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. 2014 Dec 15;8(11-12):e910–e912. [Article in French] doi: 10.5489/cuaj.2024

Une cause rare de dysurie chez la femme : le léiomyome de l’urètre et du col vésical

Mohamed Hicham Benazzouz *,, Karima Laadam , Younes Essatara *, Hachem El Sayegh *, Ali Iken *, Lounis Benslimane *, Ahmed Jahid , Yassine Nouini *
PMCID: PMC4277532  PMID: 25553165

Résumé

Le léiomyome de l’urètre est une tumeur bénigne rare constituée de tissus musculaires lisses. Cette tumeur se traduit par une variété de signes cliniques ; le recours à l’histologie est donc nécessaire pour poser le diagnostic. Le traitement de choix est l’exérèse chirurgicale. Aucun cas de dégénérescence maligne n’a été signalé jusqu’à présent, mais une récidive locale est possible en cas d’exérèse incomplète. Les auteurs font état d’un nouveau cas de léiomyome intéressant à la fois le col vésical et l’urètre, et se traduisant par la dysurie chez une patiente ; ils proposent également une revue de la littérature concernant cette pathologie.

Introduction

Le léiomyome de l’urètre est une tumeur bénigne rare1,2. Il s’agit d’une tumeur mésenchymateuse qui se développe aux dépens des tissus musculaires lisses. Depuis le premier cas décrit par Buttner en 19843, seule une quarantaine de cas ont été recensés dans la littérature mondiale4,5. La symptomatologie clinique n’est pas spécifique, et le diagnostic repose sur l’étude anatomopathologique. Le traitement est axé sur l’exérèse chirurgicale6. Aucun cas de dégénérescence maligne n’a été signalé jusqu’à présent710, mais des réci-dives locales après exérèse incomplète ont été décrites11,12. Nous faisons état d’une nouvelle observation de léiomyome intéressant à la fois l’urètre et le col vésical, et discutons la prise en charge de cette pathologie.

Observation

La patiente, une femme ménopausée de 66 ans sans aucun antécédent pathologique particulier, présentait depuis 7 mois une symptomatologie obstructive du bas appareil urinaire caractérisée par une dysurie d’aggravation progressive, compliquée par un épisode unique d’hématurie caillotante. L’examen clinique a révélé la présence d’une masse charnue de couleur rougeâtre au niveau du méat urétral (fig. 1).

Fig. 1.

Fig. 1

Présentation clinique du léiomyome de l’urètre : masse charnue, de couleur rougeâtre, au niveau du méat urétral.

L’urotomodensitométrie (fig. 2) réalisée chez cette patiente a mis au jour un épaississement tissulaire régulier qui semblait prendre naissance au niveau du plancher vésical, faisait saillie dans la lumière vésicale et s’étendait jusqu’à l’urètre. Ce processus couvrait une superficie de 49 × 31 mm.

Fig. 2.

Fig. 2

Coupe tomodensitométrique montrant une masse intravésicale hyperdense près du col vésical.

À la cystoscopie, on a retrouvé une masse solide, non papillaire, de couleur gris clair aux dépens de la face supérieure du col vésical et de l’urètre. Cette masse, qui rappelait un lobe médian prostatique, faisait saillie dans la lumière urétrale et l’obstruait complètement. Des signes de lutte de type « vessie à cellules et à colonnes » ont également été observés dans la vessie. Nous avons procédé à une résection transurétrale complète de la masse. L’analyse anatomopathologique (fig. 3 et fig. 4) des 25 grammes de tissus réséqués a révélé une prolifération tumorale bénigne composée de cellules musculaires lisses disposées en faisceaux enchevêtrés. L’analyse histologique a conclu à un léiomyome de l’urètre. Un mois après l’intervention, la patiente ne présentait plus de signes obstructifs du bas appareil urinaire, et l’examen clinique était normal.

Fig. 3.

Fig. 3

Paroi urétrale siège d’une prolifération de cellules fusiformes, avec différenciation des cellules musculaires lisses disposées en faisceaux entrecroisés (HE ×100).

Fig. 4.

Fig. 4

Prolifération tumorale constituée de cellules musculaires lisses sans atypies cytonucléaires (HE ×200).

Discussion

Le léiomyome de l’urètre a été décrit pour la première fois par Buttner en 19843. Depuis, seule une quarantaine de cas ont été recensés dans la littérature mondiale4,5. Il s’agit d’une tumeur bénigne rare, constituée de tissus musculaires lisses, qui touche les femmes plus que les hommes13. Cette tumeur peut survenir à n’importe quel âge, mais elle apparaît le plus souvent entre 36 et 46 ans. L’âge moyen de survenue est de 41 ans7,14. La partie proximale de l’urètre est le siège habituel de cette tumeur, mais la partie distale peut également être touchée15.

L’étiopathogénie des léiomyomes de l’urètre, comme celle des léiomyomes de la vessie, n’est pas encore bien établie. Cependant, quatre hypothèses ont été avancées16:

  1. Développement tumoral en rapport avec des perturbations hormonales ;

  2. Persistance d’un tissu embryonnaire résiduel dans l’urètre ou la vessie, qui se transforme en léiomyomes ;

  3. Transformation métaplasique du réseau vasculaire urétral ou vésical secondaire à une inflammation périvasculaire ;

  4. Infection de la musculeuse entraînant une inflammation avec développement de tumeurs bénignes.

La présentation clinique du léiomyome urétral n’est pas spécifique. Les symptômes les plus courants sont les suivants : infections urinaires ; effet de masse sur la paroi vaginale antérieure ; dyspareunie ; rétention d’urine ; plus rarement, signes irritatifs du bas appareil urinaire et hématurie macroscopique9,10,1719. Il est à préciser que, dans de nombreux cas, les léiomyomes de l’urètre peuvent rester longtemps asymptomatiques.

Le diagnostic différentiel du léiomyome urétral se fonde sur la présence d’urétrocèles, de caroncules, de diverticules de l’urètre et de tumeurs malignes de l’urètre – d’où l’intérêt de procéder à un examen clinique minutieux, complété par des examens d’imagerie et par une urétrocystoscopie. Celle-ci est l’examen clé du diagnostic, car elle permet à la fois de visualiser la tumeur et d’en faire des biopsies. L’urétrocystoscopie doit être minutieuse et inspecter toute la surface urétrale, en particulier chez la femme, dont l’urètre est court et chez qui l’on peut facilement méconnaître une masse urétrale en introduisant directement le fibroscope dans la vessie sans prendre soin de bien examiner l’urètre.

L’imagerie du léiomyome de l’urètre permet de préciser la taille de la tumeur, ses rapports avec les structures avoisinantes et le retentissement sur le haut appareil urinaire. Récemment, l’échographie endovaginale et l’IRM ont également été utilisées pour déterminer la nature bénigne de la tumeur20. Cependant, les examens d’imagerie ne peuvent remplacer l’urétrocystoscopie avec biopsie, qui reste la seule intervention permettant de poser un diagnostic de certitude.

À l’urétrocystoscopie, le léiomyome se présente le plus souvent sous la forme d’une masse bien délimitée de couleur gris clair, sessile pour les tumeurs de petite taille et pédiculée pour les tumeurs de plus grande taille21. L’analyse histologique révèle des fibres musculaires lisses réparties de manière uniforme, avec moins de neuf mitoses par champ. La présence de plus de neuf mitoses par champ oriente le diagnostic en faveur d’une tumeur maligne21,22.

Les traitements de choix sont la résection transurétrale et l’énucléation chirurgicale9,10,1719. De rares cas de récidive locale après résection transurétrale ou exérèse incomplète de la tumeur ont été recensés11,12, mais aucun cas de dégénérescence maligne n’a été signalé710. Certains auteurs proposent une simple surveillance par IRM pour les formes asymptomatiques11. L’inconvénient de cette approche est l’absence d’analyse histologique.

Conclusion

Le léiomyome de l’urètre est une tumeur bénigne rare qui touche les femmes plus que les hommes. L’absence de symptomatologie spécifique rend le diagnostic clinique difficile, si bien que le recours à l’analyse histologique est nécessaire pour poser un diagnostic définitif. L’imagerie sert essentiellement à préciser la taille de la tumeur et ses rapports avec les structures avoisinantes. Le traitement des formes symptomatiques est essentiellement chirurgical, qu’il soit effectué par énucléation ou par résection endoscopique. Aucun cas de dégénérescence maligne n’a été signalé, mais une récidive locale après exérèse incomplète reste possible. Une meilleure connaissance de l’étiopathogénie de cette maladie pourrait offrir aux patients de nouvelles perspectives thérapeutiques locales ou générales visant spécifiquement les cellules de cette tumeur.

Footnotes

Competing interests: Authors declare no competing financial or personal interests.

This paper has been peer-reviewed.

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