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Elsevier - PMC COVID-19 Collection logoLink to Elsevier - PMC COVID-19 Collection
. 2020 Jun 20;17(3):160–167. [Article in French] doi: 10.1016/j.etiqe.2020.06.001

COVID-19 : aux frontières de la folie

COVID-19: On the verge of madness

D Peyrat-Apicella a,*, S Gautier b
PMCID: PMC7305899  PMID: 32837543

Abstract

Les désorganisations dues à la pandémie actuelle de coronavirus SARS-CoV-2, ayant nécessité un confinement national sur la période du 17 mars au 11 mai 2020, malmènent et questionnent. Au regard du caractère extrême de cette situation traumatique et des conséquences psychopathologiques observées, nous allons tenter de mettre du sens sur une situation ressentie comme proche de la folie. Notre élaboration commune, découlant d’un journal croisé de deux psychologues, confinée et non-confinée, tentant de mettre la théorie au service de la clinique, a pour objectif de construire un étayage structurant à la pensée. En effet, l’effraction de l’angoisse de mort véhiculée par le COVID-19 génère des mécanismes de défenses d’allure psychotique au sein de l’ensemble de la société. Alors que la situation soudaine et extrême que nous décrivons peut se lire tant du côté des injonctions paradoxales, que du déni et du clivage, nous axerons nos observations et nos analyses à la fois sur les réalités sociétales et hospitalières, qui semblent mettre à mal les principes d’humanité et de dignité, de solidarité, d’équité et de justice, et enfin d’autonomie. Décrire et tenter de mettre en mots, d’analyser les mouvements à l’œuvre face à la situation actuelle, pourrait ainsi permettre de donner du sens à une situation qui en semble dénuée.

Mots clés: COVID-19, Psychose, Situation extrême, Traumatisme, Clivage


La crise sanitaire actuelle nous frappe par ce qu’elle provoque chez chacun de nous de violence et de sidération. Au-delà de ce que nous tentons de mettre en place pour faire face à la perte de repères et à la désarticulation ambiante, il est frappant d’observer de quelle manière se mettent en place des mouvements défensifs qui ne sont pas étrangers à ce que nous connaissons de la psychose. Les obligations ministérielles et les nouveaux interdits sociétaux1 , associés à l’angoisse de mort latente, nous entraînent dans un mouvement déshumanisant de rupture du lien social et d’isolement, peu propice à l’étayage que nous pourrions imaginer comme nécessaire en situation de crise. Ainsi, l’adaptation devient complexe, les liens étant empêchés et entraînant des manques difficiles à pallier.

Cette situation inouïe, de par sa survenue brutale, non anticipée, et à différents égards impensable, génère un éclatement psychique dont les morceaux semblent bien difficiles à rassembler. Le temps est suspendu, les repères explosés, la proximité interdite : être ensemble, se toucher, s’approcher apparaît désormais comme dangereux. La relation humaine physique est interdite, l’étayage et la contenance du lien social étant bannis jusqu’à nouvel ordre. Penser dans ce contexte devient difficile, voire impossible. Néanmoins, nous allons tenter de mettre des mots sur les mouvements observés au cœur de cette situation folle et surréaliste, qui est pourtant devenue réalité en ce début d’année 2020.

Le choc : « Nous sommes en guerre ! »

L’allocution du président Emmanuel Macron le 16 mars 2020 annonce le confinement prenant effet le lendemain même. Malgré l’annonce de la fermeture des crèches, écoles, collèges, lycées et universités quatre jours plus tôt, un sentiment d’incrédulité demeure. Cet événement, tant insolite que soudain, ne suscite pas dans la population la prise de conscience escomptée. Comme si cette « petite grippette de saison », comme elle était nommée par certains (y compris des médecins), allait se révéler chez nous un épiphénomène sans aucune conséquence. Le scénario catastrophe auquel nous nous sommes tous trouvés confrontés, de par sa violence et sa soudaineté, nous a probablement plongés dans une sorte de déni ne permettant aucune anticipation. À moins qu’il ne se soit agi d’une lutte psychique pour contenir la menace d’écroulement de tous nos repères ? Nous sentions-nous magiquement protégés, invulnérables ? La pensée magique, ou « toute-puissance des idées » [1], était-elle déjà à l’œuvre ? Ce déni est d’autant plus étonnant que ce qui se déroulait dans les pays voisins (Italie) ou lointains (Chine) était déjà terrifiant : les frontières des pays semblaient bien étanches, comme pour le nuage de Tchernobyl en 1986. Ces frontières imaginaires, ancrées dans l’inconscient collectif, semblent également avoir pris valeur de barrières protectrices de nos appareils psychiques.

Par ailleurs, l’annonce présidentielle, associée à une injonction de se rendre dans les bureaux de vote le dimanche2 , sème le trouble dans les esprits : le risque de contagion est tel qu’il faut fermer tous les établissements scolaires, alors que les élections sont maintenues. Le samedi soir à minuit, tous les restaurants, bars et commerces non essentiels à la vie de la nation ont été fermés. À neuf heures le lendemain matin, les bureaux de vote étaient ouverts. Ces injonctions paradoxales ont résonné d’emblée avec la discordance, signe pathognomonique de la folie. Face à ces incongruités nous cherchons à donner du sens à l’insensé et construisons des scenarii : les politiques, eux aussi, étaient-ils encore à ce moment-là dans le déni ? À moins que le risque ne s’avère moins grave qu’une crise politique : pourrions-nous en effet envisager qu’annuler les élections parce que le chef de l’État avait peur de les perdre aurait risqué d’être taxé de totalitarisme ?

Dans ce contexte, l’annonce du confinement sidère. Au point que personne ne le remet en question : chaque citoyen accepte passivement de rester chez lui dès le lendemain, sans qu’émergent à aucun moment de résistance ou de questionnement sur la pertinence de cette décision, sans que ne soit même questionné le principe de liberté fondamentale. L’angoisse de mort est massive : il faut rester confiné pour éviter la mort. Le vocabulaire utilisé pour évoquer la situation est troublant : le président de la République assénera à plusieurs reprises sa déclaration de guerre (sanitaire) contre un ennemi invisible, virus tueur et incontrôlable. Ce vocabulaire n’est évidemment pas sans nous rappeler celui utilisé en oncologie, le cancer renvoyant exactement de la même façon dans l’imaginaire collectif à cet ennemi invisible, tueur et incontrôlable [2]. Cette effraction du réel (le risque de mort) dans la violence des mots (vocabulaire angoissant), mais surtout des actes, si elle peut faire écho à la métaphore de la guerre, interroge sur la pertinence du vocabulaire employé et surtout sur ses conséquences. Si cette rhétorique martiale employée à l’égard du coronavirus fédère (« nous sommes tous dans le même bateau », car la guerre touche tout le monde), elle clive tout autant : ceux qui font bien, ceux qui font mal, les malades et les non malades, ceux qui sont touchés et ceux qui ne le sont pas. De plus, l’humain est en capacité de supporter le trauma grâce à un certain nombre de rituels, dont celui de se regrouper, de s’unir [3] : or le confinement les empêche, alors qu’ils correspondent à ce qui permet aux humains de traverser ce type de situations extrêmes.

Dans ce contexte de perte de tous nos repères habituels, cet éclatement ressenti nous questionne sur le concept même de situation extrême

Bruno Bettelheim [3] est le premier à avoir évoqué la notion de situation extrême, à partir de son expérience dans les camps de concentration. Selon lui, au-delà du risque de mort imminente, s’ajoutent la destruction du sentiment de dignité et la déshumanisation du sujet. « Le sujet est plongé dans un monde privé de sens. Tout devient incertain, il n’est plus possible d’être dans une temporalité, de faire des projets de penser au lendemain » [4]. En somme, la situation extrême a pour caractéristique de renvoyer le sujet et/ou les autres à un danger à potentialité létale, et donc directement relié à la mort : accidents, perte, deuil, attentats, guerres, agressions, catastrophes naturelles, suicide, maladie physique/psychique (grave, donc à potentiel létal). Au regard de ces éléments, nous pouvons énoncer que la situation actuelle, au-delà de représenter une situation extrême pour chaque sujet individuellement, en est également une à l’échelle nationale ET mondiale. L’analogie avec la guerre se retrouve ici, dans une inquiétante étrangeté retrouvée [5], là où toute familiarité disparaît : l’intime devient étranger, inconnu, au point de devenir effrayant. Il s’agit de quelque chose de jamais vécu, jamais éprouvé. L’inconnu et l’inédit remplacent le familier : « L’inquiétante étrangeté a trait à la question de savoir comment le familier devient étrange. (…) C’est cela l’autre aspect du domaine de l’inquiétante étrangeté : lorsque le sécurisant, le proche se transforme en quelque chose d’inquiétant » [6]. Là où ces éléments résonnent de la même façon que face à la maladie grave (telle que le cancer), le caractère non plus individuel mais sociétal du risque et de l’angoisse rendent le phénomène tsunamesque.

La conséquence des situations extrêmes est la sidération du travail de pensée, les instances psychiques se trouvant « à l’arrêt », sans plus de communication et d’échanges entre elles : dans ce type de situations, nous savons à quel point le psychologue peut, en prêtant son appareil à penser, aider à l’élaboration et à la remise en route de l’appareil psychique du sujet [7]. Néanmoins, dans la situation actuelle, la spécificité reste l’invisibilité de cette « guerre » contre un ennemi imperceptible, où tout le monde est une potentielle victime, le risque étant commun. Par ailleurs, l’aspect incontrôlable d’une propagation infiltrante à l’intérieur du corps propre n’est pas sans nous rappeler là encore le vécu du malade cancéreux, mais aussi les craintes d’intrusion et de phagocytage favorisant l’élaboration d’un délire psychotique. La spécificité de ce virus et les angoisses qu’ils véhiculent restent l’étendue du manque de connaissance à son égard et donc de son évolution chez chacun, pouvant aller de symptômes anodins à la mort.

La question du traumatisme

Cette expérience de non-sens, provoquée par la situation extrême, renvoie directement à la question du trauma. Le terme de traumatisme (physique) a été emprunté à la médecine par la psychanalyse, en conservant sur le plan psychique la définition associée, à savoir le choc violent, l’effraction et les conséquences sur l’ensemble de l’organisation. Il s’agit d’une lésion de l’intégrité du corps, externe ou interne. Le traumatisme psychique, au même titre que le traumatisme physique, est une blessure infligée par des événements extérieurs. Il met à mal la temporalité psychique et le sentiment de continuité de l’existence, désorganisant les capacités de travail psychique et compromettant les processus d’autohistorisation. Pour Laplanche et Pontalis [8], le traumatisme est un « événement de la vie du sujet qui se définit par son intensité, l’incapacité où se trouve le sujet d’y répondre adéquatement, le bouleversement et les effets pathogènes durables qu’il provoque dans l’organisation psychique ».

Pour Vallet, « les effets de la rencontre avec l’événement traumatique ne trouvent à se lier dans aucune chaîne de représentation. Ils indiquent un au-delà de la représentation qui trouve sa dimension traumatique dans ce qu’elle vient révéler au sujet un savoir interdit, qui pourtant le concerne » [9]. Dans le contexte qui nous occupe, nous entendons bien à quel point la prolifération de ce nouveau virus se révèle un évènement traumatique, puisqu’il renvoie le sujet à ce savoir connu mais refoulé : son statut de mortel. En effet et pour rappel, « La mort propre est irreprésentable […] dans l’inconscient, chacun de nous est convaincu de son immortalité » [10].

Par ailleurs, si penser le risque de mort à l’échelle d’une nation ou du monde est inévitable (guerres, catastrophes naturelles, etc.), il correspond à un irreprésentable impossible à penser lorsqu’il est à proximité. S’il est impossible de le penser, alors tout ce qui est « appareil à penser » peut être troublant, non indispensable, voire gênant. C’est ainsi que nous pouvons faire l’hypothèse que l’éviction immédiate après l’annonce du confinement des psychologues dans certains lieux (de vie, de soins, etc.) pourrait s’expliquer par la violence que représenteraient des témoins d’une pensée impensable et d’éprouvés inéprouvables en étant révélateur du trauma et en ayant peur qu’aucun étayage ne puisse suffire à contenir l’incontenable.

Observations et réflexions

Face au confinement et à la menace de mort sous-jacente révélés par l’annonce du 16 mars 2020, nous avons vu à l’œuvre différents processus, que nous allons tenter ici de mettre en mots. Le premier mouvement, que l’on pourrait qualifier de sidération, a été suivi d’une tendance à l’agitation maniaque prenant différentes formes et caractérisée par un éparpillement en miroir de l’éclatement des repères précédemment nommés, suivi d’une nécessité de résistance passant par l’agir. L’agir comme palliatif de l’angoisse, de l’effraction. On tourne en rond, recherchant en vain quelque chose qui pourrait apaiser, comme s’il n’y avait pas de lieu pour s’installer durablement, à l’instar de la déambulation des personnes âgées ne trouvant plus de repères, cherchant la sécurité et la présence de l’autre. L’observation de ces émotions, teintées d’angoisse, nous renvoient à la réactivation de souvenirs douloureux vécus ou racontés par les générations précédentes. Ces éprouvés semblent être le symptôme d’une angoisse de mort massive : omniprésente en période de guerre, celle-ci est le reflet d’un vécu sociétal relevant du trauma collectif. Cependant, il est important d’avoir en tête la potentielle réactivation d’un trauma individuel chez chacun de nous via cette situation traumatogène, associée à une crainte de l’effondrement et à une atteinte du sentiment d’immortalité.

Pour répondre à cette menace de mort traumatique et sidérante, apparaît une injonction, relayée par tous les médias, qui devrait permettre la protection : « Restez chez vous ! ». Cette réponse semble être entendue et respectée de manière quasi-totale, unanime, pour faire face à une conscience absolue et totalitaire du risque. Pour ceux qui n’appliqueraient pas la règle absolue, il s’agirait de se soumettre au jugement sociétal du déni de cette même réalité et de ce même risque. Ainsi, un mouvement unique semble se dessiner, il s’agit d’aider ceux qui sont « au front ». De faire corps. D’être solidaire sans remise en question des risques même du confinement comme le soulèvent Brooks et al. [11], dans le prestigieux Lancet : « la plupart des études examinées ont signalé des effets psychologiques négatifs, notamment des symptômes de stress post-traumatique, de la confusion et de la colère ».

Un clivage sociétal

Le risque vital amené par ce virus auparavant inconnu génère un éclatement des repères de chacun : tous les morceaux restent isolés, chacun dans leur coin, à l’épreuve du confinement. Face à cette explosion, tous les désirs semblent aller dans le sens de se rassembler, dans une lutte pour résister à l’éclatement. Or, il est impossible de rassembler les morceaux car se rassembler est dangereux. On ne peut pas faire corps. Chacun doit rester isolé, ce qui nous semble-t-il, dans ce contexte, entraîne l’apparition de mouvements psychotiques liés au morcellement, tels que le clivage ou le déni.

En réponse à ce phénomène, le premier mouvement est de tenter de donner du sens : « je supporte d’être isolé parce que je (me) protège ». Il s’agit d’une question de survie, pour soi et pour les autres. Par ailleurs, le peu de perceptions associées au confinement renvoie à l’impossibilité de se représenter un événement jamais éprouvé. Mais comment comprendre que les mêmes qui acceptent le confinement sans aucune discussion aujourd’hui ont des réactions toutes autres lorsqu’il s’agit de se faire vacciner, se faire dépister pour un cancer du sein ou pour arrêter de fumer ? La prise de conscience de ce qui pourrait venir à manquer, la peur de ne plus avoir de quoi vivre arrive petit à petit, au fil du temps : la projection sur des situations connues car racontées mais jamais éprouvées (comme les récits de guerre par exemple) entraîne des comportements surprenants de stockage face à la peur de la pénurie, de dénonciations face aux craintes de perte de liberté et de manque, l’angoisse d’être soi-même contaminé ou la peur pour ses proches.

L’homme biologique doit être sauvé là où l’homme social se retrouve face à une interdiction formelle d’être en contact avec l’Autre, ce qui fait la base de l’être humain, et le renvoie donc à une impossibilité majeure. L’être humain ne pouvant vivre sans contact social, « On fait comme si »3 . Ce déni semble pointer le fait que chacun donne le change, comme si ce n’était pas si difficile. Les messages raisonnables pullulent sur les réseaux sociaux : comparativement aux calvaires d’Anne Franck4 , Gandhi ou Nelson Mandela, il n’est pas bien difficile de rester enfermé chez soi, accompagné de chaînes de télévision délivrant des programmes, films et séries à profusion, de réseaux sociaux pléthoriques et de tous les moyens modernes de communication, sans pénurie de nourriture ou de manques quelconques. Les conséquences psychiques de l’enfermement et de la privation de liberté semblent niées : on reste en surface, on ne peut pas vraiment éprouver cette expérience, trop violente. Ainsi, face à la situation sanitaire et au confinement, deux catégories de citoyens se dessinent très nettement : les « héros » – terme issu d’une idéalisation collective face à l’angoisse éprouvée – et les « zéros ».

Les « héros »

Les soignants étaient déjà épuisés avant le début de cette crise sanitaire par des manques de personnels et de moyens qu’ils ont criés durant des mois et des années. À bout de souffle, ils se sont lancés dans un combat qu’ils n’ont pas eu le choix de mener. De plus, il n’est plus possible pour eux de se réfugier derrière la certitude d’aller bien : l’illusion d’immortalité habituelle qui permet de tenir côté soignant est tombée face à un virus qui peut s’attaquer à tous. Ainsi, une porosité de la frontière soignants/soignés les a assurément fragilisés. Le gouvernement s’est empressé de les qualifier de « héros » alors qu’ils n’ont résolument pas eu le choix, exerçant leur métier avant tout par vocation. Or, comme le dit M.-J. Del Volgo : « Il est dangereux de faire endosser aux soignants le costume du héros. Être un héros, cela signifie se sacrifier, souffrir en silence. Le héros ne demande ni aide ni moyens. Le héros est un surhomme. Cette approche fait peser sur les épaules des soignants une immense responsabilité, tout en leur interdisant de reconnaître leur propre vulnérabilité »5 . En d’autres termes, après cette quasi panthéonisation, comment donc avouer ses angoisses de mortels ?6 Car un héros, ça ne craque pas. Et si le héros, finalement mortel, est victime du virus, il devient une sorte de célébrité, à l’instar du soldat inconnu, symbole de ceux morts pour le pays. En somme, les soignants « au front » face au COVID-19 sont comme « covidés », estampillés COVID, tel un label qualité des soignants valeureux, les autres se sentant laissés pour compte. Enfin, si cette « héroïsation » n’a concerné au départ que les soignants, le mouvement s’est poursuivi par une prise de conscience de l’intérêt de nombreuses professions utiles à la société (pompiers, policiers, ambulanciers, rippeurs, caissières, commerçants, camionneur…) : pour beaucoup gilets jaunes7 hier, ils sont mobilisés comme « premiers de tranchée » aujourd’hui et font vivre l’ensemble du pays8 , prenant une place à part dans la société.

Les « zéros »

Une autre partie de la population se retrouve donc confinée, assignée à résidence. Quelle identité possible pour ces sujets impuissants, dans l’attente, face à une menace de mort écrasante ? Ce vécu de ne pas être essentiel ou indispensable, de ne potentiellement pas avoir d’« utilité » dans une nouvelle vie à venir, peut générer un vécu douloureux voire dépressiogène. Là où certains se disent qu’ils veulent retrouver l’essentiel, le nécessaire, la décroissance, ils peuvent ressentir un sentiment de manque de sens et d’inutilité de leur métier.

De plus, le difficile vécu de culpabilité face à l’impuissance amène certains à chercher à tout prix des solutions pour aider (comme par exemple la multitude de couturières qui se sont mises à fabriquer des masques bénévolement), mais aussi à développer une solidarité fédératrice et contenante (car rassemblante) : face au stress et à l’angoisse, agir pour sortir d’une passivité culpabilisante et écrasante semble une défense évidente. La pensée magique évoquée précédemment se retrouve à partir d’une sorte de mantra que nous pourrions évoquer ainsi : « si j’agis, je ne suis pas du côté des malades ».

Du côté des « confinés » se retrouvent également les non respectueux du confinement. L’absence de repères, de cadre et donc de surmoi sociétal entraîne certains, peut-être aussi mus par un déni de cette réalité terrifiante, vers des levées d’inhibition entraînant des sorties non autorisées, mais aussi une négation des interdits, voire des actes de vandalismes, vol, lettres d’insultes et autres comportements extrêmes. Ce déni des limites amène d’apparentes prises de risques, là où inversement certains sont dans une distanciation extrême. Il n’existe plus d’entre deux, pas d’ambivalence : on fait ou on ne fait pas. On fait comme si de rien ou on est paralysé. On cherche à aider ou on fait du tort. Tous les comportements sont exacerbés, comme observés à la loupe. Les adaptations à une situation folle ne sont pas possibles : le clivage et le déni sont à l’œuvre, là où d’autres réponses ne sont pas encore possibles. Le manichéisme ambiant semble s’ériger en défense sociétale et amène presque à choisir un camp, le principe d’autonomie apparaissant comme bafoué : les gentils qui respectent les nouvelles règles et se mobilisent comme ils peuvent ou les méchants qui font fi des injonctions.

Les injonctions paradoxales

Du confinement naît un paradoxe majeur : la question des autorisations de sortie. Mais qu’est-ce que signifie le fait de devoir s’« auto-autoriser » à sortir ? Sommes-nous donc responsables de la mesure d’un risque que finalement personne ne mesure vraiment ? L’ampleur de la méconnaissance autour du virus amène un flou qui engendre ces injonctions paradoxales (ces injonctions qui rendent fou). Alors quelles sont les bonnes raisons de sortir ? Ce questionnement entraîne chacun dans un conflit de valeur : est-il légitime de s’auto-autoriser à sortir pour aller travailler ? Faire son jogging ? Aller voir sa mère en EHPAD9 au risque de porter la culpabilité du risque de contamination des autres résidents ? Chacun se retrouve face à lui-même, en proie à un conflit psychique entre désir et raison, sans arbitre extérieur, la loi ne jouant plus son rôle de guide moral. Et pourtant, la police vérifie de manière active que les règles sont bien respectées, que nous les avons correctement appréciées, verbalisant de manière fréquente et régulière ceux qui seraient dehors sans raison valable. Encore un paradoxe ! Il est interdit de sortir de chez soi sans autorisation légale. Mais chacun doit évaluer lui-même sa légitimité à agir sans que les règles ne soient claires. Tout cela dans un climat de peur et rempli d’incertitude sur la balance bénéfice-risque d’une sortie (quel que soit son motif) possiblement responsable d’une contamination de soi ou de l’autre. Là encore, quid du principe d’autonomie ? Et de celui de justice et d’équité ? En l’absence de règles clairement établies et d’une justice bien définie, pourrait-on parler de relative autonomie ?

Un clivage hospitalier

De même que dans la société apparaît ce clivage entre deux catégories de personnes bien distinctes au gré de la reconnaissance sociale, à l’hôpital s’opère un clivage du même ordre. Deux catégories de patients émergent : les « COVID + » et les « COVID − », une identité chargée de signification, engendrant un sentiment de déshumanisation.

Côté patients…

Les médecins parlent des « COVID + » et des « COVID − », comme s’il y avait désormais deux types de patients (d’êtres humains ?), comme si l’identité du malade était associée à son statut sérologique, comme si cette identité revêtait une nécessité plus ou moins urgente de prise en charge. Les services s’organisent entre ceux qui accueillent les « plus » et ceux qui accueillent les « moins », les lieux de soins se réorganisant autour du virus, actif ou non. Les hôpitaux vont même jusqu’à vider leurs lits, abandonnant leurs patients habituels pour laisser la place à ceux qui viendront peut-être. Le patient qui n’est pas COVID + n’a plus de place dans les soins, ou la retrouvera à la fin de l’épidémie. Cette distinction n’est pas sans rappeler l’époque ou la séropositivité concernait le virus du Sida, avec ce même clivage, cette même angoisse, et le même sentiment que dans un premier temps, certains peuvent être protégés (les hétérosexuels dans le cas du VIH, les jeunes en bonne santé dans le cas du COVID-19). Par ailleurs, ce centrage sur le COVID-19, occupant tous les esprits et prenant toute la place (de par l’angoisse qu’il véhicule), renvoie les « COVID − » à un abandon ou une non-reconnaissance, comme l’écrit si justement Éric Fiat10 à propos de sa tante décédée : « Étrangère, puisque mourant un jour où il n’aurait fallu mourir, car d’autre chose que du corona ». Les morts du COVID prennent ainsi la place des autres morts, qui meurent tout autant qu’avant cette pandémie.

Côté soignants…

Dans ce contexte où les soignants sont applaudis tous les soirs à 20 h, nul doute qu’il est valorisé de faire partie des équipes de soin qui accueillent des patients atteints de COVID. Ces soignants démontrent leur conscience professionnelle : ils sont au front et répondent présent. Cependant, beaucoup d’entre eux signifient que cela devra permettre des ajustements réels en sortie de crise. Les psychologues sont alors mis au-dehors pour être protégés (tels des réservistes) et aussi parce qu’il existe une conscience accrue du besoin à venir de personnes qui vont engranger, récupérer la souffrance, afin de tenter de contenir l’ensemble à l’extérieur comme des bras qui embrassent. Mais pas à l’intérieur. Ce serait trop traumatique, à l’endroit même du noyau blessé et dangereux. Deux mouvements co-existent : la nécessité de trouver les psychologues en dehors pour prendre soin de ceux qui ont trop souffert et la peur d’être en conscience du traumatisme qui se vit dans l’instant.

Les soignants qui poursuivent leur travail auprès de patients COVID − n’ont rien d’exceptionnel à raconter : ils soignent comme habituellement, pointant un quotidien presque inchangé. Et face à cette situation exceptionnelle, ce quotidien paraît un peu fade. Il y a aussi tous les professionnels de santé qui sont en attente, confrontés à des lits vidés dans leurs services à l’adresse de malades probables. Au détriment de ceux qui reviendront peut-être plus tard. Ceux qui auront été oubliés, ceux qui auront dû attendre pour se faire soigner. Ces situations génèrent plusieurs conflits de loyauté chez les soignants : le premier est le sentiment d’abandonner des patients pour faire place à une urgence qui, dans certains territoires ne viendra pas. Le second est un conflit interne au sujet des valeurs humanistes qui soutiennent l’éthique soignante. Si les soignants en gériatrie ou en soins palliatifs tolèrent de côtoyer la mort, c’est parce qu’ils travaillent en équipe, dans une prise en charge globale des patients dans une perspective humaniste. Or, les restrictions actuelles empêchent les visites des proches, empêchent des soins de contact, ce qui fait sens et qui contient l’impuissance soignante. Interdire la chambre d’un mourant ou d’un résident d’EHPAD à un proche, c’est peut-être pensable, mais se l’entendre dire dans la réalité est révoltant. Cette révolte interne, que le soignant accepte et introjecte parce qu’il s’agit de l’intérêt collectif n’est pas sans conséquence. S’il ne peut trouver un aménagement suffisamment bon dans l’accompagnement à la mort qu’il procure, le soignant ne pourra pas faire le deuil de son patient. Ce deuil pourtant si nécessaire pour poursuivre son travail et réinvestir un autre patient après lui. Enfin, le risque face à ce conflit de loyauté est de projeter la colère sur les patients ou sur les familles qui deviennent les mauvais objets, ceux qui continueraient de demander l’interdit, au risque de penser que c’est quand même fou, dans cette situation, de solliciter une rencontre avec un proche !

Encore une fois, face à cette situation folle, les réactions sont extrêmes, le clivage massif : il faut ou il ne faut pas faire, dire ou exiger, il n’y a plus de place pour la réflexion éthique et la réflexion tout court, il faut agir. Pour de nombreuses questions primordiales dans l’accompagnement de fin de vie, que ce soit la présence autorisée ou non des proches, celle des soignants décrits maladroitement comme « non indispensables », des représentants du culte ou des bénévoles, la question des toilettes mortuaires ou des funérailles, l’interdit fait loi. Les sociétés savantes, d’ordinaire pluriprofessionnelles éclatent également, délivrant des protocoles monodisciplinaires strictement médicaux, comme si seul l’aspect médical comptait, ne laissant plus de place à la subjectivité des malades, des proches, et même des soignants. Plus que jamais, le discours est clivé, dans une confusion des langues [12], décrite par Patinet et al. [13], majorée par le clivage créé par la présence indispensable de soignants prodiguant les soins vitaux et l’éviction de tous les autres, dans un sentiment de déshumanisation des soins. Le risque et l’urgence de la situation ont généré un sentiment d’urgence ayant entraîné la création de protocoles parfois inadaptés, sans concertation, suscitant parfois des représentations frôlant l’euthanasie. Il n’y a pas le temps de penser ou il ne faudrait surtout pas penser ? Encore une fois, penser l’impensable, le risque de mort encouru par chacun, génère une angoisse qui tente de s’apaiser par des passages à l’acte de toutes parts.

Une tentative de mise en sens…

Une société du « sans contact »

Nous l’avons vu, la société dans ses nouvelles exigences génère un manque de l’Autre : l’absence de contact, de corporel (poignées de main, bises, étreintes et embrassades) et la distance entravent toute possibilité de se rassembler et donc de se contenir, comme nous l’aurions fait naturellement face à toute autre crise. En somme, comment se « serrer les coudes » à distance quand il semble si absolument nécessaire de se soutenir et de s’épauler ? C’est toute notre manière d’être en société qui est déstabilisée, le principe d’humanité même. Nous sommes soumis à l’observation de tous les gestes du quotidien pour s’interroger sur leur maintien possible : plus aucun contact ne devient spontané, on en vient à être étonnés de voir deux personnes proches l’une de l’autre, comme si elles étaient en danger ou pire, inconscientes. Le conditionnement est vite à l’œuvre, assorti des regards suspects.

Les consultations psychothérapeutiques mettent en exergue la flambée des problématiques existantes, de toutes les vulnérabilités (résidants d’EHPAD, SDF, populations précaires, etc.), du manque de solidarité. Sans cadre, sans repères, sans contacts, les mécanismes de défense sont fragilisés et les étayages manquent. Comment contenir et limiter cet éparpillement délétère sans présence ? Yzerbyt et Klein pointent la nécessité absolue de renforcer la proximité du lien social, car « c’est en consolidant le lien social, en cultivant les élans de solidarité, en mettant à l’honneur la connivence au sein de la population, que l’on pourra faire face à ce virus »11 . D’après eux, moultes expériences en psychologie sociale mettent en évidence le lien social comme garant d’une meilleure santé physique et sociale, ainsi que de la gestion de l’anxiété. De manière latente, la question sous-jacente demeure celle de la contamination : mais s’agit-il d’avoir peur d’être contaminé ou d’être contaminé par la peur ? En effet, ce climat de peur est-il justifié ? Les précautions sont-elles en trop ? Insuffisantes ? Adaptées ? Mais encore : ai-je déjà été contaminé.e ou vais-je le devenir ? Suis-je immunisé.e ? Comment être rassuré.e : grâce au test ? Mais si le test est négatif, combien de temps apaisera-t-il l’angoisse d’une contamination à venir ? Toutes ces questions sans réponses, envahissantes psychiquement de manière plus ou moins consciente, associées à tous les mouvements précédemment évoqués, amènent à des comportements et défenses similaires à ceux retrouvés dans la folie.

L’émergence de mouvements psychotiques en réponse à une situation perçue comme folle…

L’agitation maniaque secondaire au climat de peur et d’angoisse vécue depuis le début de la crise décrite, de même qu’un certain nombre d’actions, de réactions et d’événements nous ont amenées à penser la situation comme folle. Un sentiment d’inquiétante étrangeté, de bizarrerie (un des symptômes de la discordance12 , signe pathognomonique de la schizophrénie) ne nous quitte plus. « La bizarrerie est, par nature, impossible à codifier. Elle se ressent, s’observe et s’apprécie, toute situation lui étant propice. (…) La bizarrerie des enchaînements logiques est plus aisée à repérer, car elle est marquée d’emblée par la discordance et la rupture des éléments de la pensée » [14].

Ainsi, nous retrouvons avec étonnement dans les réactions à toutes les situations évoquées dans ce texte, des mécanismes de défense assez largement identifiables et typiques de la psychose. En premier lieu, le clivage (de l’objet) semble être responsable de l’organisation de notre société. Laplanche et Pontalis nous rappellent qu’il s’agit d’un mécanisme de défense décrit par Mélanie Klein et considéré par elle comme la défense la plus primitive comme l’angoisse, retrouvé dans plusieurs scindages décrits (« covidés »/« non covidés », « héros »/« zéros », « COVID + »/« COVID − »). De même, le déni, mode de défense consistant en un refus par le sujet de reconnaître la réalité d’une perception traumatisante d’après Freud (dans Laplanche et Pontalis, 1967) est un mécanisme largement repéré dans la situation extrême qui nous occupe. Enfin, la projection, opération par laquelle le sujet expulse de soi et localise dans l’autre des qualités, des sentiments, des désirs, voire des « objets » qu’il méconnaît ou refuse en lui [8], est retrouvée dans différentes interactions. En effet, la situation est particulièrement propice à ce type de mouvements, face à des ressentis difficiles à mettre en mots, en sens. Nous projetons sur l’autre des agressivités quasi paranoïaques : les autres deviennent dangereux pour nous, peut-être parce que nous craignons d’être dangereux pour eux ?

Ces mécanismes de défenses et mouvements généraux, associés à des angoisses dissociatives et de morcellement propres à une situation « explosante » et à des terreurs primitives résurgentes nous amènent à penser et questionner le potentiel psychotique de la situation. Néanmoins, nous observons également – et bien heureusement ! – des mécanismes normalo-névrotiques (sublimation, déplacement, humour…) : le confinement est pour certains un temps de ressourcement, de réactivation des désirs profonds, une occasion incomparable de repartir à zéro. D’autres rencontrent leurs enfants dans les apprentissages scolaires, ils ont du temps pour la vie familiale et peuvent trouver un moment de répit au milieu d’une vie à cent à l’heure. Pour ces personnes le confinement a du bon, il s’agit de ceux qui vivent dans une situation de sécurité financière, sociale, psychique, familiale. Évoluant dans un cadre suffisamment sécure, ils seront en mesure de tirer parti de cette situation, d’en faire un épisode décisif et positif de leur vie.

Pour être rassurés, nous avons besoin de percevoir une réalité suffisamment connue, grâce aux habitudes, aux rituels, et aux modes de relation aux autres. Ces éprouvés vécus en présence et avec l’autre soutiennent l’altérité et donc la stabilité interne. Pourtant, dans cette crise, ces repères ne sont plus maintenus, ils sont éclatés, les fragments sont morcelés, nous sommes psychiquement fragilisés. Cela ressemble bien au vécu du sujet psychotique, vécu caractérisé par un défaut de rapport à la réalité, qui émerge dans un contexte où plus rien ne semble réel. Mais alors comment faire face psychiquement à la violence que représente la perte de tout lien social, de tout contact physique ? Pourrions-nous risquer le « confinementisme », phénomène qui serait similaire à l’hospitalisme de Spitz [15], décrit comme un état dépressif et un repli relationnel consécutif à la privation de lien affectif chez certains enfants hospitalisés et éloignés de leur mère ? Par ailleurs, ce néologisme (au même titre que celui de « covidé » employé plus haut) n’est pas non plus sans nous rappeler un symptôme psychotique. Inventer des mots face à des événements nouveaux et improbables prend valeur de nécessité quand il s’agit de penser l’inédit, de dire ce qui n’est pas encore défini, de créer le réel. Nos créations de nouveaux mots en sont les témoins.

L’élaboration même de cet article a demandé un important travail de rassemblement et de mise en lien d’éprouvés disparates et morcelés. Les échanges quasi quotidiens sur la situation inédite ont fait émerger en miroir la mise en évidence de processus psychotiques lors de la mise en mot, comme dans une sorte de supervision tentant de trouver du sens, de la théorie pour soutenir le vécu, l’éprouvé. Dans ce temps de confinement nous avons été comme envahis par trop de mails, trop de sollicitations, mais également trop de vide, trop de changements, trop de peurs, trop de traumas, trop de tout. L’envahissement de la sphère privée a laissé encore moins de place à la rêverie, à la tranquillité psychique. Les « chez soi » sont devenus des bureaux et/ou des salles de classe, imposant, d’une part, une disponibilité de chacun au-delà des limites habituelles, et d’autre part, un téléscopage des espaces. Les limites sont devenues poreuses. Le travail, oppressant autant que les appels nombreux et difficiles à repousser au lendemain, n’a plus permis de laisser d’espace où se réfugier.

L’incertitude au sujet de la fin de cette crise oblige à vivre dans l’instant. Le lendemain n’existe pas. Aucune projection n’est possible. Comme le pointent Brooks et al. (2020), ce qui a permis de tenir la période de confinement a été de l’être dans de bonnes conditions, mais surtout d’avoir une date de fin qui permettait la projection, la confiance. Les dates successives de sortie de confinement n’ont pas permis de se projeter dans une sortie sûre et certaine. D’ailleurs, le déconfinement conserve un goût de non achevé : il ne renvoie pas à l’avant, rien n’est terminé, tout continue… Le coronavirus n’est pas mort. Alors que nous observons actuellement des mouvements de retour au travail, de tentative de reprise d’une vie normale malgré les « gestes barrières », la fin du confinement ne nous a assurément pas permis de retrouver des rapports humains spontanés. Mais qu’en sera-t-il par la suite ? Cette distance sociale va-t-elle laisser des traces pendant de nombreux mois ou de nombreuses années ?

Déclaration de liens d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Footnotes

1

Nous faisons ici tout particulièrement référence à la période de confinement qui a eu lieu entre le 17 mars et le 11 mai 2020, mais aussi aux recommandations de la période dite de déconfinement.

2

Le premier tour des élections municipales ayant eu lieu le dimanche 15 mars 2020.

3

Chanson composée par Calogero dans les tout premiers temps du confinement, les bénéfices étant reversés aux hôpitaux, initiative suivie ensuite par de nombreux artistes.

4

Franck A. Le journal d’Anne Franck. Paris: Folio; 1977 [1947].

5

Entretien journal Le Monde, publié le 26/03/20.

6

Frédéric Pommier, France Inter, 09/04/20.

7

En référence au mouvement des gilets jaunes, mouvement de protestation né en France en octobre 2018.

8

Jérôme Fourquet et Chloé Morin, Le Figaro, publié le 09/04/20.

9

Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes.

10

Éric Fiat, philosophe, « Aujourd’hui, ma tante est morte ». La Croix, 25/03/20.

11

Yzerbyt, V. & Klein, O. ; professeurs de psychologie sociale. Loin des yeux, proche du cœur ! Le lien social au temps du coronavirus. The Conversation, L’expertise universitaire, l’exigence journalistique, 19/03/20.

12

Perte de concordance entre la pensée, l’affectivité, l’expression verbale et le comportement.

Références

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