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. 2011 Mar-Apr;64(2):104–115. [Article in French]

Utilisation de lignes directrices dans le cadre de l’implantation de cabinets automatisés décentralisés en établissement de santé

Lionel Brisseau 1, Jean-François Bussières 2, Denis Lebel 3, Suzanne Atkinson 4, Louise Robinette 5, Sylvie Fortin 6, Michel Lemay 7
PMCID: PMC3093417  PMID: 22479039

RÉSUMÉ

Contexte :

Il existe peu de données sur les conséquences de l’utilisation des cabinets automatisés décentralisés (CAD) en établissements de santé.

Méthode :

Il s’agit d’une étude descriptive de la conformité des pratiques par rapport à des lignes directrices publiées dans le cadre de l’implantation de CAD. L’objectif principal de l’étude est d’évaluer la conformité globale et celle de chaque processus du circuit du médicament. L’étude se déroule au sein du Centre hospitalier universitaire (CHU) Sainte-Justine, un établissement mère–enfant de 500 lits. À partir des lignes directrices portant sur l’utilisation sécuritaire des CAD de l’Institute for Safe Medication Practice (aux États-Unis) (2008) et de son outil d’autoévaluation (2009), nous avons évalué la conformité de la pratique à 30 jours et à 120 jours après l’implantation.

Résultats :

Nous avons procédé de novembre 2009 à avril 2010 à l’implantation de sept stations de CAD au sein du CHU Sainte-Justine. Le profil de conformité est passé de 66 % à 74 % de janvier à avril 2010. Pour chaque processus relatif à l’utilisation sécuritaire des CAD, nous présentons une brève description des critères ainsi que les éléments de non-conformité liés à la technologie ou aux aspects organisationnels. Pour chaque élément de non-conformité, nous avons déterminé les actions requises auprès du fabricant afin de modifier l’équipement (c. à .d. aspects technologiques) et auprès de l’établissement afin de modifier les modalités d’utilisation (aspects organisationnels) en précisant le ou les processus impliqués.

Conclusion :

Cette étude décrit la conformité des pratiques au CHU Sainte-Justine par rapport à des lignes directrices publiées par l’Institute for Safe Medication Practices. L’utilisation de lignes directrices dans le cadre de l’implantation de cabinets automatisés décentralisés en établissement peut aider à guider les actions tant sur le plan technologique qu’organisationnel.

Keywords: automatisation, gestion des risques, gestion de la qualité

INTRODUCTION

On reconnaît la complexité et l’importance du circuit du médicament pour la prestation sécuritaire de soins en établissement de santé1. Plusieurs technologies ont été développées au cours des trois dernières décennies afin de sécuriser le circuit du médicament, notamment les ensacheuses, les robots, les pompes intelligentes, les lecteurs de code-barres et les cabinets automatisés décentralisés (CAD). Parmi les avantages attendus de cette technologie, on distingue en particulier la sécurisation du circuit du médicament (c.-à-d. réapprovisionnement, entreposage, distribution, enregistrement des doses) ainsi que l’amélioration de son efficience (réduction des délais de livraison de la pharmacie centrale aux unités de soins). Notons toutefois que les preuves de ces avantages ont été peu décrites dans la littérature. De plus, les CAD ne se substituent cependant pas au pharmacien et les ordonnances doivent être préalablement validées. On retrouve des CAD sur le marché américain depuis 1990 (p.ex. Pyxis Medstation de Cardinal Health [Vaughan, Ontario] depuis 1990, OmniRx de Omnicell [Mountain View, Californie] depuis 1993 et AcuDose-Rx de McKesson [Saint-Laurent, Québec] depuis 1999).

Dans leur enquête de 2008 sur la pratique pharmaceutique en hôpital aux États-Unis, Pederson et coll. rapportent que 83 % des personnes ayant répondu au sondage ont recours à des CAD2 contre 38 % en 19993. Au Canada, Hall et coll. rapportent dans l’enquête de 2007–2008 que 23 % des sondés ont recours à des CAD et que seulement 8 % de l’ensemble d’entre eux les utilisent pour plus de 90 % des lits4.

L’utilisation sécuritaire des CAD est encadrée par les normes nord-américaines sur la gestion des médicaments et quelques documents publiés par différents organismes57. D’autres organismes ont émis des lignes directrices portant sur l’utilisation sécuritaire des CAD. L’American Society of Health-System Pharmacists a publié en 2009 des lignes directrices portant sur l’utilisation sécuritaire des CAD8. Ces directives touchent plusieurs aspects liés aux CAD soit les conditions nécessaires, les justifications pour outrepasser la validation d’une ordonnance, les interfaces, les contrôles de qualité, les rapports et audits, la gestion des stocks, les aspects juridiques et la formation. Enfin, l’Institute for Safe Medication Practice (ISMP en États-Unis) a aussi publié en 2008 des lignes directrices portant sur l’utilisation interdisciplinaire des CAD9, suivies, en 2009, d’un outil d’auto-évaluation10.

MISE EN CONTEXTE

Nous avons procédé, de novembre 2009 à avril 2010, à l’implantation de sept stations de CAD AcuDose-Rx de McKesson au sein du CHU Sainte-Justine, à Montréal (Québec), soit à l’urgence (une station principale avec auxiliaire et tour au poste central et une station principale au poste d’observation pour un total d’environ 64 000 visites par année), aux soins intensifs pédiatriques (une station principale avec auxiliaire et tour au poste central et une station principale au poste secondaire pour un total d’environ 900 admissions par année) et aux soins intensifs de néonatologie (une station principale pour chacune des trois unités de soins pour un total d’environ 1000 admissions par année). Les CAD sont gérés par deux logiciels, soit Connect-Rx, soutien de la paramétrisation des CAD, et Connect-Rx pour l’intégration des CAD aux autres logiciels McKesson utilisés dans le cadre du circuit du médicament.

En ce qui concerne les ressources humaines, l’implantation a requis la contribution de plusieurs titres d’emploi, soit 628 heures de pharmaciens, 87 heures d’assistants techniques séniors en pharmacie, 492 heures d’assistants de recherche en pharmacie et 104 heures d’infirmières. Au terme des 120 jours après l’implantation, un total de 395 infirmières, 60 infirmières auxiliaires, 42 inhalothérapeutes, 24 pharmaciens, 18 assistants techniques séniors en pharmacie et 6 administrateurs ont été formés à titre de superutilisateurs (n = 84) ou d’utilisateurs (n = 461) et pour un total de 600 heures de temps d’infirmiers et de pharmacie de personnes en formation rémunérée. Nous avons enregistré dans le logiciel de gestion des CAD (Connect-Rx) un total de 260 entités génériques et 401 présentations commerciales réparties dans les 7 stations. Les CAD sont utilisés en mode « profil » à l’exception du CAD du poste central de l’urgence, qui est utilisé en mode « inventaire », compte tenu des modalités de fonctionnement (c.-à-d. délai de séjour, la fréquentation accrue en soirée et la nuit, saisie limitée des ordonnances par la pharmacie). Les CAD sont utilisés pour stocker les substances contrôlées, les médicaments du commun des unités de soins et certaines premières doses. Les CAD sont interfacés avec les logiciels permettant la gestion des admissions, départs et transferts (Clinibase CI, Logibec, Montréal, Québec), la gestion des visites à l’urgence (Stat-Urgence, Stat-Dev, Mercier, Québec) et le dossier pharmacologique informatisé (GESPHARx, CGSI Solutions TI Inc, Québec, Québec).

L’objectif de cet article est de présenter la pertinence de l’utilisation de lignes directrices dans le cadre d’une implantation de cabinets automatisés décentralisés en établissement de santé.

MÉTHODE

Il s’agit d’une étude descriptive de la conformité des pratiques par rapport à des lignes directrices publiées dans le cadre de l’implantation de CAD. L’objectif principal de l’étude est d’évaluer la conformité globale et de chaque processus du circuit du médicament.

L’étude se déroule au sein du CHU Sainte-Justine, un établissement mère-enfant de 500 lits. Le département de pharmacie offre une distribution unitaire quotidienne en cassettes de l’ensemble des médicaments destinés à près de 20 000 personnes admises par année, soit pendant plus de 100 000 jours-patients. L’établissement comporte 21 unités de soins et environ 1500 utilisateurs potentiels des CAD (c.-à-d. infirmières et inhalothérapeutes).

Dans le cadre du rapport du groupe d’experts mandaté par le ministère de la Santé et des Services sociaux sur les Systèmes automatisés et robotisés de distribution des médicaments11, le circuit du médicament comporte 54 étapes. Notre analyse de conformité porte sur les étapes de réapprovisionnement, de planification, de préparation et d’enregistrement des doses. Dans le cadre de la phase I du projet de mise à niveau du circuit du médicament mené à l’échelle du Québec depuis 200812, le CHU Sainte-Justine a obtenu le financement requis pour l’implantation de sept stations de CAD dans les unités de soins critiques. L’acquisition et l’implantation des CAD ont été coordonnées par un comité local du circuit du médicament.

À partir des lignes directrices portant sur l’utilisation sécuritaire des CAD de l’Institute for Safe Medication Practice (2008) et de son outil d’autoévaluation (2009), nous avons évalué la conformité de la pratique 30 jours et 120 jours après l’implantation. Les lignes directrices de l’ISMP comportent 89 critères regroupés en 12 processus, pour un maximum de 445 points (c.-à-d. cinq points par critère). L’ISMP précise que les processus ont été définis par un groupe d’experts à partir du cadre conceptuel key elements of the medication use system13 et de discussions liées à l’utilisation sécuritaire des CAD. Un processus regroupe un ensemble de critères permettant une utilisation sécuritaire des médicaments à une ou plusieurs étapes du circuit du médicament.

L’évaluation de la conformité de notre pratique a été menée par les auteurs de cet étude soit l’équipe d’implantation composée de trois pharmaciens, de deux infirmières, d’une gestionnaire de risque et d’un résident en pharmacie. L’évaluation a été menée individuellement puis établie par consensus conformément à l’échelle ordinale de A à E, telle que l’ISMP le propose (« A » représentant l’absence de cette activité, et « E » représentant l’implantation complète de l’activité au sein de l’organisation). Une correspondance numérique (c.-à-d. A = 1, B = 2, C = 4, D = 4, E = 5) nous a permis d’obtenir des scores agrégés et d’établir une note globale et par processus.

Pour chaque processus, nous avons déterminé et discuté les principaux éléments de non-conformité inhérents à la technologie des CAD et aux aspects organisationnels. Par ailleurs, un certain nombre de problèmes vécus n’ont pu être associés à aucun critère parmi ceux proposés par l’ISMP. Nous les avons toutefois recensés en complément de présentation de nos résultats. Aucune analyse statistique n’a été menée étant donné le caractère descriptif de l’étude.

RÉSULTATS

Le tableau 1 présente le profil de conformité en janvier 2010 et avril 2010. Nous observons que la conformité aux lignes directrices de l’ISMP sur les CAD est passée de 67 % à 74 % en trois mois.

Tableau 1.

Profil de conformité des pratiques par rapport à des lignes directrices publiées dans le cadre de l’implantation de cabinets automatisés décentralisés

Processus liés aux cabinets automatisés décentralisés Nombre de critères Points* (% de conformité par processus)
janvier 2010 avril 2010
No 1 – Environnement favorable à l'utilisation du CAD 11 39 (71) 40 (73)
No 2 – Sécurisation des accès et du suivi des substances contrôlées 12 36 (60) 47 (78)
No 3 – Utilisation optimale des profils patients 3 11 (73) 11 (73)
No 4 – Affichage des informations à l'écran 19 71 (75) 71 (75)
No 5 – Gestion des stocks 7 18 (51) 23 (66)
No 6 – Configuration des CAD 3 14 (93) 14 (93)
No 7 – Sécurisation du processus de réapprovisionnement 13 44 (68) 46 (71)
No 8 – Sécurisation de la procédure de distribution de médicaments 6 20 (67) 21 (70)
No 9 – Gestion des alertes d'évitement 6 19 (63) 23 (77)
No 10 – Standardisation du transport du médicament du CAD chez le patient 4 16 (80) 16 (80)
No 11 – Gestion des retours de médicaments 1 4 (80) 5 (100)
No 12 – Formation du personnel et validation des connaissances 4 7 (35) 14 (70)
Total 89 299 (67) 331 (74)

CAD = cabinet automatisé décentralisé.

*

Nombre maximale de points : cinq pour chaque critère.

Pour chaque processus relatif à l’utilisation sécuritaire des CAD, nous présentons une brève description des critères ainsi que les éléments de non-conformité liés à la technologie ou aux aspects organisationnels. Pour chaque élément de non-conformité, nous avons déterminé les actions requises auprès du fabricant afin de modifier l’équipement (c.-à-d. aspects technologiques) et auprès de l’établissement afin de modifier les modalités d’utilisation (aspects organisationnels) en précisant le ou les processus impliqués.

Le tableau 2 présente le profil des éléments de non-conformité aux lignes directrices de l’ISMP de chaque processus de cabinets automatisés décentralisés.

Tableau 2.

Profil des éléments de non-conformité aux lignes directrices de l’ISMP par processus de cabinets automatisés décentralisés

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Numéro du processus* (numéros des critères) Aspects technologiques Aspects organisationnels
No 1 (no 1 à 11) – Environnement adéquat, soit aménagement physique et flot de travail No 11 – Le CAD ne permet pas l’affichage alternatif du contenu de l’intranet pharmacie ou d’autres ressources informationnelles sur l’écran du CAD. Ainsi, le personnel soignant doit consulter ces outils à partir d’un 2ème ordinateur situé à l’extérieur de la pharmacie d’étage lors de la préparation d’un médicament. Faute de financement disponible, l’ajout d’un poste informatique complet à proximité de chaque CAD ne peut être effectué pour le moment.
No 9b – Le CAD ne comporte pas de support pour documents papier afin de faciliter la consultation de la FADM lors de distribution de doses; des supports plastiques ont été ajoutés à chaque CAD.
No 4a – Le choix de l’Agence de santé et de l’établissement de ne pas utiliser les tours comme espaces de rangement pour les sacs de solutés destinés aux perfusions intraveineuses en raison du financement disponible et du recours au système de réapprovisionnement en double casier (Triax) pour la gestion des solutés.
No 1 – La phase I du projet SARDM limitait l’implantation des CAD aux unités de soins critiques; toutefois, la phase II devrait permettre au CHUSJ d’acquérir des CAD au sein d’autres unités de soins. Le recours à un double système (c.-à.-d. avec CAD et sans CAD selon les unités) oblige le maintien de deux systèmes de gestion des stocks pour le personnel soignant et le personnel pharmacie.
No 2 (no 12 à 23) – Sécurité et gestion des accès aux CAD, soit la gestion des codes d’accès, la biométrie et les mots de passe, la gestion des produits réfrigérés et des substances contrôlées incluant les retours et rebuts No 19 – La gestion hors-CAD des produits réfrigérés en raison du non financement du cadenas Bluetooth relié au CAD et pouvant être ajouté aux réfrigérateurs en place. Bien que certains établissements aient opté pour un petit réfrigérateur intégré à la tour, cette option n’a pas été retenue au CHUSJ car plusieurs stations ne comportent pas de tour et il existe un risque de surchauffe à l’intérieur de celles-ci.
No 14 – Le fabricant a enregistré tous les identifiants du personnel soignant dans la base de données des CAD ainsi qu’un mot de passe universel; bien que ceci ait facilité l’octroi d’un accès rapide en cours de formation de masse, cette pratique menace la gestion sécuritaire des accès aux nouveaux employés. En effet, la modification initiale du mot de passe est indépendante de l’enregistrement de la biométrie et ne nécessite pas de témoin, alors qu’un tel contrôle pourrait sécuriser l’utilisation d’un mot de passe universel. En cours d’implantation, le fabricant a cependant accepté d’insérer un nouveau mot de passe individuel par usager encore inactif.
No 12 à 18b – La gestion des accès à partir des rapports proposés via les logiciels Connect-Rx et le module d’archivage Data Station est difficile. Notre équipe a dû développer elle-même un rapport synthèse de gestion des accès. D’autre part, une paramétrisation par groupe de médicament ou bien la disponibilité de paramètres personnalisables pour les médicaments stockés permettrait une gestion plus adéquate des accès aux médicaments par groupe d’utilisateurs, en particulier pour la nécessité du témoin ou la gestion des heures d’accès aux médicaments. Enfin, l’absence de rappel d’expiration du mot de passe et de son inactivation après le délai choisi (c.-à.-d. un an selon la recommandation de l’Agence) pourrait être à l’origine de problèmes d’accès récurrents.
No 12 à 18b – L’absence de restriction des accès par usager en fonction de l’unité de soins ou du médicament pour les infirmières (c.-à.-d. tous les utilisateurs ont accès à tous les CAD et à tous les médicaments). Une restriction a toutefois été appliquée aux inhalothérapeutes qui n’ont pas accès aux substances contrôlées. Cette décision est motivée notamment par le roulement important de personnel incluant l’équipe volante, la possibilité de paramétrer localement des rapports d’utilisation par usager et l’absence de gestion centralisée des accès et des mouvements de personnel. L’établissement a toutefois convenu de mettre en place au cours de la prochaine année une gestion centralisée des accès et de la formation du personnel soignant dans le cadre du circuit du médicament.
No 20 – La destruction des rebuts des substances contrôlées provenant de solutés n’est pas documentée au CAD mais sur la FADM compte tenu de la dilution du produit source et de son administration partielle.
No 3 (no 24 à 26) – Utilisation optimale du profil patient au niveau des CAD, incluant le choix de l’inventaire des médicaments et leurs particularités d’accès No 24 et 25 – En mode inventaire (c.-à.-d. accès direct à tous les médicaments sans affichage du profil des patients), on ne peut paramétrer l’accès aux médicaments en fonction des heures d’ouverture de la pharmacie. Ainsi, il est impossible de restreindre l’accès aux médicaments à alerte élevée de l’ISMP en dehors des heures d’ouverture de la pharmacie dans le CAD utilisé comme armoire de nuit. Tous les médicaments stockés sont donc disponibles en tout temps.
No 26 – L’impossibilité de paramétrer spécifiquement le recours au témoin en fonction des heures d’ouverture de la pharmacie ou en fonction des privilèges de l’utilisateur.
No 24 – Le comité local SARDM a opté pour la distribution en mode inventaire pour le CAD de l’urgence principale étant donné le délai de séjour, la fréquentation accrue en soirée et nuit et la saisie limitée des ordonnances par la pharmacie. Toutefois, le recours au mode inventaire ne nuit pas à la détection des allergies/intolérances ni à la documentation nominative des doses si le CAD est adéquatement utilisé et la lecture des alertes effectuées.
No 26 – Le comité local SARDM a choisi de ne pas imposer la double-vérification des médicaments à la distribution au CAD mais plutôt à la préparation au chevet en ayant recours à la FADM, considérant que les CAD sont implantés dans les unités de soins critiques où il est souvent difficile d’exiger deux soignants simultanément au CAD (c.-à.-d. les patients des soins intensifs au CHUSJ sont en chambre unique et il y a rarement deux infirmières disponibles en même temps au CAD compte tenu de la surveillance en tout temps requise au chevet).
No 4 (no 27 à 45) – Informations affichées à l’écran du CAD, soit l’identification du patient, ses allergies, le contenu des ordonnances valides à la FADM et les alertes No 30 – L’affichage inadéquat des allergies des patients. Bien que le terme allergie soit affiché en rouge à chaque patient de la liste ayant au moins une allergie documentée, l’affichage de celles-ci n’est pas optimal, notamment parce que toutes ces allergies sont affichées lors d’une distribution, indépendamment du médicament dispensé. D’un point de vue de prestation sécuritaire, la détection adéquate des allergies devrait comporter une alerte pertinente à la sélection du médicament, un message de taille suffisante ainsi qu’une documentation de l’action posée par l’infirmière (c.-à.-d. confirmation de la consultation avant la distribution). Enfin, McKesson est disposé à intégrer une table hiérarchisée des allergies en tenant compte des classes thérapeutiques afin d’en permettre une détection croisée. Toutefois, cette intégration n’a pas encore été réalisée et le logiciel Connect-Rx n’en permet pas une saisie et une mise à jour facile.
No 36 – L’affichage en deux écrans non successifs du contenu de l’ordonnance (c.-à.-d. premier écran qui affiche environ 75 caractères et second écran obtenu après 3 clics pour un total de 420 caractères par commentaire d’ordonnance) fait en sorte que le personnel soignant est susceptible de préparer le médicament sans consulter l’ensemble des directives.
No 35 et 41 – L’affichage incohérent de la description des produits qui est issu d’une concaténation inadéquate de cinq champs clés. Afin d’obtenir un affichage identique entre les CAD et la FADM, nous avons dû saisir des informations descriptives dans des champs non conçus à cette fin, et ainsi renoncer à l’utilisation de l’option permettant au CAD de suggérer la quantité adéquate et sécuritaire à prélever par l’infirmière.
No 35 – Le téléversement inutile des données provenant du système pharmacie compte tenu de l’incapacité d’importer adéquatement l’information dans les champs pertinents de Connect-Rx. Cette opération a contribué à « polluer » la base de données et augmente les risques d’erreurs lors de la mise à jour de celle-ci.
No 5 (no 46 à 52) – La gestion des stocks, soit l’adoption du contenu des CAD par le comité de pharmacologie, les critères de sélection des produits disponibles au CAD, le recours systématique aux formats unidoses et les audits périodiques No 48 – Le CAD ne permet pas une gestion adéquate des volumes en décimales (c.-à.-d. le CAD permet les rebuts en décimales mais pas les sorties); bien que le concept de CAD repose sur la distribution de formats unitaires, la pratique pédiatrique et les ressources humaines disponibles pour la production de préparations unidoses extemporanées ne permettent pas de produire en quantité suffisante avec péremptions adéquates des unidoses de toutes les formes orales liquides requises, particulièrement pour les substances contrôlées.
No 50 – Le fabricant n’a pas systématiquement traduit les rapports dans la langue des usagers (c.-à.-d. français); la traduction insuffisante ou inadéquate de rapports limite leur utilisation. Aussi, les rapports disponibles sont issus des données de transactions enregistrées par le CAD et ne permettent ainsi pas un contrôle de qualité des bases de données telles que les fiches de médicaments, les utilisateurs, les alertes, etc.
No 51 – La quantité maximale stockée par pochette n’a pas été établie en tenant compte du risque de surdosage par pige erronée mais en fonction de l’historique de consommation et de l’optimisation du remplissage; la modification demandée à McKesson pour un calcul adéquat de la quantité à distribuer en tout temps devrait limiter les risques de pige erronée. Une optimisation du processus de remplissage des réserves d’étage s’avère également nécessaire afin de palier à l’augmentation de la charge de travail technique lié aux CAD.
No 50 – Le réajustement de l’inventaire n’a pas encore été effectué en raison du manque de recul de consommation et du temps nécessaire à une telle réévaluation.
No 6 (no 53 à 55) – Configuration physique des tiroirs CAD NA No 53 – Compte tenu des contraintes financières, l’établissement a acheté une combinaison de pochettes sécurisées (n = 337 localisations, soit 40,0 %) et de tiroirs matriciels (n = 506 localisations, soit 60,0 %); le recours aux tiroirs matriciels étant moins sécuritaire, les médicaments à niveau d’alerte élevée ont été assignés à des pochettes sécurisées. Malgré cela, plusieurs erreurs ont été recensées, principalement imputables à la chronologie de réapprovisionnement décrite ci-après (c.-à.-d. voir processus no 7) ou à des erreurs de format dans les tiroirs à matrice ouverte. Aucun élément de non-conformité au niveau technologique n’a été noté.
No 7 (no 56 à 68) – Processus sécuritaire de réapprovisionnement des CAD No 65a – La séquence des écrans et messages proposés par le CAD n’est pas sécuritaire; par exemple, le CAD autorise l’ouverture d’une pochette suite à la sélection d’un item à réapprovisionner AVANT la lecture du code-barres de ce dernier; ainsi le personnel technique peut ajouter à une pochette un item erroné dont le code-barres est toutefois lisible mais qui ne correspond pas au contenu de la pochette ouverte. Aussi, le CAD n’offre pas d’alternative si le code-barres est illisible lors du réapprovisionnement alors que le recours à un témoin pourrait dans ce cas être proposé.
No 61a, 65a – Le logiciel du CAD ne permet pas la gestion adéquate du contenu du code-barres utilisé sur le marché canadien (c.-à.-d. GTIN de seize chiffres selon le standard GS1); étonnamment, le grossiste McKesson a introduit sur le marché canadien en 2006 le GTIN à seize chiffres pour la gestion de sa distribution centralisée avec les établissements de santé14. Bien que des masques de saisie partielle des chiffres du code-barres commercial puissent être utilisés, cette pratique est non sécuritaire. L’équipe d’implantation a dû saisir les chaînes de seize caractères dans un champ miscellaneous non conçu pour cette utilisation. Cette information a ensuite été utilisée par le biais d’outils informatiques développés localement afin de tenter de de préserver une certaine intégrité référentielle.
No 61 – La préparation des médicaments pour le réapprovisionnement des cabinets est auto-vérifiée par l’assistant technique sénior en pharmacie, que le médicament comporte ou non un code-barres compte tenu des normes professionnelles en vigueur au Québec.
No 61a, 65a – Santé Canada n’oblige pas le recours à un code-barres de façon systématique sur tous les formats d’emballage canadien de médicaments.
No 8 (no 69 à 74) – Processus sécuritaire de distribution des médicaments par l’utilisation d’un CAD, selon la configuration de celui-ci et les recommandations d’utilisation No 73 – Bien que la consultation systématique de la FADM est prévue à nos procédures, l’affichage au CAD du contenu de l’ordonnance en deux écrans non successifs n’est pas optimal. Un affichage cohérent en un écran serait requis pour une prestation sécuritaire de soins. No 74 – La mise en place d’un nombre optimal de rapports d’audit n’a pas encore été effectuée compte tenu des problèmes reliés aux rapports et à leur archivage numérique, aux délais d’implantation de l’outil d’archivage (McKesson Data Station), à la complétion de l’implantation et à la maîtrise de la technologie.
No 9 (no 75 à 80) – Gestion des alertes et double-vérifications No 79 – Le CAD ne permet pas de gérer différemment le recours à un témoin en mode profil et hors profil mais seulement en fonction du médicament; dans notre circuit du médicament, le recours à un témoin uniquement en mode hors-profil serait utilisé dans plusieurs situations, comme pour les médicaments à alerte élevée. No 79 – Comme précisé dans le processus n<o> 3 (critère no 26) le comité local SARDM a opté une double-vérification des médicaments au moment de la préparation au chevet en ayant recours à la FADM.
No 12 (no 86 à 89) – Formation du personnel et révision des processus No 89 – Le fournisseur de CAD n’a pas fourni initialement des outils adéquats de gestion des différentes situations de pannes majeures.
No 86 – Le fournisseur de CAD n’offre pas d’outil de formation adapté au personnel soignant outre les manuels détaillés (c.-à.-d. plusieurs centaines de pages).
No 87, 88 – L’établissement dispose d’un comité de gestion de risques ; toutefois, le recours à un rapport d’incident/accident n’est pas utilisé systématiquement pour documenter les problèmes inhérents à l’utilisation des CAD.

CAD = cabinet automatisé décentralisé, CHUSJ = Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, FADM = feuille d’administration des médicaments, GTIN = Global Trade Identification Number, ISMP = Institute for Safe Medication Practices (É.-U.), NA = non-applicable, SARDM = systèmes automatisés et robotisés de distribution des médicaments.

*

Aucun élément de non-conformité relatif à l’utilisation des CAD pour le processus no 10 et le processus no 11.

Autres processus

En ce qui concerne les processus no 10 (transport des médicaments du CAD vers la chambre du patient) et no 11 (gestion adéquate des retours de médicaments), nous n’avons pas noté d’éléments de non-conformité relatifs à l’utilisation des CAD.

Enfin, malgré les exigences soulevées par une telle démarche d’autoévaluation, un certain nombre de problèmes n’ont pu être associés à aucun critère parmi ceux proposés par l’ISMP. Ainsi, on note sur le plan technologique l’absence de support pour le lecteur de code-barres, l’absence d’interface possible avec notre logiciel de gestion de stock (c.-à-d. nécessité de ressaisir les listes de réapprovisionnement imprimées à partir de Connext-Rx), la non-conformité des dates d’expiration au format canadien (c.-à-d. AAMMJJ), la gestion des patients par numéro de dossier et non par numéro d’admission, l’affichage incomplet du descriptif des médecins à l’écran (seulement nom, prénom et pas d’autre identifiant, tel que le numéro de pratique), absence d’avertissement de couleur à l’écran pour signaler l’apparition d’une nouvelle prescription validée par la pharmacie, suppression obligatoire des patients au CAD après 99 jours sans activité, difficulté de procéder à une recherche croisée des médicaments en noms générique et commercial.

DISCUSSION

Données probantes limitées

Il existe relativement peu de données sur les conséquences de l’utilisation des CAD en établissements de santé. L’absence des termes « automated dispensing devices » ou « automated dispensing cabinets » dans le MeSH (Medical Subject Headings de la National Library of Medicine en États-Unis) ainsi que leur utilisation dans le texte de seulement et respectivement 76 et 14 articles publiés depuis 2002 dans PubMed montrent bien le défaut de publication dans ce domaine. De plus, l’expression medication systems ne permet de recenser que 1147 articles et seulement quelques autres pertinents. Aucun article n’a été retrouvé en texte libre pour les termes Acudose-Rx, Omnicell, mais 24 sous Pyxis et 5 sous Pyxis Medstation. Parmi les articles recensés, notons quelques enquêtes décrivant la proportion d’utilisateurs15, quelques études descriptives examinant l’implantation et l’utilisation1620, quelques études évaluant les conséquences de l’emploi des CAD sur les erreurs médicamenteuses21,22, quelques études économiques23, et une étude portant sur la perception de la fiabilité de CAD par le personnel soignant24. Depuis la publication d’un numéro spécial de Health Devices en 1996 sur les CAD, aucune autre publication n’a fait le point sur ce type de technologies et son rapport coût-bénéfice.

Alors que l’acquisition de CAD était généralement auto-financée sur le marché américain par une capacité accrue d’enregistrement de toutes les doses distribuées en cours d’hospitalisation et de les facturer aux patients, le financement de CAD sur le marché canadien ne provient que de fonds publics et ne se justifie que par des gains d’efficacité et de sécurité. Il est intéressant de souligner que le United States Pharmacopeia Center for Advancement of Patient Safety a publié en janvier 2007 un profil synthèse des erreurs médicamenteuses liées au CAD et rapportées au portail MedMarx25. De juillet 2001 à décembre 2005, 32 339 erreurs médicamenteuses liées à des CAD ont été rapportées aux États-Unis. De ces erreurs, 1 % (n = 310) étaient de catégorie E (réintervention nécessaire, sans prolongement de l’hospitalisation), 0,2 % (n = 54) de catégorie F (réintervention nécessaire avec prolongement de l’hospitalisation), < 0,1 % (n = 5) de catégorie G (intervention supplémentaire nécessaire), < 0,1 % (n = 10) de catégorie H (dommage permanent) et < 0,1 % (n = 4) de catégorie I (décès). Bien que la déclaration locale des incidents et des accidents médicamenteux soit aussi prévue à un registre national des incidents et accidents au Québec depuis 2003, la déclaration demeure encore locale au sein de plusieurs établissements compte tenu des logiciels disponibles.

Plusieurs auteurs ont souligné que la seule introduction d’une technologie dans le cadre du circuit du médicament ne suffit pas à réduire les risques d’erreurs2631. L’introduction d’une technologie doit être adéquatement planifiée, en tenant compte des aspects technologiques et organisationnels. En ce qui concerne les aspects technologiques, une implantation réussie repose notamment sur la sélection de l’équipement le plus approprié pour les besoins de l’établissement, une paramétrisation adéquate de l’outil, une bonne compréhension des modalités d’utilisation et des limites de la technologie. En ce qui concerne les aspects organisationnels, une implantation réussie repose notamment sur une identification des changements de pratique requis, sur l’adoption d’un plan d’implantation approprié et sur la formation adéquate du personnel. Notre analyse de conformité reprend ces deux dimensions, même si le questionnaire de l’ISMP ne permet pas de déterminer l’origine de la non-conformité.

Au Québec, l’acquisition des CAD a été menée à l’échelle provinciale dans le cadre d’un appel d’offres mené par Approvisionnement-des-2-rives. Ainsi, les établissements intéressés à acquérir des CAD ont pu profiter du pouvoir d’achat de l’appel sans toutefois pouvoir intervenir dans le développement de celui-ci ni dans la sélection du produit. Bien que l’implantation ait été soutenue par plusieurs agences régionales de santé avec la production d’outils de planification et d’implantation, il semble pertinent de mesurer l’état de conformité d’une nouvelle technologie à implanter lorsque des lignes directrices sont disponibles.

Événement sentinelle déclencheur

La survenue de trois pannes majeures a contribué à la réalisation de cette analyse de conformité. En effet, les trois pannes ont été vécues difficilement compte tenu du délai de prise en charge, de l’insuffisance de la documentation destinée la gestion de pannes majeures, de l’incapacité à accéder à toutes les pochettes verrouillées de médicaments malgré les outils en place (c.-à-d. gel de l’application empêchant l’ouverture par logiciel et l’ouverture mécanique) et en présence de confusion entre les rôles des différents acteurs. Les sept secteurs auxqels le réseau accorde la priorité constituent des unités de soins critiques tertiaires. Le non-accès aux médicaments peut causer des préjudices aux patients. Bien que ces unités aient accès à des chariots de réanimation complets32, plusieurs substances contrôlées ne se retrouvent que dans les cabinets. L’analyse de conformité, entreprise avant le début de notre implantation, aurait permis d’identifier d’emblée les faiblesses inhérentes à la gestion des appels d’urgence, à la vérification de la documentation fournie par le fabricant et à la simulation en temps réel.

Notre analyse de conformité et notre implantation ont mis en évidence des faiblesses étonnantes tant sur le plan technologique, compte tenu du fait que la commercialisation de cette technologie est en cours depuis une quinzaine d’années, que sur le plan organisationnel.

Aspects technologiques

Réapprovisionnement par codes-barres

Le recours aux CAD vise à sécuriser le circuit du médicament. Cette sécurisation passe notamment par une double-vérification contenant-contenu lors du réapprovisionnement. Compte tenu de l’efficience promise par cette technologie, la double vérification est assurée par la lecture par code-barres lors du réapprovisionnement. Paradoxalement, le champ code-barres de l’AcuDose-Rx ne comporte que dix caractères (adapté au NDC américain) au lieu des seize caractères du GTIN canadien utilisé notamment par McKesson dans ses activités de distribution de médicaments aux établissements de santé au Canada. Devrait-il y avoir un meilleur arrimage entre les divisions grossiste et robotisation? Des mesures temporaires (c.-à-d. masque de saisie) ont été proposées par le fournisseur afin de pallier ce vice de conception. Toutefois, ces mesures ne permettent pas de donner des informations sur le véritable numéro de code-barres lu et limitent toute intégration de ces données à d’autres applications du circuit du médicament, par exemple dans le cadre de notre intranet. De même, la séquence des écrans proposés lors du réapprovisionnement n’est pas optimale, les messages affichés sont insuffisants ou inadéquats, et des transactions erronées peuvent être effectuées. Par exemple, un assistant technique en pharmacie peut sélectionner à l’écran un médicament à réapprovisionner qui aboutit à l’ouverture de la pochette. La lecture des codes-barres des articles à ajouter est requise, mais après l’ouverture de la pochette. Ainsi, la lecture d’un code-barres erroné n’empêche pas de poursuivre les actions ni de remplir la pochette avec le mauvais produit. Qu’on se rappelle l’erreur survenue aux États-unis lors du réapprovisionnement d’un CAD à une unité de néonatologie, où le personnel technique a réapprovisionné, sans double-vérification ni code-barres, une pochette d’héparine avec des fioles concentrées à 10 000 UI/mL au lieu de 100 UI/mL. Trois bébés sont décédés à la suite de cet accident33,34. Une erreur similaire, sans conséquence sur les patients, est survenue dans notre établissement (c.-à-d. héparine et néonatologie). Elle est le résultat de la séquence non optimale des écrans lors du réapprovisionnement, mais aussi de l’intitulé inadéquat du bouton « SKIP » de la version anglaise qui a été traduit par « SUIVANT » en version française. Ceci laisse croire à l’usager qu’il termine l’action en cours et passe à la transaction suivante alors qu’en fait, il passe directement à l’étape suivante sans valider celle en cours.

Des fonctionnalités non optimales

Si les CAD ont été acquis au niveau du Québec dans la perspective de réduire des erreurs médicamenteuses, il est raisonnable d’exiger que l’affichage du contenu de chaque ordonnance soit possible sur un seul écran plutôt qu’elle soit incomplète et répartie sur deux écrans accessibles en plusieurs clics, que la détection des allergies soit similaire à celle effectuée au dossier pharmacologique informatisé et comporte un message spécifique à la médication dispensée et que l’information sur les événements de type « override » en présence d’allergie soit disponible. On s’attendrait aussi à ce que le calcul de la quantité à sortir du CAD soit possible, indépendamment du choix de la description des produits (format en ml versus format en mg), et que l’utilisation de décimales soit possible pour la sortie et pas seulement pour le rebut de doses lorsque seul un format multidose peut être utilisé (p. ex. pour les substances contrôlées en pédiatrie).

Des difficultés liées au contexte pédiatrique

Plusieurs des difficultés rencontrées lors de l’implantation des CAD au CHU Sainte-Justine sont corrélées aux spécificités du contexte de soins en pédiatrie. Ainsi, on pourrait citer les faibles doses de substances contrôlées à l’origine de rebuts plus fréquents, les conditionnements parfois inadaptés aux posologies pédiatriques, les nombreux médicaments à conserver au réfrigérateur, etc. Il est aussi prévisible qu’un établissement adulte ET pédiatrique rencontre encore plus de difficultés en raison des présentations multiples de plusieurs produits.

Aspects organisationnels

Une gestion centralisée des accès

Plusieurs établissements de santé ne sont pas dotés d’une gestion centralisée des accès des employés aux ressources informationnelles. Ainsi, un nouvel employé doit souvent contacter plusieurs services afin d’obtenir des noms d’usagers et des mots de passe. Cette gestion non centralisée des demandes d’accès empêche la gestion en temps réel des départs et des absences et menace la sécurité des accès et notamment l’utilisation appropriée des CAD. La prise de conscience de la globalité du circuit du médicament impose la mise en place d’une gestion centralisée des accès sur le plan organisationnel. Mais à qui revient la tâche de gérer l’identité d’un employé, sa formation, ses codes d’accès et la mise à jour de ce porte-folio? Au département de pharmacie? Sans doute pas, car le chef de département de pharmacie peut difficilement vérifier l’identité et les demandes du personnel soignant (plus de 1000 infirmières au travail et en formation dans notre établissement). À la direction des ressources humaines? À la direction des technologies de l’information? Un projet pilote de gestion centralisée incluant un porte-folio des accès et de la formation (y compris la formation à la carte requise pour différents aspects du circuit du médicament) est à mettre en place au cours des prochains mois.

Un système partiel

Compte tenu des choix financiers effectués (c.-à-d. non-acquisition de cadenas pour les frigos, acquisition de tiroirs matriciels et pochettes verrouillées) et des limites de la technologie (c.-à-d. non-gestion des formes liquides pédiatriques), nous avons dû maintenir un système mixte éliminant les gains de productivité. Ainsi, le personnel technique doit continuer de se rendre à chaque étage afin de vérifier l’état des stocks non CAD afin de préparer le remplissage. La gestion de stock en temps réel permettant la sortie de listes de remplissage à la pharmacie est donc utilisée sans que l’on puisse éliminer pour autant la double visite à l’étage.

Des retards dans la mise en place des audits

La plupart des systèmes informatiques comportent une variété de rapports développés pour répondre aux besoins des différents usagers. À notre avis, il existe des pratiques optimales afin d’assurer une utilisation adéquate des cabinets. Y’a-t-il des accès non autorisés? Y’a-t-il des écarts entre les doses dispensées et les doses prescrites? Y’a-t-il une description détaillée en temps opportun de la résolution des écarts de décompte de substances contrôlées? Y’a-t-il une sortie de doses pour plusieurs patients lors d’une même transaction faite par une infirmière? Compte tenu du nombre important de rapports disponibles (c.-à-d. plus de 80), de l’absence de leur non-disponibilité en français et de la nécessité d’ajouter à la description de tâches d’une personne (assistant technique en pharmacie, pharmacien, infirmière, agent administratif?) la vérification quotidienne des outils d’audit, il est raisonnable de penser qu’un rapport personnalisé développé au format asp et disponible sur l’intranet de la pharmacie sera prochainement développé pour optimiser la tâche d’audits périodiques.

Importance de l’évaluation en cours d’implantation

Notre étude descriptive illustre la faisabilité du recours à un cadre normatif externe en cours d’implantation afin d’identifier les éléments de non-conformité tant sur le plan technologique qu’organisationnel. S’il est vrai que l’analyse menée 30 jours après l’implantation nous a permis d’identifier de façon explicite les éléments de non-conformité et d’établir un plan d’action tant avec le fournisseur qu’avec l’équipe d’implantation locale et le personnel soignant, l’analyse de conformité réalisée après 120 jours révèle peu de progrès (c.-à-d. amélioration absolue de seulement 7 %). Cette faible amélioration s’explique par le fait que les écarts technologiques requièrent des changements sur le produit lui-même, lesquels s’inscrivent dans un lent processus de mise à jour tenant compte de tous les utilisateurs d’AcuDose-Rx dans le monde. De plus, ces écarts technologiques obligent à des adaptations organisationnelles souvent coûteuses en efforts, en temps et en formation pour compenser les lacunes technologiques. Par exemple, nous avons dû retirer les stupéfiants, drogues contrôlées et benzodiazépines en forme orale liquide et les remettre dans les armoires sécurisées requérant un décompte de la part des trois quarts de travail, ajouter des coffrets d’urgence aux unités de soins critiques pour pallier les pannes, procéder au remplissage des chariots de trauma à partir du CAD en mode hors profil plutôt qu’au nom du patient compte tenu de leur utilisation limitée en cas de véritables urgences. De même, les écarts organisationnels requièrent des changements de pratique nécessitant quelques mois (p. ex. mise en place d’une gestion centralisée des accès, développement d’un processus efficace d’audits et de rapports avec maîtrise de la technologie).

Enfin, précisons que cette analyse de conformité ne permet pas de mener une analyse pharmacoéconomique de la technologie de CAD. D’autres travaux sont en cours pour en préciser les coûts et les conséquences au sein de notre établissement.

Limites

Cette étude descriptive comporte des limites. Il s’agit d’une évaluation de conformité de l’AcuDose-Rx à deux dates rapprochées dans le temps. Une évaluation répétée après 12 et 24 mois d’utilisation est sans doute nécessaire si l’on veut constater les progrès obtenus tant sur le plan technologique qu’organisationnel. De même, cette évaluation ne permet pas de comparer la conformité d’autres équipements (Pyxis Medstation, etc.). De plus, l’évaluation de la conformité aux lignes directrices de l’ISMP ne suffit pas pour rassembler suffisamment d’information sur les écarts technologiques et organisationnels. Des rencontres périodiques du comité local du circuit du médicament ont été et seront nécessaires afin d’identifier les problèmes et les solutions. Une liste de ces écarts a d’ailleurs été transmise à un comité provincial d’usagers. Nous pensons que ce type de comité (local et provincial) devrait être permanent lorsque de telles technologies sont introduites dans le circuit du médicament hospitalier.

CONCLUSION

Cette étude décrit la conformité des pratiques au CHUSJ par rapport à des lignes directrices publiées par l’ISMP. L’utilisation de lignes directrices dans le cadre de l’implantation de cabinets automatisés décentralisés en établissement peut aider à guider les actions tant sur le plan technologique qu’organisationnel.

Acknowledgments

Nous tenons à remercier l'équipe technique du département de pharmacie, le personnel soignant, et l'équipe des services techniques et informatiques.

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Articles from The Canadian Journal of Hospital Pharmacy are provided here courtesy of Canadian Society of Healthcare-Systems Pharmacy

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