Abstract
La crise sanitaire de la COVID-19 a imposé une réorganisation majeure de l’offre de soins en France. Considérant la nécessité de maintenir des soins pour les adolescents souffrant de troubles physiques ou psychiques, les Maisons des Adolescents ont dû adapter en urgence leurs pratiques afin de maintenir au maximum la continuité des soins pour les adolescents et leurs familles. À travers le cas d’une adolescente qui a présenté une dégradation clinique de son anorexie mentale durant le confinement, nous présentons les réorganisations des soins au sein des différentes unités (consultations–hôpital de jour–unité d’hospitalisation temps plein) d’une Maison des Adolescents parisienne au cours de la pandémie de COVID-19. À partir de la littérature existante, nous discutons les avantages et limites de la télémédecine et les enjeux pratiques pour l’organisation future des soins pour les adolescents. Contrairement à la médecine pédiatrique ou pédopsychiatrique, il n’existe pas de protocole décrivant la mise en place de la télémédecine en médecine et psychiatrie de l’adolescent. Il est urgent d’approfondir les évaluations de l’utilisation de la télémédecine pour les adolescents. Ce type de recherche permettra d’améliorer les connaissances sur l’efficacité, l’acceptabilité et les limites de l’utilisation d’un dispositif de téléconsultation en psychiatrie de l’adolescent, en contexte de crise. Certaines modalités de soins à distance mises en place pendant la crise pourraient ainsi être maintenues dans le temps et s’inscrire en routine dans le domaine de la médecine et psychiatrie de l’adolescent.
Mots clés: Télémédecine, Adolescence, COVID-19, Pandémie, Confinement, Maison des Adolescents
Abstract
Background
The COVID-19 sanitary crisis has imposed a major reorganization of the health care system in France. Lockdown could be a factor in the emergence or deterioration of psychological disorders; it can be even more fragilizing during the specific period of adolescence. The « Maisons des Adolescents » (Teenagers’ Houses) had to urgently adjust their practices to provide continuity of care for adolescents suffering from physical or mental disorders. The « Maisons des Adolescents » are pluridisciplinary care centres for adolescents and their families that provide assessments and services for medical, psychological, socio-educational, educational and legal needs. How did care continue for adolescents during lockdown? What adjustments occurred in the « Maisons des Adolescents » during the health crisis?
Methods
This article presents the case of an adolescent who suffered a significant deterioration of her anorexia nervosa during confinement. Through this case, we describe the reorganization of care within the different units (consultations - day hospital - hospitalization unit) of a Parisian « Maison des Adolescents » during the COVID-19 pandemic.
Findings
In this service, the rapid implementation of the telemedicine system in the context of the COVID-19 pandemic made possible provision of continuity in care for vulnerable adolescents and families. Based on the existing literature, we discuss the advantages and limitations of telemedicine and the practical issues for the future organization of care for adolescents.
Perspectives
In contrast to pediatric medicine or child psychiatry, there is no protocol describing the application of telemedicine in adolescent medicine and psychiatry. There is an urgent need for further evaluation of the use of telemedicine for this population. This kind of research will improve knowledge about the effectiveness, acceptability and limitations of using a teleconsultation device in adolescent psychiatry in a crisis context. Certain remote care modalities implemented during the sanitary crisis could thus be maintained over time and become routine in the field of adolescent medicine and psychiatry.
Keywords: Telemedicine, Adolescence, COVID-19, Pandemic, Lockdown, « Teenager's House » (Maison des Adolescents)
1. Introduction
Les Maisons des Adolescents (MDA) sont des centres de soins pluridisciplinaires à destination des adolescents et de leurs familles qui proposent des services d’accueil, d’évaluation et de prise en charge médicales, psychologiques, socio-éducatives, scolaires ou encore juridiques [1], [2]. La crise sanitaire de la maladie à coronavirus (coronavirus disease 2019 ; COVID-19), qui a entraîné la limitation extrême des contacts puis un confinement généralisé de la population, a imposé une réorganisation majeure de l’offre de soins en France [3], [4]. Les soins considérés comme non-urgents et programmés ont été différés. Les soins essentiels ont été réalisés à distance dans l’immense majorité des cas, et la télémédecine s’est généralisée. La télémédecine est définie comme un ensemble d’actes médicaux réalisés à distance par l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (appels téléphoniques, visioconférences, envoi d’ordonnance par mail, …) [5]. Elle est classiquement utilisée pour relever des défis tels que les déserts médicaux, les pénuries de ressources matérielles ou humaines [6]. Considérant la nécessité de maintenir des soins pour les adolescents souffrant de troubles chroniques, physiques ou mentaux, les MDA ont dû se réorganiser et adapter en urgence leurs pratiques afin de maintenir au maximum la continuité des soins pour les adolescents et leurs familles. Cela est apparu essentiel durant cette période face au risque de déstabilisation des pathologies chroniques ou de majoration de troubles psychiques tels que la dépression, l’anxiété ou l’état de stress aigu en lien avec le confinement [7], [8]. Beaucoup de créativité a été nécessaire pour proposer des modalités de soins thérapeutiques et adaptées aux attentes des adolescents : téléconsultations, bien sûr, mais aussi rédaction de fiches pratiques par pathologies à destination des adolescents et familles [9], [10], groupes thérapeutiques ou ateliers de médiations à distance, thérapies familiales en visioconférences, ou encore visites virtuelles des proches. À travers le cas d’une adolescente qui a présenté une dégradation clinique de son anorexie mentale durant le confinement, nous présentons les réorganisations des soins au sein d’une MDA1 parisienne au cours de la pandémie de COVID-19 et discutons les enjeux pratiques pour l’organisation future des soins.
2. La réorganisation des soins à travers le parcours d’une adolescente
2.1. Cas clinique
Anna est une adolescente de 16 ans qui a commencé une prise en charge à la MDA en ambulatoire fin 2019 pour un Trouble des Conduites Alimentaires (TCA) restrictif. Anna est fille unique, elle vit avec ses parents en garde alternée depuis leur séparation il y a deux ans. Depuis l’été 2019, elle présente une anorexie mentale restrictive pure, compliquée d’un épisode dépressif, qui s’est aggravée en fin d’année avec une accélération de la perte pondérale. Elle bénéficie de consultations mensuelles avec un somaticien, un diététicien et un psychiatre, et elle est également suivie en thérapie individuelle par un psychologue de manière hebdomadaire. Ses premiers soins se sont mis en place durant cette période d’aggravation, et ont permis une stabilisation clinique autour d’un IMC à 15 kg/m2. À l’annonce du premier confinement (le 17 mars 2020), Anna a poursuivi ses soins médicaux et paramédicaux grâce à l’instauration immédiate de téléconsultations. Du fait d’une recrudescence anxieuse en lien avec le confinement au domicile et la modification de ses soins, un étayage et une surveillance supplémentaires ont été proposés à Anna avec la mise en place d’un hôpital de jour (HDJ) virtuel au sein de la MDA. Malgré le suivi ambulatoire soutenu en téléconsultations et la participation à l’HDJ en visioconférence une fois par semaine, Anna s’est dégradée cliniquement. Elle s’est présentée sans rendez-vous au dispositif d’accueil et de permanence de soins de la MDA et a ainsi été réévaluée en urgence en présentiel. Le constat de la perte de poids de six kilos en deux semaines (IMC = 13,5 kg/m2), le ralentissement psychomoteur massif, la recrudescence d’idéations dépressives et la situation familiale très conflictuelle ont amené l’équipe médicale à proposer une hospitalisation à temps plein pour un sauvetage nutritionnel de six semaines. Anna a bénéficié d’une renutrition entérale intensive et a retrouvé progressivement une autonomie alimentaire. Malgré le confinement, un travail familial a pu être amorcé avec Anna et ses parents lors d’entretiens en visioconférence. Ses parents, qui refusaient de se voir depuis leur séparation, ont finalement accepté des entretiens ensemble via la visioconférence. Au fur et à mesure de ces entretiens distantiels, la famille a progressivement accepté l’idée de débuter une thérapie familiale. Anna est sortie d’hospitalisation complète au bout de six semaines. Elle a repris son suivi ambulatoire en consultation et en HDJ, qui s’est réorganisé progressivement en présentiel à la levée du confinement, de même que l’ensemble des activités thérapeutiques.
2.2. La prise en charge ambulatoire en permanence d’accueil et consultation
En consultation, le suivi par téléphone a rapidement cédé la place aux visioconférences, qui permettaient un échange plus proche de la consultation présentielle et un meilleur accordage émotionnel entre le thérapeute et le patient.
Seules les consultations d’urgence et les situations où l’évaluation à distance était impossible étaient maintenues sur place : patients présentant des critères de gravité physique (perte rapide de poids, dénutrition sévère, malaises…) ou psychiatrique (risque suicidaire). Assurer une permanence d’accueil pour les adolescents et les familles étaient essentielle, a fortiori dans le contexte du premier confinement. En effet, cette mission d’accueil est spécifique aux MDA, et devenait d’autant plus importante dans cette situation sanitaire source de stress ou de complications socio-familiales pour certains. Les thérapies individuelles et groupales ont aussi été organisées en visioconférence. Certains groupes de parole ont pu se poursuivre à distance en adaptant les thématiques au contexte du confinement, et palliant le sentiment d’isolement de certains jeunes. Concernant les nouvelles demandes de prise en charge, des consultations en visioconférence ont été mises en place sur des délais courts, pour s’ajuster aux besoins liés à cette période, renforcer le soin ambulatoire et éviter les passages aux urgences ou les hospitalisations. Le nombre de téléconsultations a rapidement augmenté à mesure que celui des consultations présentielles diminuait dès mi-mars, et le nombre total de consultations n’a non seulement pas diminué, mais il a au contraire augmenté par rapport à 2019 (Fig. 1, Fig. 2, Fig. 3 ).
Fig. 1.
Proportions de consultations totales (présentielles et téléconsultations) à la Maison des Adolescents entre janvier et juin 2020 par rapport à 2019.
Fig. 2.
Proportions de consultations psychiatriques et psychologiques (présentielles et téléconsultations) à la Maison des Adolescents entre janvier et juin 2020 par rapport à 2019.
Fig. 3.
Proportions de consultations somatiques (présentielles et téléconsultations) à la Maison des Adolescents entre janvier et juin 2020 par rapport à 2019.
2.3. La prise en charge en hôpital de jour (HDJ)
L’HDJ accueille habituellement des groupes de patients en fonction de leurs pathologies : TCA, obésité, troubles psychiatriques tels que la phobie scolaire, la dépression, les états limites. Les activités sont groupales. Avec le confinement, l’accueil en présentiel s’est totalement interrompu et les soins se sont poursuivis par un suivi individuel médical, infirmier et diététique à distance par téléphone ou visioconférence. Les patients pouvaient participer à une journée par semaine d’HDJ en « virtuel » grâce à la mise en place d’atelier groupal en visioconférence. Ce suivi distantiel de l’HDJ se faisait de manière concomitante au suivi individuel de téléconsultations par le psychiatre et/ou psychologue référent.
2.4. La prise en charge en hospitalisation à temps plein
L’unité d’hospitalisation accueille vingt adolescents souffrant de TCA, de pathologies psychiatriques aiguës ou de symptômes somato-psychiatriques intriqués. Habituellement, l’hospitalisation est ouverte, sans contrat de séparation pour les patients hospitalisés pour anorexie mentale et les visites permettent une évaluation des interactions sociales et familiales, complétées par des entretiens familiaux réguliers. Durant le confinement, les visites et les permissions ont été suspendues afin de minimiser, dans ce contexte de crise sanitaire lié à la COVID-19, la circulation de personnes dans le service. Les patients ont pu maintenir un lien avec leur famille grâce aux temps de téléphone et tablette pluriquotidiens qui ont été élargis. Les adolescents hospitalisés étaient ainsi connectés de l’hôpital tandis que le reste de la famille était au domicile. Par ailleurs, tous les entretiens médicaux avec les familles étaient réalisés en moyenne une fois par semaine en visioconférence. Les patients ont pu bénéficier d’activités thérapeutiques et d’enseignement à distance par l’association l’école à l’hôpital.
3. Discussion
L’adolescence est une période de grands remaniements psychiques, relationnels, corporels et peut être à elle seule une période de vulnérabilité [11], [12]. Le contexte de crise sanitaire et le confinement ont été décrits comme facteurs d’apparition ou d’aggravation de troubles psychiques [13] ; cela peut être d’autant plus fragilisant durant cette période si spécifique qu’est l’adolescence [7]. Il était donc particulièrement important de pouvoir maintenir un accès aux soins à cette population. À la MDA, la mise en place rapide du dispositif de télémédecine dans le cadre de l’épidémie COVID-19 a permis d’assurer une continuité des soins et une disponibilité rassurante pour des adolescents et familles vulnérables, potentiellement fragilisés par la crise. Il n’existe pas de protocole décrivant la mise en place de la télémédecine en médecine et psychiatrie de l’adolescent [14], contrairement à la médecine pédiatrique [15] ou pédopsychiatrique [16]. La réorganisation s’est donc faite en urgence et sans cadre préétabli. L’organisation a été optimisée à mesure que les professionnels prenaient en main les outils numériques et adaptaient l’offre de soins.
Le maintien du suivi à l’aide de la télémédecine montre plusieurs intérêts. Tout d’abord, sur l’aspect préventif, la téléconsultation permet de repérer les situations plus à risque sur le plan médico-social et familial et ainsi prévenir au maximum les risques d’aggravation somato-psychique. Dans le cas d’Anna, il a ainsi été possible de surveiller l’évolution de son TCA, détecter la détérioration clinique et donc adapter la prise en charge jusqu’à organiser une admission en hospitalisation complète, en évitant un passage par un service d’urgence ou encore un retard d’accès aux soins. Par ailleurs, la télémédecine réduit non seulement l’isolement des patients, mais permet aussi d’apporter un support réel médical, infirmier et psychologique [17]. Pour Anna, le fait de bénéficier initialement un suivi en téléconsultation avec ses différents intervenants de la consultation comme de l’HDJ a permis de détecter les signes de détérioration et de pouvoir renforcer la prise en charge. Le suivi en distantiel assure une vigilance à l’égard de ces adolescents fragiles, qui ne sont pas toujours en mesure d’exprimer spontanément une demande d’aide et de soins. Les études rapportent une utilité du dispositif de télémédecine surtout dans les déserts médicaux ou les zones géographiques peu peuplées [6], [18], mais nous avons expérimenté que le recours à la télémédecine peut également être nécessaire et avantageux en cas d’isolement lié à une situation de confinement. De plus, l’outil numérique est aujourd’hui largement utilisé et maîtrisé par les adolescents qui peuvent alors adhérer avec facilité à la télémédecine, voire être parfois plus à l’aise qu’en présentiel. Aussi, la visio-conférence peut faciliter la discussion de certaines questions difficiles à aborder par l’adolescent ou encore, lors d’une hospitalisation, aider à travailler des relations extrêmement conflictuelles entre l’adolescent et ses parents qui ont besoin d’une mise à distance [6], [19]. Dans le cas clinique présenté, il a été beaucoup plus envisageable pour les parents de participer ensemble aux entretiens familiaux du fait de la distance liée à la visioconférence. Cela a permis de réamorcer un dialogue dans la famille autour d’Anna et finalement mettre en place une thérapie familiale, largement indiquée dans cette situation et, de manière générale, dans la prise en charge des adolescents souffrant de TCA.
Face à une mise en place en urgence et une utilisation intensive et quasi-exclusive du dispositif de télémédecine, les professionnels de santé se sont heurtés à plusieurs limites. Le cas d’Anna soulève cette question des limites de la télémédecine, puisqu’une hospitalisation temps plein a été nécessaire malgré un suivi ambulatoire renforcé en visioconférence. Cependant, cette situation inédite de recours rapide et massif à la télémédecine a permis de penser à des solutions innovantes et créatives face aux limites auxquelles se confrontaient au fur et à mesure les professionnels (Tableau 1 ). La littérature soulève déjà la limitation des interventions possibles sur place (visites à domicile par exemple) [6]. Les situations de protection de l’enfance sont extrêmement difficiles à gérer en téléconsultation. En effet, de jeunes adolescents peuvent être exposés à des situations d’abus ou violences intra-familiales et une téléconsultation depuis leur domicile n’est pas propice à parler en sécurité de ce qui leur arrive. La télémédecine présente alors des limites en termes de confidentialité ou d’intimité au domicile [14]. Sur le plan clinique, le confort du praticien peut rapidement être limité face à l’absence d’examen sur place. Néanmoins, la pratique de la téléconsultation par les somaticiens s’est révélée non dépourvue d’intérêt en matière d’évaluation (examen clinique à distance, pesée en direct…), avec un temps réservé à l’adolescent seul et également un temps d’échange avec la famille, reprenant le schéma habituel des consultations en présentiel. Cependant, il semble important de pouvoir assurer une permanence médico-psycho-sociale sur place pour les patients qui nécessiteraient une évaluation clinique en présentiel. De plus, ce type de permanence est une des missions spécifiques aux MDA pour faciliter l’accès aux soins des adolescents, leur permettre de dépasser leurs réticences initiales à consulter, répondre dans une temporalité adéquate [20].
Tableau 1.
Principales modifications des soins durant le confinement lié à la pandémie de COVID-19 et propositions de solutions face aux limites perçues.
Modifications de soins | Limites ou difficultés perçues | Solutions |
---|---|---|
Mise en place de téléconsultations pour le suivi individuel médical, infirmier, psychologique, diététique | Manque de confidentialité possible Familiarité aux outils numériques soignant-dépendante Examen clinique limité, examen physique impossible |
Accord entre la famille, le patient et le thérapeute pour que le patient soit seul dans une pièce à l’heure du RDV Formation aux outils numériques Examen clinique ciblé et consultation en présentiel si nécessité d’un examen clinique approfondi ou d’un examen physique |
Activités groupales (HDJ) en visioconférence Consultations de groupe (TF, TMF, transculturel, adoption, entretien familial) en visioconférence |
Manque de fluidité dans les échanges entre les participants Limite d’intervention des thérapeutes lors de conflits familiaux ou agitation |
Distribution de la parole par un référent Proposition de visioconférence en groupe pour des patients déjà connus (pas pour un nouveau groupe) |
Suspension des visites et permissions des patients hospitalisés | Travail familial plus limité Évaluation limitée dans les cas de refus scolaire anxieux Sortie définitive sans essai à l’extérieur pouvant mener à des rechutes plus rapides et maintien des situations de repli |
Augmentation des entretiens familiaux en visioconférence ou téléphone pour informer les parents de la prise en charge Augmentation des temps de téléphone personnel pour les adolescents hospitalisés pour maintenir un lien avec l’entourage Accompagnement pour évaluation des compétences scolaires et aménagements (école à l’hôpital en ligne) |
Sur le plan de la communication, la fluidité des échanges en visioconférence peut être altérée à cause de problèmes de connexion ou de difficulté de compréhension. Sur le plan familial, l’arrêt des permissions a empêché une partie de l’évaluation et du travail relationnel au domicile. Dans ce contexte, le maintien des entretiens familiaux et des thérapies familiales en visioconférence était d’autant plus important. Enfin, face à la mise en place et la diffusion extrêmement rapide de la télémédecine dans nos pratiques, il est important de quand même soulever les limites légales et éthiques de ce dispositif, en particulier au sujet de la protection des données et du risque de mauvaises pratiques des professionnels de santé, trop peu formés à la télémédecine [17]. Malgré le contexte de la crise sanitaire, le recours en urgence à la télémédecine nécessite une vigilance et ne doit pas aboutir à ce que certains auteurs appellent « la télénégligence » [21].
4. Conclusion
À travers ce cas clinique qui témoigne de la réorganisation des soins au sein d’une MDA, nous avons vu les intérêts et les limites du recours à la télémédecine auprès de patients adolescents et leurs familles. La rapidité de mise en place de la télémédecine a permis de soutenir les adolescents, limiter les complications de leurs troubles en assurant une continuité dans leur suivi, dépister, orienter et réajuster leur prise en charge en cas de dégradation clinique en évitant des consultations dans les services d’urgence déjà saturés du fait de la crise sanitaire. Il est urgent d’approfondir les évaluations de l’utilisation de la télémédecine pour les adolescents. Dans ce sens, l’équipe de la MDA a démarré une étude qui explore le vécu des adolescents, parents, médecins et psychologues au sujet de la mise en place précipitée de téléconsultations dans le contexte de l’épidémie COVID-19. Ce type de recherche permettra d’améliorer les connaissances sur l’efficacité, l’acceptabilité et les limites de l’utilisation d’un dispositif de télémédecine en psychiatrie de l’adolescent, en contexte de crise. Certaines modalités de soins à distance mises en place pendant la crise pourraient ainsi être maintenues dans le temps et s’inscrire en routine dans le domaine de la médecine et psychiatrie de l’adolescent.
Déclaration de liens d’intérêts
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Remerciements
Remerciements à Floriane Crine.
Footnotes
À noter que la MDA dont il est question dans l’article possède une unité d’hospitalisation complète (ce qui n’est pas la règle pour toutes les MDA en France).
Matériel complémentaire
Le matériel complémentaire accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur https://doi.org/10.1016/j.neurenf.2021.02.001.
Supplément en ligne. Matériel complémentaire
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