Résumé
Objectif
L’absence de préparation du système de soins psychiatriques à l’épidémie de virus SARS-CoV-2 fait redouter fait redouter un scénario pessimiste pour la santé physique et mentale des patients suivis en psychiatrie. L’objectif de cet article est de proposer des éléments de guidance pour réorganiser les soins psychiatriques dans le contexte de pandémie Covid-19.
Méthode
Les auteurs ont réalisé une synthèse de la littérature internationale combinée au partage des expériences locales françaises.
Résultats
Les patients souffrant de troubles psychiques semblent particulièrement vulnérables à ce virus et à la pandémie : vulnérabilités liées aux comorbidités médicales, à l’âge, aux troubles cognitifs qui peuvent entraver le respect des consignes de confinement et aux complications psychosociales. Plusieurs initiatives ont été prises pour assurer la continuité des soins et contenir l’épidémie : création en psychiatrie d’unité Covid+ co-supervisée par des médecins généralistes ou internistes, restriction des consultations aux cas sévères et redéploiement des soins en téléconsultation, accompagnement de type case-management pour les sorties précoces ou l’impossibilité d’hospitaliser, accompagnements spécifiques pour les complications psychiques du confinement. Les populations suivies en pédopsychiatrie, en psychiatrie du sujet âgé, en addictologie ou détenues en prison doivent bénéficier d’une attention particulière. Plusieurs questions restent en suspend : la question de l’interaction négative ou positive des traitements sur l’infection SARS-CoV-2, l’épidémiologie de l’infection chez les personnes souffrant de troubles psychiques, leur adaptation à un confinement long.
Discussion
Une prise de conscience par les décideurs politiques de la grande vulnérabilité de ces populations et des institutions psychiatriques dans cette situation de catastrophe sanitaire est urgente.
Mots clés: Coronavirus, Covid-19, SARS-CoV-2, Santé mentale, Épidémie, Pandémie, Psychiatrie, France
Abstract
Objective
The lack of ressources and coordination to face the epidemic of coronavirus raises concerns for the health of patients with mental disorders in a country where we keep in memory the dramatic experience of famine in psychiatric hospitals during the Second World War. This article aims at proposing guidance to ensure mental health care during the SARS-CoV epidemy in France.
Methods
Authors performed a narrative review identifying relevant results in the scientific and medical literature and local initiatives in France.
Results
We identified four types of major vulnerabilities in patients suffering from mental disorders during this pandemic: (1) medical comorbidities that are more frequently found in patients suffering from mental disorders (cardiovascular and pulmonary pathologies, diabetes, obesity, etc.) which represent risk factors for severe infections with Covid-19; (2) age (the elderly constituting the population most vulnerable to coronavirus); (3) cognitive and behavioral troubles which can hamper compliance with confinement and hygiene measures and finally and (4) psychosocial vulnerability due to stigmatization and/or socio-economic difficulties. Furthermore, the mental health healthcare system is more vulnerable than other healthcare systems. Current government plans are poorly adapted to psychiatric establishments in a context of major shortage of organizational, material and human resources. In addition, a certain number of structural aspects make the psychiatric institution particularly vulnerable: many beds are closed, wards have a high density of patients, mental health community facilities are closed, medical teams are understaffed and poorly trained to face infectious diseases. We could also face major issues in referring patients with acute mental disorders to intensive care units. To maintain continuity of psychiatric care in this pandemic situation, several directions can be considered, in particular with the creation of Covid+ units. These units are under the dual supervision of a psychiatrist and of an internist/infectious disease specialist; all new entrants should be placed in quarantine for 14 days; the nurse staff should benefit from specific training, from daily medical check-ups and from close psychological support. Family visits would be prohibited and replaced by videoconference. At the end of hospitalization, in particular for the population of patients in compulsory ambulatory care situations, specific case-management should be organized with the possibility of home visits, in order to support them when they get back home and to help them to cope with the experience of confinement, which is at risk to induce recurrences of mental disorders. The total or partial closure of mental health community facilities is particularly disturbing for patients but a regular follow-up is possible with telemedicine and should include the monitoring of the suicide risk and psychoeducation strategies; developing support platforms could also be very helpful in this context. Private psychiatrists have also a crucial role of information with their patients on confinement and barrier measures, but also on measures to prevent the psychological risks inherent to confinement: maintenance of sleep regularity, physical exercise, social interactions, stress management and coping strategies, prevention of addictions, etc. They should also be trained to prevent, detect and treat early warning symptoms of post-traumatic stress disorder, because their prevalence was high in the regions of China most affected by the pandemic.
Discussion
French mental healthcare is now in a great and urgent need for reorganization and must also prepare in the coming days and weeks to face an epidemic of emotional disorders due to the containment of the general population.
Keywords: Coronavirus, Covid-19, SARS-CoV-2, Epidemy, Pandemy, Psychiatry, France
Introduction
La France et nombre de pays traversent une crise sanitaire sans précédent : l’épidémie de coronavirus SARS-CoV-2 qui sévit depuis décembre 2019 s’est rapidement transformée en pandémie et l’OMS a nommé le syndrome dû à ce virus Covid-19 (coronavirus disease 2019). À la date du 21 février 2020, il y avait 12 cas en France et une personne décédée. Un mois plus tard, ce sont 25 600 cas et 1331 décès [1].
L’absence de préparation, de coordination et le manque de moyens pour faire face à l’épidémie de coronavirus SARS-CoV-2, dans un contexte où la psychiatrie était déjà en difficulté, font redouter les scénarios les plus sombres pour la santé des patients suivis en psychiatrie. Le 6 mars, le plan blanc a été déclaré pour les hôpitaux généraux, plan inadapté aux réalités hospitalières psychiatriques, et négligeant la santé mentale d’une façon générale [2]. L’expérience de la famine dans les hôpitaux psychiatriques en France lors de la seconde guerre mondiale est un exemple du tribut que paient ces populations parmi les plus vulnérables en temps de crise [3], [4]. Entre 1940 et 1945, 76 000 personnes sont mortes dans les hôpitaux psychiatriques, dont 45 000 à cause de la faim et de ses complications. À l’issue d’une enquête historique, l’hypothèse d’une extermination active a été repoussée au profit de celle d’un abandon des populations psychiatriques par une société vivant sous le régime du rationnement. Les travaux historiques ont aussi mis en avant la détermination de psychiatres dans ce contexte d’impuissance généralisée à renouer avec l’idée de guérison, pour pouvoir faire sortir à tout prix les « aliénés » de l’asile, privé des ressources les plus élémentaires [4], [5]. Ainsi, la pénurie d’insuline et de cardiazol dès 1940 promeut la sismothérapie mieux tolérée que ces deux thérapies. Les « sorties d’essai » (aujourd’hui permission) voient aussi le jour dans ce contexte. En un mot, des éléments fondateurs de la psychiatrie contemporaine avaient été initiés dans le contexte de la guerre.
Forts de cette mémoire, dans ce contexte de crise sanitaire historique, cet article propose de faire une synthèse des connaissances actuelles concernant la prise en charge des patients suivis en psychiatrie dans le contexte épidémique, d’identifier les questions sans réponse à ce jour, et de partager l’expérience et les initiatives de certains services/praticiens du pays pour assurer la continuité des soins et préserver la santé des patients. Illustrant l’impréparation aux épidémies de nos systèmes de soin en général, et de la psychiatrie en particulier, ce n’est que tardivement, soit le 23 mars 2020, que le ministère des Solidarités et de la Santé a publié une fiche de consignes et recommandations applicables à l’organisation des prises en charge dans les services de psychiatrie et les établissements sanitaires autorisés en psychiatrie et que la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) a saisi le ministre de la Santé pour demander des mesures spécifiques pour la psychiatrie [6], [7]. Dans ce contexte exceptionnel, « l’union sacrée » de tous les acteurs de la santé mentale est essentielle et doit permettre d’inventer dans un délai record des pratiques de soins permettant de préserver au maximum les patients et leurs soignants.
Vulnérabilité des patients de la psychiatrie au Covid-19
Le risque infectieux, la situation de confinement et l’absence de préparation à cette vague épidémique, sont, plus encore que pour d’autres disciplines médicales, trois contraintes qui pèsent sur les soins psychiatriques. Parmi les centaines d’articles en lien avec la santé mentale, parus autour de la pandémie, nous avons identifié deux lettres à l’éditeur portant sur les patients hospitalisés en psychiatrie en Chine [8], [9]. Les confrères chinois alertent sur le sort des populations souffrant de troubles psychiques et partagent leur expérience, déplorant le manque d’intérêt des autorités et de la communauté scientifique à leur égard.
Vulnérabilité individuelle des patients de la psychiatrie au coronavirus
Dans ce contexte de pandémie, les patients souffrant de troubles psychiques sont triplement vulnérables à l’épidémie.
Vulnérabilité liée aux comorbidités
Hors contexte épidémique, les patients hospitalisés en psychiatrie souffrant de schizophrénie, de trouble bipolaire, de dépression, de trouble anxieux ou d’autisme présentent un surrisque d’infections à pneumocoques [10]. Plus largement, en raison d’une vulnérabilité croisée immunogénétique, ces patients ont souvent une moins bonne capacité à se défendre face aux infections comme le montrent les associations épidémiologiques entre troubles psychiatriques et de très nombreuses infections (toxoplasmose, herpès…) au cours de pathologies psychiatriques [11]. En outre, ils sont beaucoup plus souvent que la population générale atteints de comorbidités (pathologies cardiovasculaires et pulmonaires, diabète, obésité, consommation de tabac inhalé) qui sont des facteurs de risque d’infection sévère à SARS-CoV-19 (Encadré 1 ) [12]. En effet, la prévalence des maladies cardiovasculaires est comprise entre 30 et 60 % avec une prévalence 1,5 à 2 fois plus élevée chez les personnes souffrant de pathologie psychiatrique comparativement à la population générale. Les mêmes taux sont observés pour l’obésité dans ces populations [13]. Ces comorbidités, souvent insuffisamment dépistées et traitées, sont en grande partie responsable d’une diminution de l’espérance de vie de 10 à 15 ans chez les patients présentant un trouble psychiatrique chronique comparativement à la population générale [14].
Encadré 1. Covid-19 : les problématiques spécifiques de l’addictologie.
Covid-19 : les problématiques spécifiques de l’addictologie
Tabac :
Il existe une forte prévalence de patients fumeurs parmi les patients ayant des troubles liés aux substances psychoactives. Dans le contexte du Covid-19, la consommation actuelle du tabac a été associée à une augmentation de 1,4 du risque de faire une forme sévère de la maladie et de 2,4 du risque de nécessiter des soins en réanimation [32]. Les données montrent également une moindre augmentation du risque chez les anciens fumeurs.
Alcool :
Les patients ayant des troubles liés à l’usage d’alcool (TLUA) ont une vulnérabilité aux infections pulmonaires comparativement à la population générale [28], [33]. Les TLUA sont également associés à un pronostic plus péjoratif en termes de mortalité et de retard de prise en charge médicale des pneumonies. Cette aggravation est probablement en lien avec une toxicité directe au niveau pharyngé et pulmonaire, ainsi qu’une moindre immunité cellulaire au niveau alvéolaire [34]. On peut craindre que ces mêmes mécanismes aggravent le pronostic des patients TLUA dans le cadre de l’épidémie à SARS-CoV-2. Il y a un risque de retard diagnostique également dans le cadre des présentations atypiques du Covid-19 comme de l’agitation, des hallucinations et des crises convulsives qui peuvent être attribuées à tort aux consommations ou à un sevrage complexe en alcool.
Il a été montré que lors des catastrophes, les consommations d’alcool peuvent augmenter en population générale, dans un objectif anxiolytique et de gestion des émotions négatives. Bien qu’il n’ait pas été montré une augmentation franche de l’incidence des TLUA, les consommations peuvent rester plus importantes durant plusieurs années après l’événement [35]. Une étude chinoise après la première épidémie de SARS (Severe Acute Respiratory Syndrome) en 2003 a montré que les soignants ont été particulièrement affectés. Ils souffraient à la fois de syndrome post-traumatique en lien avec les traumas subis au travail et de troubles liés à l’alcool jusqu’à 3 ans après l’épidémie [36].
Autres substances psychoactives :
Il n’y a pas de données chinoises par rapport aux autres substances psychoactives, notamment les opioïdes. Les opioïdes ont un impact au niveau respiratoire, notamment en inhibant le réflexe de toux et aux fortes doses provoquant une diminution de la fréquence respiratoire. Ces patients sont souvent désinsérés socialement et particulièrement méfiant face à la médecine. Ceci peut contribuer aux retards de demandes de prise en charge aux urgences. Les présentations atypiques du Covid avec un tableau plutôt neuropsychiatrique peuvent également être attribués à l’usage des substances ou au sevrage.
Vulnérabilité liée à l’âge
Les personnes âgées constituent la population la plus vulnérable au risque épidémique, et il existe un risque élevé d’exacerbation de troubles psychiques et d’aggravation des symptômes psychiatriques existants, de troubles cognitifs et de perte d’autonomie (Encadré 2 ). Les enfants de moins de 16 ans semblent présenter moins de formes graves que les adultes (171 cas en Chine, moyenne d’âge de 6,7 ans, 22 cas hospitalisés dont trois cas relevant de la réanimation) [15]. En France, le 26 mars, une adolescente de 16 ans sans comorbidité est décédée de détresse respiratoire. Par ailleurs, les enfants et adolescents souffrant de troubles psychiques pourraient moins supporter le confinement (Encadré 3 ). Le taux de mortalité va croissant avec l’âge et le nombre de comorbidités.
Encadré 2. La psychiatrie du sujet âgé face à la pandémie.
La psychiatrie du sujet âgé face à la pandémie
Les personnes âgées payent le plus lourd tribut en termes de mortalité liée à l’infection Covid 19. En effet, la mortalité augmente avec l’âge et s’élève à 14,8 % chez les plus de 80 ans, contrastant avec le taux observé chez les moins de 40 ans, évalué à 0,2 % [19]. Les troubles psychiatriques sont fréquents dans la population générale âgée, et la transmission rapide du Covid-19, le taux de mortalité associée élevé, et les conséquences de la réorganisation des soins et des mesures de confinement font craindre une exacerbation du risque de troubles psychiques et d’aggravation des symptômes psychiatriques existants, de troubles cognitifs et de perte d’autonomie.
La réorganisation des soins hospitaliers nécessite un renforcement des mesures visant à protéger cette population vulnérable du risque d’infection nosocomiale au Covid-19, qui peut être propagé à leur dépens par les soignants et les autres patients, et dont l’expression clinique pourrait être partiellement différente dans cette population (confusion, chutes, etc.). Ces mesures de prévention comprennent les mesures barrières strictes, mais également le port de masque systématique par les soignants et la création d’unités « Covid free ». Certains patients Covid+ présentant un trouble neurocognitif sévère, parfois incapables de respecter les mesures barrières et d’isolement, soulèvent également des questions éthiques sur leur conditions de prise en charge.
Les personnes âgées souffrent plus fréquemment de solitude, à même d’être exacerbée dans ce contexte épidémique. Elles ont également un accès limité aux outils technologiques développés pour les sujets plus jeunes souffrant de troubles psychiatriques. De plus, les personnes âgées cliniquement stables souffrant de troubles psychiatriques doivent généralement se rendre régulièrement dans les centres de soins psychiatriques. Or, les mesures de quarantaine actuelles et les restrictions des transports publics sont inévitablement devenues un obstacle majeur à l’accès aux soins pour cette population. Enfin, la restriction des interventions des équipes mobiles de psychiatrie dans les EHPAD compromettent également le suivi et la prise en charge psychiatrique de nombreuses personnes.
La psychiatrie du sujet âgé doit donc faire face avec cette crise à de nombreux enjeux médicaux et éthiques dans un contexte de pénurie de personnel dédié, aggravé par les exclusions temporaires des personnels contaminés. La réorganisation rapide, réfléchie et coordonnée est en cours et doit aboutir dès que possible afin de faire face aux besoins actuels et d’anticiper les besoins futurs qui seront probablement plus importants encore au sortir de la vague épidémique.
Encadré 3. La pédopsychiatrie au risque de la pandémie.
La pédopsychiatrie au risque de la pandémie
L’épidémie pose la question de l’inégalité devant la maladie, les soins et les ressources. Parmi les personnes vulnérables et les situations à risque il y a les bébés, enfants et adolescents suivis en pédopsychiatrie et leurs familles. En particulier, l’inquiétude porte sur les enfants et adolescents qui ont des troubles du développement et des troubles du spectre autistique, qui souffrent de TDAH, de TOC ou qui ont des comportements d’opposition par exemple et qui doivent rester confinés. Pour eux, les soins à distance ne sont pas aussi efficients. Par ailleurs, le confinement pourrait aussi aggraver les troubles psychiques d’adolescents qui ont des idées suicidaires ou qui s’auto-mutilent gravement, de jeunes patients souffrant d’une schizophrénie en difficulté pour accepter les mesures de confinement, ou encore ceux qui ont des troubles graves du comportement alimentaire et qui sont confrontés aux nouveaux rapports à la nourriture en temps d’épidémie. Enfin, il existe également une catégorie d’enfants vulnérables, ceux de l’aide sociale à l’enfance ou les mineurs non accompagnés.
Par ailleurs, le coronavirus a commencé à toucher les enfants et les adolescents, et il est nécessaire d’anticiper les besoins de soins de ces populations dans les services de pédopsychiatrie et les unités « Covid-psy ». Mais l’inquiétude naît de la possible inadéquation entre les ressources disponibles et le niveau des besoins.
Les services de pédopsychiatrie se sont adaptés (ou sont en train de le faire) pour organiser des suivis ambulatoires au téléphone ou en vidéoconférence, et les hospitalisations se sont recentrées sur les urgences. Mais la hiérarchisation des besoins est souvent difficile à réaliser dans des situations de confinement où les tensions intrafamiliales s’exacerbent parfois et où la réalité de la maladie et de la mort renforce les fragilités et les expressions comportementales. Plusieurs services proposent déjà des guides pour aider les parents et tous ceux qui sont proches d’eux, et qui sont à disposition de tous les professionnels de santé. Cela représente une avancée pour l’après, mais il reste beaucoup à faire pour les aider à résister.
Cette crise est aussi révélatrice des forces et des faiblesses de notre système de soins. Or la pédopsychiatrie, toutes les tutelles en conviennent, est dans une situation de tension, et cette pandémie ne manquera pas de le démontrer de nouveau.
Vulnérabilité cognitive et comportementale
Malgré l’absence de données scientifiques à ce sujet, l’expérience clinique montre que les personnes souffrant de troubles psychiques sévères peuvent être en difficulté pour adopter les « mesures barrières » (mesures comportementales pour se protéger et protéger les autres du virus) et respecter les consignes de confinement. Si le non-respect des consignes sanitaires de confinement s’inscrit dans un épisode de décompensation de la pathologie psychiatrique, une hospitalisation peut être envisagée. Étonnamment, des cas isolés d’hospitalisation sans consentement ont été observés pour le seul motif du non-respect des mesures de confinement chez des patients stabilisés sur le plan psychiatrique. Il s’agit d’un point de vigilance : le non-respect d’une obligation citoyenne ne constitue pas à lui seul un motif d’hospitalisation, au risque de saturer rapidement les capacités d’hospitalisation en psychiatrie et plus fondamentalement de ne pas respecter la loi et les libertés individuelles.
Vulnérabilité psychosociale
Les conditions de vie socio-économiques des patients aggravent le pronostic lié au confinement : fort isolement social des patients, logements précaires, peu de réseau de solidarité permettant une surveillance informelle de l’état de santé de ces personnes. Par ailleurs, les confrères chinois ont rapporté qu’en cas de forme sévère du Covid-19, la stigmatisation retardait leur accès aux soins et altéraient leur qualité [8]. Ce phénomène a été décrit pour tous les troubles psychiatriques sévères dans tous les pays [16], [17]. De plus, la vulnérabilité des populations psychiatriques carcérales est encore plus élevée et des mesures spécifiques peuvent être anticipées (Encadré 4 ) [18].
Encadré 4. Psychiatrie en milieu pénitentiaire.
Psychiatrie en milieu pénitentiaire
Les équipes soignantes des unités sanitaires en milieu pénitentiaire (USMP) et les personnels pénitentiaires se préparent à l’accueil de personnes détenues contaminées. Les liens avec les équipes en charge des soins en médecine générale doivent être renforcés pour le repérage et la prise en charge de ces patients au sein de la détention. La réorganisation de l’offre de soin en prison s’organise autour de mesures visant à diminuer les risques de contamination comme dans les établissements de santé accueillant les personnes placées sous-main de justice (PPSMJ) dans le cadre d’hospitalisations complètes en centre hospitalier (universitaire, général ou monodisciplinaire) et en unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA). Les 9 UHSA du territoire national disposent toutes d’un secteur dédié permettant de maintenir une offre de soin psychiatrique aux détenus nécessitant une hospitalisation complète.
D’autres questions se posent et sont à ce jour sans réponse. Notre vigilance doit être particulièrement accrue dans cette situation d’incertitude.
La possibilité de formes cliniques spécifiques
Si plusieurs infections par des virus respiratoires dont le SARS-CoV-1 peuvent produire des tableaux neurologiques (encéphalites, crises convulsives), il n’existe pas de données concernant le SARS-CoV-2 [20], [21]. À noter, une récente alerte épidémiologique sur les formes anosmiques et agueusiques sans congestion nasale du Covid-19 qui pourraient être en lien avec une atteinte neurologique [22]. De fait, les coronavirus sont possiblement neurotropes et peuvent pénétrer dans le cerveau via le système olfactif [23]. À ce jour, il n’y a aucune donnée structurée disponible pour connaître l’épidémiologie, la présentation clinique et le pronostic des patients de la psychiatrie souffrant de Covid-19. Le partage d’expérience en France attire l’attention sur le fait que pour plusieurs patients français, c’est un épisode de confusion fébrile, aux allures de décompensation psychiatriques (dont crise clastique), qui a fait diagnostiquer une infection à SARS-CoV-2. En période épidémique, la recherche de symptômes de Covid-19 et la prise des constantes vitales doivent donc impérativement être réalisées systématiquement devant une décompensation psychiatrique.
La possibilité d’interaction avec les psychotropes
Le Covid-19 pourrait modifier les concentrations sanguines de certains psychotropes, notamment la clozapine ou le lithium. Par conséquent, comme pour tout épisode aigu, surveiller les concentrations sanguines des psychotropes à marges étroites (clozapine, lithium) semble être une mesure de prudence. Par ailleurs, les pneumopathies à germe intracellulaire sont connues pour être hyponatrémiantes (SIADH) et les antidépresseurs sérotoninergiques peuvent l’être aussi. De plus, en cas de fièvre la tolérance des antipsychotiques peut être altérée, tout particulièrement en ce qui concerne la clozapine [24]. Enfin, le Covid-19 est responsable d’un syndrome respiratoire qui pourrait se trouver aggravé par les psychotropes dépresseurs du système respiratoire (benzodiazépine, carbamates, opioïdes). L’apparition de symptômes respiratoires, doit conduire à réévaluer la balance risque–bénéfice de ces traitements. Par ailleurs, plusieurs publications font état de l’efficacité in vitro de certains psychotropes sur des virus proches du coronavirus : notamment, le lithium et la chlorpromazine (avec une efficacité supérieure à la chloroquine mais ces données exclusivement précliniques ne permettent pas à ce jour de valider une utilisation clinique de ces traitements [25], [26]).
Le point le plus important actuellement est le probable surrisque de mortalité pour les personnes souffrant de troubles psychiques. À la date du 13 mars en Italie, sur 3200 décès identifiés comme liés au Covid, seules deux personnes avaient moins de 40 : une femme de 39 ans atteinte d’une néoplasie décédée à l’hôpital et un homme de 39 ans atteint de troubles psychiatriques compliqués de diabète et d’obésité mort seul à son domicile [27].
Vulnérabilité de l’organisation des soins psychiatriques à la pandémie
Face au nombre croissant de décès, le pouvoir exécutif a décidé par une série d’arrêtés de freiner la progression du virus dans la population pour limiter l’engorgement du système de santé. Pour la première fois dans l’histoire du pays, le confinement de la population française est déclaré le 16 mars 2020 [28]. Les hôpitaux avaient été mobilisés en amont, le 6 mars, avec le déclenchement du plan blanc par le ministre de la Santé, avec notamment la mobilisation de la réserve sanitaire. Les activités non urgentes sont déprogrammées et les moyens logistiques et humains sont concentrés autour du soin aux personnes atteintes du Covid-19. Ainsi, les chirurgies programmées sont suspendues, permettant de libérer les respirateurs des blocs pour créer de nouveaux lits de soins intensifs. Dans les EHPAD et les établissements accueillant des personnes handicapées, le plan bleu (crée après la canicule de 2003) est activé le même jour permettant de réorganiser les établissements en quelques jours pour faire face au virus.
Force est de constater que dans les faits, ces plans sont inadaptés aux hôpitaux/établissement/service de psychiatrie. Depuis 10 ans, plusieurs voix s’étaient élevées pour demander l’adaptation des mesures du plan blanc à la psychiatrie, l’inclusion des psychiatres dans l’élaboration de ces plans, et la nécessité de créer un plan blanc psychologique et psychiatrique [2], [29]. Les réponses apportées aujourd’hui face à la pandémie sont bien en deçà de ce qu’il faudrait voir déployer pour protéger les patients et les soignants de ces structures, dans un contexte de pénurie de ressources organisationnelles et logistiques (matériel médical de protection notamment). À titre d’exemple, le centre hospitalier Sainte-Anne, à Paris, n’avait pas été recensé dans le plan de répartition des masques [30].
L’expérience chinoise a mis en évidence des facteurs de vulnérabilité des hôpitaux psychiatriques au risque de transmission au Covid-19, rapportant ainsi un cluster dans un hôpital psychiatrique de Wuhan avec 50 patients et 30 soignants atteints [9] :
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le fait que les services de psychiatrie soient fermés, densément peuplés et que la vie y soit structurée de façon communautaire (notamment les chambres doubles, les repas en commun, les salles d’activité) ;
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le sous-équipement matériel et le faible entraînement du personnel pour faire face aux pathologies infectieuses d’une façon générale et plus spécifiquement contre les pathologies respiratoires (absence d’oxygène notamment) ;
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la difficulté pour sensibiliser les patients et leur faire adopter les mesures barrières et l’isolement infectieux ;
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de nombreux membres du personnel soignant ont présenté des signes d’épuisement professionnel.
À cela nous pouvons ajouter l’éloignement des hôpitaux psychiatriques et des services de médecine somatique, et notamment des services de réanimation, tant sur le plan géographique que de la culture professionnelle. Le stigma persistant que portent les patients suivis en psychiatrie, et la difficulté pour les services de MCO d’accueillir des patients souffrant de troubles psychiques décompensés en l’absence d’équipe de psychiatrie de liaison. Cette difficulté est chronique. Ainsi, après un infarctus du myocarde, les patients souffrant de schizophrénie bénéficient moins souvent de gestes de revascularisation, le taux d’intervention étant abaissé de 47 % [31]. En temps de crise cette difficulté est exacerbée.
Réorganisation des établissements psychiatriques dans l’effort sanitaire de lutte contre l’épidémie–l’exemple des unités Covid+
À partir du constat de ces vulnérabilités, nous rapportons ici l’expérience internationale rapportée dans la littérature et l’expérience française d’établissements psychiatriques pour contenir l’épidémie et poursuivre les soins psychiatriques.
En Chine, les centres de santé mentale ont été confinés rapidement :
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tout nouvel entrant était placé en quarantaine pendant 14 jours dans une unité de pré-admission organisée spécifiquement pour l’épidémie ;
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une enquête sur les potentiels contacts (moins d’un mètre pendant plus de 15 minutes) était menée permettant de contacter les personnes concernées et de les placer en quarantaine ;
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le personnel de l’hôpital (soignants, agents hospitaliers, etc.) devait être réduit au minimum et leur température était prise à l’entrée et à la sortie, quotidiennement ;
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les visites étaient interdites et remplacée par des visioconférences. L’approvisionnement en nourriture et habits était interdit. La famille était tenue informée de l’état de santé et de confort de son proche hospitalisé régulièrement par téléphone ;
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un soutien psychologique en ligne a été proposé aux soignants.
Actuellement en France, plusieurs établissements psychiatriques ont très rapidement créé des unités dédiées (étage voire bâtiment en isolement) permettant de prendre en charge les patients souffrant de troubles psychiques et du Covid-19. Certaines sont supervisées par des psychiatres, en présence d’un médecin somaticien. D’autres sont des unités somatopsychiatriques. Au centre psychothérapique de Nancy, une unité Covid+ de 20 lits a été créée dès le 20 mars 2020 du fait de la situation épidémique avancée dans le Grand Est. Située dans un bâtiment isolé des autres services, elle intègre des personnels médicaux et paramédicaux de psychiatrie et de médecine générale (Annexe 1) pour un exemple de projet de service. Au CHU de Nantes, l’unité de 30 lits répartis en deux ailes distinctes est supervisée par deux médecins internistes, deux internes en médecine et un interne en pharmacie.
Dans certaines de ces unités dédiées au soin des patients souffrant de troubles psychiques et de Covid-19, le personnel est testé au Covid avant la prise de fonction dans l’unité (à ce jour par PCR, l’utilisation de sérologies serait plus pertinente) et doit autosurveiller l’apparition de symptômes quotidiennement. Le personnel est formé spécifiquement au soin du Covid (isolement gouttelettes et contact, soin spécifique, surveillance). Les critères d’hospitalisation dans ces unités sont un diagnostic formel d’infection à SARS-CoV-2 par PCR, un tableau clinique évocateur de Covid-19 (car le test n’est pas disponible partout et présenterait un taux important de faux négatifs) sans signe de gravité somatique (Tableau 1 ), et la nécessité de recevoir des soins psychiatriques en milieu hospitalier. La sortie des patients se fait après les 14 jours nécessaires à la diminution de la contagiosité, si l’état psychiatrique est stabilisé et que le patient est évalué comme capable de respecter les mesures de confinement. Au sein de l’unité un circuit patient et un circuit soignant permettent de limiter le risque de transmission avec un sas d’habillage pour les soignants, en pyjama jetable, portant un masque chirurgical et désinfectant régulièrement tout le matériel, y compris non médical (clé, téléphone, etc.). Les chambres sont vidées de tout matériel inutile et théoriquement chaque patient a son matériel médical dédié. En cas d’impossibilité, une désinfection du matériel se fait entre chaque patient. La vaisselle est à usage unique et le linge appartient à la filière linge infecté. Avant chaque entrée en chambre, le soignant s’habille avec une charlotte, une casaque, des lunettes de protection, des surchaussures et des gants remontant sur la casaque. Un bilan clinique et paraclinique et une fiche de surveillance spécifique ont été développés pour cette unité (Fig. 1, Fig. 2 ). La difficulté principale actuellement est de faire respecter par les patients les mesures d’isolement en chambre, avec la nécessité de recourir à une sédation pouvant péjorer l’évolution de la symptomatologie respiratoire. Un téléphone est laissé au patient qui peut contacter directement le poste de soins comme par exemple dans le service de psychiatrie de La Pitié-Salpêtrière.
Tableau 1.
Fréquence respiratoire > 24/min |
SpO2 < 95 % en air ambiant ou patient oxygéno-requérant |
Dyspnée se majorant progressivement ou rapidement |
Tachycardie supérieure à l’état de base (tachycardie présente à l’état de base chez les patients sous anticholinergiques) |
Malaise |
Altération importante de l’état général |
Décompensation d’une pathologie somatique sous-jacente |
Au centre hospitalier du Vinatier, à Lyon, deux unités Covid+ psychiatriques, dont l’une dédiée aux patients présentant des signes de gravité sans nécessité de réanimation, ont été créées. Un dispositif coordonné par des psychiatres et psychologues permet de soutenir par téléphone les professionnels exposés eux-mêmes en première ligne au risque infectieux et à des arbitrages thérapeutiques et éthiques difficiles dans ces unités.
Dans les services de psychiatrie au sein d’hôpitaux généraux (universitaires et non universitaires), la situation est également complexe. Les services de psychiatrie (patients et soignants) souffrent des mêmes types de représentations que celles évoquées précédemment. La juxtaposition dans un même établissement de structures financées par la T2A (MCO) et de structures financées en dotation annuelle de financement (psychiatrie) transforme souvent ces dernières en variables d’ajustement budgétaires dans des établissements fréquemment en plan de retour à l’équilibre budgétaire. Cette situation a été identifiée devant les parlementaires [37]. Si on peut espérer que la modification du financement en cours permette de faire évoluer les choses, aujourd’hui c’est une cause fréquente de sous-dotation budgétaire des services de psychiatrie par rapport aux services de médecine et de chirurgie. Au CHU de Clermont-Ferrand, paradoxalement c’est le manque de moyens des unités de psychiatrie en particulier l’absence de sanitaires individuels et la large prépondérance des chambres doubles qui a — pour une fois — eu un effet positif en termes de soins pour les patients Covid+. En effet, l’impossibilité de positionner une unité Covid au sein des services de psychiatrie du pôle a nécessité la création d’un dispositif Covid+ médico/psychiatrique intégré, au sein des unités de médecine qui ont été réorganisées, offrant ainsi les soins médicaux et psychiatriques les plus adaptés aux patients. Cette organisation reste tenable car pour le moment (26 mars 2020) la pression épidémique en Auvergne n’étant pas celle que connaissent d’autres régions françaises mais elle pourrait s’avérer insuffisante voire catastrophique si le nombre de malade venait à augmenter rapidement.
Au sein de CHS comme le Vinatier, de CHU tels que Clermont-Ferrand et l’AP–HP, une coordination de psychiatres et de psychologues de l’établissement ont permis le déploiement rapide d’une plateforme de soutien aux professionnels de l’établissement travaillant dans toutes les unités (MCO et psychiatriques), confrontés au stress majeur de cette épidémie d’une ampleur inconnue. Cela souligne, d’une part, la capacité de mobilisation opérationnelle des professionnels de la santé mentale, mais aussi, le rôle que nous pouvons et devons jouer en situation de crise, dans des structures de soins « somatiques » pour soutenir et protéger les professionnels.
Concernant la réalisation des séances d’électroconvulsivothérapie (ECT), tant que les anesthésistes ne sont pas appelés en renfort dans les services de réanimation, il est conseillé de les maintenir, en assurant la désinfection du matériel entre chaque patient, et la protection du personnel soignant. Dans tous les cas, les ECT devraient être préservées dans leurs indications urgentes. En cas d’indisponibilité des ECT, l’adaptation du traitement psychotrope doit être prioritaire. Pour les dépressions sévères, les perfusions de kétamine ou l’administration d’esketamine en intranasal ou la rTMS peuvent être proposées. Pour les catatonies, l’utilisation des benzodiazépines ou dérivés (lorazépam, zolpidem) et la substitution des traitements dopaminergiques par des molécules sédatives non dopaminergiques (type prométhazine) peuvent être envisagées.
Assurer le suivi des patients psychiatriques en situation ambulatoire forcée
Du fait de la nécessité de libérer des unités intrahospitalières pour faire face à l’épidémie, un certain nombre de patients ont vu leur sortie de l’hôpital anticipée en faveur d’un suivi extrahospitalier au cours des derniers jours. Les ruptures de soins en psychiatrie sont fréquentes en contexte de fonctionnement habituel du système de soins psychiatriques [38], [39]. Elles entraînent un nombre important de conséquences négatives pour les personnes atteintes de troubles psychiques (rechutes, conduites suicidaires, défaut d’accès aux soins médicaux, désinsertion psychosociale, isolement, etc.) [40]. De plus, les mesures de confinement sont de plus sont pourvoyeuses de symptômes dépressifs, anxieux, compulsifs à même de favoriser la rechute/récidive de troubles psychiques [41]. Un suivi de type case-management de transition à distance pourrait être prodigué pour cette population à haut risque. Il s’agira d’accompagner les patients dans leur expérience d’une double réalité : la sortie précoce de l’hôpital et l’expérience du confinement au domicile [42], [43], [44], [45]. Les patients sortis de l’hôpital n’ont pas eu la possibilité d’anticiper le confinement et risquent de se retrouver dans des situations de stress et d’inconfort majeurs. Un suivi téléphonique intensif doit être proposé dans les jours et semaines qui suivent la sortie de l’hôpital, afin de prévenir le risque suicidaire, limiter le risque de rupture de soin et de rechute, tout en favorisant une expérience la moins défavorable possible du confinement via des outils de psychoéducation aménagés (fiches repères, évaluation téléphonique de l’expérience du confinement, soutien aux aidants).
Le risque de décompensation psychiatrique au domicile constitue un enjeu majeur de la prise en charge psychiatrique, dans un contexte d’engorgement des circuits habituels d’intervention au domicile tel que le Samu ou SOS médecins. Dans certains centres, les services d’accueil des urgences générales (SAU) refusent les urgences psychiatriques en raison de l’utilisation de leurs lits pour les patients Covid+ (par exemple à Lyon, Colombes ou Bobigny). Les urgences psychiatriques ont pourtant augmenté du fait des fermetures de certains CMP, HDJ, CATTP, la réduction du nombre de lits de psychiatrie pour permettre un redéploiement vers les services de MCO et plus généralement les décisions de sorties précoces. Des unités d’interventions au domicile organisées sur le mode de l’urgence ou de la semi-urgence peuvent permettre une intervention spécialisée, ciblée et adaptée pour les cas les plus sévères. Le recueil téléphonique des demandes permet de distinguer les situations nécessitant une prise en charge téléphonique et celles, plus sévères, requérant une intervention au domicile. En cas d’intervention au domicile, les recommandations sur les mesures de protection liées au risque d’infection au Covid-19 doivent être appliquées (port de masque et de blouse, respect des gestes barrières…), de même que les mesures de sécurité habituelles pour les soignants intervenant à domicile et pour les personnes bénéficiaires de l’intervention (prévention du risque auto- et hétéroagressif, prévention du risque traumatique lié à une intervention coercitive). L’unité Psymobile, située au sein du centre hospitalier le Vinatier à Lyon, a ainsi recentré son activité à domicile vers le repérage et l’intervention dans les cas de décompensations psychiatriques aiguës sévères nécessitant une hospitalisation en urgence. Une équipe médico-infirmière peut ainsi se déplacer au domicile de patients, connus ou non de la psychiatrie, présentant un état de décompensation psychiatrique aiguë pour évaluer et orienter en urgence. En Île-de-France, les patients adultes avec autisme peuvent bénéficier de visites à domicile grâce à un partenariat entre le centre ressource autisme Île-de-France (CRAIF) et l’équipe autisme adulte de la Pitié-Salpêtrière. La préparation en amont des interventions, associée à une coordination précise du parcours de soin, constitue un point central du dispositif.
Autant que possible, les patients suivis habituellement en ambulatoire doivent bénéficier d’une continuité des soins organisée par leur service de référence. Avec l’arrêté du 15 mars, les pharmacies ont l’autorisation d’accepter les ordonnances expirées en cas de maladie chronique et de traitement prescrit depuis au moins 3 mois, et ce jusqu’au 31 mai pour limiter les interruptions de traitements [46]. Cette mesure a été complétée le 19 mars pour être applicable pour les traitements de substitution aux opiacés et les anxiolytiques et hypnotiques [47]. Les CMP, HDJ ou CATTP qui ont dû fermer pour respecter les consignes sanitaires organisent des téléconsultations infirmières et médicales, en conservant les possibilités d’accueil physique pour les situations les plus à risque. La fermeture de ces dispositifs de soin est particulièrement perturbante pour les patients souffrant de troubles psychotiques, nécessitant une explication adaptée et répétée de l’intérêt des mesures de confinement pour eux-mêmes et pour les autres. Il est conseillé tant que possible d’intensifier la fréquence notamment en cas de sortie précoce, d’impossibilité d’hospitaliser les patients, et du stress lié au confinement. L’évaluation du risque suicidaire doit notamment être répétée au cours du suivi, l’isolement créé par le confinement pouvant diminuer le risque suicidaire dans un premier temps par réduction d’accès au moyen mais possiblement le majorer dans le cas d’un confinement prolongé. La création de hotlines téléphoniques dédiées à la prise en charge des personnes en crise suicidaire est notamment recommandée, s’appuyant sur les dispositifs existants (centres de prévention du suicide, dispositifs VigilanS) ou la création de dispositifs dédiés. Le centre de prévention du suicide du centre hospitalier le Vinatier s’est ainsi réorganisé en hotline téléphonique réceptionnant des appels de personnes en crise suicidaire, ou de leur entourage personnel ou professionnel, afin d’évaluer l’intensité du risque suicidaire et proposer un suivi à distance adapté, sur le modèle des brief contact interventions [48]. De plus, la psychoéducation doit constituer un point central pour les patients suivis en ambulatoire et peut ici prendre la forme de fiches de prévention sur les précautions à prendre pour préserver sa santé mentale en période de confinement et sur la continuité de prise des traitements (Annexe 2). Pour les personnes souffrant d’addiction, le risque de sevrage doit être anticipé et prévenu.
Assurer la continuité des soins pour les patients en consultation libérale
Concernant les patients suivis en libéral, les psychiatres ont un rôle crucial d’information des patients sur les mesures de confinement et les mesures barrières visant à limiter la propagation de l’épidémie. Par ailleurs, la psychiatrie fait face à une nouvelle demande : celle des mesures de prévention et de lutte contre le stress lié à la pandémie. Les recommandations des organismes internationaux, des sociétés savantes et la littérature internationales mettent en avant [49] :
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maintien de l’hygiène du sommeil et de la régularité des rythmes, avec des repas à horaires réguliers et une alimentation saine et équilibrée ;
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planification d’activités avec la mise en place d’une certaine routine quotidienne ;
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l’exercice physique ;
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le maintien de liens sociaux quotidiens (sans nier l’utilité des réseaux sociaux virtuels, éviter qu’ils ne deviennent exagérément exclusifs) ;
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les techniques de relaxation et de méditation, si besoin en conseillant des sites ou des applications mobiles quand un accès à un(e) psychologue est difficile ;
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éviter d’initier ou de majorer sa consommation de substances (tabac, alcool, etc.) ;
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avoir connaissance des aides et des ressources disponibles (sites gouvernementaux et de l’OMS, fiches d’information, etc.) ;
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éviter de suivre l’information télévisée en continu (privilégier un temps consacré dans la journée) et ne pas s’exposer à la désinformation (fake news et informations non vérifiées sur les réseaux sociaux) ;
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garantir aux patients isolés et/ou âgés une dignité, un accompagnement et un accès adéquat aux denrées alimentaires et aux soins. Leurs familles doivent être tenues informées régulièrement et mobilisées quand cela est possible ;
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éviter la « coronaphobie » et la stigmatisation des personnes malades et des populations asiatiques qui alimentent le stress et la xénophobie [50].
Ce travail d’éducation à la santé est non seulement une contribution utile en termes de santé publique, mais il est psychiquement rassurant pour les patients et leurs proches. L’intégration de la composante altruiste du confinement est susceptible de favoriser son acceptation et son respect [51], [52].
Les autorités de santé encouragent fortement la téléconsultation et notamment la vidéoconférence, pour laquelle une revue systématique n’a pas mis en évidence de différence significative dans la satisfaction des patients et la fiabilité du diagnostic par rapport aux consultations en face-à-face [53].
Les conséquences psychiques de la pandémie sont difficiles à prédire et dépendront de multiples paramètres individuels et collectifs (vulnérabilité préalable, durée de la quarantaine, capacités de résilience, accès aux soins, qualité de la prise en charge, etc.), mais les patients devraient être informés du fait qu’il est naturel d’éprouver une peur de la contamination, des troubles du sommeil passagers, une inquiétude pour ses proches, une irritabilité, un sentiment de frustration, d’impuissance et d’ennui, cette gamme d’émotions négatives fréquemment ressenties dans ce type de situation [49], [54]. Ces symptômes modérés à court terme sont néanmoins susceptibles d’évoluer à long terme vers des troubles de l’adaptation, des troubles anxieux et dépressifs, des addictions, et des syndromes de stress post-traumatique ; ils nécessitent donc d’être à la fois dédramatisés et surveillés.
L’apparition de symptômes significatifs et répétitifs dans le temps, tels que des attaques de panique, des insomnies persistantes–surtout si elles sont accompagnées de cauchemars et/ou d’hypervigilance diurne, les troubles cognitifs, une majoration de la consommation de substances, une anhédonie voire l’apparition d’idées suicidaires ne devraient pas être banalisés, mais diagnostiqués et traités de façon appropriée.
En effet, compte tenu de la situation épidémique actuelle, l’actualité sur le Covid-19 va continuer de faire la une des médias, faisant un décompte quotidien du nombre de décès, ce qui est pourvoyeur de stress et d’anxiété pour ceux qui s’y exposent intensément. Par ailleurs, parce que la quarantaine ne sera pas levée dans un avenir proche, nous avons des raisons de croire que la prévalence de symptômes psychotraumatiques parmi le public sera potentiellement important.
Une étude chinoise a montré que la prévalence de symptômes significatifs de stress post-traumatique (SSPT) à un mois après le début de l’épidémie de Covid-19 dans les régions les plus touchées était de 7 % [55]. Les facteurs prédictifs de SSPT étaient le sexe féminin (dans cette étude, les femmes souffraient davantage de souvenirs intrusifs, d’altérations négatives de la cognition ou de l’humeur et d’hypervigilance) et une mauvaise qualité de sommeil, ce dernier facteur étant, selon les auteurs, lié à la fois à l’apparition et au maintien de SSPT.
Les psychiatres libéraux peuvent également jouer un rôle important dans l’optimisation des soins médicaux reçus par les patients souffrant de troubles psychiques, troubles pour lesquels ils sont susceptibles de pâtir d’une double stigmatisation sociale et médicale. Cela passe par un travail de collaboration ville-hôpital, mais aussi par une sensibilisation et une éducation des équipes médicales des autres spécialités aux perspectives de la santé mentale. L’enjeu, crucial, est de permettre aux patients de bénéficier d’interventions médicales aussi précoces et d’aussi bonne qualité que les personnes ne souffrant pas de troubles psychiques.
L’expérience des psychiatres à l’étranger qui ont dû affronter la première vague de pandémie doit guider les pouvoirs publics dans l’élaboration de plans de gestion de crise. Dans la province du Sichuan, un plan d’aide psychologique a été défini avec la mise à disposition auprès du public d’un manuel d’intervention psychologique (de type « self-help ») pour faire face au stress généré par le coronavirus [54]. Les auteurs ont présenté plusieurs méthodes d’auto-intervention spécifiquement adaptées à 11 populations différentes (grand public, personnes anxieuses, patients suspects d’infection à SARS-CoV-2, patients infectés confirmés, membres de la famille des patients souffrant de troubles psychiques, membres de la famille des cas confirmés, personnels médicaux, psychologues, personnel administratif, policiers et employés de bureau), puis à partir du 6 février, la province du Sichuan a ouvert gratuitement plusieurs lignes d’assistance téléphonique 24 heures sur 24 au grand public avec l’aide de bénévoles, en même temps que s’ouvraient des consultations psychologiques en ligne coordonnées par plusieurs hôpitaux de la province du Sichuan qui auraient joué un rôle important dans le maintien de la santé mentale de personnes souffrant de Covid-19 isolées au domicile. Enfin, afin de mieux comprendre l’état d’esprit de la population, une enquête en ligne sur l’état de santé mentale des personnels médicaux, des cas suspects et confirmés de l’épidémie a été réalisée. Tous les participants recevraient des conseils en fonction de leurs scores au sondage [54].
Chez les enfants et les adolescents, les réponses émotionnelles habituelles en situation de stress incluent notamment l’irritabilité, besoin d’isolement ou au contraire comportement « collant » ou l’agressivité qui peuvent être interprétées à tort comme des comportements « régressifs » contre lesquels il conviendrait de lutter, alors qu’ils sont souvent tout simplement adaptatifs ; dans cette population jeune, il est tout aussi crucial de bien délimiter ce qui relève de la réaction de stress normal de ce qui correspond à une psychopathologie avérée à prendre en charge.
Le moment est venu, en tant que psychiatres, de faire en sorte que non seulement nos patients puissent pleinement intégrer les services de santé, mais d’aller plus loin pour l’avenir, en plaçant la santé mentale au centre même du dispositif sanitaire, de montrer que l’identification précoce de la détresse psychique et que les interventions médico-psycho-sociales opportunes peuvent non seulement prévenir la crise en période de pandémie, mais aussi aider à contenir sa propagation [56].
Perspectives immédiates et à plus long terme
Dans cet article, nous avons insisté sur la crainte potentielle d’un surrisque de morbi-mortalité chez les patients suivis en psychiatrie due aux vulnérabilités individuelles et institutionnelles. Le besoin de se ré-organiser en extrême urgence dans un contexte d’impréparation et de moyens insuffisants pour lutter contre le risque infectieux expose les patients et les soignants à un risque accru de contamination, et les patients à un risque de rupture de soin psychiatrique. Le ministère de la Santé et des Solidarités a mis en circulation le 23 mars 2020 des consignes et recommandation pour les établissements psychiatriques qui, d’une part, restent souvent très générales et, d’autre part, ne sont pas assorties de moyens concrets pour leur mise en œuvre [6]. L’expérience chinoise permet de donner des orientations qui doivent être adaptées au contexte français.
Le soin des personnes souffrant de troubles psychiques dans un contexte où l’épidémie de SARS-CoV-2 exerce d’autres demandes de soins à destination des psychiatres et acteurs de la santé psychique, comme l’a prouvé l’expérience chinoise [41], [54], [55], [56], [57] :
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les personnels soignants mobilisés pour lutter contre l’épidémie sont à risque de contamination, de traumatismes psychiques et de décompensation psychiatrique ;
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les patients et les familles des patients souffrant du Covid-19 qui, du fait de l’interdiction des visites dans les hôpitaux, sont en détresse, nécessitent l’intervention des psychiatres et psychologues ;
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à l’échelle nationale, les mesures de confinement sont à même de créer une forte demande d’assistance psychologique voire psychiatrique immédiate et au décours de la crise.
Dans cette situation sanitaire inédite et en l’absence de données internationales, il est crucial de construire rapidement des connaissances scientifiques pour :
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optimiser les prises de décisions cliniques, thérapeutiques et organisationnelles au fur et à mesure de cette crise ;
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tirer des leçons pour de probables prochaines vagues épidémiques.
Ainsi, une veille épidémiologique est actuellement mise en place concernant les unités Covid en psychiatrie, avec le soutien de la coordination nationale des dispositifs régionaux de recherche clinique en psychiatrie et santé mentale, afin de mesurer l’efficacité des mesures mises en place, la morbidité, la mortalité et l’accès aux soins de réanimation. Plus largement, il semble prioritaire d’instaurer une veille épidémiologique dédiée à tous les patients de la psychiatrie pour identifier de potentielles particularités cliniques de l’infection, l’évolution de la morbi-mortalité infectieuse, le monitorage des traitements psychotropes, le nombre de décompensation/complications psychiatriques.
Concernant la mobilisation des pouvoirs publics, il est urgent qu’il y ait une prise de conscience au plus haut niveau de la très grande vulnérabilité de ces populations et des institutions psychiatriques pour limiter la morbi-mortalité liée directement à l’infection et indirectement à l’adaptation des soins psychiatriques aux contraintes sanitaires du confinement.
Conclusion
Dans le contexte d’épidémie au Covid-19, la psychiatrie française se trouve en situation de réorganisation de son offre de soin et de création de soins en urgence, en même temps qu’elle doit se préparer à prévenir et prendre en charge les effets négatifs attendus sur la santé mentale du confinement à l’issue de la pandémie. Pour la psychiatrie française, la première semaine de confinement a été celle de l’adaptation d’urgence, la deuxième et troisième semaine devront être celles de la coordination de tous les acteurs. À distance de la crise, il faudra passer à une logique de « préparation » à ces épidémies, en s’assurant que la psychiatrie soit incluse dans la construction des plans d’urgence, notamment via l’implication des psychiatres, des directeurs d’établissements psychiatriques et des autres acteurs de la santé mentale. Les difficultés majeures de coordination et de gestion de cette crise mettent en exergue la nécessité absolue d’une voix commune de la psychiatrie française auprès des autorités sanitaires, par exemple au travers d’une société savante légitimement reconnue par tous, dans l’intérêt de nos patients.
Déclaration de liens d’intérêts
Astrid Chevance, Nicolas Hoertel, Pierre Thomas, Rachel Bocher, Marie-Rose Moro, Vincent Laprévote et Marion Leboyer ne déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
David Gourion déclare des activités de conseil et invitations en qualiteacute;; d'intervenant pour Lundbeck, Servier, Lilly, Janssen et des interventions ponctuelles pour Astra-Zeneca et OtsukaPierre-Michel Llorca a reçu des honoraires pour la participation à des groupes d’experts, la coordination d’études cliniques et la participation comme orateur dans des congrès des compagnies suivantes : Abbvie, Allergan, Gedeon Richter, Gilead, Janssen, Lundbeck, Otsuka, Recordatti, Sanofi, Teva. Il est membre du Comité Exécutif de la Fondation FondaMental. Amine Benyamina est membre du board scientifique de Indivior et de camurus. Il a fait des interventions ponctuelles pour abbvie, janssen et ethypharm. Philippe Fossati déclare des perception d’honoraires par Lundbeck, servier , janssen, et sage therapeutics et des financements de projet de recherche par Servier Il est membre du board scientifique de Lundbeck et Janssen.
Marc Masson déclare des liens d'intérêt avec LUNDBECK, JANSSEN, SANOFI, SHIRE, BMS, OTSUKA.
Edouard Leaune a reçu un soutien financier et non financier de Janssen et Lundbeck. Raphaël Gaillard a été membre d’un board scientifique pour Janssen, Lundbeck, Roche, SOBI et Takeda. Il a été consultant ou est intervenu comme orateur pour Astra Zeneca, Boehringer-Ingelheim, Pierre Fabre, Lilly, Lundbeck, MAPREG, Otsuka, Pileje, SANOFI, Servier, LVMH et a reçu des honoraires, et il a reçu un financement pour des travaux de recherche de la part de Servier. Il est membre fondateur de Regstem.
Footnotes
Supplementary data associated with this article can be found, in the online version, at https://doi.org/10.1016/j.encep.2020.03.001.
Appendix A. Supplementary data
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