Abstract
Objectifs
L’épidémie du COVID-19 est survenue au Gabon à une période où l’hôpital psychiatrique vit une crise sans précédent du fait d’une baisse des moyens matériels et humains. À partir de l’expérience clinique des soignants, nous présentons les difficultés que rencontrent ces acteurs du soin pour maintenir l’alliance thérapeutique.
Méthode
L’article expose une synthèse de travaux sur le confinement, le COVID-19 et les troubles psychiques.
Résultats
Globalement, on observe une baisse des consultations en ambulatoire. En zone rurale, la crise sanitaire a occasionné une suppression des suivis au domicile des patients ainsi qu’une difficulté d’accès aux médicaments psychotropes onéreux, favorisant l’inobservance du traitement avec comme conséquence des décompensations psychiatriques.
Mots clés: Alliance thérapeutique, Confinement, COVID-19, Médicaments psychotropes, Psychiatrie
Abstract
Gabonese psychiatry is facing a crisis, which results in a decrease in material and human resources. Hospital beds are closed and consultations are mainly on an out-patient basis. This article shows how health care workers are coping with this pandemic, and the challenges of maintaining the therapeutic alliance. It presents a synthesis of works on confinement, COVID-19 and mental disorders. Clinical observations reveal that the COVID-19 epidemic has strengthened the dysfunctions observed in care. In rural areas, there is a suppression of follow-up at home. In general, this health crisis had an impact on the purchasing power of patients. What caused a difficulty of payment of the psychiatric consultations in liberal, a difficulty of access to the expensive psychotropic drugs, thus favouring a non-observance of the care, and a decompensation of the psychiatric picture. In urban areas, there is a considerable decrease in out-patient consultations. There is still concern about the inter- and post COVID-19 psychiatric care. This pandemic calls on leaders leading to a reorganisation of the psychiatric care system (decentralisation of establishments throughout the country, training of qualified nursing staff, fall in the prices of expensive psychotropic drugs). The establishment of helplines in psychiatric facilities, the opening of hospital beds, COVID-19 devices in public and private facilities for patients with mental disorders are essential.
Keywords: Decompensation, COVID-19, Psychiatry, Psychotropic drug, Therapeutic alliance
1. Introduction
Le 12 mars 2020, le Gabon déclarait son premier cas de COVID-19. Pour faire face à cette crise sanitaire, un Comité de pilotage (COPIL) indépendant composé d’universitaires, de biologistes, d’épidémiologistes, de médecins de la santé publique et de la santé militaire ainsi que des membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), voyait le jour. Dans le même élan, des mesures gouvernementales de restriction des déplacements, le confinement total puis partiel du grand Libreville, la fermeture des frontières aériennes, maritimes, terrestres, etc., devenaient effectifs.
La pandémie du COVID-19 représente un réel danger pour le Gabon, au regard de la fragilité de son système sanitaire, des dangers liés aux représentations de la maladie par les populations, des difficultés liées à la non-application des gestes barrières, et de la précarité dans laquelle se trouve une frange considérable de la population (600 000 personnes vivent avec moins d’un euro par jour, selon les estimations de la Banque mondiale, 2019). Parmi les sept recommandations formulées par le COPIL dans le rapport du 21 mars au 3 avril 2020, nous retenons la répartition adéquate des équipements aux régions sanitaires. Cependant, force est de constater que les structures de prise en charge des malades mentaux, c’est-à-dire le Centre national de santé mentale de Melen (CNSM) de Libreville et le service de psychiatrie du Centre hospitalier régional de Mouila (CHRM), sont les grandes oubliées de ces mesures gouvernementales (kits de protection insuffisants ou parfois absents). Ce constat est fait à l’échelle nationale. Nous observons un déni de la pathologie psychiatrique, qui se caractérise par l’absence de création d’unités COVID-19 au sein des structures de prises en charge des malades mentaux, alors que les conditions de confinement sont génératrices de détresse psychologique et de survenue de troubles psychiatriques [19]. La santé mentale des patients atteints de COVID-19, des personnes asymptomatiques, et de la population en général, devrait être une priorité de santé publique. La vulnérabilité de l’organisation des soins en psychiatrie, la vulnérabilité individuelle des usagers et la précarité sont des facteurs qui pèsent sur les soins dans ce secteur. Les professionnels de santé doivent sans cesse adapter et réajuster la prise en charge au regard du contexte. Comment le personnel soignant fait-il face à cette épidémie ? Cet article fait état des connaissances actuelles sur le confinement, le COVID-19 et les troubles psychiques. Il présente l’expérience des praticiens des structures de Libreville et de Mouila pour assurer la continuité des traitements et maintenir le lien social.
2. Troubles psychiques et confinement
Plusieurs études ont démontré l’impact négatif du confinement sur la santé mentale des individus, avec ou sans antécédents psychiatriques. Le confinement, à l’origine de l’ennui et de l’isolement social, serait potentiellement générateur de nombreux troubles, troubles du sommeil, anxiété, trouble stress post-traumatique (TSPT), dépression, suicide, stress aigu, conduites addictives [17], [18]. Les situations de confinement, à l’exemple du milieu carcéral [19], seraient propices à l’éclosion des troubles cités précédemment. Les mesures de confinements très stricts ont des conséquences désastreuses sur la santé mentale des détenus. C’est le cas, par exemple, du système carcéral américain qui, durant des années, a eu recours à l’isolement comme moyen de punition (prisonnier seul dans une cellule, avec des stimulations environnementales et des interactions sociales limitées au strict minimum) [13]. Le tableau clinique présenté par ces prisonniers, aussi appelé security housing unit (SHU) syndrome [14], [15], incluait un état confusionnel agité associé à des idées délirantes (paranoïa) et des phénomènes hallucinatoires (chez plus de 40 % des individus), mais également une forte agitation, de l’impulsivité et souvent des épisodes de violence auto-dirigée [5], [16]. Ces symptômes étaient très souvent observés chez des individus sans antécédents psychiatriques. La prévalence des troubles en milieu carcéral pourrait s’expliquer non seulement par les mauvaises conditions de détention et probablement par les antécédents personnels, surtout la personnalité pré-morbide. Par ailleurs, le confinement solitaire engendrerait plus de morbidité psychiatrique que l’emprisonnement non solitaire (29 % vs 15 %), avec principalement de l’anxiété et de la dépression [1]. Des observations de confinement en petits groupes (allant de deux à six personnes lors d’expéditions polaires, sous-marines ou insulaires) rapportent une augmentation de la paranoïa et des expériences de type hallucinatoire (flash lumineux, impression de mouvements), entre autres symptômes psychologiques [9], [10]. Les symptômes psychiatriques développés dans ces conditions sont liés à la durée de confinement mais disparaissent, en tout cas pour les symptômes psychotiques, après la fin de celui-ci.
3. Troubles psychiques et COVID-19
Les patients atteints de troubles psychiques sont une population très exposée au COVID-19. Une recension d’études souligne que hors contexte épidémique, les patients hospitalisés en psychiatrie, souffrant de schizophrénie, de trouble bipolaire, de dépression, de troubles anxieux ou d’autisme, présentent un risque d’infection à pneumocoques [20]. Ils sont beaucoup plus souvent que la population générale atteints de comorbidités (pathologies cardiovasculaires et pulmonaires, diabète, obésité, consommation de tabac inhalé) qui sont des facteurs de risque d’infection sévère à SARS-CoV-19 [21]. La prévalence des maladies cardiovasculaires est comprise entre 30 et 60 % avec une prévalence 1,5 à 2 fois plus élevée chez les personnes souffrant de pathologies psychiatriques comparativement à la population générale [11]. La vulnérabilité cognitive et comportementale dans cette population n’a pas fait l’objet d’étude. Néanmoins, l’expérience clinique démontre que le défaut d’insight, notamment dans les troubles psychotiques, serait un obstacle aux respects des mesures barrières qu’impose cette épidémie. Une étude chinoise portant sur des séances de psychothérapies dynamiques a démontré que le confinement lié au COVID-19 déstabilise le fonctionnement mental des personnalités limites. La mise en quarantaine et la distanciation sociale intensifient le sentiment de vide intérieur, et aggravent la peur de l’abandon associé à d’autres émotions pénibles [7]. Ce sentiment de vide subjectif est transformé en une certitude absolue déformant ainsi la réalité. C’est pourquoi les personnalités limites réagissent facilement et intensément à toutes les possibilités de rejet social. Leur penchant pour l’expérience et leur intolérance douloureuse à la solitude les rendent hypersensibles aux situations sociales [12].
4. COVID-19 et organisation des soins en psychiatrie dans les pays développés
La pandémie du COVID-19 a entraîné une large réorganisation du système sanitaire, particulièrement dans les pays développés. La restructuration affecte toute la chaîne de production des soins, notamment sur le plan des organisations des ressources humaines et matérielles (suspension des activités programmées et structuration de soins). L’un des besoins sanitaires principaux reste celui des lits dédiés aux patients infectés. L’hôpital psychiatrique a contribué également à ce mouvement inédit : fermeture des hôpitaux de jour, téléconsultations et renforcement des interventions à domicile, redéploiement des personnels, constitution de réserves sanitaires, etc. [8]. Malgré la télécommunication, les consultations en présentiel sont indispensables. En France, des établissements, publics comme privés, ont dû mettre en place des unités PSY/COVID destinées à recevoir des patients avec COVID-19 et ayant besoin de soins psychiatriques. De telles unités ont également pour but de contrôler le risque épidémique, de concentrer les moyens de préventions et de soins dont il a fallu gérer la pénurie en début d’épidémie et d’homogénéiser les soins [4]. Dans de nombreux hôpitaux, des unités consacrées à la prise en charge des patients psychiatriques présentant une infection au COVID-19 ont été créées. Des équipes pluridisciplinaires (psychiatres, généralistes, pharmaciens) établissent des protocoles spécifiques en vue de proposer des soins de qualité [6], [8]. La décompensation psychiatrique au domicile constitue un enjeu majeur de la prise en charge durant la pandémie du COVID-19. Les circuits d’interventions traditionnels (SOS Médecins ou SAMU) sont particulièrement difficiles pour les patients souffrant de troubles psychotiques. À ce propos, l’accent est mis sur la psychoéducation qui doit constituer un point central pour les patients suivis en ambulatoire. Ce travail d’éducation à la santé est aussi psychiquement rassurant pour les patients et leurs proches. Pour prévenir les troubles, les auteurs préconisent des prises en charge diagnostiques et thérapeutiques qui nécessitent un accompagnement précoce et spécialisé, le recours à la télépsychiatrie, afin de répondre aux contraintes de confinement, aux horaires, et risques infectieux [6].
5. Une clinique ambulatoire à bout de souffle
L’histoire de la psychiatrie au Gabon remonte à l’époque coloniale. Dans les années 1970, on observe la première implication des personnels qualifiés en santé mentale (premier psychiatre, formation des infirmier(e)s spécialisé(e)s en santé mentale). Situé en périphérie de Libreville, le Centre national de santé mentale de Melen abrite neuf pavillons (deux pour les femmes et sept pour les hommes) et un ancien quartier composé d’indigents sous neuroleptique retard. À sa création, l’établissement fonctionnait 24 h/24 h, offrant ainsi la possibilité d’une prise en charge en interne (hospitalisation) et en externe (ambulatoire). Le service d’accueil appelé encore « service porte » était orienté sur les urgences psychiatriques, l’administration des premiers soins sous la direction des techniciens supérieurs (c’est le cas, par exemple, des premiers soins axés sur la contention chimique par injection pour les cas d’agressivité), la prescription des traitements, la vérification des ordonnances, le suivi de l’évolution de la maladie et l’orientation vers les psychiatres. Au Centre national de santé mentale de Melen, la prise en charge n’est pas uniquement médicamenteuse. Des psychologues cliniciens offrent des séances de psychothérapies pour les usagers en interne et externe. Contrairement au centre national de santé mentale de Melen, le service de psychiatrie de Mouila est orienté sur une prise en charge en ambulatoire. Les consultations psychiatriques sont conduites par un infirmier en santé mentale. Depuis 2014, on observe une réorganisation des soins au centre national de santé mentale de Melen, les pavillons d’hospitalisations sont fermés. Les soins se font principalement en ambulatoire. Les hospitalisations sont rares, sauf en cas de force majeure. Il est question de quelques patients dont les parents ont perdu tout contrôle. Le Centre national de santé mentale de Melen connaît une crise sans précédent (pénurie du personnel soignant qualifié, vétusté des bâtiments, difficulté d’approvisionnement en médicament, retard de paiement des honoraires, etc.). Les mêmes maux sont répertoriés en zone rurale, du côté du service de psychiatrie du Centre hospitalier régional de Mouila. Le départ à faire valoir ses droits à la retraite de l’unique infirmier en santé mentale a plongé le service dans le chaos. Depuis 2016, on observe une reprise timide des soins, avec des hospitalisations du côté du Centre national de santé mentale de Melen. Cependant, une exigence d’accompagnement est recommandée aux aidants. En dehors des facteurs humains, économiques et sociaux (précarité) qui rendent difficile la prise en charge des malades mentaux, s’ajoute le facteur culturel. Les préjugés autour de la maladie mentale sont un frein au bon déroulement du processus thérapeutique. Les désinvestissements successifs des traitements au profil des différents thérapeutes – église (pasteur, prêtre), médecine traditionnelle (féticheur, marabout) – sont très présents au sein de cette population. En 2003, 55 % des malades internés au Centre national de santé mentale de Melen avaient consulté des tradithérapeutes et/ou des Églises éveillées [2]. Une étude réalisée en 2008 sur le rôle « des Églises éveillées dans la prise en charge des patients à Libreville » mentionnait que sur 81 malades, 72,8 % étaient venus consulter dans ces églises pour des pathologies médicales ; 27,2 % pour des problèmes surnaturels. Chez 53,4 %, l’étiologie sorcière était proposée par les pasteurs [3]. Ces différents thérapeutes sont consultés pour des problèmes psychiques et des malchances. Ces nouvelles formes d’assistance médicale, notamment psychiatrique, se développent avec la récession économique, créant ainsi un dysfonctionnement des politiques publiques (à l’exemple de l’accès au soin).
6. La crise de trop
Au Centre national de santé mentale de Melen, les soignants observent une baisse significative des consultations en ambulatoire depuis la déclaration du premier cas de COVID-19. L’absence de données statistiques ne permet pas d’évaluer ce phénomène en termes de prévalence. Le COVID-19 vient accentuer le dysfonctionnement observé dans l’accompagnement des malades mentaux. Les pavillons femmes et hommes sont quasi déserts. Seuls les patients n’ayant pas d’endroits où aller (indigents de l’ancien quartier), et ceux retenus par le confinement total sont présents sur les lieux (cas des pavillons des femmes). Les soignants et les membres de l’administration se plaignent de l’insuffisance de kits de protection (gants, gels et bavettes). L’angoisse d’être contaminé par les patients est grande au sein du personnel soignant. Cela est d’autant plus justifié, car ce secteur a enregistré deux décès liés au COVID-19 sur les huit annoncés le 10 mai 2020 par le COPIL. À ce propos, des auteurs soulignent que le stress lié au contexte infectieux avec la crainte, majorée par le manque d’équipement, d’être vecteur de contamination de ses proches, ses collègues et patients est un facteur générateur de troubles psychiatriques chez les professionnels de santé [8]. Le constat est très alarmant en zone rurale, avec pour supplément une absence de consultation psychiatrique. Dans les rues de Libreville et de Mouila déambulent des malades en décompensation de la pathologie psychiatrique (dénudés, délirants) n’ayant aucune conscience de l’épidémie, du respect des consignes, et dont aucune hospitalisation ne peut être envisagée.
7. L’arrêt des suivis aux domiciles en zone rurale
Les ruptures de soins sont fréquentes en psychiatrie, même dans un contexte de fonctionnement habituel. Pour maintenir l’alliance thérapeutique, le psychologue clinicien du Centre régional de Mouila a mis en place un projet thérapeutique d’accompagnement des patients à leurs domiciles. Cette action repose sur l’éducation thérapeutique (ET), des psychothérapies de soutien et l’orientation en libéral pour les soins infirmiers en psychiatrie. Les patients et parents avaient au préalable donné leur consentement. Il était question à travers ET de fournir des informations sur la maladie. L’acquisition des compétences opératoires facilite la gestion des comportements et la prise de conscience de l’intérêt du traitement. ET rompt avec les préjugés sur la maladie mentale et permet aux aidants de saisir leurs rôles dans le processus de soins. C’est le cas de M., âgée de 40 ans, qui présente un trouble bipolaire de l’humeur. Elle est ouvrière agricole. Sa consommation de cannabis, son inobservance du traitement, son instabilité émotionnelle, sa difficulté à faire face à ses engagements professionnels (absentéismes répétés) lui ont valu plusieurs mises à pied. Son entourage dénote des actes auto-agressifs (tentative de suicide), un défaut d’hygiène corporelle, etc. Selon ces derniers, M. ferait preuve de paresse et de manque de volonté ; « elle ne veut rien faire de sa vie ». M. affirme que sa maladie trouverait son origine dans une possession démoniaque : « ma défunte grand-mère habite mon corps », ce qui justifierait son instabilité émotionnelle. Durant ET, le psychologue explique à M. que son comportement résulte de son affection psychiatrique (symptômes de la maladie). L’observance du traitement corrigera ses symptômes, M. pourra progressivement retrouver sa stabilité et son autonomie. Aux parents, la connaissance du trouble et ses manifestations ont permis de déculpabiliser et de lever tout sentiment d’impuissance. Après vérification de son ordonnance et observation clinique (exaltation d’humeur, agressivité verbale, hyperactivité, etc., expression du versant maniaque de son trouble), M. est orientée pour une consultation psychiatrique en libéral, qui donnera lieu à une prescription de traitement (régulateur de l’humeur). Les psychothérapies de soutien ont renforcé ses capacités d’adaptation. M. arrive à s’affirmer devant ses collègues et parle librement de sa maladie. Elle identifie ses émotions et élabore des stratégies préventives (face à sa consommation de cannabis, son hygiène, son rythme de veille sommeil, la prévention du stress, sa gestion de dépenses). Un bilan psychiatrique a été envoyé à son employeur afin de revoir les modalités de son contrat de travail (réduction des heures de travail, exécution de tâches moins complexes). Avec le confinement lié au COVID-19, la fréquence des consultations au domicile des patients est passée progressivement de deux à une séance puis zéro. Le psychologue dresse un constat des dernières visites. L’épidémie du COVID-19 n’a pas été sans incidence sur le pouvoir d’achat de M., créant ainsi une difficulté de paiement des consultations en psychiatrie et une incapacité à s’approvisionner en médicament. Nous observons une décompensation du tableau psychiatrique qui se traduit par les signes cliniques ci-après : impulsivité, euphorie, irritabilité, hyperactivité (jardine toute la journée sans se reposer et sans être fatiguée), des hallucinations auditives prototypes de symptômes psychotiques (dit entendre la voix de sa grand-mère), conduite addictive (consommation de cannabis et alcool) qui a une fonction d’automédication (surmonter le stress lié au COVID-19 et traiter sa symptomatologie psychotique). Sur vingt-deux familles (100 %) suivies à domicile, cinq (23 %) suivaient correctement leur traitement malgré l’épidémie (consultation psychiatrique en libéral, ordonnance à jour et traitement), dix-sept (77 %) exerçant en majorité dans le tertiaire (chauffeurs, commerçants, ouvriers, et bien d’autres) évoquaient des difficultés financières accentuées par la crise (faible rendement des activités génératrices de revenu, hausse du coût des transports, absence de moyens financiers pour les soins infirmiers en psychiatrie et/ou l’achat de médicaments). L’infodémie, la précarité sociale, l’incapacité pour les autorités à répondre aux besoins des malades et à apporter une réponse sanitaire adéquate sont autant de facteurs qui contribuent à générer de l’angoisse au sein de cette population vulnérable.
8. Conclusion
La psychiatrie gabonaise s’efforce à offrir des soins au regard des faibles moyens dont elle dispose. Une inquiétude majeure réside quant à la prévention et à la prise en charge des effets négatifs liés au COVID-19 pendant et après cette épidémie au sein de la population en général, et celle des malades mentaux en particulier. La mise en place de lignes d’écoute dans les structures psychiatriques et l’ouverture de lits d’hospitalisation des cas de COVID-19 sont indispensables. Cette crise sanitaire invite les dirigeants à une réorganisation du système de soins en psychiatrie (décentralisation des établissements dans l’ensemble du pays, formation du personnel soignant qualifié, baisse des prix des médicaments psychotropes onéreux, etc.). Pour répondre aux besoins de formation, l’Institut national de formation d’action sanitaire et sociale (INFASS) devra intégrer dans son programme un module en psychiatrie en santé mentale.
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
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