Introduction
La bronchite aiguë est un processus inflammatoire transitoire de la muqueuse bronchique, d’origine virale ou bactérienne. Elle s’observe plus souvent chez les enfants de moins de 4 ans. Elle est la conséquence d’une infection aiguë (souvent descendante, rhino-pharyngo-laryngo-trachéo-bronchique), en général par des virus pneumotropes qui détruisent les cellules ciliées de l’épithélium bronchique et provoquent une hypersécrétion de la muqueuse. Les virus infectent et endommagent l’épithélium respiratoire, provoquent la libération de cytokines pro-inflammatoires, augmentent la production de sécrétions et diminuent la clairance mucociliaire. L’étiologie est principalement virale ; plus de 180 virus ont été répertoriés ; les plus fréquents sont : virus influenzae A et B, virus para-influenzae 1 et 2, virus respiratoire syncytial (VRS), rhinovirus, adénovirus, coronavirus, paramyxovirus. Plus rarement, des bactéries sont à l’origine des bronchites aiguës : Bordetella pertussis responsable de la coqueluche qui n’est pas abordée dans ce chapitre. Le rôle pathologique de Mycoplasma pneumoniae reste controversé. L’inhibition des processus de défense anti-inflammatoire par les virus peut aboutir à une surinfection bactérienne, avec production de biofilms et altération de la clairance muco-ciliaire responsables d’une bronchite bactérienne persistante (protracted bronchitis des Anglo-Saxons). Les germes des surinfections bactériennes sont le plus souvent : Streptococcus pneumoniae, Haemophilus influenzae, Branhamella catarrhalis.
En l’absence de surinfection et si la bronchite survient sur des bronches saines, la restitution ad integrum de la muqueuse s’effectue en quelques semaines. La toux est aiguë si elle dure moins de trois semaines.
Examen clinique
Éléments du diagnostic
Le diagnostic de bronchite aiguë est purement clinique et repose sur l’observation de signes et symptômes banals, non spécifiques.
La bronchite est en général précédée d’une infection virale des voies aériennes supérieures (rhinite, rhinopharyngite). Elle se manifeste par une toux, initialement non productive, « sèche », puis grasse, associée à une expectoration non visible chez l’enfant car déglutie. La toux peut être émétisante, responsable de vomissements contenant du mucus. Une sensation de brûlure rétrosternale est parfois décrite. La fièvre est inconstante, généralement peu élevée et dure 3 à 5 jours. À l’examen physique, la dyspnée est absente ou modérée, et l’auscultation pulmonaire normale au début peut retrouver des râles bronchiques ou sous-crépitants diffus à la phase sécrétante. La maladie évolue en 2 à 3 semaines.
Le diagnostic différentiel se pose avec les autres infections respiratoires basses de l’enfant : bronchiolite aiguë et pneumonie (tableau 36.1 ).
Tableau 36.1.
Diagnostic différentiel entre bronchite, bronchiolite aiguë et pneumonie.
| Bronchite | Bronchiolite | Pneumopathie | |
|---|---|---|---|
| Âge | Variable | < 2 ans | Variable |
| Mode de début | Progressif | Brutal | Brutal |
| Fièvre | Modérée 38 °C | Modérée 38 °C | Élevée 39-40 °C |
| Toux | + | +++ | ++ |
| Détresse respiratoire |
Absente à légère | Présente | Variable |
| Auscultation pulmonaire | Ronchis et/ou sous-crépitants bilatéraux | Sibilants ± crépitants | Signes en foyer (crépitants, souffle tubaire) |
Signes de gravité
La bronchite aiguë étant une pathologie bénigne, la présence de signes de gravité évoque une autre atteinte respiratoire ou une complication. La présence d’un facteur de risque expose davantage aux complications. Les facteurs de risque individuels associés à une infection respiratoire basse chez l’enfant sont :
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une pathologie respiratoire chronique : asthme, mucoviscidose, maladie ciliaire bronchique, séquelles graves de virose (adénovirus, rougeole) ;
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une comorbidité associée : cardiopathie congénitale, drépanocytose, immunodépression, insuffisance rénale, maladie neuro-musculaire.
La persistance d’une toux au-delà de 3 semaines sans intervalle libre fait suspecter une coqueluche, une bronchite bactérienne persistante, une toux post infectieuse (mycoplasme pneumoniae) ou une autre pathologie respiratoire tels que l’asthme, l’hyperréactivité bronchique, la mucoviscidose, une dyskinésie ciliaire primitive, un déficit humoral, un corps étranger inhalé, une dilatation des bronches, une malformation… Son analyse nécessite une réévaluation complète de l’enfant.
Examens complémentaires
Aucun examen complémentaire n’est justifié lors du diagnostic de bronchite aiguë. Un épaississement péribronchique plus ou moins associé à une distension thoracique est visible radiologiquement. La radiographie de thorax n’est indiquée qu’en cas d’évolution défavorable. L’examen cytobactériologique des crachats (ECBC) n’a aucun intérêt, il reflète le plus souvent la flore oro- ou rhino-pharyngée. Il est réservé aux bronchopathies chroniques telle que la mucoviscidose.
Prise en charge
Il convient d’expliquer aux parents que seules des mesures simples sont nécessaires pour la prise en charge de cette toux aiguë banale et que celle-ci peut durer 1 à 3 semaines. La surveillance et les motifs d’une nouvelle consultation sont clairement énoncés.
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•Les mesures hygiéno-diététiques :
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–désobstructions nasales pluriquotidiennes au sérum physiologique en cas d’encombrement nasal ;
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–éviction de l’exposition au tabac (ne pas fumer au domicile) ;
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–hydratation régulière.
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•Antipyrétique si fièvre :
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–paracétamol par voie orale en monothérapie : 15 mg/kg par prise, sans dépasser 4 prises par jour avec un minimum de 4 heures entre deux prises.
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•Il n’y a pas lieu de prescrire d’antitussifs :
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–La toux est un mécanisme réflexe de protection des voies aériennes.
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–Sont contre-indiqués chez le nourrisson : les mucolytiques, les mucofluidifiants, l’hélicidine, le fenspiride et les sirops antihistaminiques H1 de première génération utilisés dans le traitement de la toux. Les sirops antitussifs centraux à base d’opiacés sont contre-indiqués chez les nourrissons en raison de leur effet dépresseur respiratoire. En aucun cas, les antalgiques opioïdes de forme pédiatrique ne doivent être utilisés pour traiter la toux chez le nourrisson. La prise de miel n’est pas recommandée chez les enfants de moins de 1 an.
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Il n’est pas nécessaire de prescrire de la kinésithérapie respiratoire.
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•Surveillance :
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–température corporelle ;
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–prises alimentaires chez le nourrisson ;
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–apparition ou aggravation d’une gêne respiratoire ;
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–durée de la toux.
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•Motifs d’une nouvelle consultation :
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–gêne respiratoire ;
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–baisse de la ration alimentaire en dessous de 50 % chez le nourrisson ;
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–fièvre persistant au-delà de 3 jours ;
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–toux persistant au-delà de 3 semaines.
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Indications et modalités de l’antibiothérapie.
En pratique, chez un enfant sans facteur de risque, l’abstention de toute prescription antibiotique en cas de bronchite aiguë est la règle.
En cas de suspicion de bronchite bactérienne persistante, les recommandations du Groupe de Pathologie Infectieuse Pédiatrique (GPIP) 2016 préconisent une antibiothérapie par amoxicilline à 80 mg/kg/j pendant 10 jours. Il est nécessaire d’évaluer l’efficacité à la fin du traitement.
Le niveau de preuve du bénéfice d’un traitement antibiotique contre une éventuelle bronchite à mycoplasme est insuffisant à ce jour1 et il n’existe pas de recommandation en ce sens.
Footnotes
Gardiner SJ, Gavranich JB, Chang AB. Antibiotics for community-acquired lower respiratory tract infections secondary to Mycoplasma pneumoniae in children. Cochrane Database of Systematic Reviews 2015, Issue 1. Art. No.: CD004875 http://www.cochranelibrary.com/
