RÉSUMÉ
Au Canada, 45 % des nouveaux cas de cancer et 63 % des décès dus au cancer se produisent chez les Canadiens de 70 ans et plus. Ces personnes âgées et leurs familles ont des préoccupations et des besoins particuliers, mais qui demeurent souvent mal reconnus et satisfaits. Or, le nombre de personnes âgées au Canada devrait plus que doubler au cours des 25 prochaines années. Nous devons donc intégrer à notre pratique en oncologie, de même qu’aux politiques, à la recherche et à la formation, une meilleure compréhension du vieillissement, et développer des modèles de soins optimisés et adéquats pour les personnes âgées.
Le groupe d’intérêt sur l’oncologie et le vieillissement de l’Association canadienne des infirmières en oncologie (ACIO) est une initiative incitant les infirmières du domaine à se pencher sur ces questions. Nous résumons ici les faits saillants de l’atelier qui a donné le coup d’envoi à ce groupe lors de la conférence annuelle de l’ACIO en 2015 et rappelons les priorités et problèmes liés à la pratique qui ont été relevés pendant les échanges avec les participants. Nous relatons également la façon dont le groupe d’intérêt a évolué depuis sa création et listons les objectifs qui orienteront les prochaines étapes.
INTRODUCTION
L’impact du vieillissement de la population canadienne sur la prestation des soins de santé se remarque de plus en plus, particulièrement dans les soins contre le cancer. On estime que 45 % des nouveaux cas de cancer et 63 % des décès dus au cancer se produiront chez les Canadiens de 70 ans et plus, et la majorité des cancers les plus fréquents (poumon, colorectal) se produisent dans cette tranche d’âge (Comité consultatif de la Société canadienne du cancer, 2017). Divers signes attestent de lacunes liées à l’âge dans les soins oncologiques : disparités dans les taux de mortalité des différents groupes d’âge (Comité consultatif de la Société canadienne du cancer, 2017), écart grandissant avec l’âge quant au taux de survie (Brenner et Arndt, 2004), besoins insatisfaits (Puts, Papoutsis, Springall et Tourangeau, 2012), tendances de traitements sous-optimaux même lorsque l’état de santé et l’état fonctionnel sont pris en compte (Bojer et Roikjær, 2015; Hamaker et al., 2015).
En tant qu’infirmières en oncologie, nous sommes bien placées pour intégrer aux soins des personnes atteintes de cancer la compréhension des aspects biopsychosociaux du vieillissement. Le travail auprès des personnes âgées a beau représenter une part importante de notre pratique, nous avons souvent peu de formation à cet égard, et un accès limité aux ressources gériatriques. Tenons-nous vraiment compte des besoins particuliers qui relèvent du vieillissement, ou nous adonnons-nous simplement à soigner des gens qui se trouvent dans cette tranche d’âge? Chose certaine, au Canada, le nombre de personnes âgées devrait plus que doubler au cours des 25 prochaines années (Statistique Canada, 2014), et il en ira de même pour le nombre de cas de cancer (Comité consultatif de la Société canadienne du cancer, 2015). Nous devrons donc nous doter des connaissances, compétences et ressources nécessaires pour répondre aux besoins des patients âgés et de leurs proches.
Pour entamer une discussion sur la façon dont les infirmières en oncologie peuvent mieux prendre soin des personnes âgées atteintes de cancer, nous avons organisé un atelier à la conférence annuelle de l’Association canadienne des infirmières en oncologie (ACIO) en octobre 2015. Un groupe d’intérêt sur l’oncologie et le vieillissement en est né. Le présent article relate les grandes lignes de cet atelier et les premières activités du groupe d’intérêt.
Le document s’articule autour des trois grands thèmes de la conférence de 2015 : communauté, volonté, passion, à quoi nous avons ajouté progrès. Nous résumons d’abord les propos tenus à l’atelier en relevant les principales préoccupations en lien avec les soins oncologiques prodigués aux personnes âgées (aspect communauté) et en présentant la volonté qui anime l’oncologie gériatrique en tant que sous-spécialité. Nous rapportons ensuite les conversations des participants à l’atelier, témoignages d’une passion évidente à l’idée de mieux comprendre et aborder les questions relatives au vieillissement des patients. Les participants avaient alors lancé l’idée du groupe d’intérêt et discuté des priorités qu’il devrait avoir. Nous évaluons enfin les progrès que le groupe d’intérêt a réalisés et listons les buts et objectifs qui orienteront les prochaines étapes.
COMMUNAUTÉ : LES PROBLÈMES PARTICULIERS AUX SOINS DES PERSONNES ÂGÉES ATTEINTES DU CANCER
Les façons dont les personnes âgées font l’expérience du cancer et des traitements corollaires varient énormément. Ces expériences sont façonnées par l’hétérogénéité des aspects biologiques, psychologiques et sociaux du vieillissement. Or, ces dissemblances ne sont pas seulement évidentes lorsqu’on compare deux personnes différentes : elles se manifestent quand on compare différentes générations (Gubrium et Charmaz, 1992) et même, lorsqu’on compare différents systèmes d’organes chez un même un individu (White et Cohen, 2006).
Quand on pense à la population « gériatrique », on imagine parfois des aînés fragiles. Mais ces derniers ne représentent qu’un petit sous-ensemble des personnes âgées recevant des traitements contre le cancer (Retornaz et al., 2008). Une donnée éloquente : l’espérance de vie moyenne des femmes de 80 ans peut varier de 13,0 ans, pour celles dans les 25 centiles supérieurs, à 4,6 ans pour celles dans le quart inférieur (Walter et Covinsky, 2001). Ainsi une dame peut-elle être confinée à un fauteuil roulant et requérir une assistance au quotidien, alors qu’une autre peut vivre seule, faire du sport tous les jours et s’impliquer activement dans sa communauté. L’âge chronologique ne suffit donc pas à déterminer les préoccupations et besoins réels d’une personne. Plutôt que de simplement qualifier un patient « d’âgé » en comptant ses années, il nous faut, dans le traitement du cancer, tenir compte de l’âge fonctionnel (Klepin, Rodinet Hurria, 2015) ou de l’âge physiologique (National Cancer Institute, 2010), et nous sensibiliser aux problèmes associés à la vieillesse qui peuvent se manifester à différents moments chez différentes personnes.
La pathologie du cancer change avec l’âge; certains cancers deviennent plus agressifs, et d’autres, indolents (White et Cohen, 2006). D’autres changements physiologiques normaux ou anormaux se produisent au fil des années, comme l’affaiblissement de l’adaptabilité et du maintien de l’homéostasie. L’ampleur de ces changements n’est pas toujours prévisible, et peut avoir de profondes répercussions sur l’efficacité du traitement, de même que sur la capacité du patient à adhérer à un plan de traitement (Sawhney, Sehlet Naeim, 2005; Sehl, Sawhneyet Naeim, 2005). Les changements physiologiques peuvent aussi entraîner une réduction de la mobilité, des troubles sensoriels ou cognitifs, des pathologies multiples, ou l’occurrence de facteurs de risques importants pour les syndromes gériatriques tels que le déclin fonctionnel, la polypharmacie, les chutes, le delirium, l’incontinence, la perte de poids et la dépression (Inouye, Studenski, Tinettiet Kuchel, 2007; Olde Rikkert, Rigaud, van Hoeyweghenet de Graaf, 2003). La variation de la situation sociale d’un individu peut le rendre plus ou moins vulnérable au risque (Andrew et Keefe, 2014), ce qui souligne la nécessité de comprendre le point de vue du patient et d’adapter les soins à la situation de chaque personne.
Le manque de sensibilisation à l’hétérogénéité et aux problèmes associés au vieillissement mène à l’âgisme – à des stéréotypes à propos du déclin et à des idées reçues sur ce que serait un « vieillissement réussi ». L’âgisme est insidieux dans le système de santé (Alliance for Aging Research, 2003) et l’oncologie ne fait pas exception (Kagan, 2008; Wedding et Stauder, 2014). Même si les formes de discrimination les plus flagrantes sont souvent évitées, les plus subtiles sont communément ignorées. Parmi les exemples, mentionnons la présentation inadéquate de l’information, l’inaccessibilité des milieux de soins de santé, le manque de coordination des soins, les ressources limitées pour assurer l’accès des patients âgés au dépistage et au traitement, et des variations dans la gestion clinique en fonction des valeurs et des perceptions de l’équipe soignante en oncologie (Tariman, 2009; Tariman, Berry, Cochrane, Doorenboset Schepp, 2012). La perpétuation de ces schémas d’âgisme vient notamment du manque de recherches sur cette population, notamment en raison du peu d’inclusion dans les essais cliniques et d’un nombre insuffisant de mesures des résultats reflétant les paramètres importants pour les personnes âgées (Hurria et al., 2014; Hurria et al., 2015; Sinding et Wiernikowski, 2009). Il faut corriger le tir pour fournir des traitements adéquats et offrir aux aînés les soins dont ils ont vraiment besoin.
VOLONTÉ : LE RÔLE DE L’ONCOLOGIE GÉRIATRIQUE
Sous-spécialité qui prend de l’ampleur, l’oncologie gériatrique adjoint l’étude du vieillissement à l’oncologie en vue d’offrir aux personnes âgées atteintes de cancer et à leurs proches des soins optimaux et adaptés. C’est une discipline relativement récente. Les préjugés dans le traitement des personnes âgées ont été reconnus pour la première fois au milieu des années 1970–1980; après une période de revendication, des avancées significatives ont commencé à se produire dans les années 1990 (Boyle, 2006). L’Oncology Nursing Society a publié son premier énoncé de position sur l’oncologie gériatrique et les soins infirmiers en oncologie en 1992 (Boyle et al., 1992); il a ensuite été mis à jour en collaboration avec le Geriatric Oncology Consortium (Oncology Nursing Society et Geriatric Oncology Consortium, 2004, 2007). Cet énoncé évoque le manque de recherche et la complexité des soins qui transparaissent dans les disparités et tendances au sous-traitement qui ont une incidence sur la qualité de vie. Dans un rapport récent sur les soins de qualité en cancérologie, l’Institute of Medicine souligne l’importance de la collaboration entre les équipes primaires, gériatriques et spécialisées (Institute of Medicine, 2013), la coopération entre les infirmières en oncologie et les infirmières gériatriques étant indispensable à l’atteinte de cet objectif (Ferrell, McCabeet Levit, 2013).
Pour garantir des soins adéquats, l’oncologie gériatrique doit reposer sur une collaboration interdisciplinaire et interprofessionnelle. De nombreuses personnes âgées qui arrivent dans un centre de cancérologie ont l’air fortes et indépendantes; il se peut toutefois qu’elles soient vulnérables aux effets toxiques du traitement, ou à d’autres complications ou effets secondaires que l’équipe ne peut soupçonner lors des premières rencontres. Une évaluation gériatrique complète permet de déterminer les forces et faiblesses du patient au départ, d’en évaluer le statut fonctionnel, et de détecter des vulnérabilités aux complications, aux effets secondaires ou à la toxicité (National Comprehensive Cancer Network, 2016; Wildiers et al., 2014). À l’instar de la communauté médicale qui se mobilise pour soutenir le développement de l’oncologie gériatrique en tant que sous-spécialité dans la recherche, l’éducation, la pratique et l’élaboration des politiques, la communauté infirmière doit s’activer au sein de sa propre profession. Nous devons tenir compte des compétences relatives au vieillissement que requiert la prestation de soins efficaces, et nous devons favoriser le perfectionnement professionnel des infirmières qui oeuvrent dans cette sous-spécialité.
PASSION : LES DÉFIS ET PRÉOCCUPATIONS DANS LES SOINS INFIRMIERS
Ayant constaté notre intérêt commun pour ces sujets, nous (les auteures du présent article) avons jugé nécessaire d’échanger avec d’autres infirmières en oncologie. Pour entamer le dialogue et explorer la possibilité de former un groupe d’intérêt, nous avons organisé à la conférence annuelle de l’ACIO de 2015 un atelier ouvert à tous les participants. En mettant en commun notre expérience (Fay était alors infirmière clinicienne spécialisée et infirmière pivot pour les patients âgés en oncologie au Centre du cancer Segal à Montréal, et Lorelei, responsable de la pratique pour la British Columbia Cancer Agency à Victoria), nous avons donné trois objectifs à l’atelier :
Faire un survol des façons dont l’oncologie et le vieillissement s’entrecroisent, et considérer les besoins afférents qui ne sont pas assez reconnus et étudiés.
Faire ressortir la raison d’être de l’oncologie gériatrique en tant que sous-spécialité.
Animer une discussion avec les participants pour explorer les défis et les bons coups réalisés auprès des personnes âgées atteintes de cancer, et parler de la création d’un groupe d’intérêt.
Douze collègues travaillant dans différents contextes cliniques à travers le pays ont participé à l’atelier. Ensemble, nous avons commencé à explorer les enjeux aussi bien que les réussites. Les participants ont fait des témoignages prenants, évoquant toute la complexité qu’implique le fait de prendre soin de personnes âgées atteintes de cancer tout au long de la trajectoire de soins... Leur passion est évidente. Mais il est aussi apparu que les infirmières en oncologie vivent de la détresse morale quand les ressources et les systèmes requis pour répondre à ces besoins ne sont pas en place.
Cette détresse morale émanait en particulier des histoires de sous-traitements et de traitements trop agressifs. Des questions ont alors fait surface... Bien que la plupart des personnes âgées soient plutôt en bonne santé quand elles entament un traitement, dans quel état les laissons-nous à la fin? Les aidonsnous à retrouver le niveau de fonctionnement qu’ils avaient au départ? Savons-nous seulement ce qu’il était? À quoi ressemblerait l’intégration d’une approche gérontologique à nos évaluations et interventions tout au long de la trajectoire de soins? Quand et comment aiguiller adéquatement les personnes âgées vers les soins palliatifs? Nous nous sommes également penchés sur les questions systémiques, en discutant des décisions explicites et implicites concernant l’accès au traitement et son rationnement, et la façon dont l’âge du patient peut influencer ces décisions.
Au fil de la discussion, nous avons mis au jour de nombreuses préoccupations cliniques liées aux soins oncologiques pour les personnes âgées. Les participants ont verbalisé trois grandes sources d’inquiétudes (tableau 1) : l’âgisme, les résultats des traitements sous-optimaux, et les questions éthiques concernant les décisions en matière de soins et de traitements. Les participants ont non seulement exprimé des préoccupations précises en lien avec ces trois sujets, mais ils ont aussi proposé des objectifs et des idées sur la façon dont le système de soins contre le cancer pourrait y répondre.
Tableau 1.
DOMAINE | PROBLÈME/DIFFICULTÉ | CHANGEMENT SUGGÉRÉ À L’ÉCHELLE DU SYSTÈME |
---|---|---|
Âgisme | Concentration sur l’âge chronologique sans prise en compte des capacités fonctionnelles et des comorbidités. Vieillesse vue comme une comorbidité plutôt que comme une étape du développement humain. Personnes âgées considérées comme des citoyens de seconde classe. Absence d’évaluations gériatriques complètes pour tous les patients. Difficulté à reconnaître que la prochaine génération puisse être différente. |
Établir des liens avec la gériatrie pour faciliter des évaluations complètes; reconnaître l’hétérogénéité et identifier les besoins associés au vieillissement. Faire de la recherche pour soutenir l’implication des praticiens en gériatrie. Donner accès aux services d’une infirmière clinicienne spécialisée en gériatrie. Intégrer des processus pour prioriser les patients âgés en vue d’effectuer une évaluation gériatrique complète. Mettre au point des outils pour aider les personnes âgées qui n’ont pas accès à une évaluation gériatrique complète ou qui n’en ont pas besoin. Apporter une perspective gérontologique aux soins, y compris les soins palliatifs. |
Résultats des traitements sous-optimaux | Besoin de cerner les schémas de sous-traitements et de surtraitements. Perspective des aînés (souvent différente de la nôtre) négligée à l’égard des traitements :
Manque de suivi et d’évaluation régulière pour les patients prenant des traitements de chimiothérapie par voie orale. Négligence à vérifier dans quelle mesure l’état des patients a changé par rapport au point de départ :
|
Combler les lacunes en matière de transport et de soins à domicile. Optimiser les soins en mettant fortement l’accent sur des ressources adéquates et sur les soins de base, plutôt que sur des solutions de hautes technologies (rôle clé du personnel infirmier). Renforcer la collaboration entre l’oncologie gériatrique et les soins palliatifs, et mieux cerner le moment où faire intervenir ces derniers. Se concentrer sur les soins proactifs (p. ex. appels de suivi pour évaluer les besoins). Mettre en oeuvre des stratégies proactives pour aider les patients à revenir à leur état de départ une fois le traitement terminé. Mieux intégrer les phases de réadaptation et de préadaptation dans la trajectoire de soins. Intégrer à nos lignes directrices et protocoles de traitement des encarts traitant spécifiquement de la situation des personnes âgées et des choses particulières à surveiller avec cette population de patients. |
Problèmes éthiques concernant les décisions relatives aux soins et au traitement | Besoin de reconnaître que les patients âgés ont souvent une confiance presque aveugle en leurs médecins traitants. Explications inadéquates et trop peu claires quant aux traitements, ce qui amène les patients à subir des traitements qu’ils ne comprennent pas pleinement. Difficultés à protéger l’autodétermination et la sécurité des patients. |
Militer pour un traitement et un soutien à la décision adéquats pour les patients. Veiller à ce que les patients âgés recevant des soins primaires soient recommandés à des spécialistes en oncologie. Insister sur la capacité des personnes âgées à prendre des décisions concernant leur traitement. Optimiser les façons de soutenir l’indépendance en dépit des risques, tout en mettant en place les mesures de soutien nécessaires. |
Le tableau 1 recense les préoccupations des infirmières en oncologie à l’égard du vieillissement, et les changements proposés au système. Les participants ont également reconnu que les déterminants sociaux de la santé – tels que le revenu, l’éducation, l’exclusion sociale, le sexe et la race – interagissent avec les enjeux cernés, en ayant une incidence sur les ressources et en accroissant les besoins et les inquiétudes. Cette interaction serait particulièrement marquée au sein de certaines populations cancéreuses, comme celles atteintes d’un cancer de la tête et du cou ou d’un myélome multiple, et celles vivant en milieu rural.
Comme nous l’avons mentionné, l’atelier a permis de comprendre que l’écart entre les besoins des personnes âgées atteintes de cancer et les réponses du système était la cause de la détresse morale chez nos participants. Nous nous sommes accordés sur le fait que l’âgisme n’a pas qu’une incidence directe sur les personnes âgées et sur leur capacité à recevoir des traitements optimaux et adéquats : cette discrimination entrave aussi notre propre capacité à changer le système pour mieux aider les patients et leur famille. Cela est, en soi, une importante source de frustration. Ensemble, tâchons de nous pourvoir des ressources, des outils, des compétences et des connaissances nécessaires pour satisfaire ces besoins. Pour y parvenir, nous devrons travailler à différents niveaux : éducation, pratique, recherche et politiques.
Le groupe a reconnu qu’une première étape cruciale consistait à sensibiliser les membres de l’ACIO à ces sujets et à rallier les infirmières qui s’intéressent au traitement du cancer chez les aînés. Pour donner le coup d’envoi à ce travail collaboratif, nous avons convenu de fonder un groupe d’intérêt sur l’oncologie et le vieillissement au sein de l’ACIO, une initiative conforme au plan stratégique de l’association, qui met à notre disposition des outils et ressources. Nous avons conclu l’atelier en discutant des priorités qu’aurait ce groupe (résumées dans le tableau 2).
Tableau 2.
Priorités | Idées d’actions concrètes |
---|---|
Une première étape cruciale : sensibiliser |
|
Mettre au point des outils pour mobiliser les membres et faire croître le groupe d’intérêt |
|
Identifier un projet tangible sur lequel travailler ensemble pour faire progresser la pratique |
|
PROGRÈS : LES PRIORITÉS ET LES OBJECTIFS DU GROUPE D’INTÉRÊT
L’atelier de 2015 a souligné l’intérêt pour un groupe sur l’oncologie et le vieillissement au sein de l’ACIO; ce dernier a donc été créé dès décembre de la même année. Notre première rencontre annuelle s’est tenue en 2016 à la conférence de l’ACIO. Nous y avons discuté des priorités du groupe et relevé différents besoins : intégrer au programme de la conférence davantage d’activités en lien avec le traitement des personnes âgées; préparer des webinaires ou ateliers portant sur des outils et ressources à l’attention des infirmières en oncologie travaillant auprès des personnes âgées et de leurs familles; préciser le rôle des infirmières en oncologie dans le contexte de l’évaluation clinique des personnes âgées atteintes de cancer. Cette discussion s’est poursuivie dans les rencontres subséquentes, et nous continuons de définir les prochaines étapes et notre plan stratégique global. Sur la base de ces échanges, et conformément aux priorités identifiées par les participants et les membres du groupe, nous avons défini l’objet, le but et les objectifs du groupe d’intérêt (tableau 3). L’objet et les objectifs initiaux ont été approuvés par les membres du groupe en mai 2017.
Tableau 3.
Objet : Créer un forum national pour les infirmières qui partagent un intérêt pour les soins aux personnes âgées atteintes de cancer, et s’impliquer à la grandeur du Canada pour promouvoir l’innovation dans la pratique, la recherche, l’éducation, le leadership et l’élaboration de politiques. |
But : Conjuguer les connaissances sur l’oncologie et sur le vieillissement pour optimiser les soins offerts aux personnes âgées atteintes de cancer et le soutien de leurs proches. |
Objectifs : Sensibilisation du milieu
|
Pour soutenir nos priorités et nos objectifs initiaux, nous avons conçu un site pour les membres du groupe d’intérêts accessible par la plateforme Web de l’ACIO. Il permet d’accéder à des ressources communes et à un forum où les membres peuvent échanger et poser des questions. Nous préparons aussi des webinaires et des conférences visant à sensibiliser les membres de l’ACIO à ces sujets. Nous tissons également des liens avec des organisations nationales et internationales soucieuses des soins fournis aux aînés atteints de cancer, comme l’Association canadienne des infirmières et des infirmiers en gérontologie, le Canadian Network on Aging and Cancer, et le groupe d’intérêt des infirmiers et autres professionnels de la santé de la Société internationale d’oncologie gériatrique. En decembre 2017, nous avions 99 membres de partout au Canada et aux États-Unis qui représentaient divers domaines de la pratique clinique, dont des infirmières de chevet, des infirmières cliniciennes, des infirmières pivots, des infirmières en pratique avancée, des chercheurs en sciences infirmières, des coordonnateurs de recherche, des éducateurs et des étudiants.
CONCLUSION
Intégrer la compréhension du vieillissement aux soins en cancérologie est en train de devenir une préoccupation importante pour les infirmières en oncologie. Notre atelier a confirmé que ces dernières se soucient énormément de la qualité des soins offerts aux personnes âgées. Les participants ont parlé des façons dont les infirmières en oncologie pouvaient combattre l’âgisme, en reconnaissant l’hétérogénéité et les enjeux relatifs au vieillissement, en se dotant des outils et ressources nécessaires pour optimiser les résultats des traitements, et en exigeant un meilleur soutien au traitement et à la prise de décision pour s’attaquer aux problèmes éthiques qui s’y rapportent. Ces échanges nous ont vivement encouragées à créer un groupe d’intérêt sur l’oncologie et le vieillissement, et en ont orienté les priorités et les buts initiaux. Nous entendons bientôt rédiger notre plan stratégique et comptons aller chercher le point de vue des personnes âgées atteintes du cancer et leurs proches pour l’intégrer à notre démarche.
Grâce à la présence de ce groupe d’intérêt au sein de l’ACIO, nous espérons contribuer à la concrétisation et à l’actualisation d’un modèle de traitement du cancer qui facilite cette intégration, en donnant les bons outils aux infirmières en oncologie qui travaillent avec des patients âgés, et en soutenant le perfectionnement des infirmières spécialisées en oncologie gériatrique. Avec ce groupe d’intérêt, nous espérons attirer l’attention sur les forces, les besoins et les préoccupations des personnes âgées atteintes de cancer et de leurs proches, et offrir une tribune nationale qui stimulera l’innovation dans les soins qu’on leur porte.
REMERCIEMENTS
Nous remercions les participants à l’atelier que nous avons donné à la Conférence annuelle 2015 de l’ACIO pour leur enthousiasme et leurs réflexions, qui ont jeté les bases de ce travail. Nous saluons également ceux qui ont participé aux réunions subséquentes du groupe d’intérêt : votre apport inestimable nous a aidées à fixer les priorités, les objectifs et les activités du groupe.
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