Skip to main content
Canadian Family Physician logoLink to Canadian Family Physician
. 2015 Oct;61(10):844–845. [Article in French]

Les pairs consultants

Le chaînon manquant dans le traitement de la douleur chronique

Fabian Schwarz 1,
PMCID: PMC4607323

La douleur chronique est un problème rencontré fréquemment en pratique générale. La douleur est une priorité mondiale en santé publique et on peut la qualifier de chronique si elle a été ressentie quotidiennement pendant 3 mois au cours des 6 mois précédents1. En 2007, la douleur chronique touchait 3,2 millions d’Australiens et représentait des coûts estimés à 34,3 millions de dollars australiens (AUD), soit environ 10 847 $ AUD par personne atteinte de douleur chronique2. Les données nord-américaines sont tout aussi étonnantes. Le Canada connaît une épidémie silencieuse de personnes souffrant de douleur chronique, selon un exposé présenté au Parlement sur la situation à cet égard au pays3.

Les omnipraticiens sont encouragés à utiliser une approche en équipe et un modèle psychosocial dans le traitement de la douleur chronique46. Toutefois, il est nécessaire d’améliorer la coordination des soins7 et les relations thérapeutiques8. Le chaînon manquant pourrait bien être un « pair consultant », qui ferait partie de l’équipe multidisciplinaire dans la communauté.

Les pairs consultants et les données probantes actuelles

L’importance du soutien par les pairs est reconnue mondialement et le Canada s’est même doté de normes pour l’accréditation et la certification du soutien par les pairs en milieu de santé mentale9.

On peut désigner comme pair consultant une personne qui a vécu avec la douleur chronique, a retrouvé sa qualité de vie et a exprimé le désir d’aider les autres. La documentation scientifique actuelle fait valoir que les pairs consultants trouvent un sens à leur vie et établissent des connexions dans leurs interventions pour aider autrui, et pourraient connaître une réduction de leur incapacité et de l’intensité de leur douleur sans qu’ils ne signalent que le bénévolat leur cause un préjudice ou un risque accru d’exacerbation de la douleur10.

Une récente révision des méthodes disponibles pour traiter la douleur chronique en soins primaires recommandait qu’on étudie davantage les « interventions à un niveau novateur du système »11. L’étude que proposaient les auteurs, portant sur la participation de pairs consultants dans la prise en charge de la douleur, appartient à cette catégorie. La consultation auprès d’un pair pourrait aussi être qualifiée de forme de « divulgation émotionnelle » qui est une intervention psychosociale reconnue pour la prise en charge de la douleur chronique12.

De récentes données probantes font valoir que l’initiative personnelle avec l’aide d’Internet aurait certains effets bénéfiques pour la douleur chronique13. Le recours à un pair consultant pourrait être catégorisé comme étant « une initiative personnelle guidée ». L’éducation interactive et la liberté d’expression peuvent influer favorablement sur le fonctionnement des participants et leurs connaissances à propos de la douleur14.

L’impression d’une personne que les autres ne comprennent pas le degré de douleur qu’elle subi peut avoir des conséquences nuisibles pour son identité. Il peut s’ensuivre une perte de relations (possiblement initiée par elle-même) et cette situation peut engendrer l’isolement, la culpabilité, la dépression et la colère15. Ces conclusions concordent avec les résultats d’une étude sur l’analgésie par placebo dans laquelle des données d’imagerie faisaient état d’une modulation endogène de la douleur déclenchée cognitivement lorsque les personnes croyaient avoir reçu un médicament ou un traitement contre la douleur16. Cet effet est aussi démontré par des données probantes émergentes favorisant les thérapies centrées sur le biochamp, comme le toucher thérapeutique17.

La douleur chronique et la cognition

La relation entre la douleur et la cognition est complexe. La douleur a un effet négatif sur la concentration et le rendement cognitif; par contre, le rendement cognitif peut moduler la douleur et a un potentiel thérapeutique considérable18. Par exemple, depuis les 2 dernières décennies, on discute dans les ouvrages scientifiques du rôle de l’hypnose, et certaines données probantes confirment son efficacité dans la réduction de la douleur19. Il est aussi accepté que la crainte de la douleur est un facteur pronostique de la douleur chronique (le modèle peur-évitement), ce qui signifie que si on gère la peur de la douleur, il est possible d’améliorer la douleur chronique20. Pour améliorer les résultats sur le plan de la santé, il est possible de recourir à la capacité de suggestion narrative des médias sociaux21.

La médecine narrative et l’art de la libre expression

La médecine narrative est une forme de pratique médicale centrée sur le patient22 qui a suscité un intérêt considérable au sein du monde médical au cours des dernières années23, surtout depuis la parution d’un article important à ce sujet en 200124. La Dre Rita Charon définit la médecine narrative comme étant la pratique clinique éclairée par la théorie et par la pratique de la lecture, de l’écriture, du récit et de l’écoute d’histoires25. Une narration est aussi simple qu’une personne qui dit quelque chose à une autre à propos d’une chose26 : la création de nouveaux récits27.

La prise en charge de la douleur chronique exige l’évaluation et le traitement de la souffrance et du comportement de la douleur; la narration est essentielle pour donner un sens aux expériences vécues par le patient et aider dans le traitement de la douleur chronique28.

Les omnipraticiens utilisent systématiquement des composantes narratives dans la pratique médicale au quotidien : ils écoutent, interprètent, définissent conjointement les récits du patient et en sont témoins29. Il est possible que des éléments de la médecine narrative soient utilisés de la même manière par des non-médecins. C’est là où le concept de la médecine narrative jumelé avec l’introduction d’un pair consultant pourrait aider des personnes souffrant de douleur chronique à s’aider ellesmêmes. L’hypothèse est que la liberté d’expression et la création d’un récit peuvent réduire les degrés de détresse (et de souffrance) et améliorer la qualité de vie et, par conséquent, les résultats chez le patient3033.

Il est nécessaire de faire plus de recherche concernant le rôle des pairs consultants dans la douleur chronique et les bienfaits que retirent les pairs offrant la consultation10.

L’intervention par les arts

Les pairs consultants pourraient être jumelés à des patients pour qu’ils découvrent leurs expériences communes et créent un nouveau chapitre dans leur vie grâce à l’autonomisation et à l’art de la médecine narrative. Les participants redécouvriraient leur voix intérieure par la rédaction expressive. Les répercussions d’une telle intervention pourraient faire l’objet d’études en fonction de mesures descriptives et psychométriques. La Société norvégienne pour le traitement de la douleur a développé un instrument qui examine les domaines de résultats recommandés par l’Initiative sur les méthodes, la mesure et l’évaluation de la douleur dans les études cliniques. Il comporte les composantes du court sondage Brief Pain Inventory et la version abrégée du questionnaire sur la santé, qui compte 36 questions34.

Conclusion

Il serait possible d’établir un régime d’accréditation et de formation à l’échelle du Canada à l’intention de pairs consultants en douleur chronique comme prolongement du programme actuel d’Accréditation et de certification du soutien par les pairs (Canada).

La recherche future pourrait se concentrer sur les besoins de formation des pairs consultants et la manière de les intégrer dans les systèmes de soins primaires pour minimiser les lacunes dans la prestation des soins.

Footnotes

This article is also in English on page 837.

Intérêts concurrents

Aucun déclaré

Les opinions exprimées dans les commentaires sont celles des auteurs. Leur publication ne signifie pas qu’elles soient sanctionnées par le Collège des médecins de famille du Canada.

Références

  • 1.Blyth FM, March LM, Brnabic AJ, Jorm LR, Williamson M, Cousins MJ. Chronic pain in Australia: a prevalence study. Pain. 2001;89(2–3):127–34. doi: 10.1016/s0304-3959(00)00355-9. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 2.MBF Foundation, University of Sydney Pain Management Research Institute . The high price of pain: the economic impact of persistent pain in Australia. Brisbane, Aust: MBF Foundation; 2007. Accessible à: https://www.bupa.com.au/staticfiles/BupaP3/Health%20and%20Wellness/MediaFiles/PDFs/MBF_Foundation_the_price_of_pain.pdf. Réf. du 24 août 2015. [Google Scholar]
  • 3.Coalition canadienne contre la douleur . The status of pain in Canada—moving toward a Canadian pain strategy. Oshawa, ON: Coalition canadienne contre la douleur; 2010. Accessible à: www.canadianpaincoalition.ca/media/cpc_brief_pall_comp_care.pdf. Réf. du 24 août 2015. [Google Scholar]
  • 4.Royal Australian College of General Practitioners [site web] The RACGP curriculum for Australian general practice 2011. Curriculum statements. Pain management. East Melbourne, Aust: Royal Australian College of General Practitioners; 2011. Accessible à: http://curriculum.racgp.org.au/statements/pain-management/. Réf. du 24 août 2015. [Google Scholar]
  • 5.Australian and New Zealand College of Anaesthetists, Faculty of Pain Medicine, Australian Pain Society, Chronic Pain Australia . National pain strategy. Pain management for all Australians. Pyrmont, Aust: Pain Australia; 2010. [Google Scholar]
  • 6.Hayes C, Hodson FJ. A whole-person model of care for persistent pain: from conceptual framework to practical application. Pain Med. 2011;12(12):1738–49. doi: 10.1111/j.1526-4637.2011.01267.x. Publ. en ligne du 4 nov. 2011. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 7.Mitchell GK. Improving coordination of care between specialist and general practice for people with chronic pain. Med J Aust. 2013;198(6):301–2. doi: 10.5694/mja13.10143. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 8.Kristiansson MH, Brorsson A, Wachtler C, Troein M. Pain, power and patience—a narrative study of general practitioners’ relations with chronic pain patients. BMC Fam Pract. 2011;12:31. doi: 10.1186/1471-2296-12-31. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 9.Accréditation et certification du soutien par les pairs (Canada) Certification handbook. Canada: Accréditation et certification du soutien par les pairs; 2014. Accessible à: www.psac-canada.com/certification-handbook/. Réf. du 24 août 2015. [Google Scholar]
  • 10.Arnstein P, Vidal M, Wells-Federman C, Morgan B, Caudill M. From chronic pain patient to peer: benefits and risks of volunteering. Pain Manag Nurs. 2002;3(3):94–103. doi: 10.1053/jpmn.2002.126069. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 11.Frank JW, Bair MJ, Becker WC, Krebs EE, Liebschutz JM, Alford DP. Update in pain medicine for primary care providers: a narrative review, 2010–2012. Pain Med. 2014;15(3):425–31. doi: 10.1111/pme.12337. Publ. en ligne du 14 janv. 2014. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 12.Keefe FJ, Porter L, Somers T, Shelby R, Wren AV. Psychosocial interventions for managing pain in older adults: outcomes and clinical implications. Br J Anaesth. 2013;111(1):89–94. doi: 10.1093/bja/aet129. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 13.Beatty L, Lambert S. A systematic review of Internet-based self-help therapeutic interventions to improve distress and disease-control among adults with chronic health conditions. Clin Psychol Rev. 2013;33(4):609–22. doi: 10.1016/j.cpr.2013.03.004. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 14.Ospina MB, Taenzer P, Rashiq S, MacDermid JC, Carr E, Chojecki D, et al. A systematic review of the effectiveness of knowledge translation interventions for chronic noncancer pain management. Pain Res Manag. 2013;18(6):e129–41. doi: 10.1155/2013/120784. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 15.Newton BJ, Southall JL, Raphael JH, Ashford RL, LeMarchand K. A narrative review of the impact of disbelief in chronic pain. Pain Manag Nurs. 2013;14(3):161–71. doi: 10.1016/j.pmn.2010.09.001. Publ. en ligne du 26 nov. 2010. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 16.Bingel U. Mechanisms of endogenous pain modulation illustrated by placebo analgesia: functional imaging findings [article en allemand] Schmerz. 2010;24(2):122–9. doi: 10.1007/s00482-010-0901-7. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 17.Jain S, Mills PJ. Biofield therapies: helpful or full of hype? A best evidence synthesis. Int J Behav Med. 2010;17(1):1–16. doi: 10.1007/s12529-009-9062-4. Erratum dans: Int J Behav Med 2011;18(1):79–82. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 18.Moriarty O, Finn DP. Cognition and pain. Curr Opin Support Palliat Care. 2014;8(2):130–6. doi: 10.1097/SPC.0000000000000054. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 19.Jensen MP, Patterson DR. Hypnotic approaches for chronic pain management: clinical implications of recent research findings. Am Psychol. 2014;69(2):167–77. doi: 10.1037/a0035644. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 20.Turk DC, Wilson HD. Fear of pain as a prognostic factor in chronic pain: conceptual models, assessment, and treatment implications. Curr Pain Headache Rep. 2010;14(2):88–95. doi: 10.1007/s11916-010-0094-x. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 21.Merolli M, Gray K, Martin-Sanchez F, Lopez-Campos G. Patient-reported outcomes and therapeutic affordances of social media: findings from a global online survey of people with chronic pain. J Med Internet Res. 2015;17(1):e20. doi: 10.2196/jmir.3915. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 22.Lucius-Hoene G. Illness narratives and narrative medicine [article en allemand] Rehabilitation (Stuttg) 2008;47(2):90–7. doi: 10.1055/s-2008-1042447. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 23.Morris DB. Narrative medicine: challenges and resistance. Perm J. 2008;12(1):88–96. doi: 10.7812/tpp/07-088. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 24.Charon R. The patient-physician relationship. Narrative medicine: a model for empathy, reflection, profession, and trust. JAMA. 2001;286(15):1897–902. doi: 10.1001/jama.286.15.1897. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 25.Charon R. Narrative medicine. Honoring the stories of illness. New York, NY: Oxford University Press; 2006. [Google Scholar]
  • 26.Kearney R. On stories. New York, NY: Routledge; 2002. [Google Scholar]
  • 27.Mehl-Madrona L. The nature of narrative medicine. Perm J. 2007;11(3):83–6. doi: 10.7812/tpp/07-052. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 28.Loeser JD. Pain, suffering and narrative medicine; Présenté au 4e Congrès biannuel international et multidisciplinaire sur la douleur; 1er oct. 2014; Eindhoven, Pays-Bas. Accessible à: www.paincongress.org/resources/js/tinymce/plugins/imagemanager/files/presentations/Painsufferingandnarrativemedicine.pdf. Réf. du 24 août 2015. [Google Scholar]
  • 29.Peterkin A. Practical strategies for practising narrative-based medicine. Can Fam Physician. 2012;58:63–4. [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 30.Gortner EM, Rude SS, Pennebaker JW. Benefits of expressive writing in lowering rumination and depressive symptoms. Behav Ther. 2006;37(3):292–303. doi: 10.1016/j.beth.2006.01.004. Publ. en ligne du 30 mai 2006. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 31.Sbarra DA, Boals A, Mason AE, Larson GM, Mehl MR. Expressive writing can impede emotional recovery following marital separation. Clin Psychol Sci. 2013;1(2):120–34. doi: 10.1177/2167702612469801. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 32.Travagin G, Margola D, Revenson TA. How effective are expressive writing interventions for adolescents? A meta-analytic review. Clin Psychol Rev. 2015;36:42–55. doi: 10.1016/j.cpr.2015.01.003. Publ. en ligne du 15 janv. 2015. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]
  • 33.Mugerwa S, Holden JD. Writing therapy: a new tool for general practice? Br J Gen Pract. 2012;62(605):661–3. doi: 10.3399/bjgp12X659457. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 34.Breivik H, Borchgrevink PC, Allen SM, Rosseland LA, Romundstad L, Hals EK, et al. Assessment of pain. Br J Anaesth. 2008;101(1):17–24. doi: 10.1093/bja/aen103. Publ. en ligne du 16 mai 2008. [DOI] [PubMed] [Google Scholar]

Articles from Canadian Family Physician are provided here courtesy of College of Family Physicians of Canada

RESOURCES