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. 2018 Jun;64(6):479. [Article in French]

La lutte contre l’épuisement professionnel chez les médecins

Francine Lemire
PMCID: PMC5999239  PMID: 29898942

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Chers collègues,

On estime que l’épuisement professionnel touche jusqu’à 50 % des médecins. Selon certaines données, un tiers des étudiants en médecine souffriraient d’épuisement professionnel et ce taux pourrait même atteindre 50 % pendant les stages. Ce syndrome est plus répandu dans certaines disciplines, notamment les soins d’urgence (52 %), les soins intensifs (53 %) et la médecine familiale (50 %)1. Parmi les facteurs qui entraînent une perte d’enthousiasme vis-à-vis de la pratique, on retrouve les contraintes budgétaires, l’augmentation de la charge de travail et les lacunes du système1.

L’épuisement professionnel est un syndrome distinctement lié au travail et défini par la fatigue émotionnelle et le surmenage chronique, où les exigences professionnelles sont perçues comme étant au-dessus des capacités de la personne. Le risque d’épuisement est plus élevé dans les métiers où la grande majorité du travail est de prendre soin d’autrui. Les différentes phases du syndrome comprennent la fatigue émotionnelle, la dépersonnalisation et la baisse du sentiment d’accomplissement personnel. Une lourde charge de travail, le jeune âge, le sexe (plus forte prévalence chez les femmes) et le manque de soutien d’un conjoint constituent des facteurs de risque potentiels1,2. On sait par ailleurs que si l’épuisement professionnel n’est pas pris en charge, il peut mener à une détérioration de la qualité des soins (p. ex., des erreurs médicales, des pratiques de prescription plus risquées) et avoir des répercussions néfastes sur l’attitude des médecins envers les patients (p. ex., la communication, l’empathie). À l’échelle du système de santé, l’épuisement professionnel nuit au moral et au sentiment de satisfaction des médecins, dans certains cas au point de les pousser à quitter prématurément la profession, et risque d’avoir des effets négatifs sur le leadership en santé1.

Du côté des médecins de famille, on observe que le jeune âge et le sexe féminin1–3 sont les principaux facteurs de risque pour l’épuisement professionnel. Les différentes causes du syndrome sont une combinaison de facteurs dans 5 catégories : la pratique clinique (p. ex., cas médicaux complexes, augmentation du nombre de lignes directrices à suivre [dont la pertinence est parfois discutable], trop courte durée des rendez-vous pour des patients aux besoins complexes) ; la gestion (p. ex., réduction des ressources et du financement, lieu de travail en piètre état, responsabilités de gestion) ; la régulation et les plaintes (p. ex., peur des poursuites et des plaintes, sentiment d’être jugé coupable jusqu’à preuve du contraire) ; les effectifs (p. ex., difficulté à recruter du personnel et à trouver des suppléants, passage au travail à temps partiel de certains omnipraticiens et MF) ; et autres (p. ex., opinions négatives du public, des médias et de certains décideurs)4. Pour ma part, ce qui me trouble le plus est le pourcentage élevé de MF en état d’épuisement professionnel qui songent à quitter définitivement la profession médicale2.

La situation demande que nous examinions attentivement des stratégies afin de traiter et, de préférence, prévenir l’épuisement professionnel. En mettant systématiquement en œuvre les approches suivantes3–5, vous pourriez obtenir une meilleure organisation de votre pratique, rentrer plus tôt à la maison et augmenter votre sentiment de satisfaction à la fin de la journée : cessez de lever le nez sur les dossiers médicaux électroniques et adoptez-les complètement (trouvez parmi vos collègues un as de l’informatique qui pourra vous donner quelques tuyaux) ; documentez seulement le minimum requis (vos notes devraient suffire à effectuer la facturation, à remplir les exigences médico-légales et à assurer la continuité des soins — il n’est pas toujours nécessaire de faire plus long) ; utilisez un logiciel de dossiers médicaux électroniques afin d’automatiser les tâches qui peuvent l’être (demandez l’aide de votre as de l’informatique) ; faites de la documentation un sport d’équipe (demandez au personnel de participer au processus de documentation) ; essayez d’avoir recours à un scribe ; soyez à l’affût des redondances dans vos interactions (préparez des documents écrits ou enregistrez des vidéos informatives que vous pourrez partager lors de ces discussions répétitives ; déterminez qui remettra ce matériel d’information aux patients) ; faites des caucus avec votre équipe ; adoptez le traitement par lots (p. ex., groupez tous les résultats de laboratoire à examiner et déterminez lesquels devraient être signalés et portés à votre attention entre vos rendez-vous ; faites des appels à des moments déterminés de la journée)5.

Les médecins de famille qui se sont convertis à l’enseignement doivent eux aussi penser à des stratégies contre l’épuisement professionnel afin que les étudiants en médecine et les résidents apprennent à surmonter ce problème et qu’ils ne perdent pas de vue les joies de la pratique. Notre Comité sur les cinq premières années de pratique de la médecine familiale et nos employés collaborent actuellement à la création d’outils qui permettront de mieux soutenir les nouveaux MF et les résidents dans la gestion de la pratique, les aidant ainsi à trouver bonheur et succès dans leur pratique.

Toute réflexion faite, en plus de faire preuve de résilience sur le plan individuel, il faut s’attaquer aux causes systémiques de l’épuisement professionnel. C’est notre mission de défendre vos intérêts à cet égard. Je vous invite à faire part de vos propres stratégies pour prendre en charge ou prévenir l’épuisement professionnel en écrivant à info@cfpc.ca.

Remerciements

Je tiens à remercier Cheri Nickel et Eric Mang pour leur aide.

Footnotes

This article is also in English on page 480.

Références à la page 480.


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