Chers collègues,
Au moment de la rédaction de cet article, l’Association médicale canadienne, le Collège royal et le CMFC finalisent un rapport sur les soins virtuels. Les soins virtuels regroupent « toute interaction entre les patients et les membres de leur cercle de soins, ou entre membres de ces groupes, qui ont lieu à distance et qui utilisent une forme de technologie de l’information ou des communications1. » Les consultations virtuelles présentent de nets avantages dans les régions où l’accès aux soins et les ressources sont limités, pour les personnes à mobilité réduite ainsi que pour les patients sans médecins de famille. Il s’agit également d’une solution attrayante pour ceux pour qui les rendez-vous en personne sont difficiles.
Le Canada a mis du temps à réagir à l’intérêt de la population pour les soins virtuels. De récents sondages ont révélé que les deux tiers des Canadiens souhaiteraient consulter leur médecin virtuellement2, mais que seulement 18 % des médecins de famille effectuent des consultations par courriel ou message texte, et à peine 5 % par vidéoconférence3. Les médecins craignent qu’un tel accès crée des problèmes de confidentialité et de permis d’exercice. Ils disent aussi ne pas disposer de l’équipement nécessaire pour offrir ces services et craignent que ces services nuisent à leurs revenus4.
Le secteur privé a en grande partie pris les devants de l’offre de soins virtuels au Canada. Le fonctionnement de notre système de santé financé par l’État risque d’être menacé s’il ne parvient pas à intégrer cette technologie et à promouvoir ces nouveaux types d’accès. Nos trois organisations ont cru important de procéder à une analyse du contexte actuel afin d’offrir des pistes pour l’avenir. Des principes et des recommandations ont ensuite été formulés par des sous-groupes de travail sur l’interopérabilité et la gouvernance, sur le permis d’exercice et la qualité des soins, sur le mode de rémunération, et sur l’enseignement de la médecine. Trois thèmes se rapportent particulièrement à la médecine de famille :
offrir les soins virtuels dans le cadre de la continuité d’une relation préétablie avec un médecin, une clinique ou un service de santé ;
s’assurer qu’une consultation virtuelle convient pour répondre au problème du patient et que les soins dispensés virtuellement satisfont aux mêmes normes que les soins « en personne » ; et
mettre en place l’infrastructure technique nécessaire et le mode de rémunération approprié pour appuyer la prestation de soins virtuels.
Les avantages d’avoir un prestataire de soins principal s’appuient sur des preuves convaincantes5. La technologie virtuelle doit favoriser la continuité des soins et minimiser leur fragmentation. Il faut que les rendez-vous virtuels et en personne soient assujettis aux mêmes normes, notamment en ce qui concerne la préparation, la documentation et l’efficacité du suivi et l’orientation vers d’autres professionnels de la santé. Les services médicaux virtuels doivent être financés par les fonds publics, à l’instar des services en personne, et rémunérés de façon similaire. Le déroulement du travail étant particulièrement important en médecine de famille, il est essentiel que les équipes bénéficient d’une infrastructure technique adéquate et que les rôles soient bien attribués. En Colombie-Britannique, en Ontario et en Alberta, des innovations sont en bonne voie.
Le Plan d’action pour la médecine rurale (www.cfpc.ca/plan_action_rural/)6 souligne le besoin de réduire les obstacles interprovinciaux à l’obtention du permis d’exercice. La FOMC tente actuellement d’établir une entente de télémédecine qui permettrait aux médecins d’offrir des soins virtuels aux patients d’autres provinces et territoires en utilisant leur permis provincial, demeurant ainsi sous la juridiction de l’ordre des médecins de leur province de résidence.
L’interopérabilité est la capacité des systèmes informatiques à s’échanger des renseignements de santé. Bien qu’il n’existe aucun indicateur exhaustif pour l’évaluer, l’expérience laisse présager qu’il reste encore beaucoup à faire à. Avec les soins virtuels, l’ensemble des renseignements longitudinaux sur la santé d’une personne devrait être recueilli dans un seul et unique dossier numérique auquel le patient et tous les membres de son cercle de soins ont accès. De rigoureux protocoles permettraient de maintenir la propriété, la gestion, l’autonomie, la sûreté et la confidentialité de ces dossiers, ainsi que l’intégrité de leurs données et la qualité des soins.
Selon un sondage mené récemment dans les facultés de médecine, il y aurait un manque d’uniformité entre universités dans le langage employé pour parler de cybersanté et dans la façon de l’enseigner7. Ce sondage a également souligné l’importance de promouvoir de bonnes pratiques chez les apprenants, tant en matière de soins virtuels que dans toute interaction avec les patients. Les milieux d’enseignement doivent veiller à ce que les enseignants connaissent bien ces pratiques exemplaires et les outils employés pour les soins virtuels afin de s’assurer que les patients sont examinés et traités de façon sécuritaire et confidentielle. Comme la formation médicale est délocalisée, la situation du superviseur par rapport à l’apprenant et aux patients ainsi que sa capacité à encadrer l’évaluation des patients et les décisions relatives aux soins sont essentielles à la sécurité des patients. Le CMFC est prêt à collaborer avec l’Association des facultés de médecine du Canada et le Collège royal pour adapter les rôles CanMEDS et les normes d’agrément dans le but d’enclencher la transformation culturelle qu’exige ce changement dynamique dans l’exercice de la médecine.
Veuillez consulter le rapport du groupe de travail sur notre site Web. Nous avons besoin de connaître votre avis afin de nous assurer que le développement des soins virtuels bonifie l’expérience des médecins de famille, de nos patients et de nos apprenants.
Remerciements
Nous remercions les coprésidents du groupe de travail, Dr Ewan Affleck (CMFC), Dre Gigi Osler (Association médicale canadienne) et Dr Doug Hedden (Collège royal), tous ceux qui y ont participé, ainsi que l’Association médicale canadienne, qui a rédigé ce rapport et coordonné sa production.