En 2007, le Fonds du Commonwealth, établi à New York, a rendu public les résultats du plus récent sondage comparant les systèmes de santé de l’Australie, du Canada, de l’Allemagne, des Pays-Bas, de la Nouvelle-Zélande, du Royaume-Uni et des États-Unis1. Étant les 2 associés canadiens au Programme de bourses Harkness en politiques de la santé internationale de 2007 à 2008, nous avons rencontré notre ministre fédéral de la Santé, l’honorable Tony Clement, juste avant la publication de l’étude. Nous étions présents à Washington, DC, au moment de l’événement et nous avons entendu les réactions des ministres de la Santé (ou de leurs représentants) des 7 pays.
L’enquête internationale sur les politiques de la santé de 2007 portait sur l’opinion d’adultes (de 18 ans et plus) et sur leur système de santé et sur leurs expériences au sein de ce système. Nous avons tout de suite été frappés par la pertinence des sujets principaux de cette année au chapitre des politiques et des pratiques: accès aux soins, soins aux malades chroniques, coordination des soins, soins centrés sur le patient et sécurité des patients. On a interviewé environ 12 000 adultes, et les Canadiens représentaient environ 25% de l’échantillon (n = 3003), une plus grande proportion que d’habitude en raison d’un investissement du Conseil canadien de la santé (ce financement avait pour but de réaliser d’autres analyses futures concernant des populations particulières à notre pays).
Les résultats: le Canada occupe à peu près le milieu du peloton des 7 pays pour la majorité des sujets. Étant donné l’investissement et l’attention accordés au renouvellement des soins de santé ces dernières années au Canada, nous pouvons maintenant utiliser ces données probantes pour guider nos efforts et tout simplement nous améliorer. Les patients, les professionnels de la santé et les décideurs canadiens souhaiteraient sans doute que les médecins canadiens soient des chefs de file et des modèles à imiter sur la scène internationale mais les résultats de l’enquête font ressortir des domaines où il y a place à l’amélioration.
Place à l’amélioration
Les résultats permettent de cerner 3 domaines qu’il faut améliorer. Au Canada, ces secteurs ont récemment fait l’objet d’investissements et d’attention; cependant, il semble approprié de voir si on agit dans la bonne direction et suffisamment. Le premier domaine concerne l’accès au système de soins primaires et son utilisation. Le Canada se situait soit au dernier rang ou aux alentours pour les questions portant sur l’accès en temps opportun au médecin habituel, la possibilité de rendezvous le soir ou les fins de semaine, la durée de temps passé par les médecins avec leurs patients et les rappels concernant la prévention ou les soins de suivi. Il n’est donc pas surprenant que les adultes au Canada aient été de grands utilisateurs des services d’urgence, notamment 16% des patients ayant signalé s’être rendus à l’urgence pour des problèmes que leur médecin aurait pu traiter s’il avait été disponible. De fait, 45% des personnes atteintes de maladies chroniques au Canada étaient allées à l’urgence au cours des 2 dernières années. Comme l’ont carrément écrit les auteurs de l’étude, nous avons «les symptômes d’un système de soins primaires en état de stress1».
Heureusement, il se passe des choses prometteuses dans l’amélioration des horaires de travail des pratiques de soins primaires, comme la méthodologie d’accès avancé2, qui facilite les rendezvous le jour même ou le lendemain sans augmenter la quantité de travail ou le mécontentement du médecin.
Le deuxième secteur nécessitant notre attention est la sécurité du patient. Une proportion de 17% des répondants canadiens ont signalé avoir fait l’objet d’erreurs médicales, de médication ou de laboratoire au cours de l’année précédente. Cette part augmentait à 28% chez les patients ayant 2 problèmes chroniques ou plus et à 30% pour ceux qui consultaient 3 médecins ou plus. L’Étude canadienne sur les événements indésirables a été la première à décrire l’ampleur de ce problème au pays3. Depuis, Forster et ses collègues ont observé comment les déficiences systématiques dans la transition des soins peuvent causer de nombreux événements indésirables4. La recherche a aussi démontré que les patients ont de précieux conseils à donner pour atténuer ce problème5.
L’Institut canadien pour la sécurité des patients est devenu un important intervenant pour encourager le changement, et des centaines d’équipes dans les hôpitaux participent à la campagne nationale sur la sécurité des patients sous le slogan «Soins de santé sécuritaires maintenant!». En compagnie des autres ministres de la Santé présents, le ministre Clement a participé à la campagne officielle de signature de la nouvelle initiative de l’Organisation Mondiale de la Santé «Action on Patient Safety: High 5s6». Le Canada assumera un rôle de premier plan dans l’un ces cinq volets de l’initiative: la conciliation des médicaments.
Le troisième secteur relie la qualité des soins primaires à la sécurité des patients. Si 91% des adultes au Canada ont un médecin ou une clinique médicale réguliers, seulement 48% disent que ces médecins ou cliniques sont très ou assez faciles à contacter par téléphone, qu’ils connaissent toujours ou assez souvent leurs antécédents médicaux et qu’ils aident toujours ou souvent à coordonner leurs soins. Avant tout, les résultats de l’enquête indiquent que le fait d’avoir un «chez-soi» médical réduit le nombre de visites à l’urgence et les tests inutiles, et accroît l’accès après les heures normales, la qualité de la communication entre le patient et le dispensateur ainsi que de la coordination des soins. Les adultes qui rapportent avoir un chez-soi médical signalent moins souvent des erreurs médicales, de médicaments ou de laboratoire (17%) que ceux qui n’en ont pas (29%). Il est évident que l’accès aux services et la qualité des soins sont davantage associés à ceux fournis par un médecin habituel ou une clinique régulière qu’au simple fait d’avoir accès à une source habituelle de soins.
Perspective favorable
Par ailleurs, les Canadiens ont quand même un point de vue favorable quant au renouvellement des soins de santé. Seulement 12% des Canadiens (par rapport à 34% des Américains, par exemple) jugeaient que le système de santé devrait être rebâti. Ces constatations corroborent celles du bilan de santé du système, produit à la demande de l’Association médicale canadienne en 2007, qui indiquaient que seulement 9% des répondants canadiens avaient donné une note de «F» à la qualité du système en général7. Le Fonds du Commonwealth a aussi reconnu une amélioration avec le temps au Canada et en Nouvelle-Zélande, affirmant que les opinions sur le système s’étaient constamment améliorées au cours de la dernière décennie et étaient maintenant comparables à celles exprimées en Australie et au Royaume-Uni1 .
Dans l’ensemble, il se dégage certaines bonnes nouvelles dans les résultats de cette enquête, mais aussi des secteurs à améliorer. D’une façon ou d’une autre, nous pouvons apprendre de nos partenaires du Fonds du Commonwealth pour améliorer le système de santé au Canada.
Footnotes
This article is also in English on page 965.
Remerciements
Nous remercions de ses contributions Diane Watson, membre du corps professoral au Centre for Health Service and Policy Research à l’University of British Columbia à Vancouver et ancienne associée Harkness. Les opinions exprimées dans cet article ne représentent pas celles du Fonds du Commonwealth ni de la Fondation canadienne de la recherche sur les services de santé.
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
Les opinions exprimées dans les commentaires sont celles des auteurs. Leur publication ne signifie pas qu’elles sont sanctionnées par le Collège des médecins de famille du Canada.
Références
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