Une première communication a porté sur les résultats du Registre français des transplantés rénaux ayant développé une infection à SARS-CoV-2. Ce registre a été mis en place sous l’égide de la SFNDT pour recenser tous les cas à partir du 1er mars 2020. Sur les 279 patients transplantés rénaux inclus dans le registre, 243 ont été admis à l’hôpital et 36 ont été pris en charge à domicile. L’âge moyen des hospitalisés était de 61,6 ans et la plupart présentaient des comorbidités (hypertension artérielle : 90 % ; surpoids : 64 %, diabète : 41 %, maladies cardiovasculaires : 36 %). La fièvre, la toux, la dyspnée et la diarrhée étaient les symptômes les plus fréquents. Des formes sévères ont été rapportées chez 106 patients, soit 46 % (admission ou transfert en réanimation, ventilation mécanique ou décès). Quarante-trois patients sont décédés avec un taux de mortalité à 30 jours de 22,8 %.
En analyse multivariée, les facteurs associés à la mortalité étaient l’âge, > 60 ans, un antécédent (ATCD) de maladie cardiovasculaire et la dyspnée. Le surpoids, la fièvre et la dyspnée étaient indépendamment liés à la survenue d’une maladie sévère.
Cette étude montre bien que les transplantés rénaux ont une mortalité élevée de la COVID-19. Le défi va être maintenant de définir une prise en charge adaptée pour ces patients.
D’après l’Abstract CO Co01
Une autre analyse du CHU de Strasbourg a montré que sur 50 patients transplantés atteints de COVID-19 le taux de mortalité à 30 jours était de 19,5 %. L’élévation des marqueurs de l’inflammation (protéine C réactive [CRP] > 100 mg/L et interleukine-6 > 65 ng/L), suivie par une hausse de la troponine I hypersensible (> 30 ng/L) et des D-dimères (> 960 ng/mL), était fortement associée à la sévérité et la mortalité.
D’après l’Abstract CO T02
Une étude du CHU de Liège s’est concentrée sur la corrélation anatomoclinique de l’atteinte rénale de la COVID-19. Cette équipe a réalisé une biopsie rénale post mortem chez tout patient décédé dans le cadre d’une COVID-19. Seize biopsies ont été réalisées. Chez ces patients sévères, la prévalence de l’insuffisance rénale aiguë était de 50 % des cas et 53,3 % des patients présentaient une protéinurie > 500 mg/g de créatininurie.
En microscopie optique, les auteurs relèvent dans 70 % des cas une nécrose tubulaire aiguë de sévérité légère sans inclusion virale et sans infiltrat interstitiel ou tubulaire. Une congestion capillaire glomérulaire et péritubulaire est montrée dans respectivement 53,3 % et 80 % des cas.
Les auteurs concluent que l’analyse post mortem des biopsies rénales montre principalement des lésions tubulaires sans lésion glomérulaire significative malgré la forte prévalence d’insuffisance rénale.
D’après l’Abstract CO Co02
Au vu de ces résultats, nous pourrions nous poser la question sur la présence du virus dans l’atteinte rénale de SARS-CoV-2. C’est ce qui a justement été fait dans cette étude de l’équipe du Pr Moulin à Strasbourg. Les auteurs ont inclus 8 patients dont 3 transplantés rénaux. Quatre patients ont présenté un épisode d’insuffisance rénale aiguë (IRA) et un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA). Les lésions de nécroses tubulaires étaient fréquentes. Or, la recherche du virus par immunohistochimie et par RNAscope montre une positivité de rares cellules inflammatoires circulantes intrarénales. Les cellules podocytaires, tubulaires et endothéliales sont restées négatives. Il n’y a donc pas, dans cette série d’évidences, de présence du virus et de lésions inflammatoires aiguës dans les fragments biopsiques. En revanche, des signes en faveur d’une inflammation de la microcirculation (maladie vasculaire intestinale [MVI]) sont importants et corrélés avec l’indice de masse corporelle, la protéinurie et certains paramètres inflammatoires comme la CRP et la troponine. La présence de MVI pourrait faire évoquer une possible atteinte endothéliale liée au relargage cytokinique bien connu dans la maladie.
D’après l’Abstract CO Co03
Au niveau clinico-biologique, la fréquence et la sévérité des IRA au cours de la COVID-19 n’avaient pas été rapportées dans les formes les plus sévères de la maladie. Une étude observationnelle du CHU de Bordeaux sur 71 patients hospitalisés pour formes graves de COVID-19 en réanimation a été effectuée. Le suivi médian était de 17 (12-23) jours. L’IRA était définie selon les critères Kidney Disease Improving Global Outcomes (KDIGO) (créatinine + diurèse). Une analyse urinaire systématique (incluant ionogramme urinaire, protéinurie et recherche de glycosurie, leucocyturie et hématurie) a été réalisée le jour de l’apparition de l’IRA. Une IRA transitoire a été définie comme un retour à la créatininémie basale ou une baisse de plus de 50 % de la créatininémie dans les 72 heures après le diagnostic d’IRA.
Sur ces patients, une IRA a été diagnostiquée chez 57 patients (80 %) dont 20/57 avec une IRA stade 1, 20/57 stade 2 et 17/57 stade 3.
Deux patients sont décédés dans les 72 heures et une IRA transitoire était présente chez 4/55 (7 %) patients. Les paramètres de l’ionogramme urinaire n’étaient pas différents entre les patients ayant une IRA transitoire ou non. La dialyse a été nécessaire chez 10 patients sur 71 (14 %). Le rapport protéinurie/ créatininurie était de 82 (54-140) mg/mmol. Une glycosurie a été retrouvée chez 2 patients. Les auteurs en concluent que l’IRA est très fréquente, persistante et sévère chez les formes sévères de COVID-19.
D’après l’Abstract CO Co04
La crise sanitaire liée à la pandémie de COVID-19 a touché de nombreux patients en néphrologie, mais qu’en est-il de la continuité des soins chez les patients non infectés ? Le groupe Nephrocare a étudié de façon rétrospective entre février et avril 2020 les paramètres des patients hémodialysés (HD) au sein de leurs 41 structures. Ils proposent une comparaison de la prise en charge en Île-de-France (IDF), région fortement touchée par la Covid, avec les centres de régions moins touchées. Les auteurs montrent une baisse significative des paramètres de dialyse entre février et avril en IDF, contrairement aux autres régions. Sur tous les patients, il est observé une baisse du poids prescrit sur les 3 derniers mois, probablement liée à la suppression des collations en dialyse, à la diminution de la durée de traitement et à l’état nutritionnel de départ fragilisé par la crise sanitaire.
D’après l’Abstract CO Co05
Dès le début de l’épidémie de la COVID-19, les centres de dialyse de Belgique francophone ont enregistré les cas de manière à établir un bulletin épidémiologique. Le bulletin était élaboré à partir d’un questionnaire patient portant sur la symptomatologie, le diagnostic et les dates clés de l’évolution. Parmi 3 619 patients dialysés en Belgique francophone, 287 (7,9 %) ont présenté les symptômes de la COVID-19. Cinquante-deux patients sont décédés (18 %). Les deux groupes d’âges les plus atteints étaient les 65-74 ans et 75-84 ans.
D’après l’Abstract CO Co06
Les facteurs prédictifs des formes sévères chez les HD sont encore inconnus à ce jour. Une étude de l’Association pour l’utilisation du rein artificiel (AURA) Paris s’est intéressée au rapport polynucléaire neutrophile/lymphocyte (ratio N/L) comme pouvant être un marqueur prédictif de COVID-19 sévère. Ils ont réalisé une belle étude prospective sur 62 patients HD infectés à SARS-CoV-2. Les formes sévères étaient définies par l’oxygénodépendance, l’admission en réanimation ou le décès. Quarante-cinq pour cent des patients ont présenté une forme grave et 10 % sont décédés. En analyse multivariée, un ratio N/L > 3,7 à j7 était le facteur prédictif majeur d’une évolution vers une forme sévère.
D’après l’Abstract CO D06
La gestion quotidienne du flux des dialysés chroniques visant à limiter la contamination par le SARS-CoV-2 est complexe dans les centres de dialyse. L’objectif de l’étude de Vial et al. a été d’évaluer si la biologie réalisée en routine chez les patients HD peut être utile pour orienter rapidement vers une forte ou une faible suspicion de Covid chez les patients HD suspects. Trentesept patients inclus étaient soupçonnés d’être infectés par le SARS-CoV-2 à leur arrivée dans le centre pour une séance de dialyse. Un compte d’éosinophile inférieur à 0,045 g/L permet d’identifier une infection par le SARS-CoV-2 avec une aire sous la courbe (ASC) de 0,9. Les auteurs en concluent que le compte d’éosinophile en routine permet un dépistage rapide des patients HD chroniques suspectés d’être Covid et oriente ainsi vers forte ou une faible suspicion Covid.
D’après l’Abstract PO D36
Déclaration de liens d’intérêts
Au cours des 5 dernières années, BG a perçu des honoraires ou financements pour rédaction d’articles scientifiques par Fresenius Medical Care.
Cet article fait partie du numéro supplément Actualités du 5e congrès de la Société francophone de néphrologie, dialyse et transplantation (SFNDT) réalisé avec le soutien institutionnel de Dr. Schär et de Fresenius Kabi.