Abstract
Objectives
According to the World Health Organization, discrepancies in health statistics reflect unequal access to resources. The Truth and Reconciliation Commission of Canada calls for an increase in the number of Indigenous workers within health and social services. The involvement of local community workers is essential to ensure the cultural security of care and the decolonization of services. This article presents the role played by these workers in the expansion of mental health services and social interventions in Nunavik, the contextual considerations that influence their practice and their place within professional teams.
Methods
A thematic analysis was conducted on semi-structured interviews done in 2016 with 60 Inuit and non-Inuit individuals working in the broad field of health and social services in Nunavik.
Results
The integration of local community workers is perceived to bring several benefits, including the improvement of interventions and unique learning opportunities. However, several factors hinder this collaboration, such as clarity of mandates, access to pre-requisite training and diplomas, recognition of local knowledge, and staff turnover. More flexibility and support after hiring would allow for the service structure to be adapted to the complex reality of Nunavik.
Conclusion
This article adds to the body of literature highlighting the importance of collaboration with local community workers. The decolonization of services necessarily involves redesigning structures in order to recognize their contribution and to give a place to local knowledge.
Supplementary Information
The online version contains supplementary material available at 10.17269/s41997-020-00461-9.
Keywords: Inuit, Community health workers, Social welfare, Community health services, Intersectoral collaboration
Résumé
Objectifs
Selon l’Organisation mondiale de la santé, les écarts dans les statistiques de santé reflètent un accès inégal aux ressources. La Commission de vérité et de réconciliation du Canada appelle à l’accroissement du nombre de travailleurs autochtones dans le domaine des soins de santé et services sociaux. L’implication des travailleurs communautaires locaux est essentielle à la sécurisation culturelle des soins et la décolonisation des services. Cet article décrit le rôle de ces travailleurs dans l’extension des services de santé mentale et des interventions sociales au Nunavik et explore les considérations contextuelles qui influencent leur pratique et leur place au sein des équipes professionnelles.
Méthode
Les résultats ont été obtenus par l’entremise d’une analyse thématique d’entrevues semi-structurées effectuées en 2016 auprès de 60 individus inuit et non-inuit travaillant dans le système de la santé et des services sociaux au Nunavik.
Résultats
L’intégration des travailleurs communautaires locaux est perçue comme apportant plusieurs bénéfices, notamment une amélioration des interventions. Cependant, plusieurs facteurs entravent cette collaboration tels que la clarté dans les mandats, l’accès aux formations et diplômes pré-requis, la reconnaissance du savoir local ainsi que le roulement de personnel. Plus de flexibilité et de soutien après l’embauche permettrait d’adapter la structure des services à la réalité complexe du Nunavik.
Conclusion
Cet article s’ajoute au corpus de littérature qui met de l’avant l’importance de la collaboration avec les travailleurs locaux. La décolonisation des services passe nécessairement par le remaniement des structures afin de reconnaitre l’apport des travailleurs locaux.
Mots-clés: Inuit, travailleurs communautaires de la santé, services sociaux, services de santé communautaires, collaboration intersectorielle
Introduction
Les populations rurales et autochtones sont davantage touchées par les difficultés de santé mentale que le reste de la population (WHO 2001). Le Nunavik, nord de la province du Québec (Canada), n’échappe pas à cette réalité. C’est dans cette région, où la population est majoritairement Inuit1, que sont enregistrés les plus hauts taux de suicide du pays (Levesque et al. 2019). Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les écarts dans les statistiques de santé reflètent généralement un accès inégal aux ressources de soins. Au Canada, l’accès à des soins de qualité figure parmi les cinq principes qui guident le système de santé. S’appuyant sur ce principe, la Commission de vérité et de réconciliation (CVR) du Canada (2015) enjoint le gouvernement à reconnaitre les pratiques de guérison autochtones et appelle à l’accroissement du nombre de travailleurs autochtones dans le domaine de la santé et à leur maintien en poste. En plus d’améliorer la sécurité culturelle des soins, c’est-à-dire de contrebalancer les risques d’incompréhension, de discrimination et de racisme (O’Keefe et al. 2019), l’intégration des travailleurs communautaires locaux (TCLs) constitue un pas essentiel vers la décolonisation des services (Commission Viens 2019 p. 289).
S’il existe actuellement de nombreuses recherches entourant l’intégration de TCLs dans les pays en voie de développement, la littérature sur cette question en contexte canadien reste rare. Or, les particularités de ce contexte, notamment la légifération des professions, le colonialisme continu et les rapports de pouvoirs qui en découlent, poussent à s’interroger quant à la situation des intervenants autochtones. Cet article propose un survol de la littérature sur les TCLs puis un regard large, descriptif et critique sur la place des TCLs2 dans le système de santé et services sociaux au Nunavik. Les auteurs s’inscrivent dans une approche se voulant décolonisatrice en allant au-delà d’une visée d’adaptation des services afin de prendre en compte les enjeux de pouvoir structurels qui influencent la capacité d’agir et de prise de décision.
Revue du contexte et de la littérature
Au Canada, la période actuelle est marquée par l’amorce d’un dialogue entre les gouvernements et les leaders autochtones quant à la réconciliation, la décolonisation des soins et l’autonomie des services par et pour les communautés. La décolonisation part de la prémisse que ce ne sont pas les ressources extérieures qui sont à la source de l’amélioration du bien-être des communautés, mais plutôt le savoir local et la force identitaire (Waddell et al. 2017). Si nos connaissances empiriques en matière de santé ne cessent de croître, notre capacité à fournir des soins de qualité et culturellement sensible reste limitée (King et al. 2009; Kral 2012). Selon l’OMS (2001), les communautés, les familles et les usagers doivent participer à l’élaboration des programmes et des services afin que ceux-ci soient adaptés aux besoins. L’emploi de TCLs dans le système de santé et les services sociaux parait ainsi être le premier pas vers la décolonisation des services.
Les TCLs portent près de 60 noms différents à travers le monde, dont celui de « community health worker » et « Aboriginal patient liaison ». Ils peuvent être volontaires ou rémunérés et sont appelés à endosser une variété de tâches liées au domaine de la santé, sans pour autant agir à titre de professionnel. Le rôle de médiateur culturel, c’est-à-dire d’agir à titre de pont entre deux cultures pour faciliter la transmission des informations, adapter les interventions, assurer les suivis, etc. (Ferguson & Candib 2002), est universellement reconnu comme faisant partie des rôles endossés par les TCLs (Abbott et al. 2008). En plus de fréquemment tenir un rôle majeur dans l’adhérence au traitement, les TCLs participent à l’éducation à la santé globale des membres de leur communauté (International Labour Organization 2003). Les études portant sur l’efficacité des TCLs sont concluantes en ce qui a trait à l’amélioration de l’adéquation et l’adaptation des soins, l’augmentation de l’utilisation des ressources locales (Healey et al. 2017; Truong et al. 2014) ainsi que la réduction des symptômes de santé mentale (Barnett et al. 2018; Gureje et al. 2019). Cependant, de nombreux enjeux sont mis en évidence. Notamment, le manque d’information et d’homogénéité dans la formation qui peut faire en sorte que les professionnels de la santé entretiennent parfois des attentes inexactes à l’égard des TCLs, l’absence de reconnaissance de l’expertise des TCLs (Balcazar et al. 2011) ou encore le fait que certains administrateurs engagent davantage d’employés de l’extérieur au lieu de prioriser le savoir local et soutenir le potentiel des travailleurs de la communauté (Jackson & Parks 1997).
Au cours d’une étude menée par Fraser et al. (2016) destinée à l’exploration des collaborations au sein des services au Nunavik, les questions suivantes ont émergé : Quelle est la réalité des travailleurs inuit qui oeuvrent dans le système de la santé et des services sociaux au Nunavik? Quelles sont les avenues prometteuses pour la décolonisation des services au Nunavik?
Contexte Nunavik
Le Nunavik couvre un territoire de 501 000 km2 lequel comprend 14 communautés inuit où vivent de 195 à 2 375 habitants (Statistique Canada 2016) parlant majoritairement l’inuktitut. Jusqu’à l’approche des années 1950, la plupart des Inuit vivaient en petits camps nomades (ITK 2014) puis la souveraineté canadienne s’est imposée par l’entremise de plusieurs actions coercitives. De manière générale, ces changements socio-culturels rapides sont reconnus pour avoir eu un impact négatif majeur sur le bien-être global des Inuit (ITK 2014).
Depuis la signature de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois (CBJNQ) en 1975, les services de santé au Nunavik sont subventionnés en partie par le gouvernement fédéral et légiférés par la province de Québec, mais la Régie régionale de la santé et des services sociaux du Nunavik (RRSSSN) informe et influence le processus de développement et de livraison des services (Gouvernement du Canada 2019). Deux hôpitaux desservent la région et chaque communauté dispose d’un Centre local de services communautaires (CLSC). Plusieurs efforts ont été amorcés afin d’améliorer l’accessibilité aux services et assurer une plus grande représentativité inuit au sein des institutions de santé. Cependant, les employés inuit sont toujours nettement sous-représentés au sein de ces services.
Méthode
Les données ont été collectées dans le cadre d’une recherche menée par Fraser et al. (2016) qui visait à explorer les réseaux des services de santé et de santé mentale au Nunavik. Ce projet a été développé à la demande des partenaires communautaires membres du Regional Partnership Committee désireux de mieux comprendre comment soutenir et améliorer les réseaux de soins existants. Dans un respect des principes du Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations et du processus collaboratif ayant mené au développement de la recherche, les données et les résultats sont codétenus par les auteurs, les communautés et les organisations locales et régionales.
Le projet a été approuvé par la RRSSSN, la Commission scolaire Kativik Ilisarniliriniq ainsi que le comité d’éthique de l’Université de Montréal, et s’est déroulé à Montréal et dans 3 communautés du Nunavik. Les guides d’entrevues et les vignettes cliniques ont été développés en collaboration avec divers acteurs inuit agents à la RRSSSN. L’ensemble des directeurs des services ont été invités à participer par l’entremise d’une invitation courriel et davantage d’employés ont été recrutés par effet boule de neige. L’occupation d’un poste dans le domaine de la santé et des services sociaux au Nunavik et/ou le travail en étroite collaboration avec le personnel de la santé et des services sociaux au Nunavik constituaient les seuls critères d’inclusion. Les entrevues ont eu lieu pendant les heures de travail dans les bureaux respectifs des participants. Soixante (60) entrevues d’une durée approximative de 90 minutes ont été effectuées auprès de 21 Inuit et 39 non-Inuit.
L’entièreté des entrevues a été codifiée avec le logiciel QDAminer. Après plusieurs lectures, des thèmes généraux ont été identifiés puis présentés à des agents de la RRSSSN et à des partenaires locaux afin d’identifier de nouvelles questions de recherche. Suite à ces discussions, les segments d’entrevues traitant de la réalité des travailleurs inuit dans le système de la santé et des services sociaux au Nunavik, de leurs rôles et des avenues prometteuses pour la décolonisation des services ont été identifiés puis extraits du corpus pour faire l’objet d’une analyse ici présentée.
Dès les premières lectures des verbatim, il est apparu évident que les paroles des participants traduisaient des émotions fortes. Watzlawick et coll. (1967) avancent que la communication comprend le contenu (les mots) et la relation entre les communicants (qui précise le sens). Dans un contexte comme celui-ci, il est apparu impossible de dissocier le contenu du contenant—de dissocier les mots de l’émotion. Afin de rendre respectueusement compte des expériences et d’offrir une description riche des entrevues, l’analyse thématique (Braun & Clarke 2020) a été utilisée. Selon l’approche constructiviste, l’élaboration de la connaissance est un processus dont les principaux acteurs sont tant ceux qui partagent leurs perceptions (les participants) que ceux qui analysent les savoirs (les chercheurs) (Klapper 2011). Cet article se base sur la prémisse que les expériences et les perceptions, telles que racontées par les participants, rendent fidèlement compte des dynamiques, des actions et des décisions qui découlent de, et influencent l’interaction de la personne avec son environnement.
L’analyse du matériel a été effectuée selon une démarche en « continu » (Paillé & Mucchielli 2013). Les thèmes en lien avec la question de recherche ont été attribués aux verbatim de manière inductive et une construction simultanée de l’arbre thématique a eu lieu. Suivant les recommandations de Braun et Clarke (2020), le processus analytique a suivi une progression allant de la description basée sur le contenu sémantique jusqu’à une interprétation légère du contenu latent. La récurrence des thèmes a été dénotée afin de mettre en évidence la fréquence du partage de l’expérience. Dans l’ambition d’offrir une contextualisation, l’appartenance identitaire (soit ici Inuit ou non-Inuit) a été considérée.
Les résultats ont été résumés et présentés à différents agents de la RRSSSN et à des partenaires locaux pour rétroaction. Les commentaires ont été intégrés et ont servi à guider la discussion ici présentée. En cohérence avec les valeurs des auteures lesquelles soutiennent le transfert des connaissances pour contribuer aux changements demandés par les communautés, les données ont été intégrées à un rapport destiné aux gouvernements, institutions et organisations régionales impliquées dans le système de la santé et des services sociaux.
Résultats
La thématisation des verbatim des 60 entrevues a mené à cinq grandes catégories : le rôle des TCLs, les bénéfices, les défis, les entraves, et les facilitateurs à la collaboration entre les employés (tableaux 1 et 2).
Tableau 1.
Appartenance identitaire | Nombre |
---|---|
Inuit | 21 |
Non-Inuit | 39 |
Tableau 2.
Poste | Nombre |
---|---|
Personnel hospitalier et sage-femmes (Nunavik et Montréal) | 12 |
Personnel scolaire | 11 |
Personnel Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) | 8 |
Psychiatre, Psychologie et Psychoéducation | 6 |
Personnel RRSSSN | 5 |
Organismes communautaires et travailleurs communautaires | 5 |
Services sociaux | 5 |
Policiers et personnel du système judiciaire | 3 |
Membres des communautés | 3 |
Interprète | 2 |
Rôle des travailleurs de la communauté
Cinq (5) titres ont été utilisés pour identifier les personnes de la communauté employées dans le système de santé et des services sociaux. Si chacun de ces titres a été associé à des tâches précises, la description différait selon le participant. Cette variabilité dans la description des tâches illustre l’existence d’un flou quant au mandat officiel associé aux titres de travail (figure 1).
Le recoupement qui existe dans les tâches accomplies par les TCLs semble dû à une étendue des fonctions allant au-delà du mandat formel attribué à l’emploi. Disposant souvent de peu d’information au moment de l’embauche, les TCLs rapportent fréquemment ne pas savoir lesquelles des tâches figurent dans leur mandat et lesquelles constituent une surcharge de travail non-obligatoire. Dans certains cas, cette situation parait contribuer à entretenir une dynamique de pouvoir en termes de demandant (l’employé non-inuit) et d’exécutant (l’employé inuit).
« C’est ce qu’ils attendent de moi, les infirmières, c’est que je les aide. Je ne sais pas si je suis censé le faire, mais je le fais quand même parce qu’elles appellent et elles demandent ». – TCL
La confusion parait également interférer dans le travail quotidien des TCLs qui se doivent de rappeler à leurs collègues les limites de leur mandat. Cette situation, lorsque récurrente, peut être à l’origine de frustrations.
« C’est juste qu’on en avait parlé lors d’une rencontre, c’est que la plupart des autres départements considéraient, sans trop savoir ce qu’on faisait, qu’on était là comme pour faire de la… qu’on pouvait nous contacter à tout bout de champ pour des conseils sur tel ou tel ou tel truc, mais on n’a pas ce mandat de conseil ». – TCL
Bénéfices de la collaboration
L’ensemble des participants, Inuit et non-Inuit, ont rapporté percevoir l’implication des TCLs comme facilitant et améliorant les interventions. Les mots utilisés par certains intervenants non-inuit traduisent un fort sentiment de reconnaissance envers leurs collègues inuit.
« En tout cas, ce qui facilite [le travail], c’est la personne inuit selon moi. C’est la clé importante et c’est aussi l’ouverture ». – Intervenant non-inuit
L’amélioration de la communication entre le professionnel et le patient parait être le bénéfice le plus évident—le plus fréquemment rapporté. En plus d’améliorer la relation de confiance avec le patient, le travail en collaboration avec une personne parlant inuktitut facilite l’obtention d’informations indispensables à la mise en place d’interventions adaptées. La collaboration avec des TCL a également été associée avec la pérennité des interventions et indispensable à l’amélioration des conditions de santé locale sur le long terme.
Défis à la collaboration
Formation et enjeux de pouvoir
Selon les participants inuit et non-inuit, le manque d’accès aux formations, aux diplômes préalables à l’emploi et au soutien en continu a des répercussions sur la disponibilité de personnes qualifiées. Plusieurs ont évoqué le plafonnement rapidement atteint pour les Inuit qui, par manque d’accès aux pré-requis pour l’obtention d’un titre d’intervenant, se retrouvent confinés à des postes avec peu de possibilités d’épanouissement professionnel. S’il y a de plus en plus d’Inuit qui occupent des postes de direction, ce plafonnement s’illustre toujours dans la composition des différents paliers hiérarchiques du système de santé et des services sociaux où les postes d’autorité sont davantage occupés par des non-Inuit.
« Je suppose que la philosophie du centre de santé est d’avoir un médecin inuk, une infirmière inuk. Mais pour l’instant, c’est impossible. Parce qu’il n’y a pas assez... d’étudiants ou pas assez de diplômés. La formation est un gros problème ». – TCL
Cette situation parait contribuer à entretenir des dynamiques de pouvoir datant de la colonisation où les voix inuit sont de moins en moins nombreuses à mesure que les échelons hiérarchiques sont gravis. Ainsi, la configuration actuelle du système semble parfois contribuer à créer une certaine « distance » entre les intervenants inuit et les professionnels et directeurs non-inuit; une « distance » qui se fait sentir notamment dans le processus de prise de décision où les TCLs sont rarement présents.
« Non, je peux aller à leurs réunions, mais ils ne me disent pas vraiment quand c’est ». – TCL
Travail dans un petit milieu
Selon les participants, la taille des communautés et l’existence de liens directs ou indirects entre les TCLs et les patients entrainent certaines difficultés.
Les enjeux émotionnels mentionnés font référence au fait que l’intervention peut comporter une charge émotionnelle supplémentaire pour l’employé inuit, découlant de la relation personnelle avec le patient.
« Ça a ses désavantages, parce que demander à une petite fille inuit d’aller chez sa matante sortir un flo, c’est un peu fatigant. Puis je la comprends…. peux-tu te mettre dans la peau de la petite de 22 ans quand tu lui dis on s’en va chez ta soeur sortir les enfants? ». – Intervenant non-inuit
« Comme la plupart des community workers qui travaillent avec nous, même quand ils ne travaillent pas ils travaillent, c’est dur. Tout le monde va les voir et parle de leurs problèmes ». – Intervenant non-inuit
Cette charge émotionnelle pourrait être à l’origine d’un épuisement chez les TCLs laissant place à un changement de département, une réticence à s’impliquer dans les interventions et le processus de soin ou encore, à des absences à répétition.
« Il y en a beaucoup qui se sont désengagés parce que le travail était difficile, ce que je comprends souvent. Les anciennes amies que je revoie puis que je dis « Où que tu es rendue? », elles vont dire « Je suis encore à la DPJ mais là je fais juste du secrétariat, je ne suis plus capable de faire des suivis patients, c’est trop dur émotivement. » – Intervenant non-inuit
Entraves à la constance des collaborations
Absentéisme
La présence sur le lieu de travail a été abordée tant par les participants inuit que non-inuit. L’analyse a mis en évidence deux réalités de travail. Pour les TCLs, l’absence sur le lieu de travail a été présentée comme la conséquence d’une accumulation de défis, tant professionnels que personnels. Les TCLs doivent intégrer leur horaire de travail à un quotidien souvent chargé de défis. Des situations récurrentes au Nunavik comme la fermeture impromptue des écoles ou la nécessité de s’occuper d’un membre de la famille font en sorte qu’ils ne peuvent parfois pas se présenter au travail.
Du côté des non-Inuit, ce thème a été nommé comme l’un des défis principaux du travail avec TCLs. Ces derniers ont exprimé des attentes claires quant au rôle d’employé, incluant l’importance de se présenter au travail suivant l’horaire attribué. Au Nunavik, puisque la prestation des soins et des services sociaux s’effectue généralement en contexte de crise, les situations d’absentéisme sont lourdes de conséquences pour les collègues qui doivent pallier l’absence des autres. Il apparait ainsi que l’absentéisme à répétition est susceptible de générer un sentiment de frustration chez les professionnels non-inuit qui, en se cumulant à l’épuisement tend à parfois s’exprimer au travers d’une dévalorisation des capacités des travailleurs inuit.
« Ce qui est dommage c’est quand on réfère des Inuit ils sont moins fiables ils se présentent moins. Pis nous qu’est-ce qu’on veut c’est beaucoup de stabilité au niveau des jeunes pour les aider parce que des fois ça nuit plus qu’autre chose ». – Intervenant non-inuit
Ces situations impactent négativement les relations entre collègues et peuvent avoir comme effet de nourrir un sentiment d’inconfort vécu par l’employé inuit qui peut alors tendre, pour cette raison, à éviter de se présenter sur les lieux de travail.
« Et c’était comme ça, l’un ou l’autre ne voulait pas se présenter ou se présentait et j’en ai eu assez, vous savez, c’est comme si je ne voulais pas être là et parce que je n’aime pas du tout mon bureau ». – TCL
Afin de pallier cette situation d’absentéisme, certains participants ont suggéré d’engager davantage de TCLs et d’offrir plus de souplesse dans le milieu de travail afin d’adapter les organisations à la réalité du Nunavik.
Tensions
Plusieurs TCLs ont mentionné le roulement de personnel chez les intervenants non-inuit comme étant une entrave à la collaboration. En plus de ralentir les activités, l’arrivée d’un nouvel intervenant en poste implique un énième ajustement de visions pour arriver à une certaine entente.
« Parfois, nous ne sommes pas d’accord parce que nous avons notre propre mode de vie dans le Nord. Nous ne sommes pas au Sud. Nous ne vivons pas le même mode de vie qu’eux. Certains travailleurs sociaux, ils viennent ici et ils essaient de changer le monde entier, d’autres sont très bons ». – TCL
Le roulement du personnel non-inuit s’ajoute à leur organisation de l’emploi composée de « stretchs » de travail. Parmi les incitatifs à l’emploi au Nunavik l’on retrouve la possibilité de prendre 6 à 9 semaines de congé au sud après chaque trimestre de travail. Cette réalité parait contribuer à l’épuisement des TCLs qui doivent constamment collaborer avec de nouveaux collègues.
« Je travaille ici depuis un an et chaque personne en poste est différente de quand j’ai commencé. J’ai vu des gens rester un mois puis partir ». – TCL
Les intervenants non-inuit ont également accès à un logement ainsi que des primes d’éloignement, des bénéfices non disponibles pour les employés locaux. Pour certains TCLs, ce contexte est à la base de décisions de quitter leur emploi où ils considèrent ne pas être traité en égale avec leurs collègues venant du sud.
« Je vois des Inuit, beaucoup de mes camarades de classe, qui après avoir terminé leurs études universitaires, ne peuvent pas trouver de logement ou d’emploi ici, alors ils restent dans le Sud ». – TCL
À ceci s’ajoutent parfois des différences salariales basées sur la possession de diplômes universitaires. Si certains TCLs effectuent le même travail que les intervenants diplômés, ces derniers ne bénéficient souvent pas de la reconnaissance, y compris salariale qui devrait y être rattaché. Cette réalité parait être un facteur contribuant aux tensions entre Inuit et non-Inuit ainsi qu’au roulement d’emploi chez les TCLs en quête d’une juste reconnaissance du travail effectué.
« Les diplômes. Si vous ne l’avez pas, vous n’êtes rien. [...] C’est plus important que d’être d’ici ». – TCL
Facilitateurs à la collaboration
Les formations pour les TCLs, la disponibilité d’information culturellement sensible et le mentorat ont été identifiés comme les plus importants facilitateurs à l’intégration des TCLs. La disponibilité de soutien aiderait non seulement à l’amélioration de la prestation des soins, mais également à la rétention des TCLs.
« Ils ont besoin de plus d’encadrement, plus de support, plus concret. On a regardé comment et là, graduellement, la première est restée un peu plus, pis là elle a dit : ah ben moi je vais rester ici rien qu’une couple de mois. Ça fait deux ans, elle vient d’obtenir son diplôme de social assistant, avec Marie-Victorin ». – Intervenant non-inuit
L’accès limité aux formations pour les Inuit justifierait la nécessité d’offrir un soutien constant et de ne pas exiger la responsabilité de multiples tâches dès l’embauche. Ceux qui ont abordé ce sujet ont avancé que la responsabilisation graduelle devrait aller de pair avec une reconnaissance de l’importance du travail accompli.
« Leur donner des responsabilités graduellement, et de montrer qu’eux autres ils font la différence pour leur population ». – Intervenant non-inuit
Finalement, les possibilités de jumelage entre un intervenant non-inuit et un TCL constituerait une approche prometteuse.
« Disons que pour chaque intervention, un Inuk suit. Ça rendrait la situation beaucoup plus facile. J’ai entendu dire que du côté de la baie d’Hudson chaque intervention se fait avec un Inuk et un... ici non. C’est la base, les gens peuvent parler dans leur propre langue. » – TCL
Le travail deux par deux a été associé à de plus amples possibilités d’échanges et à une prise en charge optimale des patients. Dans un ordre d’idée similaire, la totalité des participants ayant fait des suggestions pour le futur a affirmé souhaiter avoir davantage de collègues inuit.
Discussion
Les résultats obtenus sont cohérents avec la littérature. Les participants tant inuit que non-inuit ont avancé qu’une collaboration avec les TCLs améliorait les interventions et la qualité des services de soins. Les enjeux relevés dans la littérature internationale, comme le flou quant au mandat, le manque de reconnaissance du savoir local et le faible nombre de TCLs engagés en comparaison aux professionnels et intervenants externes, ont également été mis en lumière. Cet article propose des précisions quant à ces points dans le contexte spécifique du Nunavik.
Dans un premier temps, les analyses ont mis en évidence des rôles formels et des rôles informels attribués ou endossés par les TCLs. Il est intéressant de souligner que la majorité des bénéfices perçus de la collaboration font référence aux rôles informels (ex : amélioration de la communication, facilité à rejoindre la communauté, etc.) alors que les défis (manque de formation pour les tâches liées à l’emploi, absentéisme, etc.) font davantage référence à la description de tâche de l’employeur. En ce sens, il apparait que les avantages inhérents au travail en collaboration avec des TCLs ne soient pas reconnus dans les rôles formels de ces derniers. Cette réalité pourrait être en cause dans la non-reconnaissance de l’apport des TCLs au sein des organisations puisque les décideurs, souvent loin du terrain, n’ont généralement accès qu’aux informations liées aux tâches formelles et capacités accréditées. Dans un contexte ou la majorité des institutions qui chapeautent la prestation de services en contexte autochtone affirment vouloir dispenser des soins culturellement sensibles (Ramsden 2002), il apparait crucial de s’interroger; comment s’attendre à des services culturellement sensibles et contextuellement adaptés si l’apport des TCLs n’est pas formellement reconnu?
La prise en considération du contexte dans l’interprétation des résultats mène à réfléchir à la professionnalisation des services. L’adoption du projet de loi 21 (2012) qui encadre l’exercice des professions a créé un important changement dans les pré-requis pour l’obtention d’un titre professionnel. Compte tenu de plusieurs barrières notamment géographiques et culturelles qui entravent l’accès aux études supérieures, les Inuit sont très peu représentés dans les ordres. Ainsi, peu d’entre eux remplissent les conditions d’embauche et ceux qui sont engagés occupent généralement des postes sur le terrain tandis que la majorité des postes d’autorité sont occupés par des non-Inuit. À cette inégalité se cumulent les écarts notables en ce qui a trait aux salaires et aux bénéfices entre les employés inuit et non-inuit, et ce, même à poste égale. Ainsi, la situation actuelle fait écho à ce que Quijano (2000) qualifie de « colonisation du pouvoir » (coloniality of power). Selon cette théorie, la distribution raciale et culturelle dans le milieu de travail est directement liée à un historique de colonisation. Quijano fait ainsi référence à ce qui est fréquemment appelé le « privilège blanc » dans une réalité où « Whiteness is associated almost exclusively with salary and of course with the commanding post of colonial administration » (Quijano 2000). En plus d’avoir un impact sur l’adéquation culturelle des soins, il est possible que cette réalité contribue à maintenir les relations de pouvoir entre les non-Inuit et les Inuit, perpétuant ainsi des dynamiques de la colonisation et entravant la confiance envers les organisations en place.
Les aspects précédemment mentionnés encouragent à approfondir sur les suggestions émises dans la littérature sur la santé mondiale, lesquelles soutiennent d’augmenter le nombre de prestataires de soins autochtones afin d’améliorer la sensibilité culturelle des soins et diminuer les inégalités de santé. Au Nunavik, l’intégration des TCLs va au-delà de l’augmentation des effectifs et inclut une volonté d’améliorer l’intégration des services dans la communauté et de favoriser le développement des capacités. Actuellement, le développement des capacités est effectué dans l’objectif que les TCLs puissent pourvoir des postes préalablement occupés par des non-Inuit. Ceci renvoie à développer des capacités pour faciliter l’intégration dans un système occidental aux racines bien ancrées dans le passé de colonisation. Dans ce contexte, pourrait-on qualifier de « culturellement sensible » un système de soin ou plus d’Inuit seraient employés, mais ou les difficultés découlant de leur emploi ne seraient pas adressées? Il semble impossible de dissocier les services culturellement sensibles d’un environnement de travail culturellement sensible. Pourrions-nous penser à des organisations de soin et de services sociaux bâtis sur les forces des communautés où le savoir inuit serait intégré au savoir occidental dans l’objectif de créer un nouveau savoir spécifique au contexte?
Le programme de formation des sages-femmes au Nunavik constitue en un bel exemple de reconnaissance du savoir local et de développement de capacités. C’est dans l’objectif d’offrir une formation sur les soins entourant l’accouchement en y intégrant le savoir local et le savoir académique, que le centre de santé Innulitsivik a créé ce programme. Depuis 2008, ce programme est reconnu par le ministère de la Santé et l’Ordre des sages-femmes du Québec, et permet de l’octroiement de la licence professionnelle. Si ce projet a eu de grandes retombées positives pour cette région où les sages-femmes sont les principales fournisseuses de soins périnataux (Wagner et al. 2012), il ne semble exister au Nunavik aucune autre formation donnant accès à un titre reconnu par un ordre professionnel.
Depuis les dernières années, un mouvement semble s’opérer. La prise en considération du contexte des communautés autochtones au Québec a mené à la création d’un comité soutenu par le gouvernement afin de développer des formations reconnues pour les TCLs. Depuis cette recherche, la RRSSSN a pris des mesures afin de faire une plus grande place aux travailleurs inuit, d’impliquer les usagers dans des comités de prise de décision et de développer une vision inuit d’un « Nunavik en santé ». L’ordre des psychoéducateurs et des travailleurs sociaux développe des programmes de reconnaissance du savoir local et le Cegep Marie-Victorin en partenariat avec la RRSSSN offrent des programmes de reconnaissance des acquis au Nunavik.
Conclusion
Les changements structurels prennent du temps et vont de pair avec la mise en place de changements sur le terrain. Ainsi, il apparait que la décolonisation des services passe nécessairement par le remaniement des structures afin de faire une place aux Inuit et au savoir local au-delà de celui de l’interprétation, dans les postes d’autorité et plus largement dans les processus de prise de décision de manière générale.
Supplementary Information
Conflit d’intérêts
Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.
Footnotes
Contrairement aux recommandations du bureau de la traduction du gouvernement du Canada et de l’Office de la langue française, lesquelles sont de soumettre le terme inuit aux règles grammaticales de la langue française, nous privilégierons ici les règles grammaticales de la langue inuit. Ainsi, le terme inuk est utilisé pour le singulier et inuit est invariable dans l’accord du nom et de l’adjectif (p. ex. : une Inuk, les Inuit, les régions inuit).
Nous avons pris la décision d’utiliser le terme TCL en référence aux Inuit occupant un rôle rémunéré ou bénévole dans le système de la santé et des services sociaux sans pour autant agir à titre de professionnel tel que défini dans le code de profession du Québec.
At the author’s request and expense, this French article is being published with a full English translation, which can be found in the supplementary file.
Publisher’s note
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