Pendant la campagne des élections présidentielles 2022, alors que la pandémie de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) n’est pas terminée, gageons qu’aucun candidat n’osera dire que la France dépense trop pour la santé. Pourtant, le débat ne manquera pas de revenir sur le devant de la scène politique lorsque le « trou abyssal » de la Sécurité sociale servira à justifier des politiques de rigueur. Nous dépensons 11,3 % du produit intérieur brut (PIB) pour la santé, en 4e position après l’Allemagne (11,5 %), derrière la Suisse en tête des pays européens avec 12 %, et surtout, loin derrière les États-Unis qui consacrent à la santé 17 % de leur PIB. Mais, s’il importe de comparer des valeurs relatives, il est aussi nécessaire de comparer des valeurs absolues exprimées en US dollars (US$) par habitant. En US$ par habitant, la France n’est qu’à la 12e place avec près de 5000 US$ contre près de 6000 US$ pour l’Allemagne, qui dépense donc 20 % en plus par habitant. Le record est tenu par les États-Unis avec 10 000 US$ par habitant. Il importe également de savoir comment sont réparties les dépenses de santé. On sait que pour le salaire des infirmières par rapport au salaire moyen du pays, nous sommes passés grâce aux négociations salariales lors du Ségur de la santé de la 28e à la 16e place des 32 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Les médecins généralistes installés en secteur 1 gagnent environ 30 % de moins que leurs collègues allemands. Par contre, en matière de frais de gestion, nous occupons la 2e place, après les États-Unis. Nous dépensons 19 milliards d’euros, dont 7,6 milliards pour les Assurances complémentaires qui remboursent 13 % des soins et 6,9 milliards pour la Sécurité sociale qui en rembourse près de 80 %. Les prix parfois exorbitants des innovations thérapeutiques, aujourd’hui décorrélés des coûts de recherche et développement, posent un problème économique, mais aussi le problème éthique de l’accès aux soins. Il en va de même du défaut de pertinence des actes et des prescriptions médicales, dont 20 à 30 % sont estimés injustifiés. L’autre grand défi de nos systèmes de santé est celui de l’épidémie des maladies chroniques, touchant en France 21 millions de personnes dont 11 millions pris en charge à 100 % au titre des affections de longue durée (ALD) qui mobilisent 60 % des dépenses de la Sécurité sociale. C’est ici le patient qui quotidiennement se soigne et, dans cette médecine de la personne, si la prévention secondaire est l’objectif, l’amélioration de l’observance en est le moyen. La prise en charge des maladies chroniques met en lumière les faiblesses historiques de notre système de santé, à vrai dire plus système de soin que de santé : les inégalités sociales de santé comme on l’a vu lors de la pandémie, l’insuffisance de moyens consacrés à la prévention primaire, le retard dans la construction d’un service de santé de proximité intégré, ville-hôpital, dont les maisons de santé, les centres de santé et les Communautés professionnelles de territoire de santé (CPTS) sont les éléments constitutifs essentiels.
Voici quelques-unes des grandes questions qu’abordent les articles de ce dossier thématique consacré à la Santé publique.
Déclaration de liens d’intérêts
l’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.