Vaccins contre la COVID 19
D'après la communication de Robert Cohen et Emmanuel Grimprel
Introduction
Au 1er mai 2021, on dénombrait 1 milliard de sujets vaccinés contre le Coronavirus Disease 2019 (COVID-19) dans le monde. On peut souligner ici la rapidité avec laquelle les étapes du développement de vaccins efficaces et dans l'ensemble très sûrs se seront succédées depuis le début de la pandémie.
À la date de la communication, le 20 mai 2021, on dénombrait 8 vaccins autorisés dans le monde et 4 retirés du marché (NDLR : ce nombre est stable à la date du 29 juin 2021 [1]). En Europe, 4 vaccins sont actuellement autorisés : 2 vaccins à ARNm (laboratoires Moderna et Pfizer-BioNTech) et 2 vaccins vectorisés (laboratoires AstraZeneca et Johnson&Johnson). D'autres vaccins sont en cours d'évaluation.
Vaccins vectorisés vs vaccins à ARN
Les orateurs ont rappelé que lors du cycle viral naturel, le virus infecte la cellule cible, présente son acide ribonucléique (ARN) messager (ARNm) au système enzymatique cellulaire, induisant ainsi la production des éléments constituants du virus dont la protéine spike, cible de la plupart des vaccins contre la COVID. Suivra l'induction de la réponse immunitaire cellulaire et humorale. Deux types de vaccins sont actuellement autorisés. Les vaccins vectorisés sont constitués d'un vecteur viral (de l'adénovirus vivant non répliquant) dans le génome duquel on a inséré le gène de la protéine cible. Le virus ne se multiplie pas mais exprime la proteine spike, la présente à l'hôte et induit ainsi la réponse immunitaire. Les vaccins à ARNm sont quant à eux constitués d'ARNm de la protéine spike. Cet ARNm est protégé par une nanoparticule stabilisée puis injecté par voie intramusculaire. Après administration, l'ARNm pénètre dans les cellules musculaires et est traduit dans le cytoplasme en protéine. La protéine spike ainsi produite est exprimée à la surface cellulaire puis présentée aux cellules immunitaires. Le déclenchement de la réponse immunitaire va passer par l'expression de l'antigène spike, quel que soit le type de vaccin. Dans le cas des vaccins à adénovirus, d'autres protéines de l'adénovirus vecteur vont être exprimées. A contrario, dans le cas des vaccins à ARNm, le seul antigène exprimé est l'antigène spike. De cette différence pourrait résulter une moindre efficacité de la deuxième dose des vaccins vectorisés à adénovirus.
Les vaccins à ARNm représentent une avancée majeure en vaccinologie, car ils induisent une réponse immunitaire mixte, cellulaire et humorale, aussi solide et complète que celle procurée par l'infection naturelle. Les orateurs ont cependant rappelé que cette technologie ≫ nouvelle ≪ était en fait à l'étude depuis plus de 10 ans. Le contexte a finalement permis que le développement et la production de masse soient accélérés. Le principal problème posé initialement par les vaccins à ARNm a été logistique. En effet, du fait de l'instabilité des ARNm, et faute de données, on conservait initialement ces vaccins dans des congélateurs à – 80 °C. On sait maintenant que des températures de – 15 à – 25 °C sont suffisantes, et qu'un flacon décongelé mais non ouvert peut être conservé 1 mois entre 2 et 8 °C.
Efficacité des vaccins
Les deux vaccins à ARNm autorisés en Europe (Moderna et Pfizer-BioNTech) sont très proches en termes de méthodes de fabrication, de méthodologies d'essais (vastes essais cliniques de phase 3 randomisés, en double aveugle et avec un groupe placebo) et de résultats : le groupe vacciné voit son incidence cumulée chuter de manière très importante en comparaison du groupe non vacciné [2, 3]. La protection serait significative 10 à 15 jours après la première dose [3]. Sur le terrain, les données collectées en Israël retrouvent la même efficacité pour le vaccin Pfizer-BioNTech [4]. Cette étude sur le terrain est en faveur d'une protection contre les décès liés à la COVID, les admissions en réanimation, les hospitalisations, ainsi que les formes asymptomatiques et symptomatiques, avec une efficacité estimée à plus de 90 %. Un aspect intéressant de ces études de terrain en Israël est qu'elles ont été menées alors que le variant B.1.351 (variant dit anglais) circulait.
L'analyse de l'efficacité relative des différents vaccins nécessite en effet de prendre en compte quels variants circulaient au moment des études d'efficacité. Trois catégories de variants sont définies : (i) les variants préoccupants (ou VOC, Variant of Concern) regroupent les variants pour lesquels il a été démontré, en comparant avec un ou plusieurs virus de référence, une augmentation de la transmissibilité ou un impact défavorable sur l'épidémiologie de la COVID-19, et/ou une augmentation de la gravité ou un changement de présentation clinique, et/ou une diminution de l'efficacité des mesures de contrôle mises en place (mesures de prévention, tests diagnostiques, vaccins, molécules thérapeutiques); (ii) les variants à suivre (ou VOI, Variant of Interest) qui n'ont pas fait la preuve de leur impact en santé publique mais dont les caractéristiques virologiques, cliniques et/ou épidémiologiques justifient la surveillance; et (iii) les variants en cours d'évaluation n'ayant pas d'éléments virologiques, épidémiologiques ou cliniques probants en faveur d'un impact en santé publique en France [5, 6]. Du fait de leurs caractéristiques, les VOC circulent assez facilement dans toutes les régions du monde [7]. À la date de la communication, les données de Santé publique France faisaient état de 89 % de variant B.1.1.7 (variant dit anglais), 4,6 % de B.1.351 (variant dit sud-africain) et 0,2 % de P.1 (variant dit brésilien, représentant 95 % des séquences en Guyane française).
Lorsque l'on s'intéresse aux vaccins contre la COVID-19, la question de l'échappement immunitaire est majeure. Cet échappement n'existerait pas pour le variant B.1.1.7. Il est par contre prouvé pour les variants B.1.351 et P.1.
D'après les connaissances actuellement disponibles, l'ensemble des vaccins actuellement disponibles seraient efficaces sur les souches initiales. La protection contre les formes graves serait proche de 100 % pour l'ensemble des vaccins. Seule la protection contre les formes communes serait un peu moindre pour les vaccins vectorisés. Les études disponibles ne retrouvent pas de différence majeure de protection contre le variant B.1.1.7. Des différences existeraient par contre pour le variant B.1.351, en relation avec l'échappement immunitaire. Cependant la protection contre les formes graves dues au variant B.1.351 serait très largement conservée [8]. Au total, la crainte de l'échappement immunitaire des variants existe mais les orateurs se sont voulus rassurants quant au fait qu'il y ait peu de chances que l'on fasse face à un variant avec une protection vaccinale nulle.
Schéma vaccinal en cas d'antécédent d'infection
Après un antécédent de COVID-19, 90 % des sujets ne referont pas de maladie dans les 6 mois. Chez ces sujets, une injection unique de vaccin ARNm permet de garantir les mêmes niveaux de protection qu'un schéma à double injection chez les sujets naïfs.
Avantages et inconvénients des différents vaccins
Au total, les avantages des vaccins à ARNm résident dans la plus grande rapidité du schéma d'injection avec un délai de 1 mois entre les deux injections (vs 8 à 12 semaines pour l'AstraZeneca), et une activité maintenue sur les variants B.1.351 et P.1. Leurs inconvénients résident dans leurs modalités de conservation et leur coût.
Les avantages des vaccins vectorisés sont essentiellement logistiques et économiques. Leurs inconvénients résident dans le plus grand risque de mauvaise tolérance immédiate chez les jeunes et dans le risque thrombotique par réaction auto-immune.
Données de tolérance en population pédiatrique
À l'heure de la communication, peu de données étaient disponibles. Une étude de tolérance du vaccin Pfizer-BioNTech retrouvait un bon profil de tolérance chez 1 300 adolescents vaccinés, en comparaison d'un groupe contrôle. Les données de pharmacovigilance vont rapidement arriver, suite à la vaccination de ces populations dans de nombreux pays.
Questions en suspens
L'impact qu'aura la vaccination sur le phénomène pandémique reste évidemment incertain. Les incertitudes concernent (i) l'efficacité sur les VOC et notamment l'impact sur la transmission des VOC; (ii) les capacités à obtenir une couverture vaccinale suffisante; (iii) l'impact de la vaccination sur la circulation virale mondiale et sur le développement de nouveaux variants.
La vaccination reste cependant la probable seule issue possible à la pandémie, et les auteurs ont conclu que l'ensemble des données disponibles appelaient à être optimistes !
Liens d'intérêts
L'auteur déclare ne pas avoir de liens d'intérêts.
Cet article fait partie du numéro supplément Perfectionnement en pédiatrie consacré aux Temps forts du congrès de la SFP 2021 réalisé avec le soutien institutionnel de Nestlé Nutrition Infantile et Nestlé Health Science.
Références
- 1.Zimmer C, Corum J, Wee SL. Coronavirus Vaccine Tracker. The New York Times. www.nytimes.com/interactive/2020/science/coronavirus-vaccine-tracker.html
- 2.Baden LR, El Sahly HM, Essink B, Kotloff K, Frey S, Novak R, et al. Efficacy and Safety of the mRNA-1273 SARS-CoV-2 Vaccine. N Engl J Med. 2021;384(5):403–416. doi: 10.1056/NEJMoa2035389. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
- 3.Polack FP, Thomas SJ, Kitchin N, Absalon J, Gurtman A, Lockhart S, et al. Safety and Efficacy of the BNT162b2 mRNA Covid-19 Vaccine. N Engl J Med. 2020;383(27):2603–2615. doi: 10.1056/NEJMoa2034577. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
- 4.Dagan N, Barda N, Kepten E, Miron O, Perchik S, Katz MA, et al. BNT162b2 mRNA Covid-19 Vaccine in a Nationwide Mass Vaccination Setting. N Engl J Med. 2021;384(15):1412–1423. doi: 10.1056/NEJMoa2101765. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
- 5.Organisation mondiale de la santé COVID-19 Weekly Epidemiological Update. www.who.int/publications/m/item/covid-19-weekly-epidemiological-update
- 6.Santé publique France Coronavirus : circulation des variants du SARS-CoV-2. www.santepubliquefrance.fr/dossiers/coronavirus-covid-19/coronavirus-circulation-des-variants-du-sars-cov-2
- 7.Organisation mondiale de la santé Weekly epidemiological update on COVID-19. 11 Mai 2021. www.who.int/publications/m/item/weekly-epidemiological-update-on-covid-19-11-may-2021
- 8.Abu-Raddad LJ, Chemaitelly H, Butt AA. Effectiveness of the BNT162b2 Covid-19 Vaccine against the B.1.1.7 and B.1.351 Variants. N Engl J Med. 2021;385(2):187–189. doi: 10.1056/NEJMc2104974. [DOI] [PMC free article] [PubMed] [Google Scholar]
