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. 2015 Dec;61(12):1030. [Article in French]

Où s’en va la médecine familiale?

Editor: Roger Ladouceur
PMCID: PMC4677931

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On apprend ce mois-ci en parcourant le Médecin de famille canadien que la formation en soins palliatifs offerte aux résidents en médecine familiale n’est pas optimale. En effet, selon l’enquête réalisée par Mahtani et coll. auprès de résidents I et II (page e578), cette formation offerte en milieux spécialisés a des effets inattendus: « Au lieu de susciter leur intérêt et de les engager, la formation en soins palliatifs risque de rebuter les résidents en médecine familiale, en renforçant la notion voulant qu’il s’agisse d’un domaine spécialisé (traduction libre) »1. Cette conclusion est pour le moins troublante. Évidemment, il convient ici d’être prudent puisque l’étude a été réalisée auprès d’un petit échantillon de résidents oeuvrant tous dans le même milieu. Il serait donc prématuré de généraliser ces conclusions à l’ensemble des milieux de formation en soins palliatifs. Toutefois, cette enquête sonne une cloche et soulève un doute sur la formation offerte aux résidents en médecine familiale.

D’autant plus que plusieurs sondages indiquent que les médecins de famille se désintéressent aussi des soins à domicile. Selon le Sondage national des médecins de 2010, seulement 42,4 % des médecins de famille disaient dispenser des soins à domicile2. Quant aux résidents, lorsque questionnés dans le Sondage national des médecins de 2012 sur leur intention d’offrir des visites à domicile dans le cadre de leur pratique médicale, seulement 37,6 % ont répondu positivement2. C’est donc dire que la majorité des médecins et des résidents en médecine familiale ne s’occupent pas ou n’ont pas l’intention de s’occuper de leurs patients à domicile. Tout un constat!

Comment cela peut-il être possible?

Comment peut-on prétendre être un médecin de famille en adhérant aux grands principes de la médecine familiale tout en affirmant ne pas aller visiter ses patients les plus malades lorsqu’ils ne peuvent plus se déplacer? Comment pouvons-nous prétendre que « la médecine familiale est une discipline communautaire »3 et que « le médecin de famille est une ressource pour une population définie de patients »3, et du même coup refuser de s’occuper de ses patients à domicile, particulièrement ceux en fin de vie?

Se pourrait-il que la médecine familiale soit malade? Se pourrait-il que ses grands principes ne soient que des mots, ne soient que de la poudre aux yeux?

Car non seulement les résidents ont-ils peu l’intention d’aller visiter leurs malades à domicile, mais bon nombre optent plutôt pour une pratique ciblée. En effet, selon le sondage de 2012, près de 30 % des résidents en médecine familiale avaient l’intention d’avoir une pratique ciblée (définie comme étant l’intention d’y consacrer plus de 50 % de son temps), et ce, particulièrement en médecine d’urgence.

Or, quand 30 % du produit d’un programme de formation visant à développer des généralistes conduit plutôt à des médecins ayant une pratique ciblée, on est en droit de se questionner sur son efficacité. On est en droit de se questionner sur son efficience. Car il ne faut pas se leurrer, la plupart de ces médecins de famille qui optent essentiellement pour une pratique ciblée deviennent en réalité des spécialistes dans ces champs d’exercice. Ils n’ont de la médecine familiale que le titre. On peut d’ailleurs se demander si le Collège des médecins de famille du Canada ne contribue pas lui-même au problème en attribuant des certificats de compétences avancées? C’est comme si, d’une part, le Collège se dédiait à la formation de médecins généralistes, tout en favorisant l’émergence de mini spécialités au sein de sa propre organisation.

Bien sûr, il est tout à fait louable qu’un médecin de famille développe de l’intérêt pour un champ de compétences particulier. Il est aussi tout à fait raisonnable qu’un médecin de famille vieillissant souhaite restreindre sa pratique; qu’il souhaite, pour des raisons personnelles ou liées à l’épuisement, ne plus faire de garde, d’obstétrique ou d’urgence. Personne ne lui en tiendra rigueur. La société comprend tout à fait cela et accepte qu’un médecin de famille qui prend de l’âge ne puisse plus tout faire. Mais qu’un résident en médecine familiale opte, après plusieurs années d’université et 2 ou 3 ans de résidence, de se consacrer uniquement à la médecine esthétique, à la phlébologie ou à la psychothérapie, par exemple, n’a pas de bon sens. Ce résident a bien le droit de faire ce choix s’il le désire. Mais qu’on ne vienne pas nous dire qu’il est médecin de famille. Voyons donc!

En réalité, plus les années passent, plus on a l’impression que la médecine familiale est en voie de disparaître. C’est comme si les médecins de famille devenaient de plus en plus des urgentologues, des hospitaliers, des intensivistes, voire même des médecins en soins palliatifs, et de moins en moins des « médecins de famille ».

Il est certainement temps d’y voir.

Footnotes

This article is also in English on page 1029.

Références

  • 1.Mahtani R, Kurahashi A, Buchman S, Webster F, Husain A, Goldman R. Are family medicine residents adequately trained to deliver palliative care? Can Fam Physician 2015;61:e577–82. [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
  • 2.Sondage national des médecins. Résultats du Sondage national des médecins. Mississauga, ON: Collège des médecin de famille du Canada; 2014. Accessible à: nationalphysiciansurvey.ca/fr/surveys-fr/. Réf. du 5 novembre 2015. [Google Scholar]
  • 3.Collège des médecin de famille du Canada [site web]. Les quatre principes de la médecine familiale. Mississauga, ON: Collège des médecin de famille du Canada; 2006. Accessible à: www.cfpc.ca/Les_quatre_principes/. Réf. du 5 novembre 2015 [Google Scholar]

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