Résumé
Objectif
Résumer les données qui rappellent la nécessité d’améliorer le traitement pharmacologique de l’hypertension chez les diabétiques de type 2 et de fournir des conseils d’experts sur la façon d’améliorer le traitement de la tension artérielle (TA) en contexte de soins primaires.
Source de l’information
À partir d’études recueillies grâce à une revue systématique de la littérature sur l’hypertension et le diabète, on a élaboré et révisé des recommandations et on les a soumises au vote d’un groupe d’experts du Programme éducatif canadien sur l’hypertension et de l’Association canadienne du diabète; on a également tenu compte de l’opinion avisée des auteurs sur le traitement pharmacologique optimal.
Principal message
La pathogénie de l’hypertension chez les diabétiques est complexe et fait intervenir plusieurs facteurs biologiques et environnementaux, ainsi qu’une prédisposition génétique; par conséquent, l’hypertension du diabétique présente un plus grand danger de problèmes et de complications. Les diabétiques qui n’obtiennent pas un contrôle de la TA (c’est-à-dire une valeur cible de moins de 130/80 mm Hg) ont un taux de mortalité et de morbidité plus élevé. De vastes essais cliniques randomisés et des méta-analyses d’essais cliniques randomisés ont montré qu’à elle seule, une réduction pharmacologique de la TA est la façon la plus efficace de réduire les taux de décès et d’incapacité chez le diabétique, notamment le risque de problèmes cardiovasculaires. Pour que le traitement soit efficace, il est souvent nécessaire d’utiliser deux médicaments ou plus (diurétiques, inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, β–bloqueurs, bloqueurs des récepteurs de l’angiotensine, bloqueurs des canaux calciques, spironolactone, etc.), en particulier chez les patients dont la TA est difficile à contrôler. Toutefois, les coûts de santé engendrés par une réduction importante de la TA sont considérablement moindres que ceux associés au traitement des complications qui peuvent être prévenues par l’abaissement de la TA.
Conclusion
La détection et le traitement de l’hypertension chez le diabétique sont parmi les mesures les plus efficaces pour prévenir les complications tandis que la pharmacothérapie est une des façons les plus efficaces pour maintenir des niveaux cibles de TA en contexte de soins primaires.
Abstract
Objective
To summarize the evidence for the need to improve pharmacologic management of hypertension in people with type 2 diabetes and to provide expert advice on how blood pressure (BP) treatment can be improved in primary care.
Sources of information
Studies were obtained by performing a systematic review of the literature on hypertension and diabetes, from which management recommendations were developed, reviewed, and voted on by a group of experts selected by the Canadian Hypertension Education Program and the Canadian Diabetes Association; authors’ expert opinions on optimal pharmacologic management were also considered during this process.
Main message
The pathogenesis of hypertension in patients with diabetes is complex, involving a range of biological and environmental factors and genetic predisposition; as a result, hypertension in people with diabetes incurs higher associated risks and adverse events. Mortality and morbidity are heightened in diabetes patients who do not achieve BP control (ie, a target value of less than 130/80 mm Hg). Large randomized controlled trials and meta-analyses of randomized controlled trials have shown that reducing BP pharmacologically is single-handedly the most effective way to reduce rates of death and disability in patients with diabetes, particularly associated cardiovascular risks. Often, combinations of 2 or more drugs (diuretics, angiotensin-converting enzyme inhibitors, β-blockers, angiotensin receptor blockers, calcium channel blockers, spironolactone, etc) are required for pharmacotherapy to be effective, particularly for patients in whom BP is difficult to control. However, the health care costs associated with extensively lowering BP are substantially less than the costs associated with treating the complications that can be prevented by lowering BP.
Conclusion
Detecting and managing hypertension in people with diabetes is one of the most effective measures to prevent adverse events, and pharmacotherapy is one of the most effective ways to maintain target BP levels in primary care.
La tension artérielle (TA) élevée est un facteur de risque important de mortalité et d’incapacité, en particulier chez les personnes atteintes de diabète. Au cours des dernières années, l’incidence de l’hypertension et du diabète chez les adultes canadiens a connu une hausse substantielle1. Près de 6 millions de Canadiens adultes ont reçu un diagnostic d’hypertension en 2007 (une augmentation de 52 % par rapport à la période de 1997 à 1998) et le diabète de type 2 était diagnostiqué chez environ 2 millions de Canadiens entre 2006 et 2007 (une hausse de 25 % par rapport à la période de 2002 à 2003)1,2. Entre 2007 et 2008, plus de 1 million de Canadiens souffraient à la fois d’hypertension et de diabète diagnostiqués, ce qui représente 1 Canadien sur 4 ayant de l’hypertension et 2 tiers des personnes diabétiques1. Les taux de mortalité chez les Canadiens ayant un diagnostic d’hypertension et de diabète sont 2,5 fois plus élevés que chez les Canadiens qui ne souffrent d’aucun de ces problèmes1. Les caractéristiques cliniques du diabète et de l’hypertension chez les diabétiques se trouvent au Tableau 13.
Tableau 1.
CONDITION | CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES |
---|---|
Diabète | Taux de glycémie veineuse à jeun de > 7 mmol/l; glycémie veineuse aléatoire de > 11,1 mmol/l, avec symptômes du diabète; ou glycémie veineuse 2 heures après le repas de > 11,1 mmol/l |
Hypertension chez les diabétiques | Valeur de TA systolique > 130 mm Hg ou valeur de TA diastolique de > 80 mm Hg |
TA—tension artérielle
Données provenant du Comité d’experts sur les lignes directrices de pratique clinique de l’Association canadienne du diabète3
La plupart (de 60 % à 80 %) des personnes atteintes de diabète de type 2 meurent de complications cardiovasculaires et jusqu’à 75 % des complications cardiovasculaires spécifiques ont été attribuées à une TA élevée (Tableau 2)4,5. L’hypertension est aussi un principal facteur contributif de l’insuffisance rénale et des maladies oculaires chez les diabétiques6,7. Une récente enquête en Ontario a démontré une nette amélioration dans le contrôle de la TA chez les personnes hypertendues avec ou sans diabète8,9; le traitement amélioré de l’hypertension au Canada a été associé à une réduction marquée de la mortalité et des hospitalisations attribuables aux maladies cardiovasculaires10,11. Pourtant, environ les deux tiers des diabétiques n’atteignent pas les valeurs cibles de la TA (c’est-à-dire moins de 130/80 mm Hg), une proportion bien plus élevée que chez les non-diabétiques9.
Tableau 2.
COMPLICATION | RISQUE ATTRIBUABLE, % |
---|---|
Accident vasculaire cérébral | 75 |
Coronaropathie | 35 |
Néphropathie en phase terminale | 50 |
Maladies de l’œil† | 35 |
Amputation d’une jambe | 35 |
En 2009, le Collège des médecins de famille du Canada a donné son aval à un appel à l’action pour améliorer le contrôle de la TA chez les personnes diabétiques. Il s’agit clairement d’une situation à améliorer en priorité, ce qui devrait entraîner de grandes réductions des taux de mortalité et d’incapacité, ainsi que des coûts des soins de santé. Cet article résume les données factuelles à l’appui de la nécessité d’améliorer le traitement pharmacologique de l’hypertension chez les diabétiques de type 2 et présente des conseils d’experts sur la façon d’améliorer le traitement de la TA.
Qualité des données probantes
Dans la présente révision, les données probantes sont tirées du processus de développement des recommandations du Programme éducatif canadien sur l’hypertension (PECH). Depuis 1999, le programme examine chaque année les ouvrages scientifiques sur l’hypertension et les sujets connexes et n’a pas cessé d’évoluer en augmentant toujours le nombre de ses membres et de ses activités12,13. Un sous-groupe d’experts (7 membres en 2009), sélectionnés par l’Association canadienne du diabète et le Comité de direction du PECH, choisit des études en se fondant sur une recherche documentaire effectuée par un bibliothécaire de Cochrane et élabore une ébauche de recommandations à l’aide d’un système de cotation et de classification fondé sur des données scientifiques. Le comité central d’examen (7 membres en 2009) procède ensuite à l’étude de la synthèse des ouvrages avec leurs références et des recommandations proposées14. Les membres du comité central d’examen sont des spécialistes en méthodologie qui n’ont aucun conflit d’intérêts financiers. Le comité central d’examen et le sous-groupe d’experts négocient les divergences d’opinions dans l’interprétation de la documentation et les éventuelles recommandations. Un membre du comité central d’examen présente la documentation et les recommandations au groupe de travail sur les recommandations du PECH (56 membres en 2009) et on en arrive à un consensus sur les recommandations possibles. Ces recommandations sont ensuite présentées à une assemblée nationale ouverte et soumises au vote du groupe de travail sur les recommandations; celles qui reçoivent moins de 70 % des votes sont rejetées. On a intégré une série de mesures dans le processus pour réduire l’influence de conflits d’intérêts financiers, ce qui est une priorité du PECH13.
Il y a une forte tradition de n’appuyer les recommandations pharmacologiques que sur des données probantes étayant de meilleurs résultats chez les patients, tirées d’études contrôlées randomisées ou de méta-analyses. Par ailleurs, les recommandations concernant le diabète présentées dans cette synthèse comportent des conseils spécifiques sur la façon de combiner des médicaments qui s’appuient à la fois sur les opinions d’experts des auteurs et les concepts généraux venant des publications du PECH qui concernent la combinaison des traitements.
Principales constatations
Les mécanismes expliquant les risques accrus d’une TA élevée chez les personnes diabétiques
La pathogénie de l’hypertension dans le diabète est complexe et fait intervenir de fortes interactions entre la prédisposition génétique et divers facteurs environnementaux et biologiques, comme une mauvaise alimentation, la sédentarité, la rétention de calcium, l’obésité abdominale, les déséquilibres neurovégétatifs, le durcissement artériel prématuré et la dysfonction endothéliale. Non seulement les patients diabétiques sont-ils plus enclins à avoir une hypertension concomitante, mais chaque valeur donnée de la TA systolique est associée à une augmentation de plus du double des taux de mortalité cardiovasculaire ajustés selon l’âge15. Par exemple, un patient diabétique qui a une TA systolique se situant entre 120 et 139 mm Hg a un taux de mortalité cardiovasculaire semblable à celui d’un patient non diabétique dont la TA systolique se situe entre 160 et 179 mm Hg. La cause exacte de la morbidité et de la mortalité accrues associées avec l’hypertension chez les diabétiques sans tenir compte d’autres facteurs de risque demeure nébuleuse. Cependant, l’absence fréquente de la baisse nocturne habituelle de la TA chez les patients diabétiques contribue probablement à cette situation. Malgré des lectures diurnes semblables de la TA en cabinet et à la maison, une personne dont la TA nocturne ne baisse pas aura des valeurs plus élevées de TA sur 24 heures et pendant la nuit, ces dernières en particulier étant de forts facteurs de prédiction de décès cardiovasculaire16.
Certaines données probantes à l’appui de la réduction de la TA au moyen d’une pharmacothérapie chez les personnes atteintes du diabète de type 2
La réduction de la TA chez les diabétiques par la pharmacologie est l’une des interventions médicales les plus efficaces disponibles pour prévenir la mortalité et l’incapacité. Des études randomisées contrôlées sur les traitements antihypertenseurs chez les diabétiques ont démontré des réductions substantielles dans les taux de décès, de maladies cardiovasculaires, de maladies de l’œil et de néphropathies, ainsi qu’une rapidité dans l’apparition des bienfaits6,7,17–21. Par exemple, l’étude Syst-Eur (Hypertension systolique en Europe), dans laquelle l’hypertension systolique isolée était définie cliniquement comme étant une valeur de TA systolique de plus de 160 mm Hg et une valeur de TA diastolique de moins de 90 mm Hg, a démontré qu’un traitement actif réduisait de 76 % la mortalité cardiovasculaire (le nombre nécessaire à traiter [NNT] était d’environ 21 pour un traitement de 2 ans), et de 67 % tous les accidents cardiovasculaires (NNT d’environ 13 pour un traitement de 2 ans) et ce, en réduisant la TA de 9,8/3,8 mm Hg22. Dans le sous-groupe des sujets diabétiques de l’étude HOT (Hypertension Optimum Treatment), on a comparé les sujets classés dans la catégorie visant une TA diastolique de moins de 80 mm Hg à ceux qui avaient pour objectif une TA de moins de 90 mm Hg. Même si la différence obtenue dans les valeurs de la TA entre les 2 groupes à la fin de l’étude n’était que de 4 mm Hg, cette plus grande réduction dans la TA s’est quand même traduite par une réduction de 66 % du risque de décès dû à une maladie cardiaque et à l’AVC (NNT d’environ 36 pour un traitement de 3,8 ans)23. Dans une méta-analyse d’études randomisées contrôlées sur des sujets diabétiques souffrant d’hypertension, une réduction plus intensive, par comparaison à un abaissement moins intensif de la TA, a permis de réduire les valeurs de la TA par 6/4 mm Hg additionnels et de diminuer de 27 % la mortalité totale (intervalle de confiance à 95 % de 5 % à 44 %) et de 25 % les accidents cardiovasculaires majeurs (intervalle de confiance à 95 % de 6 % à 39 %)24. L’utilisation d’un régime thérapeutique avec des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (ECA) ou des bloqueurs des récepteurs de l’angiotensine (BRA) pour réduire la TA avait des avantages additionnels pour les personnes atteintes de maladies chroniques du rein et de microalbuminurie ou de macroalbuminurie24.
Les sujets diabétiques dans l’étude clinique mentionnée ci-dessus avaient souvent des risques cardiovasculaires additionnels qui n’étaient pas traités aussi intensivement que ce qui est actuellement recommandé en pratique clinique. On a émis l’hypothèse que ces caractéristiques pourraient augmenter les avantages absolus (mais non pas les avantages relatifs) d’un traitement contre l’hypertension, entraînant un NNT plus faible que ce qui se produirait normalement. Plus particulièrement, on s’attendrait à ce qu’un plus grand nombre de diabétiques à risques cardiovasculaires plus faibles (diagnostiqués récemment ou plus jeunes, ceux n’ayant pas de risques cardiovasculaires additionnels et ceux ayant des valeurs repères de TA plus basses) aient besoin d’un traitement pour prévenir les événements calculés à partir des études cliniques indiquées. Néanmoins, les bienfaits d’un traitement contre l’hypertension ont été documentés dans de récentes études et même dans une étude clinique qui incluait des personnes ayant des valeurs repères de TA de moins de 130/80 mm Hg20. De plus, de nombreux Canadiens atteints de diabète ne reçoivent toujours pas de traitement adéquat pour d’autres facteurs de risque cardiovasculaire établis, comme la dyslipidémie25.
Tout récemment, on a publié les résultats de l’étude ACCORD (Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes), dans laquelle on choisissait au hasard des sujets diabétiques devant viser une valeur de TA systolique donnée, soit de moins de 140 mm Hg ou encore de moins de 120 mm Hg26,27. Les principaux résultats mesurés (un ensemble composé d’infarctus du myocarde, d’AVC et de décès cardiovasculaire) n’étaient pas significativement différents d’une intervention à l’autre. Le taux d’AVC a été réduit (0,21 % de moins de risque absolu d’AVC par année, réduction du risque relatif de 41 %), mais les effets indésirables sérieux étaient plus élevés (augmentation du risque absolu de 1,3 % à 3,3%, principalement attribuable à l’hypotension, aux syncopes, à la bradycardie et à l’hyperkaliémie durant l’étude de 5 ans) dans le groupe qui visait une valeur de TA systolique de moins de 120 mm Hg. Le PECH et l’Association canadienne du diabète doivent examiner l’effet de l’étude ACCORD sur les recommandations de valeurs cibles de la TA chez les personnes diabétiques, mais il convient de faire remarquer que l’étude ACCORD n’évaluait pas l’influence d’une prise en charge contre l’hypertension sur les valeurs de la TA actuellement recommandées de moins de 130/80 mm Hg. Les recommandations mises à jour et une synthèse critique des données probantes se trouvent à www.hypertension.ca.
Pharmacothérapie initiale selon les recommandations du PECH
Un inhibiteur de l’ECA ou un BRA est une thérapie de première intention potentielle pour toutes les personnes souffrant d’hypertension et de diabète14. Parmi les autres traitements de premier recours, on peut mentionner les bloqueurs des canaux calciques (BCC) à action prolongée et des diurétiques à faible dose pour les personnes qui ne font pas de microalbuminurie14. La thérapie aux diurétiques réduit les accidents cardiovasculaires majeurs chez les personnes hypertendues atteintes ou à risque de diabète dans une mesure semblable à celle des BCC à action prolongée ou des inhibiteurs de l’ECA28. Il faudrait envisager une association de 2 médicaments comme thérapie initiale si la TA est de 150/90 mm Hg ou plus élevée.
Conseils d’experts sur une pharmacothérapie combinée pour contrôler l’hypertension
Une enquête réalisée en Ontario révélait que 27 % des patients diabétiques qui avaient une TA non contrôlée n’étaient pas traités et que seulement 45 % de ceux qui prenaient des médicaments multiples avaient une prescription de diurétiques8. Selon les données actuelles, l’omission d’intensifier la pharmacothérapie est la principale cause du manque de contrôle de la TA. Dans les études cliniques, des associations de 4 médicaments ou plus sont parfois nécessaires pour le contrôle de la TA29. Les médecins qui soignent des personnes hypertendues et diabétiques doivent savoir aisément individualiser des régimes antihypertenseurs complexes selon le profil clinique de leurs patients.
Association de 2 médicaments.
En général, les médicaments prescrits en association devraient être choisis à partir des options thérapeutiques initiales. Une exception importante est la combinaison d’un inhibiteur de l’ECA avec des BRA, qui a plus d’effets indésirables qu’une thérapie aux inhibiteurs de l’ECA seulement et n’a pas d’avantage thérapeutique si on la compare à l’utilisation de l’un ou l’autre des médicaments individuellement30,31. En tant que telle, une thérapie combinant un inhibiteur de l’ECA avec des BRA n’est spécifiquement pas recommandée à moins qu’il y ait une macroalbuminurie ou une insuffisance cardiaque résistante pour laquelle cette association pourrait apporter des avantages additionnels. Des études démontrent que, chez les personnes hypertendues à risque cardiovasculaire élevé en raison du diabète ou de d’autres maladies, la réduction du risque d’accidents cardiovasculaires est plus grande quand le traitement combine un inhibiteur de l’ECA avec des BCC plutôt qu’un inhibiteur de l’ECA avec un diurétique32; les médecins devraient envisager cette combinaison avec des patients à risque élevé14.
Association de 3 et 4 médicaments
En l’absence de contre-indications, les diurétiques sont généralement à conseiller chez les patients dont la TA est difficile à contrôler33; il faut souvent des doses plus fortes de médicaments diurétiques dans les cas d’hypertension résistante34. Il importe de maintenir un taux de potassium sérique normal pour minimiser l’effet des diurétiques sur les taux de glycémie et pour maximiser les réductions d’accidents cardiovasculaires35,36. Des associations d’antihypertenseurs puissants en 3 comprimés (4 médicaments) incluent habituellement un comprimé contenant un diurétique et soit un inhibiteur de l’ECA ou un BRA, plus deux des comprimés suivants: un comprimé contenant un BCC à action prolongé; un comprimé contenant de la spironolactone; ou un comprimé contenant un β-bloqueur à action prolongée. Il est recommandé de surveiller périodiquement le potassium sérique si on prescrit de la spironolactone, en particulier si les taux de potassium sérique se situent dans la fourchette supérieure des valeurs normales, si le taux de filtration glomérulaire est réduit ou s’il y a usage concomitant d’autres médicaments pouvant causer une réduction du potassium.
Même s’il faut des médicaments multiples pour contrôler la TA, la réduction substantielle de la TA chez les diabétiques est l’une des très rares interventions médicales permettant d’économiser (c’est-à-dire que le coût de l’abaissement de la TA chez les diabétiques est moins élevé que celui de traiter les complications que permet de prévenir la baisse de la TA)37. De plus, la qualité de vie peut s’améliorer avec une réduction plus intensive de la TA38. Il y a lieu de considérer une demande de consultation auprès d’un autre spécialiste ou d’un médecin de première ligne spécialisé dans la réduction de la TA s’il n’est pas possible de contrôler la TA.
Les personnes atteintes de diabète et d’hypertension ont habituellement d’autres facteurs de risque cardiovasculaire
Même si l’hypertension est un important facteur de risque chez les personnes diabétiques, d’autres risques pour la santé importent tout autant. Les experts recommandent d’évaluer et de prendre en charge adéquatement les personnes hypertendues et diabétiques en ce qui a trait à la dyslipidémie, au tabagisme, aux taux élevés de glycémie, à l’obésité abdominale, à la sédentarité et aux habitudes alimentaires malsaines. Les changements au style de vie et la conformité à la médication demeurent la pierre angulaire de l’atteinte et du maintien des valeurs cibles de la TA. Les données actuelles ne sont pas convaincantes quant au rôle de l’acide acétylsalicylique (AAS) chez les personnes atteintes de diabète et d’hypertension. Dans l’étude HOT, les personnes atteintes d’hypertension ont bénéficié d’une thérapie à l’AAS, notamment une réduction des accidents cardiovasculaires23. Toutefois, dans des études sur des sujets diabétiques, il n’y a pas de bienfaits suffisants à tirer d’une thérapie à l’AAS dans la prévention primaire des maladies cardiovasculaires39–41. Enfin, un programme complet qui inclut des modifications au mode de vie et une pharmacothérapie pour des facteurs de risque multiples a été associé à une réduction de plus de 40 % dans la mortalité totale sur une période de 8 ans (NNT de 5 pour prévenir le décès), ce qui met en évidence l’importance de programmes intégrés qui évaluent et prennent en charge tous les risques cardiovasculaires42.
Conclusion
La détection et la prise en charge de l’hypertension chez les patients diabétiques représentent les mesures les plus efficaces pour prévenir les événements indésirables. Tous les professionnels de la santé doivent redoubler d’efforts pour améliorer les taux de contrôle de l’hypertension chez les patients diabétiques. Les effets d’une amélioration du contrôle de la TA sur les taux de mortalité et d’accidents cardiovasculaires sont substantiels et se traduisent par des économies de coûts pour le système de santé. Pour aider les médecins, les infirmières, les pharmaciens et les autres professionnels de la santé à prendre en charge de manière plus cohérente l’hypertension chez les patients diabétiques, la Fondation des maladies du cœur du Canada et l’Association canadienne du diabète élaborent des programmes de transposition du savoir à leur intention, ainsi que pour les personnes atteintes de diabète. Les professionnels de la santé peuvent être automatiquement avisés par courriel des ressources nouvelles ou mises à jour en s’abonnant à www.htnupdate.ca et les personnes atteintes de diabète peuvent recevoir des mises à jour en s’inscrivant à www.myBPsite.ca. Les recommandations mises à jour et les analyses des données probantes se trouvent à www.hypertension.ca.
Acknowledgments
Les auteurs tiennent à remercier Selina Omar Allu qui a minutieusement revu et révisé le manuscrit.
POINTS DE REPÈRE
Au Canada, plus d’un million d’adultes diabétiques sont également hypertendus, et chez les deux tiers d’entre eux, la tension artérielle (TA) est mal contrôlée; ces patients ont un risque accru de problèmes cardiovasculaires et d’accidents vasculaires cérébraux. Une réduction de la TA d’au moins 6/4 mm Hg diminue le taux global de mortalité prématurée d’environ 25 %; toutefois, cela requiert souvent 3 médicaments ou plus et même dans ce cas, plusieurs patients n’atteignent pas les niveaux cibles de TA.
Néanmoins, une réduction pharmacologique dela TA est une des rares interventions médicales à diminuer les coûts globaux de la santé et à s’être montrées en mesure de produire une importante réduction des taux de mortalité et d’incapacité. Les professionnels de la santé devraient redoubler d’efforts pour contrôler la TA chez les diabétiques, et les médecins devraient être à l’aise avec un traitement individualisé comprenant plusieurs antihypertenseurs; le site www.htnupdate.ca est susceptible d’aider les médecins et les patients.
KEY POINTS
More than 1 million Canadian adults have both diabetes and hypertension, two-thirds of whom have uncontrolled blood pressure (BP); these individuals are at increased risk of cardiovascular events and stroke. More intensive reduction of BP, by at least 6/4 mm Hg, reduces overall premature mortality rates by about 25%; however, 3 or more drugs are often required, and even then many patients do not reach the intended BP target levels. Nonetheless, reducing BP pharmacologically is one of the few medical therapies that decreases overall health care costs and that has been shown to result in large reductions in rates of death and disability. Health care professionals should redouble their efforts to control BP in people with diabetes, and physicians should be comfortable individualizing complex multidrug antihypertensive regimens; resources to assist physicians and patients are available online at www.htnupdate.ca.
Footnotes
Cet article donne droit à des crédits Mainpro-M1. Pour obtenir des crédits, allez à www.cfp.ca et cliquez sur le lien vers Mainpro.
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
Intérêts concurrents
Dr Gilbert a agi comme membre de conseils consultatifs, a reçu des subventions de recherche d’AstraZeneca, Bristol-Myers Squibb et Novartis et donné des conférences pour ces entreprises. Dr Leiter a reçu des subventions de recherche d’Abbott Laboratories, AstraZeneca, Boehringer Ingelheim, Eli Lilly, GlaxoSmithKline, Merck, Novartis, Novo Nordisk, Roche, Sanofi-Aventis et Servier, a présenté des séances de formation médicale continue en leur nom ou a agi en tant que consultant auprès d’elles. Dr Larochelle a reçu du soutien pour la formation continue et des subventions de recherche de Pfizer, Merck, Boehringer Ingelheim, Servier et AstraZeneca. Dr Tobe a reçu des subventions de recherche et des honoraires de conférencier d’Abbott Laboratories, Bayer, Boehringer Ingelheim, Bristol-Myers Squibb, Janssen, Merck, Novartis, Pfizer, Sanofi-Aventis et Servier. Dr Ward a reçu du financement d’AstraZeneca, Boehringer Ingelheim, Merck, Novo Nordisk, Sanofi-Aventis et Pfizer. Aucun des autres auteurs n’avait d’intérêts concurrents à déclarer.
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