Résumé
Les maladies infectieuses émergentes comme le Covid-19 représentent une menace majeure pour la santé mondiale. Lorsqu’ils sont confrontés à de nouveaux agents pathogènes, les individus génèrent de nombreuses croyances à propos du phénomène épidémique. Plusieurs études ont montré que les comportements individuels de protection dépendent largement de ces croyances. En raison de l’absence de traitement et de vaccin contre ces pathogènes émergents, le lien entre ces croyances et ces comportements représente un enjeu crucial pour les politiques de santé publique. Dans les prémisses de la pandémie de Covid-19, plusieurs études préliminaires ont souligné un retard dans la perception du risque par les individus, participant à une difficulté à mettre en place les mesures de précaution nécessaires : les individus avaient tendance à sous-estimer les risques associés au virus, et l’importance des mesures de prévention. Au cours du pic de la pandémie, la saillance de la menace et des informations associées au risque de mortalité pourraient ensuite avoir transformé la manière dont les individus génèrent leurs croyances, entraînant des bouleversements dans leurs modèles du monde. Nous proposons ici d’explorer l’évolution des croyances et des comportements au cours de la crise du Covid-19 en nous appuyant sur la théorie du codage prédictif et la théorie de la gestion de la terreur, deux conceptions influentes en sciences cognitives et en psychologie sociale.
Mots clés: Coronavirus, Covid-19, Croyance, Perception du risque, Codage prédictif, Biais cognitif, Cerveau bayésie, Théorie de la gestion de la terreur
Abstract
Emerging infectious diseases like Covid-19 cause a major threat to global health. When confronted with new pathogens, individuals generate several beliefs about the epidemic phenomenon. Many studies have shown that individual protective behaviors largely depend on these beliefs. Due to the absence of treatment and vaccine against these emerging pathogens, the relation between these beliefs and these behaviors represents a crucial issue for public health policies. In the premises of the Covid-19 pandemic, several preliminary studies have highlighted a delay in the perception of risk by individuals, which potentially holds back the implementing of the necessary precautionary measures: people underestimated the risks associated with the virus, and therefore also the importance of complying with sanitary guidelines. During the peak of the pandemic, the salience of the threat and of the risk of mortality could then have transformed the way people generate their beliefs. This potentially leads to upheavals in the way they understand the world. Here, we propose to explore the evolution of beliefs and behaviors during the Covid-19 crisis, using the theory of predictive coding and the theory of terror management, two influential frameworks in cognitive science and in social psychology.
Keywords: Coronavirus, Covid-19, Belief, Perceived risk, Predictive coding, Cognitive biases, Bayesian brain, Terror management theory
1. Introduction
Les maladies infectieuses émergentes comme le Covid-19 représentent une menace majeure pour la santé mondiale [1]. Lorsqu’ils sont confrontés à de nouveaux agents pathogènes, les individus génèrent de nombreuses croyances à propos de la probabilité d’être contaminé, la gravité de la maladie, la contrôlabilité de l’épidémie ou encore l’efficacité de leurs stratégies d’adaptation [2]. De nombreuses études ont montré que les mesures de protection, comme l’hygiène corporelle ou la distanciation sociale, dépendent largement de ces croyances [3]. En raison de l’absence de traitement et ou de vaccin contre ces pathogènes émergents, le lien entre l’estimation de ces risques et le succès des mesures de protection représente un enjeu crucial pour les politiques de santé publique. Pourtant, il existe peu de données sur la genèse de ces croyances en réponse à une épidémie, et sur les mécanismes cognitifs qui relient ces croyances aux comportements individuels de protection.
La théorie du codage prédictif (Predictive coding [PC]), une conception influente en neurosciences cognitives, se propose d’expliquer les processus de perception, de prise de décision, et de modification des croyances en situation d’incertitude [4]. Elle suggère que le cerveau encode un modèle interne de la structure statistique du monde qu’il utilise pour prédire les causes des entrées sensorielles et planifier des actions pour confirmer ses prédictions. Lorsqu’il détecte une différence entre les entrées sensorielles et ses prédictions, il peut modifier son modèle interne, afin de s’adapter à l’évolution du monde. Ce principe fournit un cadre unificateur pour comprendre la façon dont les croyances de ces agents évoluent au cours du temps, et le comportement de ces agents dans des situations nécessitant une prise de décision en situation d’incertitude.
La théorie du codage prédictif peut offrir un éclairage intéressant sur la manière dont nous avons considéré les risques associés au coronavirus et effectué des actions protectrices au début de la crise du Covid-19. Les épidémies sont des générateurs massifs d’incertitude. Les maladies infectieuses sont généralement perçues comme moins contrôlables et moins prévisibles que les autres pathologies, entrainant des phénomènes cognitifs complexes [5]. Dans les prémisses de l’épidémie de coronavirus, plusieurs recherches ont souligné un retard dans la perception du risque, tant au niveau individuel que sociétal [6], [7]. Elles objectivaient alors un optimisme irréaliste de nombreux individus face à la menace croissante associée au virus, estimant qu’ils ne couraient pas le risque d’être contaminés malgré l’accumulation croissante de preuves. Cette perception amoindrie du risque a pu participer à une difficulté à mettre en place les mesures de précaution nécessaires contre le risque épidémique.
Mais nos croyances sont fragiles lorsque nous sommes confrontés à des bouleversements profonds de notre environnement collectif. Après un temps initial de banalisation du risque associé au Covid-19, souvent comparé à celui de la grippe saisonnière, les médias ont massivement diffusé un flux d’information faisant état du nombre quotidien de décès, des déficiences sanitaires, et de l’instabilité économique. Le confinement de 3 milliards d’individus à travers le monde, et la mort tragique de 300 000 personnes, a soudainement dévoilé notre vulnérabilité individuelle et collective. Cette perception d’une menace imminente a probablement transformé la manière dont notre cerveau génère des croyances, et a pu influencer nos croyances à propos de nous-même, de notre avenir et du monde. C’est ce que suggèrent de nombreuses études menées en sciences cognitives et en psychologie sociale, regroupées sous le terme de théorie de la gestion de la terreur (TMT, Terror Management Theory). Le cœur de la théorie initiée par les chercheurs Tom Pyszczynski, Sheldon Solomon et Jeff Greenberg est l’idée que face à une menace imminente, nous générons ou modifions certaines croyances pour maîtriser notre peur de la mort [8]. Ce mécanisme cognitif fondamental permettrait d’immuniser les individus contre l’omniprésence de la mort, constituant un facteur de résilience et d’adaptation face aux dangers qu’ils rencontrent dans le monde [9]. Cette théorie pourrait aussi permettre de comprendre les changements des croyances individuelles et collectives face à une épidémie.
Dans cet article, nous proposons d’explorer l’évolution des croyances et des comportements au cours de la pandémie de Covid-19 en nous appuyant sur la théorie du codage prédictif et la théorie de la gestion de la terreur. Nous mobiliserons les travaux en épidémiologie et en psychologie sociale réalisés au cours des épidémies passées de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), de virus de la grippe A H1N1 (H1N1) et de syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV) afin de comprendre les mécanismes cognitifs mobilisés au cours d’un phénomène épidémique. Nous exposerons une hypothèse cognitive sur la mise à jour des croyances probabilistes à propos du risque épidémique, et sur les effets de cette crise sanitaire mondiale sur les croyances individuelles et collectives.
2. Le cerveau, une machine prédictive ?
La théorie du codage prédictif, une conception mathématique influente en sciences cognitives, s’est emparée du concept de croyance pour expliquer la manière dont nous percevons et dont nous prenons nos décisions [10]. Elle suppose que notre cerveau tente à tout moment de minimiser l’incertitude. Pour cela, il programme des actions afin d’acquérir de nouvelles informations et encode des croyances en accumulant les informations qui lui parviennent. Il fonctionne ainsi comme une « machine prédictive » qui élabore continuellement un modèle interne en synthétisant les informations statistiques présentes dans son environnement [11]. Ce modèle du monde lui permet de générer des inférences afin de minimiser la surprise associée aux phénomènes nouveaux qu’il expérimente. Ces inférences constituent des hypothèses sur l’évolution de l’environnement, qui sont utilisées pour filtrer la perception et guider nos actions [12].
La réalisation d’actions permet au cerveau d’acquérir de nouvelles informations sur son environnement. Il peut alors réduire son incertitude en élaborant des stratégies comportementales pour améliorer ses prédictions [13]. À chaque fois que notre cerveau détecte une différence entre ce qu’il attend et ce qu’il perçoit, il peut faire évoluer son modèle interne en effectuant une « mise à jour ». Le décalage entre ses attentes prédictives et les informations sensorielles entrantes crée une erreur de prédiction, c’est-à-dire un signal qui indique un changement imprévu dans l’environnement. Le cerveau peut réduire cette nouvelle incertitude en révisant ses croyances, afin de trouver une meilleure explication à ce qu’il est en train de vivre. Notre esprit est ainsi façonné par ces cycles continuels d’inférences (c’est-à-dire d’induction de ce qui se passe dans le monde en fonction de ce que nous attendons) et de mises à jour (c’est-à-dire de modification de ce que nous attendons en fonction de ce que nous percevons). Cette dynamique permet au cerveau de décoder les signaux sensoriels et d’encoder la structure statistique de son environnement, afin de s’adapter au mieux aux variations de son environnement [14].
3. La mise à jour des croyances, un processus biaisé ?
Le problème de cette mécanique en apparence si simpliste, c’est que notre cerveau déforme souvent la réalité lorsqu’il manipule l’information et forme des modèles de son environnement. Le concept de « biais cognitif », apparu dans les années 1970 suite aux travaux de Daniel Kahneman et d’Amos Tversky, désigne ces distorsions majoritairement inconscientes et automatiques dans la manière dont nous traitons l’information [15]. Lorsque nous générons des croyances, nous avons ainsi tendance à attribuer plus de confiance aux informations qui confirment nos croyances plutôt qu’à celles qui les contredisent, à privilégier l’information disponible immédiatement plutôt que de rechercher à trouver d’autres sources, à surestimer le risque associé à un événement rare mais dont les conséquences sont graves, ou encore à surestimer nos résultats positifs par rapport à la réalité [16]. À l’University College London, l’équipe de Tali Sharot a également montré que lorsque nous ajustons nos croyances sur la probabilité d’événements futurs, nous négligeons généralement les informations qui nous sont défavorables et privilégions celles qui nous sont favorables, produisant un « biais optimiste » dans la mise à jour [17].
Les distorsions dans la manière dont nous traitons l’information déterminent le type de croyances que nous développons à propos du monde. La croyance, en tant que produit fini, est le reflet des mécanismes impliqués dans sa formation. En raison de ces distorsions, nous avons ainsi généralement tendance à croire que nos compétences personnelles sont au-dessus de la moyenne, que nous avons le contrôle sur des événements qui nous échappent, que les choses se dérouleront à l’avenir comme elles se sont toujours déroulées dans le passé, ou encore que les événements de vie positifs sont plus probables que les événements de vie négatifs, et plus probables pour nous que pour les autres [18]. Comme notre perception et nos décisions dépendent de nos croyances, nos biais cognitifs ont un effet critique sur la façon dont nous comprenons le monde et agissons sur celui-ci. Ces croyances biaisées peuvent présenter un risque lors de comportements individuels comme l’alimentation ou la sexualité : notamment lorsque le sujet fait un excès d’actualisation temporelle (« ce n’est pas cette cigarette qui va me tuer »), d’immunité excessive (« aucune chance que ce soit moi qui attrape le VIH »), ou d’optimisme (« ce n’est parce que je ne me lave pas les mains que je vais avoir le coronavirus »). Ces biais influencent également nos représentations des risques indirects liés aux crises sanitaires, aux conflits géopolitiques ou encore au changement climatique [19].
Ce processus présente un intérêt majeur dans les contextes épidémiques. En effet, les croyances sur le risque associé à un agent infectieux sont les principaux déterminants des comportements de protection permettant d’inhiber sa propagation. Pour la théorie de la motivation à la protection (PMT, Protection Motivation Theory), il existe deux facteurs majeurs influençant la réalisation d’action de protection individuelle face à un risque épidémique : l’évaluation du niveau de menace, et l’évaluation des capacités adaptatives [20]. L’évaluation du niveau de menace englobe les croyances sur la vulnérabilité individuelle, c’est-à-dire l’estimation du risque de contracter la maladie, et les croyances sur la gravité du virus, c’est-à-dire l’estimation de la dangerosité de la maladie. L’évaluation des capacités adaptatives implique des croyances sur l’efficacité des stratégies possibles, telles que des actions de protection ou de distanciation sociale, et les croyances sur la capacité personnelle à mettre en place ces stratégies, telles que la disponibilité de ces stratégies pour l’individu ou encore leur coût en terme énergétique ou psychologique [21]. Ces croyances peuvent être représentées sous la forme d’une structure hiérarchique définissant des liens d’implication logique, dans laquelle les croyances sur la capacité des individus à se protéger influencent les croyances sur la vulnérabilité individuelle ou sur la dangerosité du pathogène (Fig. 1 ).
Fig. 1.
Association entre croyances et comportements dans la théorie de la motivation à la protection (Protection Motivation Theory [PMT]). Illustration du lien entre croyances sur le risque et sur les facultés d’adaptation inspirée du cadre de la théorie de la motivation à la protection (PMT). Pour cette théorie, il existe deux facteurs influençant la réalisation d’action de protection individuelle face à un risque épidémique : l’évaluation du niveau de menace, comprenant les croyances sur la vulnérabilité individuelle, c’est-à-dire l’estimation du risque de contracter la maladie, et les croyances sur la gravité du virus, c’est-à-dire l’estimation de la dangerosité de la maladie ; et l’évaluation des capacités adaptatives, comprenant les croyances sur l’efficacité des stratégies de protection, et les croyances sur la capacité personnelle à mettre en place ces stratégies.
Plusieurs études ont confirmé cette théorie en démontrant que les comportements de protection étaient directement associés à ces variables. Au cours de l’épidémie de grippe H1N1, la croyance que le virus pouvait se propager par contact indirect, impliquant un plus grand risque de transmissibilité et donc une augmentation de la vulnérabilité individuelle, était corrélée à un plus grand respect des mesures d’hygiène et de distanciation sociale [22]. D’autres travaux ont montré que le respect des mesures de protection par la population dépendait plus largement des croyances sur la sévérité de l’infection que sur sa contagiosité. Ainsi, lorsque les individus croient que la maladie a une forte incidence mais une faible sévérité, ils sont peu soucieux des mesures de protection individuelles, tandis que lorsqu’ils pensent que la maladie est très sévère, ils sont plus enclins à se protéger, même si elle est associée à une faible incidence [23]. Les maladies infectieuses considérées comme plus dangereuses sur l’échelle de biosécurité (Biosafety level [BSL]) sont généralement associées à des mesures de protection individuelles plus importantes [23].
Par ailleurs, la planification de politiques de santé publique efficaces dépend en partie de la façon dont les citoyens perçoivent les risques liés à l’épidémie [24]. Les mesures contraignant les libertés individuelles ou l’économie ne peuvent être décidées que lorsque les croyances à propos du risque ou de l’utilité des procédures de protection sont suffisamment partagées par une partie de la population, permettant d’assurer leur acceptation sociale [25]. Le problème est que les individus considèrent majoritairement le risque proximal associé à la santé individuelle ou des membres du cercle proche, sans toujours nécessairement évaluer les effets secondaires et tertiaires associés à un phénomène épidémique. En se focalisant sur le risque individuel de contagion ou de mortalité lié au virus, beaucoup d’individus peuvent négliger les effets systémiques comme la fracture économique ou le risque géopolitique, quand bien même ces dimensions influencent les risques individuels immédiats, comme on peut le voir dans le contexte de capacité de production des masques. Ces données soulignent la complexité de l’intrication entre croyances sur le risque, comportements de protection et politiques de santé publique en situation épidémique.
4. Un retard de perception du risque associé au Covid-19 ?
Début décembre 2019, les premiers cas d’une pneumonie virale inconnue sont détectés à Wuhan en Chine. Le 7 janvier suivant, les autorités chinoises annoncent avoir identifié un nouveau type de coronavirus. Après la mise en quarantaine de Wuhan le 23 janvier, le gouvernement chinois isole les habitants de douze autres agglomérations de la province du Hubei. Le 24 janvier, trois premiers cas sont détectés en France tandis que la progression en Chine est évaluée à 4537 personnes atteintes. Notre cerveau est alors saturé d’informations provenant de Chine, de Corée du Sud, de Taïwan, puis de l’Italie qui connaissent une progression exponentielle de l’épidémie. Un fossé épistémique se creuse entre les mesures rigoureuses prises dans les premiers pays touchés et les croyances des Européens à propos du virus.
Le travail mené par l’équipe du chercheur en psychologie sociale Jocelyn Raude illustre ce paradoxe [6]. Tandis que des épidémiologistes de renom comme Gabriel Leung ou Marc Lipsitch annoncent que 40 % à 70 % de la population mondiale pourrait être infectée au cours de l’année, seulement 6,2 % des 4 348 personnes interrogées à la fin du mois de février en France, en Italie, au Royaume-Uni et en Suisse estiment qu’ils ont un risque supérieur à 5 %, et une large majorité des participants évalue ce risque à environ 1 %. Une autre étude réalisée au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Allemagne montre que les individus interrogés estiment que la probabilité d’être infectée par le virus est plus importante pour quelqu’un d’autre que pour eux-mêmes, un phénomène appelé « optimisme comparatif » [7]. Beaucoup d’individus pensent alors que l’épidémie ne se généralisera pas, qu’il ne s’agit que d’une forme atténuée de grippe, ou encore que le COVID-19 ne tue que les personnes de plus de 70 ans.
Le 29 février, 100 cas sont comptabilisés en France, tandis que l’Italie dépasse le seuil symbolique des 1 000 cas confirmés. Le 8 mars, la Lombardie ainsi qu’une douzaine d’autres provinces italiennes sont officiellement placées en confinement. Le 10 mars, le confinement est généralisé à l’ensemble de l’Italie tandis que la France franchie à son tour le seuil des 1000 cas. Pourtant le sondage Ifop du 5 mars rapporte que seuls 47 % des Français se déclarent inquiets pour eux-mêmes et pour leur famille, tandis que 53 % d’entre eux ne se lavent pas les mains après avoir pris les transports, 75 % continuent de serrer la main et 91 % font encore la bise à leurs proches. Un basculement s’opère le 16 mars après l’allocution télévisée du président de la République et l’annonce du confinement. Le sondage Ifop réalisé à cette période montre alors que 74 % des Français se déclarent inquiets pour eux-mêmes et pour leur famille. Le 24 mars, la France déclare officiellement l’état d’urgence sanitaire. Le 28 mars, la pandémie a touché plus de 300 000 personnes et fait plus de 19 000 morts en Europe.
Ce que certains ont condamné comme « l’insouciance » ou le « déni » d’une partie de la population mondiale pourrait aussi être le reflet de la manière dont notre cerveau forme des croyances à propos du monde. Dans un contexte épidémique, notre cerveau utilise les preuves provenant des relations interpersonnelles et des médias pour générer des croyances sur les risques d’infection, la gravité de la maladie et les stratégies de protection [26]. Pour le Covid-19, l’écart entre la nature des informations statistiques disponibles lors de la propagation rapide du virus depuis la Chine et les croyances que nous avons développé sur les risques associés à cette épidémie pourrait avoir été causé par un biais dans le traitement de l’information probabiliste, entraînant une négligence des informations défavorables. Ce biais pourrait avoir participé à la génération de croyances inadaptées concernant notre capacité à contrôler l’épidémie, la supériorité de notre système de soin ou encore le caractère singulier et lointain du phénomène épidémique. L’épidémie du virus de la grippe A H1N1 (H1N1) à Hongkong en 2009 donne également une illustration intéressante de ce phénomène. Au cours de cette épidémie, tandis que les épidémiologistes alertaient sur un risque d’infection allant de 11 à 19 % de la population [27], la majorité des individus estimaient que l’épidémie n’affecterait pas leur vie quotidienne [28], et qu’il était peu probable qu’ils soient infectés ou qu’ils infectent les autres [29]. Le décalage entre la perception du risque et les informations statistiques dans les prémisses d’une épidémie pourrait donc constituer une tendance naturelle au niveau individuel et collectif, déterminée par la structure de notre architecture cognitive, et participant à notre vulnérabilité commune face à ces risques émergents.
5. Avons-nous été victimes de notre irrationalité ?
Le paradoxe est que les sciences cognitives ont aussi été mobilisées pour expliquer la panique ressentie par de nombreux individus au début de l’épidémie. Plusieurs médias évoquaient alors un phénomène de « contagion de la peur » et de nombreux chercheurs évoquaient l’influence du « biais de négligence des probabilités » désignant la surestimation des risques faibles ou encore du « biais de disponibilité » conduisant à surpondérer les données facilement accessibles comme le nombre de décès, pour expliquer la crainte ressentie par de nombreux français. Rétrospectivement, on invoque après coup d’autres biais pour justifier le décalage entre nos croyances subjectives et l’évolution dramatique de la crise sanitaire sur le plan mondial. Est-ce à dire que nous sommes tous des êtres irrationnels vacillant entre excès d’indifférence et de panique ?
Les travaux scientifiques sur les biais cognitifs ont donné lieu à un certain nombre de contresens supposant que notre cerveau aurait un fonctionnement illogique nous amenant à développer des croyances irrationnelles et à prendre des décisions insensées. En réalité, les biais ne signifient pas que nous sommes fondamentalement irrationnels, mais simplement que les critères de la rationalité sont plus complexes que ce nous entendons habituellement par ce terme [30]. La théorie de l’évolution offre d’ailleurs un éclairage intéressant sur les présomptions de rationalité. Elle suggère que nos capacités cognitives, comme toutes les autres fonctions de notre organisme, ont été sélectionnées au fur et à mesure des générations successives en fonction de leur valeur adaptative. Or plusieurs travaux ont montré que pour un organisme évoluant dans un nouvel environnement, surestimer ses propres capacités et la probabilité de gains accroît le taux d’exploration, augmentant l’accès aux ressources alimentaires et sociales [31]. Nos biais cognitifs semblent avoir une utilité à l’échelle de notre espèce, permettant à notre cerveau de développer des modèles du monde qui maximisent certaines fonctions indispensables à notre survie et notre reproduction [32].
Toutefois, notre environnement ancestral était aussi parsemé de dangers vitaux et une erreur de jugement pouvait vite se révéler fatale. Dans un environnement ou les potentialités de récompenses sont supérieures aux dangers, des croyances optimistes sont adaptatives, mais lorsque les dangers outrepassent les récompenses, il est nécessaire de brider notre tendance à surestimer nos capacités [33]. Notre cerveau possède ainsi des mécanismes de rétrocontrôle permettant de s’adapter aux situations dans lesquelles une perspective trop optimiste serait délétère. Plusieurs travaux ont montré que le biais optimiste sur la mise à jour des croyances se renforce lorsque nous percevons le monde comme très stochastique, c’est-à-dire lorsque nous avons une incertitude sur son évolution ou lorsque les signaux que nous percevons sont ambigus [34]. Au contraire, il s’atténue lorsque nous percevons des signaux de menace immédiate dans l’environnement, nous rendant plus sensible aux informations aversives que nous récoltons [35]. Le problème est que ces deux mécanismes sont imbriqués : lorsque nous percevons une information négative, nous avons tendance à déprécier sa fiabilité. Ainsi, à moins d’être exposé à une menace tangible, nous surévaluons la variabilité des informations aversives et dévaluons notre confiance à leur égard, ce qui contribue ainsi à biaiser nos croyances.
La saillance de la menace et la fiabilité des informations sont donc primordiales pour la génération de croyances relativement réalistes sur le risque. Dans le cas de l’épidémie du coronavirus, notre cerveau s’est retrouvé saturé d’informations ambiguës et dissonantes provenant du monde entier. En effet, une dissonance s’est établie entre les données épidémiologiques et les discours politiques, entre les mesures de confinement et les appels au maintien de l’activité économique, ou encore entre les consignes de sécurité et le comportement de nombreuses personnalités publiques. Cet effet a pu participer à la perception biaisée du risque au début de l’épidémie de coronavirus, en raison d’informations contradictoires concernant la sévérité du virus qui était souvent présenté comme une « petite grippe ». Cet effet rappelle l’évolution des croyances sur le risque au cours de l’épidémie de SARS de 2003 : les individus originaires de pays non affectés n’étaient pas inquiets [36] et sous-estimaient également leur risque personnel d’être infectés par le virus, qu’ils estimaient plus faible que pour leurs pairs [37]. L’ensemble de ces biais peut contribuer à dévaluer les informations menaçantes provenant de pays étrangers à propos d’un virus dont le taux de mortalité individuel est jugé plutôt faible, participant à la difficulté initiale à ajuster nos croyances et nos comportements vis-à-vis de l’épidémie. Si je crois que je n’ai pas de risque d’être malade, que le virus ne va pas se propager dans mon pays ou encore qu’il n’est pas dangereux, alors je ne vais pas m’alarmer lorsque je perçois sa progression dans les régions limitrophes, et je vais difficilement me plier aux mesures de sécurité qu’on me suggère.
Tout a changé lorsque le Covid-19 s’est propagé à travers le monde, entraînant le confinement de plus de trois milliards de personnes et des mesures gouvernementales drastiques contre sa propagation. D’un risque ambigu et lointain, nous sommes passés à une menace immédiate et tangible. Bien que cette supposition nécessite une validation expérimentale, le biais optimiste de mise à jour de nos croyances a probablement diminué au fur et à mesure de la propagation de l’épidémie et de l’augmentation de la saillance de la menace, nous permettant de nous adapter efficacement à l’épidémie. Face à l’afflux d’informations alarmantes, nos croyances individuelles se sont probablement calquées sur la structure statistique du monde. Conformément à cette idée, une étude réalisée aux États-Unis a montré que l’estimation du risque de contracter le COVID-19 a augmenté de façon spectaculaire au cours des 5 jours suivant la qualification du phénomène de « pandémie » par l’Organisation Mondiale de La Santé, c’est-à-dire que les croyances sur la vulnérabilité individuelle ont pu être transformées par la saillance symbolique d’une nouvelle menace collective [38]. De la même manière, les représentations sociétales ont évolué de l’idée d’un « virus chinois » à une « pandémie mortelle », de mesures de « précaution » au « confinement de trois milliards de personnes », d’une « chute des indices » à un risque de « krach boursier » et d’un « revers pour l’économie internationale » à une « récession prolongée ». Tous ces changements sont le reflet d’une mise à jour de nos croyances à propos d’un phénomène nouveau et des liens qu’il entretient avec notre monde. Cette évolution a pu provoquer chez certains individus une sensation de « dissonance », comme s’ils avaient été trompés ou que quelque chose d’inexplicable était en train de se dérouler.
6. L’épidémie de coronavirus bouleverse-t-elle nos croyances ?
En plus des croyances sur le risque, une crise de cette ampleur est peut-être en mesure de transformer en profondeur la manière dont nous concevons notre singularité, dont nous comprenons le monde et dont nous envisageons notre avenir. Les épidémies sont des générateurs massifs d’incertitude, les virus étant souvent considérés comme des entités non contrôlables, indistinctes et invisibles [5]. Une des manières de réduire l’incertitude et la dissonance est de générer des explications sur le monde, ou de renforcer son adhésion à des explications existantes. Face à cette menace, notre cerveau génère sans cesse des croyances qui lui permettent d’expliquer les phénomènes qui nous entourent. Ces croyances structurent notre vision du monde et constituent un rempart de stabilité face à son ambiguïté et son imprévisibilité. Ce phénomène est visible dans la formation des théories du complot, des superstitions ou des spéculations conspirationnistes face à des événements inattendus. Dans le contexte du coronavirus, de nombreux individus à travers le monde ont ainsi adhéré à des croyances injustifiées affirmant que le coronavirus avait été créé dans un laboratoire de recherche chinois, que la propagation de la maladie était favorisée par la technologie mobile 5G, ou encore que le futur vaccin serait utilisé pour implanter une puce électronique dans l’organisme [39]. L’adhésion à ces croyances irrationnelles représente un moyen de catalyser l’incertitude, bordant l’ensemble des hypothèses contrefactuelles.
Par ailleurs, la pandémie de Covid-19 est un générateur massif de saillance de mort. Après ce temps initial de banalisation du risque, les individus se sont retrouvés submergés d’un flux d’information faisant état du nombre quotidien de décès, des déficiences sanitaires et de l’instabilité économique de la nation. Pour la théorie de la gestion de la terreur (Terror Management Theory [TMT]), une conception influente en sciences cognitives et en psychologie sociale initiée par les chercheurs Tom Pyszczynski, Sheldon Solomon et Jeff Greenberg, une menace imminente ou des signaux évoquant la mortalité favorisent la génération ou le renforcement de croyances et de valeurs protectrices [8]. Le cœur de la théorie est l’idée que ces croyances nous permettent de maîtriser notre peur de la mort, constituant un facteur de résilience et d’adaptation face aux dangers rencontrés dans le monde [40].
Les études menées dans ce cadre ont montré que la saillance de la mort associée aux attentats terroristes ou aux épidémies produisait un renforcement de l’adhésion des individus aux croyances, normes et valeurs de leur culture d’appartenance [41]. Les individus ressentent plus d’affinité envers les pairs du groupe auxquels ils appartiennent et accordent moins leur confiance aux individus assimilés à des groupes exogènes. Ce mouvement s’accompagne souvent d’une valorisation des croyances patriotiques, nationalistes, et à un renforcement des pratiques religieuses [42], [43], [44]. En consolidant le sentiment d’appartenir à quelque chose de plus grand qu’eux, ce mécanisme pourrait ainsi permettre aux individus de dompter leur angoisse existentielle et de redonner du sens au monde. Cette théorie s’est proposée d’expliquer l’évolution des croyances aux États-Unis après le 11 septembre 2001 [45]. Elle a pointé des phénomènes étonnants comme une plus grande indulgence des jurés envers les individus appartenant à leur propre groupe socioculturel lors des procès survenant après les attentats terroristes, ou encore le renforcement de l’adhérence aux politiques conservatrices aux États-Unis [46] et à l’intégrisme religieux en Afrique pendant l’épidémie d’Ebola [47].
Au cours des prochains mois, l’humanité restera confrontée avec cette nouvelle source de terreur que représente la pandémie. Ces travaux suggèrent que la crise du coronavirus pourrait entraîner des bouleversements dans les croyances individuelles et collectives. Elle pourrait provoquer une forme de transvaluation de la manière dont nous comprenons notre singularité et la structure de notre environnement, favorisant le renforcement de certains schémas de croyances [48]. Une étude en cours, réalisée par une équipe de l’Université de Californie suggère par exemple que l’adhérence aux stéréotypes sexuels traditionnels a eu tendance à se renforcer pendant la pandémie de coronavirus aux États-Unis [49], tandis qu'une autre suggère que la saillance de la menace provoquée par le Covid-19 a favorisé les croyances xénophobes envers les chinois [50]. De nombreux autres travaux expérimentaux seront nécessaires pour déterminer l’effet d’une telle crise mondiale sur les mécanismes de génération des croyances, tant sur le plan individuel que sociétal, et pour évaluer son impact sur les processus électoraux, l’adhésion aux valeurs culturelles ou encore les pratiques religieuses.
7. Conclusion
La pandémie de Covid-19 a provoqué une crise sanitaire et sociale sans précédent, mobilisant toutes les ressources adaptatives de notre « cerveau prédictif ». Après un temps initial de banalisation du risque associé au virus, nous nous sommes retrouvés submergés d’un flux d’information faisant état de nos vulnérabilités individuelles et collectives. Au cours de l’Histoire, les catastrophes sanitaires, géopolitiques et climatiques que nous avons traversées ont provoqué des changements sociétaux majeurs. La génération massive d’incertitude et de saillance de mort pourrait transformer la manière dont nous comprenons le monde, influençant nos modèles politiques, religieux et culturels. En s’adaptant aux changements provoqués par cette crise sanitaire sans précédent au XXIe siècle, notre cerveau illustre une fois encore ses remarquables facultés d’adaptation.
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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