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. 2021 Apr 1;99(4):475–477. [Article in French]

Le syndrome des ongles jaunes : un désordre génétique ?

Yellow nail syndrome: a genetic Disorder?

Narjes Abid 1, Manel Loukil 1, Nour Mahmoud 1, Imen Badri 1, Khaled Bouzaidi 2, Hedia Ghrairi 1
PMCID: PMC8734484  PMID: 35244933

Résumé

Introduction

Le syndrome des ongles jaunes est une entité très rare. Son diagnostic est clinique posé devant l’association de minimum deux parmi ces trois manifestations : anomalies unguéales, lymphoedème primitif et une atteinte respiratoire chronique. Sa physiopathologie est inconnue et l’existence d’un désordre génétique à l’origine de ce syndrome est encore sujet de controverse.

Obsrvation

Nous rapportons l’observation d’un jeune homme atteint de ce syndrome et pour qui cette même affection a été retrouvée chez plusieurs membres de sa famille.

Conclusion

La mise en évidence de cette affection chez plusieurs membres de la même famille plaide en faveur de son origine génétique.

Mots clés: syndrome des ongles jaunes , manifestations respiratoires, lymphoedème, génétique

INTRODUCTION :

Le syndrome des ongles jaune (SOJ) est une entité rare de physiopathologie inconnue (1) . Il associe, dans sa forme complète, une atteinte unguéale, un lymphoedème primaire et une atteinte pleuropulmonaire. Des formes familiales ont été très rarement décrites soulevant l’hypothèse d’une maladie génétique (2 , 3) . Nous rapportons l’observation d’un jeune homme présentant le SOJ et pour qui le même syndrome a été retrouvé dans plusieurs membres sa famille.

OBSERVATION :

Il s’agit de MR BA âgé de 42 ans, sans antécédents pathologiques notables issu d’un mariage consanguin de 1er degré. Il s’est présenté à notre consultation pour une toux sèche et une dyspnée d’effort d’aggravation progressive depuis 3 mois. L’examen clinique a mis en évidence des ongles jaunes épaissis incurvés au niveau des doigts et des orteils ( fig 1 ) et un lymphoedème des deux membres inférieurs ( fig 2 ). L’anamnèse a révélé la présence des mêmes anomalies unguéales chez plusieurs membres de sa famille : son frère, présentant par ailleurs une cécité congénitale, pour laquelle il n’a bénéficié d’aucune exploration, sa soeur et deux de ses neveux (un garçon de 7 ans et une fille de 5 ans) ( fig 3 ). Chez toutes ces personnes précitées les anomalies unguéales ont été constatées depuis la naissance. Les deux neveux, ayant les anomalies unguéales, sont suivis pour un asthme bronchique depuis l’âge de deux et trois ans. Le reste des membres de la famille ne présentaient pas de symptomatologie respiratoire ni de lymphoedème.

Figure 1 : Aspect incurvé épaissis des ongles avec une coloration jaunâtre .

 Figure 1 : Aspect incurvé épaissis des ongles avec une coloration jaunâtre

Figure 2 : Aspect de lymphoedème des deux membres inférieurs .

 Figure 2 : Aspect de lymphoedème des deux membres inférieurs

Figure 3 : Aspect incurvé épaissis des ongles de la main avec une coloration jaunâtre .

 Figure 3 : Aspect incurvé épaissis des ongles de la main avec une coloration jaunâtre

Le scanner thoracique de Mr BA a objectivé un épanchement pleural droit enkysté de grande abondance. La ponction pleurale a ramené un liquide laiteux avec un taux de triglycéride à 3.33 mmol/l (291 mg/dl) posant le diagnostic d’un chylothorax. Devant le caractère récidivant de l’épanchement pleural malgré plusieurs ponctions évacuatrices, Mr BA a bénéficié d’une ligature du canal thoracique droit. L’évolution à 14 mois, après l’intervention chirurgicale, était marquée par l’absence de récidive de l’épanchement pleural mais la persistance du lymphoedème et des manifestations unguéales. Devant le caractère familial des anomalies unguéales, une consultation génétique a été proposée mais a été refusée par Mr BA et sa famille.

DISCUSSION

Le syndrome des ongles jaunes est une pathologie rare définie par une triade clinique associant des ongles jaunes épaissis, un lymphoedème primitif et des manifestations respiratoires chroniques. La triade complète n'est retrouvée dans la littérature que dans 27-60% des cas et il est possible de porter le diagnostic de ce syndrome devant l'association de deux seulement des 3 manifestations. L'atteinte respiratoire est présente dans 56-71% des cas. Il s'agit le plus souvent d'une toux sèche chronique ou d'épanchement pleuraux (à liquide claire dans 75% des cas, chyleux dans 22% des cas et purulent dans 3,5% des cas) (2). L'asthme bronchique, tel il est le cas des deux enfants de notre observation, est aussi parfois décrits dans la littérature, toutefois beaucoup moins fréquemment (4) .

Les autres manifestations cliniques décrites sont notamment une rhinosinusite aiguë ou chronique et des manifestations oculaires à type de pannus cornéen (5) ou de lymphoédème palpébral 6. Aucun cas de cécité associé au syndrome des ongles jaunes, tel il est le cas du frère de Mr BA n'a été décrit dans la littérature (7) .

La physiopathologie du syndrome des ongles jaunes reste encore mal connue. Plusieurs hypothèses ont été soulevées dans la littérature. La possibilité d'une dysfonction lymphatique avec anomalies du drainage de la lymphe a été évoquée par plusieurs auteurs (3). L'existence d'un chylothorax et d'un lymphoedème chez notre patient confronte cette hypothèse. Plus récemment, certains auteurs ont incriminé l'exposition au dioxyde de titane, additif utilisé dans de nombreuses applications notamment alimentaires et cosmétiques (8). La possibilité d'un désordre génétique à l'origine de ce syndrome a été sujet de controverse dans la littérature (2, 9). Quelques auteurs soutiennent cette hypothèse à partir de l'observation de rares cas familiaux touchant deux ou trois générations de la même famille (3). Cependant, aucune altération génétique causale n'a été identifiée jusqu'à présent (2). Finegold et al ont cherché une mutation du gène FOXC2 chez 86 familles présentant un lymphoedème familial. Cette mutation a été retrouvée chez 11 familles parmi les 86 étudiées mais n'a pas été retrouvée chez les 4 familles présentant un lymphoedème s'intégrant dans le cadre du syndrome des ongles jaunes (10). Dans notre observation, le début congénital des symptômes, l'atteinte de plusieurs individus de la même fratrie et de deux générations successives de la même famille soutiennent l'hypothèse d'une maladie génétique. La transmission serait, probablement, autosomique récessive. En effet, les deux neveux de Mr AB sont nés de parents sains.

Selon les données de la littérature une régression spontanée du SOJ peut être observée et son traitement est mal codifié. L'application topique de vitamine E seule ou associé à des injections intra lésionnelle de stéroïde tel que le triamcinolone acetonide 5 mg/ml/injection, 0.1-0.2 ml pour chaque ongle atteint a été proposée par certains auteurs mais dont l'efficacité n'a pas été démontrée. L'évacuation pleurale doit être proposée en cas d'épanchement mal toléré. La pleurodèse médicale ou chirurgicale est intéressante en cas de pleurésie récidivante permettant l'éviction des récurrences, tel il est le cas de notre patient. Le traitement du lymphoedème repose sur le drainage lymphatique et la contention veineuse (1 , 2) .

CONCLUSION

Notre observation plaide en faveur de l'implication de facteurs génétiques dans la genèse du syndrome des ongles jaunes. Ceci souligne l'importance de tracer l'histoire familiale devant toute identification de ce syndrome.

Contributor Information

Narjes Abid, Email: .

Manel Loukil, Email: .

Nour Mahmoud, Email: .

Imen Badri, Email: .

Khaled Bouzaidi, Email: .

Hedia Ghrairi, Email: .

REFERENCES

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