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The Canadian Journal of Infectious Diseases & Medical Microbiology = Journal Canadien des Maladies Infectieuses et de la Microbiologie Médicale logoLink to The Canadian Journal of Infectious Diseases & Medical Microbiology = Journal Canadien des Maladies Infectieuses et de la Microbiologie Médicale
. 2007 Jan-Feb;18(Suppl A):19A–20A. [Article in French]

Stratégie de traitement : Rôle de l’enfuvirtide dans la prise en charge des effets secondaires limitant le traitement

Christos Tsoukas 1,
PMCID: PMC3555495

Abstract

Les effets secondaires peuvent limiter les options s’offrant aux médecins dans le traitement de l’infection par le VIH. La prise en charge de ces effets secondaires est essentielle afin d’éviter l’arrêt du traitement. L’enfuvirtide, un inhibiteur de la fusion du VIH, peut être utile en tant qu’un des trois agents actifs du traitement antirétroviral. Ce peut être une façon de réduire les effets secondaires limitant le traitement et d’avoir un agent efficace pour le contrôle viral. Dans le cas présent, le patient avait des antécédents de traitements longs et problématiques, avec de nombreuses affections concomitantes. Son dernier schéma thérapeutique en date, qui comprend un agent d’une nouvelle classe thérapeutique, l’enfuvirtide, a maintenu la suppression du VIH tout en minimisant la toxicité.

Keywords: Antirétroviraux, inhibiteurs de la fusion du VIH, infection par le VIH


Les effets secondaires limitant le traitement peuvent forcer les cliniciens à faire des choix thérapeutiques non optimaux relativement au contrôle viral dans leur tentative de prise en charge des manifestations indésirables afin d’éviter l’arrêt complet du traitement. Passer d’un agent antirétroviral toxique à l’enfuvirtide (inhibiteur de la fusion du VIH) comme un des trois agents, au minimum, du traitement contre le VIH peut aider à réduire les effets secondaires limitant le traitement du fait du profil d’innocuité favorable de l’enfuvirtide (1). Le cas suivant décrit l’application de cette approche à la prise en charge d’un patient ayant des antécédents de traitement problématiques. Au cours des 11 années de son traitement contre l’infection par le VIH, ses schémas thérapeutiques ont été modifiés en raison d’effets secondaires limitant les médicaments ainsi que de troubles infectieux, métaboliques, neurologiques, iatrogènes, allergiques, oncologiques et psychiatriques concomitants.

PRÉSENTATION DU CAS

Le patient, un homme de 61 ans, a reçu un diagnostic de séropositivité pour le VIH en 1985. À cette époque, on a aussi diagnostiqué chez lui un carcinome basocellulaire du visage. Étant asymptomatique, il n’a pas reçu de traitement antirétroviral avant 1995, date à laquelle il a commencé à prendre la zidovudine (ZDV) et la zalcitabine (ddC). Sa numération des CD4 à l’époque était de 30 cellules/mm3.

Le patient a dû arrêter le traitement par la zalcitabine après six mois en raison d’une neuropathie périphérique l’ayant obligé à arrêter de travailler. En 1996, il a présenté une pneumonie à Pneumocystis jiroveci, une candidose orale et une infection à Mycobacterium avium associée à une lymphadénopathie généralisée. Il a alors commencé un protocole expérimental d’une durée de six mois au cours duquel il a reçu l’indinavir en monothérapie. Sa numération des CD4 était à 10 cellules/mm3. En dépit de la monothérapie, il a obtenu une excellente réponse au traitement.

En juin 1996, sa charge virale était devenue indécelable et sa numération des CD4 était de 80 cellules/mm3. Une trithérapie par la lamivudine (3TC), l’indinavir et le ZDV a été instaurée, car il s’agissait de la norme de traitement à l’époque. L’année suivante, sont apparues chez lui une dépression et une arthrose, et en 2000, il présentait une neuropathie périphérique grave.

Il a continué la trithérapie jusqu’en avril 2002. Sa numération des CD4 a progressivement augmenté, passant de 10 cellules/mm3 en 1996 à environ 500 cellules/mm3 en 2002. À ce point, son ARN viral du VIH-1 était indécelable.

En avril 2002, dans le but de simplifier son traitement, l’indinavir a été interrompu et l’association 3TC/ZDV a été changée pour l’association abacavir/3TC/ZDV (Trizivir, GlaxoSmithKline). Le patient a ensuite présenté une allergie à l’abacavir, compliquée par une pneumonite liée à l’abacavir. Tous les antirétroviraux ont alors été interrompus. La numération des CD4 a baissé à 165 cellules/mm3 et la charge virale a augmenté à 37 000 copies/mL.

Entre juillet 2002 et janvier 2003, un traitement par la névirapine et l’association 3TC/ZDV a été instauré. Toutefois, ce traitement n’était pas efficace, et la numération des CD4 a continué de baisser, atteignant 68 cellules/mm3, tandis que la charge virale restait la même. Le génotypage effectué en décembre 2002 a révélé que le patient avait une résistance significative aux agents nucléosidiques, avec de multiples mutations liées à la thymidine ainsi qu’une mutation G190S, correspondant à une résistance à la névirapine et à l’efavirenz mais pas à la delavirdine. Contrairement aux constatations génotypiques relatives au virus de ce patient, il ne semblait pas y avoir de mutations liées aux inhibiteurs de la protéase.

En mars 2003, le patient a commencé à prendre l’hydroxyurée (Hydrea, Bristol-Myers Squibb Canada), l’association lopinavir/ritonavir, la delavirdine (Rescriptor, Agouron Pharmaceuticals Canada Inc.) et la didanosine (ddI), mais a présenté une fois encore une allergie, cette fois-ci à la delavirdine. Sa numération des CD4 a chuté à 42 cellules/mm3 et sa charge virale était décelable, à 2 600 copies/mL.

Entre avril 2003 et juillet 2005, il a commencé un traitement associant le lopinavir, le ritonavir, le ddI et le d4T. Sa charge virale est devenue indécelable, à moins de 50 copies/mL, et sa numération des CD4 a augmenté à 272 cellules/mm3. Toutefois, son évolution a été compliquée par une diarrhée et une fatigue grave.

En 2005, le patient a présenté un ulcère anal, diagnostiqué par la suite comme étant un carcinome anal. Il a eu besoin d’une radiothérapie étendue afin de maîtriser le carcinome anal.

En juillet 2005, en raison d’une diarrhée continue (non liée à la radiothérapie), l’association lopinavir/ritonavir a été arrêtée et le patient est passé à l’atazanavir potentialisé (Reyataz, Bristol-Myers Squibb Canada), qu’il a pris jusqu’en août 2005. Il a dû ensuite arrêter tout antirétroviral en raison d’une acidose lactique provoquée par la prise concomitante du ddI et du d4T. Sa numération des CD4 à l’époque avait chuté à 120 cellules/mm3 et sa charge virale avait de nouveau augmenté à 37 000 copies/mL.

Il n’a pris aucun traitement jusqu’en septembre 2005, date à laquelle un traitement à base de lopinavir plus ritonavir, de d4T et de ddI a été instauré. L’atazanavir n’a pas été réadministré. Sa numération des CD4 a continué de baisser, atteignant 50 cellules/mm3, mais sa charge virale est devenue indécelable.

Il a continué de présenter une diarrhée et une neuropathie et, pour cette raison, à partir de janvier 2006, on a changé l’association lopinavir/ritonavir pour le fosamprénavir (Telzir, GlaxoSmithKline Inc.) et le ritonavir à 100 mg deux fois par jour.

En mars 2006, le patient a de nouveau présenté une acidose lactique liée à l’administration concomitante de ddI et de d4T, même si sa charge virale restait indécelable et sa numération des CD4 était à 78 cellules/mm3. À cette même époque, le taux d’ARN du VIH du patient étant inférieur à 50 copies/mL, le ddI a été arrêté et remplacé par l’enfuvirtide. Le patient a continué de prendre le fosamprénavir et le d4T, et a indiqué qu’il était moins fatigué, qu’il n’avait plus de diarrhée et que la neuropathie avait diminué au cours des trois mois suivants. Son état a continué de s’améliorer et, en décembre 2006, sa numération des CD4 avait augmenté à 280 cellules/mm3 et sa charge virale continuait d’être indécelable. Son génotype de résistance aux médicaments contre le VIH n’a pas évolué dans le temps.

Il faut noter que ce patient avait eu pendant six ans une excellente observance à son traitement antirétroviral hautement actif initial et ce, en dépit des traitements antérieurs complexes nécessitant trois prises par jour. Ses problèmes ont commencé lorsque le médecin a essayé de simplifier son traitement, avec la conséquence malheureuse de la survenue de multiples allergies à ses antirétroviraux. Le manque relatif d’options en termes d’inhibiteurs nucléosidiques a entraîné le maintien de l’association neurotoxique du ddI et du d4T, qui a aussi provoqué une acidose lactique, complication grave de cette association médicamenteuse. En dépit du fait que l’infection par le VIH a été maîtrisée par une association de fosamprénavir, de ritonavir, de ddI et de d4T, la capacité à maintenir un tel traitement a été compromise par la récurrence de l’acidose lactique et la persistance de la neuropathie et de la diarrhée. L’utilisation de l’enfuvirtide dans cette situation en remplacement d’un des agents toxiques a entraîné une amélioration de l’état de santé général du patient, avec la réduction de la diarrhée et de la neuropathie ainsi que l’absence d’acidose lactique.

Le remplacement du d4T dans le schéma thérapeutique de ce patient est aussi prévu afin de prévenir les complications à long terme continues associées à ce nucléoside.

COMMENTAIRES

Le traitement et les antécédents médicaux de ce patient ne sont pas rares chez les patients de plus de 50 ans présentant une infection par le VIH de longue date. Son traitement a été instauré tard dans le cours de la maladie, augmentant la probabilité de complications, y compris de cancer. Les passages à de nouveaux traitements, justifiés par différentes raisons, visaient à parvenir à un contrôle virologique. Rétrospectivement, la décision de simplifier le traitement fut malheureuse, mais le lien entre la suppression virale inadéquate et la résistance n’était pas aussi clair qu’il l’est de nos jours. Dans cette situation complexe, le dernier traitement en date du patient s’est révélé être le moins toxique et le plus efficace. Ce cas illustre comment l’ajout d’une nouvelle classe thérapeutique visant une nouvelle cible permet de maintenir la suppression du VIH tout en minimisant la toxicité. Il souligne aussi le fait que l’enfuvirtide, même administré par injection et chez un patient dont l’ARN du VIH est inférieur à 50 copies/mL, a montré qu’il entraînait un bienfait supplémentaire grâce à l’absence de toxicité systémique.

RÉFÉRENCE

  • 1.Trottier B, Walmsley S, Reynes J, et al. Safety of enfuvirtide in combination with an optimized background of antiretrovirals in treatment-experienced HIV-1-infected adults over 48 weeks. J Acquir Immune Defic Syndr. 2005;40:413–21. doi: 10.1097/01.qai.0000185313.48933.2c. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]

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