicale par contact avec une bouillotte. Elle avait bénéficié d’une abdominoplastie 3 ans auparavant. Il s’agissait d’une brûlure au 2ème degrés profond, en carte de géographie pour laquelle elle a bénéficié d’une excision chirurgicale suivi d’une cicatrisation dirigée (Fig. 3). Cette brûlure étant moins grave que les deux présentées cidessus, la prise en charge n’a pas nécessité de recours à notre CTB et son traitement a été effectuée au sein du service de chirurgie plastique de ce centre hospitalier général.

Fig. 3.

Fig. 3

Troisième patiente, lors de la première consultation

Discussion

Plusieurs auteurs rapportent des cas de brûlure causées par l’usage d’une bouillotte. Dans la majorité des cas, il s’agit de femmes jeunes, soit lors d’un usage à visée antalgique avec une application d’une bouillotte au contact d’une zone douloureuse (lombaire ou abdominale le plus souvent), soit dans un but de réchauffement avec une bouillotte placée sous les couvertures. Le plus souvent, il s’agit d’une brûlure après fuite ou éclatement de la bouillotte, responsable d’un contact direct avec l’eau chaude.5,6 Il est également décrit des brûlures par contact prolongé avec une bouillotte, favorisées par des troubles de la sensibilité. Goltsman et coll. ont montré en effet qu’une bouillotte remplie avec de l’eau à 70°C et placée sous une couverture dans une pièce à température ambiante maintenait une température supérieure à 50°C pendant plus de 3 heures.5 Or, on sait que pour voir apparaître une brûlure au 2ème degrés profond, il suffit d’un contact d’une minute à 50°C, de quelques secondes à 60°C ou d’une seconde à 70°C.7 Le plus souvent, ces brûlures surviennent chez des patients atteints de neuropathies périphériques, en premier lieu les neuropathies diabétiques, avec dans ce cas des brûlures volontiers localisées au niveau des membres inférieurs mais on retrouve également des brûlures chez des patients atteints de neuropathies non diabétiques.5,6 Dans le même registre de brûlure survenant dans un contexte de perte de la sensibilité, il est rapporté plusieurs cas de brûlure suite à un contact avec une bouillotte en regard de lambeaux.8-10 Gowaily et coll. rapportent un cas de brûlure par contact avec une bouillotte à une semaine post-opératoire d’une reconstruction mammaire par lambeau de muscle droit abdominal à palette transversale (Transverse Rectus Abdominal Muscle flap : TRAMf). La patiente avait appliqué une bouillotte remplie d’eau chaude au contact de la peau du sein reconstruit et s’était endormie avant de se réveiller avec une brûlure au 3ème degré sur la palette cutanée du lambeau, sans avoir ressenti la moindre douleur.9 Nahabedian et coll. ont rapporté 4 cas similaires, dont les brûlures pouvaient survenir jusqu’à 4 ans après la réalisation du lambeau.10 Remarquons que, dans tous ces cas décrits, la brûlure n’intéressait que la peau du lambeau sans déborder sur la peau «native» du sein autour. Selon les auteurs, cela est dû à une altération de la thermorégulation cutanée de la peau du lambeau. En effet, la capacité de la peau à dissiper la chaleur nécessite une sensibilité cutanée pour fournir le stimulus pour la transpiration, la vasodilatation et l’augmentation du flux sanguin. L’altération de la sensibilité cutanée est donc responsable d’une part de l’absence de douleur au moment de la brûlure mais rend la peau également plus vulnérable à l’exposition à une source de chaleur par altération de la thermorégulation.10 Alokaili a rapporté récemment un cas de brûlure par contact par bouillotte après abdominoplastie dans un contexte de dysménorrhée. Il s’agissait d’une brûlure au second degré superficiel située au niveau de la région sous-ombilicale, dont l’évolution a été favorable sans prise en charge chirurgicale.11 Bien que toute intervention chirurgicale soit susceptible d’affecter la sensibilité cutanée, ceci est particulièrement vrai et inévitable lors d’une abdominoplastie. Plusieurs équipes ont étudié cette altération de la sensibilité abdominale au décours de la chirurgie en divisant l’abdomen en plusieurs cadrans. Il en ressort que la perte de sensibilité est plus importante dans la région sous-ombilicale, puis sous la cicatrice au niveau du pubis et juste au-dessus du néo-ombilic.1-4 Aherrera et coll. ont montré que cette perte de sensibilité était plus importante dans les 12 premiers mois après la chirurgie avec une bonne amélioration avec le temps, notamment à 2 ans de la chirurgie, pour la grande majorité des patientes.2 La récupération de cette sensibilité avec le temps n’est pas toujours complète, ce qui entraîne une vulnérabilité de la peau aux traumatismes et notamment aux brûlures, même à distance de la chirurgie.2

Toutes ces brûlures sont évitables. La physiopathologie étant bien connue, une bonne information des patients au préalable devrait permettre d’éviter tous ces accidents. Cela est bien repris dans la fiche d’information de la SOFCPRE où il est écrit «Les altérations de la sensibilité de la paroi, notamment une diminution de la sensibilité prédominant dans la région sous-ombilicale, sont fréquemment observées : la sensibilité normale réapparaît le plus souvent dans un délai de 3 à 12 mois au décours de l’abdominoplastie.» Il pourrait cependant être stipulé que l’application d’une bouillotte et de toutes autres sources de chaleur au niveau de l’abdomen dans les suites d’une abdominoplastie peut causer des brûlures profondes. Néanmoins, cela ne dispense pas de le rappeler aux patients avant et après la chirurgie, et ce, de manière plus générale pour toutes les interventions où un lambeau est réalisé, il en va de la responsabilité du chirurgien.

Conclusion

La perte de la sensibilité, notamment de la région sous-ombilicale, est inévitable dans les mois suivant une abdominoplastie. De plus, les patients ne sont pas toujours informés et sensibilisés à cette perte de sensibilité et aux conséquences que cela peut avoir. L’application d’une source de chaleur est un traitement populaire de la dysménorrhée, ciblant cette zone vulnérable, et donc potentiellement nocive sans sensation protectrice. Nous recommandons donc d’éviter cette pratique chez les patients ayant bénéficié d’une abdominoplastie. Une fois la brûlure survenue, il est important d’avoir recours à un centre de référence dans de bref délai. Les brûlures superficielles peuvent être traitées par cicatrisation dirigée, avec un suivi régulier et attentif. Les brûlures profondes nécessiteront le plus souvent un traitement chirurgical en deux temps, avec un premier temps d’excision suivi d’une couverture par greffe de peau mince. Les séquelles esthétiques sont majeures dans ces cas.

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Articles from Annals of Burns and Fire Disasters are provided here courtesy of Euro-Mediterranean Council for Burns and Fire Disasters (MBC)

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