Abstract
Le severe acute respiratory syndrome coronavirus 2, coronavirus à tropisme respiratoire responsable de la Covid-19, a été isolé pour la première fois en Chine fin 2019. Plusieurs mois après sa découverte et malgré sa diffusion pandémique, il reste de nombreuses zones d’ombre concernant la physiopathologie et le traitement de la Covid-19. Nous disposons en revanche de données solides concernant ses caractéristiques épidémiologiques et l’expression clinique de cette maladie est maintenant bien décrite.
Mots clés: clinique, Covid-19, épidémiologie, Sars-CoV-2, transmission
Abstract
Severe acute respiratory syndrome coronavirus 2, the coronavirus with respiratory tropism responsible for COVID-19, was isolated for the first time in China at the end of 2019. Several months after its discovery and despite its pandemic spread, there are still many grey areas concerning the pathophysiology and treatment of COVID-19. However, we have strong data on its epidemiological characteristics and the clinical expression of this disease is now well described.
Keywords: clinical, COVID-19, epidemiology, Sars-CoV-2, transmission
Le severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 (Sars-CoV-2) est un virus à acide ribonucléique appartenant au genre des Betacoronavirus et génétiquement proche de virus zoonotiques. Plusieurs mois après son identification, il reste de nombreuses zones d’ombre concernant la physiopathologie et le traitement de la Covid-19, maladie dont il est responsable. Nous disposons en revanche de données épidémiologiques et cliniques de plus en plus solides.
Évolution de l’épidémie
Les premiers cas d’infection par ce nouveau coronavirus à tropisme respiratoire, ultérieurement baptisé Sars-CoV-2, ont été identifiés en Chine, à Wuhan, en décembre 2019 [1]. L’épidémie de Covid-19 s’est étendue en quelques semaines à l’ensemble de la Chine continentale, où elle semble avoir été rapidement maîtrisée grâce aux mesures de santé publique.
Des cas ont cependant été diagnostiqués sur tous les continents et, dès le 11 mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé a reconnu le caractère pandémique de la Covid-19 (figure 1 ). À partir de fin février 2020, l’Europe de l’Ouest est devenue la région où l’épidémie se développait le plus rapidement.
Figure 1.
Nombre quotidien de nouveaux cas de Covid-19 par région de l’Organisation mondiale de la santé entre le 30 janvier et le 30 septembre 2020.
Devant l’explosion du nombre de cas et la saturation des systèmes de santé dans certaines régions, des mesures de confinement ont progressivement été instituées dans la plupart des pays européens, permettant le contrôle de l’épidémie dont le pic a été atteint début avril.
Début mai 2020, le continent américain est devenu le nouvel épicentre de l’épidémie, alors qu’une montée inquiétante du nombre de contaminations était observée au Moyen-Orient, en Asie du Sud-Est et en Afrique.
Caractéristiques épidémiologiques et transmission
La transmission interhumaine du Sars-CoV-2 est avérée, avec un taux de reproduction de base (R0) compris entre 2 et 4 [2], ce qui signifie qu’un sujet infecté contamine en moyenne deux à quatre autres personnes. Le mode de transmission prépondérant impliquerait les gouttelettes de taille importante (> 5 μm) générées au cours de la parole, de la toux ou des éternuements, et ne se propageant pas à plus de deux mètres du sujet émetteur. Il existe des arguments solides en faveur de l’existence d’une transmission aérienne [3], médiée par les aérosols (gouttelettes de taille ≤ 5 μm), mais cette voie est marginale, tout comme la transmission par contact avec des surfaces contaminées.
La maladie est contagieuse avant même l’apparition des signes cliniques. Les patients infectés présenteraient une contagiosité maximale pendant les quatre jours entourant le début des symptômes. D’authentiques infections secondaires ont été observées autour de sujets strictement asymptomatiques.
Présentation clinique
La présentation clinique de l’infection au Sars-CoV-2 est très polymorphe. La proportion de formes asymptomatiques est encore débattue, elle se situe probablement autour de 15 % [4]. Chez les patients symptomatiques, la période d’incubation suivant la contamination dure moins de quatorze jours (médiane cinq jours) [5]. Il s’agit d’une durée comparable à celle retrouvée avec d’autres virus dits respiratoires où la porte d’entrée de l’agent infectieux et le site définitif de réplication virale sont similaires. Les périodes d’incubation des autres présentations, notamment cutanées, neurologiques et digestives, sont moins connues et pourraient être plus longues, car impliquant une étape virémique intermédiaire.
Le tropisme du Sars-CoV-2 explique en grande partie les différentes manifestations rencontrées. Le récepteur viral est la protéine angiotensin-converting enzyme 2 (ACE2), présente sur l’ensemble du tractus respiratoire, mais également sur les cellules du tractus gastro-intestinal et les cellules endothéliales. La réaction immunitaire en réponse à l’infection est un autre élément essentiel de la physiopathologie de la maladie. Elle peut aller d’une forme asymptomatique, avec une clairance virale associée à une production d’anticorps neutralisants, à une réponse inflammatoire disproportionnée et délétère pour l’organisme.
L’expression ACE2 tout comme l’état immunitaire diffèrent selon l’âge et certaines comorbidités. Cela explique probablement en partie les énormes différences d’expression clinique et de gravité observées entre des individus jeunes sans antécédents et des sujets âgés ou comorbides. Plus de 90 % des patients décédés de la Covid-19 ou de ses complications étaient âgés de 65 ans ou plus et la majorité présentait une comorbidité, en particulier une hypertension artérielle, un diabète ou une obésité. La situation des enfants est particulière, avec un taux d’hospitalisation inférieur à 1 %, mais quelques formes rares de myocardite.
Les manifestations classiques de la maladie sont celles d’une virose respiratoire, allant d’une atteinte respiratoire haute bénigne à une pneumonie sévère. Les symptômes le plus fréquemment rapportés sont la toux (75 %), plutôt sèche, la fièvre (50 %) et la dyspnée (30 %) [6]. Des signes digestifs (diarrhées) et des céphalées peuvent les accompagner. La proportion exacte de chacune de ces manifestations dépend de la sévérité de la forme clinique. La pneumonie présente au scanner thoracique un aspect particulier en plages de verre dépoli périphériques (crazy paving). Enfin, un des signes les plus évocateurs est la survenue de troubles du goût (dysgueusie) et de l’odorat (anosmie, hyposmie), réversibles la plupart du temps dans les trente jours. Ils pourraient être en lien avec une atteinte du rhinencéphale.
Plus rares, mais maintenant bien décrites, les atteintes extrarespiratoires font toute la particularité de l’infection au Sars-CoV-2.
Les symptômes dermatologiques sont le reflet du tropisme du virus pour l’ACE2 exprimé à la surface des cellules endothéliales. Une réaction inflammatoire lymphocytaire cluster de différenciation 8 périvasculaire est responsable de manifestations de type vascularite des petits vaisseaux [7]. Les patients présentent alors des engelures, parfois caractérisées par des évolutions bulleuses, dont la guérison est la règle en quelques jours à quelques semaines.
Les atteintes digestives peuvent être présentes de manière isolée, notamment chez le sujet âgé ou le jeune enfant, ou associées à d’autres manifestations. Elles ne sont pas graves en soi, mais difficiles à repérer. De plus, elles complexifient la démarche diagnostique en augmentant de manière importante le nombre de cas suspects.
Des manifestations neurologiques, plus rares, ont été décrites, prenant la forme d’encéphalites ou de polyradiculonévrites. Elles correspondent à une atteinte encéphalitique directe du virus ou à des symptômes inflammatoires postinfectieux aspécifiques [8].
Chez le sujet âgé, l’infection est fréquemment responsable de complications non spécifiques, tels un état confusionnel ou une chute.
Aucun des signes pris isolément ou en association ne permet cependant de porter ou d’infirmer le diagnostic de Covid-19, ce qui impose la réalisation d’un test virologique (reverse transcription polymerase chain reaction [RT-PCR]) chez tout patient suspect.
Globalement, la mortalité associée à la Covid-19 s’établirait, en France, à 0,7 % [9]. Il est estimé que 80 % des sujets symptomatiques ne nécessiteront pas d’hospitalisation (figure 2 ). La soudaineté de l’expansion de ce virus explique l’impact majeur qu’il a eu sur les systèmes de santé, en saturant brutalement toute l’offre de soins, malgré un taux de létalité relativement bas.
Figure 2.
Répartition des formes cliniques de la Covid-19 selon leur gravité.
Facteurs influençant l’évolution de l’épidémie
Parmi les facteurs influençant la vitesse de dissémination du Sars-CoV-2, outre les caractéristiques intrinsèques du virus, les facteurs climatiques, les comportements humains, les politiques de santé publique et l’état d’immunité de la population peuvent être mentionnés. Il a été observé que d’autres coronavirus sont responsables d’épidémies essentiellement hivernales [10]. De plus, la persistance de ces virus sur les surfaces inertes raccourcit lorsque la température augmente [11]. Il était donc envisageable que la transmission interhumaine du Sars-CoV-2 soit moins efficace en été. Cependant, l’épidémie se développe dans des pays à climat chaud, ce qui a très tôt suggéré que l’arrivée de l’été ne suffirait pas à faire disparaître le virus d’Europe.
L’efficacité du port du masque, des mesures d’hygiène et de la distanciation physique n’est plus à démontrer. L’enquête CoviPrev, menée par Santé publique France, a montré que le respect des recommandations concernant les mesures de protection a eu tendance à diminuer après la fin du confinement, à l’exception du port du masque en public [12].
Le confinement, mis en place dans de nombreux pays depuis le début de la pandémie, a été extrêmement efficace [9], faisant chuter le R0 de 77 % en France, au prix de lourdes conséquences sociales et économiques.
Depuis la levée du confinement, le contrôle de l’épidémie repose sur une politique de tests virologiques massifs, associée à l’isolement des sujets infectés (RT-PCR positive) et à l’identification précoce des sujets contacts à risque (contact tracing). Cette stratégie a fait la preuve de son efficacité, notamment en Chine [13] et en Corée du Sud [14].
Enfin, le niveau d’immunité collective est un élément déterminant de l’évolution d’une épidémie. Sur la base de modélisations prenant en compte le R0 de la maladie, il peut être estimé que l’épidémie s’arrêtera lorsque environ 70 % de la population seront immunisés [15]. Or, la séroprévalence de la Covid-19 en France à l’issue de la première vague restait faible, estimée à 6,7 % [9]. Il est toutefois possible qu’une partie de la population soit protégée vis-à-vis du Sars-CoV-2 en raison d’une immunité croisée avec d’autres coronavirus. Des anticorps reconnaissant ce virus sont en effet présents chez les patients ayant été infectés par le Sars-Cov [16], mais ils ne sont probablement pas neutralisants. L’immunité antivirale cellulaire pourrait également conférer un certain degré de protection croisée [17].
Conclusion
Les mesures de confinement généralisé instaurées en Europe pendant le printemps 2020 n’ont pas permis d’arrêter l’épidémie de Covid-19. Depuis début septembre 2020, une remontée exponentielle du nombre de cas est observée, reflétant une meilleure capacité diagnostique, mais également une augmentation réelle du nombre de sujets infectés. La politique globale de contrôle de l’épidémie repose actuellement sur le renforcement de la stratégie “tester, tracer, isoler” et sur la généralisation du port du masque, avec l’espoir que ces mesures limiteront l’engorgement des structures de soins.
Points à retenir.
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Après avoir débuté en Chine, en décembre 2019, l’épidémie de Covid-19 a vu son épicentre se déplacer vers l’Europe, puis vers le continent américain.
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Le severe acute respiratory syndrome coronavirus 2 se transmet essentiellement par les gouttelettes émises par les sujets infectés, même asymptomatiques.
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L’expression clinique de la Covid-19 est polymorphe, mais la forme la plus commune est l’infection des voies respiratoires hautes ou basses, pouvant aller jusqu’à la pneumonie gravissime.
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La mortalité globale de la Covid-19 en France est de 0,7 %, avec de grandes variations selon le terrain, l’âge supérieur à 65 ans étant le principal facteur de risque de forme grave.
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En l’absence d’un traitement efficace et d’un vaccin, l’hygiène et les politiques de santé publique, comprenant le dépistage massif et le confinement des sujets infectés, sont les principaux leviers pour lutter contre l’épidémie.
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Références
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