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. 2022 Nov 24;29(1):43–56. [Article in French] doi: 10.1016/j.pto.2022.11.002

Les pratiques professionnelles au cœur de la crise dans la gestion de l’urgent : l’exemple de la crise du COVID-19

Professional practices at the heart of the crisis in emergency management: The example of the COVID-19 crisis

A Villemain a,b,, W Suarez b
PMCID: PMC9684101

Abstract

Nos organisations ont été fortement ébranlées par la pandémie COVID-19 et le monde du travail n’a pas été épargné. Seules les activités essentielles se sont poursuivies afin de maintenir un niveau minimal de fonctionnement, tout comme dans les hôpitaux ou dans les collectivités territoriales. Durant les cinq premiers mois de crise en 2020 (de mars à juillet), 34 entretiens ont été menés dans ces 2 entités du service public afin de décortiquer à la lumière de « l’activité » et au cœur de la crise, la gestion de l’urgent. Les résultats montrent que si l’urgent est principalement géré par une activité d’improvisation construite à partir de l’intuition des acteurs de terrain, la crise est gérée par la gouvernance de manière rationnelle aboutissant a posteriori à la rédaction de procédures. Cette situation de crise a poussé les organisations à se reconfigurer dans l’urgence, permettant alors le développement de nouvelles pratiques professionnelles. Les stratégies de damage control et de procéduralisation seront discutées. Des perspectives sont ouvertes sur les questions de formation à ces situations de crise sur un fond de développement de présomption d’ignorance.

Mots clés: Crise, Urgent, Hôpital, Collectivité, Ergonomie

1. Introduction

Aucun environnement de travail ni organisation n’a été préparé à vivre une telle pandémie déclarée à l’échelle mondiale, ni en France, ni dans le monde. La COVID-19 a posé des défis complexes et uniques aux praticiens des facteurs humains des services publics (gestionnaires des risques).

L’activité professionnelle s’est vue déstabilisée, révélant, d’une part, les limites des procédures existantes de gestion de crise (plan blanc, plan canicule, etc.) et, d’autre part, l’apparition d’une activité professionnelle improvisée et « bricolée », permettant de gérer les situations de tension en y ajoutant les ingrédients manquants.

Depuis tout temps, les situations de crise sont, dans des environnements à risque, gérées avec une approche probabiliste à l’image du dernier accident nucléaire de Fukushima (cf. travaux de Guarnieri et al., 2015 ; ). Lorsqu’une situation critique se produit alors que les probabilités d’occurrence de l’événement étaient faibles, les prescriptions deviennent impossibles à appliquer et mettent en difficulté les opérateurs et les organisations. Dès lors, l’activité professionnelle quotidienne se transforme en une activité de créativité grâce à un processus de transformation collective (Villemain & Lémonie, 2021). Mais comment se construit cette activité résiliente durant la crise ?

Actuellement, seule une étude a été menée pour documenter les questions relatives aux facteurs humains et à l’ergonomie (HFE) dans le cadre de la gestion des catastrophes (Sasangohar et al., 2020). Très peu d’articles en ergonomie pour le moment ont questionné le COVID-19 sous l’angle de l’activité.

1.1. Les enjeux d’une recherche originale

Cet article propose une recherche menée durant la crise COVID-19 ; une opportunité inestimable pour tenter de saisir la crise en flagrant délit, de mieux en comprendre les ressorts organisationnels et pour éclairer ainsi la direction à prendre dans de telles situations. Cette étude a été menée sans regard omniscient sur la situation, ne connaissant pas au moment des premiers recueils (mars 2020) l’ampleur de la crise, en termes de durée (quelques semaines ?) et de dénouement (50 morts ? 500 morts ? 50 000 morts ?). Par ailleurs, il faut souligner la difficulté à appréhender la crise pendant la crise, puisqu’elle détruit tout sur son passage, structures comme processus existants (Vogus & Sutcliffe, 2007). Il a donc fallu reconstituer et comprendre ce qu’était l’organisation avant la crise pour en mesurer les effets.

L’enjeu d’un tel travail repose à la fois tant sur une dimension organisationnelle qu’individuelle du travail. Les directions d’organisations publiques, comme dans les hôpitaux ou encore les politiques locales ont été dans un flou permanent, tiraillées par les contradictions prédominantes et rendant les prises de décision obscure. La crise COVID-19 est venue questionner les procédures existantes dans le travail qui se sont révélées inefficaces. Du point de vue individuel, la crise sanitaire a placé les individus, face à leurs limites, leur offrant ainsi une nouvelle expérience totalement inattendue, et l’opportunité de développer de nouvelles pratiques professionnelles dans un tel contexte.

Les objectifs de l’étude étaient d’identifier les mouvements dans les organisations en crise, en (1) démêlant l’amalgame entre l’urgent et la crise ; (2) d’identifier les stratégies individuelles et collectives pour faire face à la crise ; (3) et enfin d’identifier les facteurs permettant de stabiliser l’organisation et pourquoi pas même, de la développer. À travers une approche compréhensive et exploratoire, son originalité repose sur une triangulation de données recueillies simultanément en temps réel sur deux terrains de structures publiques : une collectivité territoriale et un hôpital.

1.2. Situation de crise ou situation d’urgence ?

Nombreuses sont les études qui portent sur la gestion de crise (hors COVID-19). Beaucoup d’entre elles définissent et caractérisent la crise, par : un changement de moyens pour atteindre des objectifs et pour fonctionner, l’incertitude et la durée de la crise ; On note une rupture dans la continuité du travail, un travail en situation dégradée, un dépassement des ressources de l’organisation qui est à ce moment-là menacée (Dautun, 2009, Dautun, 2007 ; Pauchant et al., 1992 ; Pearson & Clair, 1988 ; Weick, 1988 ; Miglani et al., 1988). La caractéristique principale est de décider et d’agir en urgence (Crocq et al., 2009) : l’amalgame entre urgent et crise fait ainsi son apparition.

Car dans la littérature, l’urgent se définit aussi par une rupture dans la continuité des actions habituelles imposant une nécessité d’agir différemment et dans l’immédiateté (Crocq et al., 2009). Pour compléter cette définition, la situation d’urgence est caractérisée par une pression temporelle et une temporalité d’action courte, agrémentée d’un degré de complexité et d’interdépendance entre les éléments de la situation (Owen, 2007). L’urgence émerge alors de la perception des acteurs sur la situation (Guarnieri et al., 2015). L’urgence déstabilise l’organisation et les modes de fonctionnement et est concomitante avec une réduction de moyens matériels et humains et en plus avec un empan temporel réduit (Adrot & Garreau, 2010). Ainsi dans l’urgence (créée, d’une part, par le flux d’arrivée des patients en ce qui concerne le milieu hospitalier, et, d’autre part, par le manque de moyens qui génère une urgence inhabituelle), ce sont des situations dans lesquelles le processus de travail va très vite à l’image d’une essoreuse. L’opérateur est alors dépassé, modifiant ainsi l’activité professionnelle nominale1 . L’opérateur ne pourra faire face à la situation que par une activité de bricolage (Weick, 2001). Toute ressource disponible ou à portée de main peut alors être utilisée.

En résumé, la situation de crise génère un bouleversement de référentiel (Weick, 1993 ; Lagadec, 1991), qui, temporairement, empêche de donner du sens aux évènements (Roux-Dufort, 2010). Si la situation de crise débouche sur une réorganisation du travail, la situation d’urgence, elle, amène à des situations de « bricolage » et d’improvisation transformant ainsi l’activité professionnelle.

Ces situations d’improvisation induisant des bricolages, pourraient se rapprocher des stratégies damage control (Masquelet, 2013) si bien développées dans le domaine médical. Ce terme à l’origine issu de la Marine Américaine, a été utilisé au cours de la seconde guerre mondiale pour désigner la capacité d’un équipage à gérer (bricoler) les avaries et les dommages subis par le navire en vue de poursuivre sa mission pour atteindre le port (moment durant lequel d’importantes réparations peuvent être effectuées). Trois phases sont décrites par Masquelet : la première vise à réparer des avaries les plus graves, des extinctions de feux, un colmatage des brèches ; la seconde consiste à maintenir le navire jusqu’au port ; enfin la troisième sera le moment de réparations définitives une fois arrivé en sécurité au port. Le damage control a par la suite été employé dans le domaine de la chirurgie notamment lors de conflits armés ou d’attentats terroristes. La logique de damage control médical (Travers et al., 2016) se met en place. L’objectif est de prendre en charge les blessures rapidement en improvisant. Ainsi, l’idée phare est de pallier les situations d’urgences mettant en jeu le pronostic vital, par l’utilisation de toutes les ressources présentes.

1.3. Les leçons des épidémies précédentes

Après chaque situation épidémique vécue ces dernières années, des recommandations sont nées avec une forte connexion entre le monde du soin et la collectivité notamment en cas de décès massifs et la gestion de ces derniers dans les deux milieux. Par exemple, l’épidémie de SRAS (coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère SARS-CoV) de 2003 à Toronto avait ébranlé le système de soin mettant en avant les risques d’infection du personnel soignant. Réactivité, adaptation et compétences des équipes soignantes ont été facteur d’enrayement de l’épidémie (Brunet, 2007). Suite à ces constats, des recommandations sur le développement de formations médicales ont été au centre des préoccupations. Les épisodes d’infections grippales (H5N1) ont conduit à des recommandations portant aussi bien sur la disponibilité matérielle et humaine dans une situation de crise que sur la question du tri des patients (Guery et al., 2007). Malgré ces préconisations, notre système de soin semble avoir souffert des mêmes manques oubliés après la crise et redécouverts avec le COVID-19.

Suite à la canicule de 2003, une étude menée en île de France a mis en évidence une inadéquation organisationnelle et logistique des pouvoirs publics, y compris dans la mise en œuvre des dispositifs face à une situation de décès massifs. Ces constats ont débouché sur la mise en place de recommandations sous forme de mesures procédurales destinées aux préfets (Chabanne, 2009). Les moyens matériels insuffisants avaient déjà été soulignés à ce moment-là en cas de pandémie. Cette question n’a pas été résolue par les pouvoirs publics, ni même celle de la gestion opérationnelle. L’une des raisons est peut-être l’accumulation d’indices dans des lieux et services cloisonnés qui ne s’articulent pas entre eux (Bourdès & Laroche, 2009). La situation se complexifie lorsqu’un travail collaboratif est nécessaire entre plusieurs institutions comme c’est le cas pour les crises évoquées et celle du COVID-19 n’y a pas échappé.

2. Contexte de la recherche : l’entrée dans la crise de deux structures de service public

Deux structures de pouvoirs publics ont participé à l’étude : une collectivité territoriale de 20 000 habitants, comptant 600 agents et 150 métiers différents ; un hôpital médico-chirurgico-obstétrical, comptant plus de 5000 agents, de la réanimation et des unités COVID-19.

Concernant la collectivité territoriale, le COVID-19 fait son apparition dans un contexte politique de tension d’entre deux tours, avec un maire en ballotage défavorable. Concernant l’hôpital, le COVID-19 fait son apparition dans un contexte de tension sociale : les moyens humains et matériels étaient de plus en plus réduits et plaçaient déjà le personnel soignant dans une situation de tension. L’activité professionnelle à l’hôpital était donc en situation dégradée avant le début de la pandémie en France.

Ces deux structures sont réunies autour d’un challenge commun : celui de faire face du mieux possible à la pandémie, aux patients (hôpital) et aux décès (collectivité) en masse, tout en maintenant un niveau minimal de fonctionnement pour éviter les effets cascade.

Des cellules de crise ont été instaurées rapidement à l’hôpital comme dans la collectivité ; ces concertations quotidiennes permettaient de centraliser les points de blocage du moment et devenait un lieu incontournable des prises de décision (ou de non décision).

Le point de départ de la crise n’est pas identique pour la collectivité ou l’hôpital. La mise en tension de l’hôpital a été liée à une recrudescence de cas COVID-19, qui a généré rapidement une déprogrammation des interventions pour se centrer sur l’urgent ; quant à la collectivité, l’annonce du confinement (16/03/20) a amorcé le déclenchement du Plan de Continuité d’Activité (PCA), soit un mode de fonctionnement en situation dégradée, ne préservant que les missions vitales des services tout en étant en effectifs réduits.

Le virus s’est invité dans les organisations, les déstabilisant et augmentant les contraintes dans tous les domaines professionnels. Pour illustrer nos propos nous allons prendre l’exemple du milieu hospitalier et des collectivités territoriales. Les objectifs de cette recherche étaient d’identifier les mouvements dans les organisations sous l’angle des choix opérationnels pour enrayer la crise. Quelles ont été les solutions apportées ? Quels ont été les types de solutions ? Quels ont été les moyens et les ressources trouvés ? Cette étude vient questionner des enjeux de préparation ou de formation des organisations à réagir à l’urgence et aux situations de crise. Enfin, il s’agit là d’envisager la crise comme vecteur de transformation et de développement des organisations et des individus à l’image de ce que propose l’ergonomie constructive (Falzon, 2013).

3. Méthodologie

3.1. Participants

Concernant le milieu hospitalier, 12 personnels soignants ont participé à l’étude, comprenant 4 corps de métier différents : 4 infirmiers (ères), 3 cadres de santé, 4 médecins et 1 aide-soignant.

Concernant le milieu des politiques locales, 22 personnels de la collectivité ont participé à l’étude, comprenant 4 statuts différents : 2 élus, 1 Directrice Générale des Services (DGS), 10 Directeurs Généraux Adjoints (DGA), 9 Agents appartenant à 6 services différents.

3.2. Triangulation des données

Les données ont été recueillies simultanément dans les deux structures durant les 5 premiers mois de la crise dès l’annonce du premier confinement (de mars 2020 à juillet 2020, soit 15 semaines). La diversité des recueils et des données a permis de procéder à une triangulation des données (Cahour & Créno, 2017 ; Julien et al., 2019 ;; Leplat, 2008). D’après Leplat (2008), « il est recommandé d’utiliser conjointement plusieurs méthodes afin de recouper et d’enrichir les informations apportées par chacune d’elles » (p. 191). Ainsi, nous avons mené une analyse de documents, de compte-rendu2 , mais nous nous sommes aussi appuyés sur le suivi de l’actualité, et des décisions gouvernementales, des préfets et des politiques locales. Ce recueil a été complété par la mise en place dès le lendemain de l’annonce du confinement d’entretiens semi-directifs et de récits de narration (Moyenne : 1 h) (en présentiel dans le milieu hospitalier, par téléphone dans le milieu de la collectivité). La trame des entretiens reposait sur 3 moments-clés : (1) en quoi consistait le travail avant le confinement ainsi que leur avis sur l’organisation (travail collectif ? collectif de travail ?) afin d’avoir une idée sur le travail en situation nominale ; (2) ce qui a changé dans les pratiques depuis l’entrée dans la crise ? il leur a été demandé d’illustrer leur propos à partir du vécu, et de décrire leur expérience (Vermersch, 2009), afin de rendre compte du travail en situation dégradée ; (3) quelles ont été les solutions trouvées, les stratégies individuelles et collectives développées dans la situation, toujours en leur demandant d’illustrer leurs propos à partir de description de situations vécues.

3.3. Procédure

Les entretiens ont été menés durant 15 semaines, entre le mois de mars et le mois de juillet, par téléphone ou en présentiel, en fonction des disponibilités des participants. Les données recueillies ont subi les contraintes liées à la crise ce qui rendait impossible la planification des entretiens. Le protocole a donc suivi les imprévus de la crise. Le suivi de l’actualité en parallèle nous permettait d’ajuster la fréquence des entretiens et les acteurs visés. Par exemple, 3 jours après la réouverture des écoles, un cluster est apparu dans la commune en question. Les classes ont immédiatement été fermées 3 jours après. Nous avons mené les entretiens avec le responsable du service concerné.

3.4. Analyse des données

Les données issues des entretiens ont été retranscrites puis nous avons procédé à une catégorisation selon la théorie ancrée de Corbin et Strauss (2008), respectant les 3 moments-clés du guide d’entretien. Ainsi, l’analyse croisée des verbatim des deux milieux d’étude a permis d’extraire (1) la situation de travail avant crise ; (2) le travail en situation dégradée ; (3) les stratégies globales et locales, à l’échelle individuelle, comme collective.

4. Résultats

Les résultats obtenus nous ont permis de faire émerger un processus de gestion de crise en 3 phases (phase d’improvisation ou de damage control ; phase d’ajustement ; phase de reconfiguration) ainsi que des conséquences des reconfigurations sur le développement de nouvelles pratiques professionnelles. C’est ce que nous exposons dans ce qui suit.

4.1. La gestion de crise, un processus en 3 phases

4.1.1. Une crise caractérisée par une succession de contraintes et de situations d’urgences

Nos entretiens nous ont permis de révéler que cette crise est une succession de contraintes et de situations d’urgences, tant dans le domaine des collectivités territoriales que celui des hôpitaux (Fig. 1 ). Grâce aux entretiens menés durant 12 semaines consécutives, la dynamique de la situation a pu être retracée, permettant ainsi une lecture diachronique de la crise.

Fig. 1.

Fig. 1

Situations dégradées évoquées dans la collectivité territoriale et l’hôpital.

Pour l’hôpital, l’entrée dans la crise s’est déclenchée à partir de l’augmentation du nombre de malades du COVID-19, alors que dans la collectivité, à partir de déclenchement du PCA, c’est-à-dire, de la diminution des effectifs.

Chaque organisation dans son domaine a ensuite connu des perturbations, des moments de tensions et de pression, des controverses à gérer, comme par exemple ouverture puis fermeture puis ouverture des marchés dominicaux ou encore les masques non nécessaires, puis obligatoires pour les soignants, puis obligatoires pour la population générale en extérieur comme en intérieur. Si dans le milieu hospitalier les situations d’urgence portent davantage sur des questions matérielles, dans le milieu territorial c’est essentiellement en lien avec la gestion des lieux publics.

Par ailleurs, la structuration des organisations a empêché l’adaptation à l’urgent. L’organisation des 2 services publics n’a pas permis de gérer de manière sereine la crise. Vue comme empêchant d’avancer dans l’urgence, elle a été remaniée très rapidement structurellement, tant du point de vue des démarches administratives que des procédures ou encore du point de vue fonctionnel (matériel). Les résultats exposés ci-dessous montrent bien que le structurel a été pensé en situation nominale mais devenant très vite une contrainte en situation de crise. Des ajustements ont donc eu lieu pour gérer les situations d’urgence.

Les procédures administratives trop lourdes ralentissaient la gestion de l’urgent et ont du être allégées. Les exemples qui suivent émanent tant de la collectivité que du milieu hospitalier :

« On nous disait ce n’est pas possible (en temps normal) et par notre bidouille on y arrivait … il fallait qu’on se démerde avec ce qu’on avait » (Médecin, 15/07/20),

« Toute la lourdeur administrative habituelle n’existe plus : y a des délégations de signatures, des procédures allégées, du coup ça va beaucoup plus vite pour déclencher les choses » (DGS, 23/03/20).

Les délais habituels ont été réduits, les délégations de signatures accélérées et les demandes dérogatoires qui contraignent habituellement le système des marchés publics ont été levées (circulaire abrogeant…). Cet allégement des procédures administratives et opératoires a permis un gain de temps et d’améliorer la réactivité. Les procédures ont par la suite été ré-élaborées et ré-inventées afin de cadrer de nouvelles pratiques professionnelles. Par exemple, dans le milieu hospitalier, les actions opératoires ont devancé les cadres règlementaires, administratifs et législatifs, qui, peu de temps après, officialisaient les procédures effectuées pour contrecarrer le décalage entre le réel de l’activité et le règlementaire :

« On s’est retrouvé en manque de blouses, de médicaments, de seringues, de respirateurs, de masques… » (Médecin, 15/07/20),

« Nous étions 4 (1 infirmière et 3 aides-soignantes) dans l’unité COVID et n’avions que 4 blouses pour 3 patients, en théorie nous devons changer de sur blouse à chaque entrée dans une chambre et nous nous occupons tous de tous les patients. Nous avons donc mis en place un système où 1 aide-soignante s’occupait de chaque patient et moi (infirmière) je faisais le tour des patients, comme cela on limitait les croisements par les aides-soignants qui iraient voir chaque patient aussi. On économisait les blouses…que l’on n’avait pas. » (Infirmière, 14/05/2020).

4.1.2. L’improvisation sous la forme du damage control gérée de manière intuitive

Une fois les contraintes de procédures dépassées, les résultats montrent l’existence de plusieurs étapes dans le processus de transformation de l’urgence à la crise (Fig. 2 ). Quatre périodes en lien avec la pression temporelle (du proximal vers le distal) apparaissent : tout d’abord l’émergence de contraintes fortes, caractérisées par des manques, ruptures, ou besoins (matériels, humains…), des solutions créatives et totalement improvisées vont se mettre en place à l’échelle du collectif afin de pouvoir maintenir un niveau d’activité essentiel voir vital ; par la suite des ajustements vont être nécessaires et vont permettre de temporiser en attendant qu’une solution plus construite et donc plus viable émerge : c’est une phase de reconfiguration du travail. L’improvisation permet une réponse rapide à une situation d’urgence ; Ou encore, pour faire face à la rupture de médicaments ou de matériels, les agents ont su trouver des solutions de fortune, improvisées dans un premier temps :

« On échange entre médecins et pharmaciens pour utiliser les molécules disponibles, chaque jour ça change… » (Médecin, 15/07/20).

Fig. 2.

Fig. 2

Processus de transformation : de l’urgence à la crise (domaine hospitalier) (2020).

4.1.3. Une phase d’ajustement avant une phase de reconfiguration

Les résultats ont révélé l’existence d’une phase d’ajustement dans la mesure où la situation persistait et se répétait. Pour reprendre l’exemple des ruptures de blouses à l’hôpital, les agents ont improvisé des blouses en sac poubelle pour pouvoir fonctionner dans l’urgence, puis ils se sont dotés de ponchos lavables (phase d’ajustement), le temps de créer des ateliers de couture pour confectionner des blouses. Il s’agit dans ce dernier cas d’une reconfiguration plus confortable que les 2 précédentes phases et plutôt satisfaisante dans l’équilibre protection/coût/urgence. Ces ateliers de coutures restent désormais dans la tête des agents et de l’institution comme une solution mobilisable lors d’une prochaine crise. Ainsi, la phase intermédiaire permet de laisser le temps à l’organisation de proposer des solutions plus pérennes et plus construites, plus contrôlées.

4.2. Conséquences des reconfigurations dans le travail sur le développement de nouvelles pratiques professionnelles

Le développement de nouvelles pratiques professionnelles a repris les rênes sur le structurel ; nous avons vu s’opérer un glissement au profit d’une nouvelle organisation du travail et de nouvelles pratiques professionnelles, comme la mise en place du télétravail, de l’entraide spontanée ou encore des formations éclairs.

4.2.1. Le télétravail : de nouvelles frontières entre les espaces privés et professionnels

La pandémie et les décisions de confinement ont eu pour conséquences de changer la manière de travailler avec notamment le développement du télétravail. Dans un premier temps, cette mise au télétravail n’a pas été construite mais subie par les agents et les organisations. Du jour au lendemain, un certain nombre de personnes se sont retrouvées à domicile ayant à peine eu le temps de prendre le nécessaire à leur activité professionnelle :

« Je me suis retrouvée sans dossier, sans rien, pas d’ordinateur, démunie (…) du coup je me suis occupée en réfléchissant sur les aménagements possibles en cas d’augmentation des décès… j’ai travaillé autrement sur l’anticipation » (DG., 16/04/2020).

Le télétravail très peu développé dans ces deux structures a été mis en place dans l’urgence et s’est grandement développé jusqu’à la protocolisation et le passage en instance de charte télétravail. Le télétravail a aussi intégré durant la crise l’utilisation des groupes WhatsApp :

« Nous nous sommes retrouvés à plus de 100 sur le groupe WhatsApp du service, on échangeait rapidement sur les problèmes, les procédures, les appareils avec ceux qui étaient chez eux, on gardait du lien » (Infirmière, 06/06).

permettant ainsi une communication plus rapide, plus fluide, plus étendue et plus intégrative. Ces groupes ont permis de maintenir le lien à la fois social et professionnel, notamment entre les opérateurs en postes et ceux confinés à domicile (collectivité et hôpital) ou encore avec les managers qui ont été confrontés au management à distance.

4.3. L’entraide spontanée par la polyvalence et la transversalité dans le travail

La polyvalence et la transversalité se sont développées de manière forcée (par la pandémie) mais malgré tout volontaire et spontanée tant au sein de la collectivité que dans le milieu hospitalier :

« On se côtoyait tous, les manipulateurs en radiologie, les ingénieurs biomédical… On a fini avec une équipe importante composée de titulaires, de personnes du pool de l’hôpital habituées à venir dans le service et d’une somme importante de soignants venus d’ailleurs » (Médecin, 15/07/20),

« On a formé une équipe d’inconnus, en quelques semaines on était une vraie équipe. » (Aide-soignant, 15/06) ;

« Avant certains agents me répondaient, « ce n’est pas dans ma fiche de poste » ; maintenant, c’est « sollicitez-moi si vous avez besoin » (DGA, 02/04/20),

« Les agents du service des sports sont allés faire le portage des repas » (DGA, 27/05/20) ;

« J’étais volontaire dans l’unité COVID » (Infirmière, 04/08/20).

Cette entraide spontanée a déplacé les murs des institutions, les restaurateurs ont offert des repas aux soignants, l’association « protège ton soignant » a permis des aides matériels (allant des réfrigérateurs aux appareils à dialyses), la grande distribution (après démarchage des médecins et infirmières) des ponchos pour paliers aux manques de blouses. Dans le domaine de la collectivité territoriale, les métiers se sont inter-changés pour aider au portage des repas dans les résidences pour personnes âgées.

4.3.1. Les formations éclaires

Un des aboutissements de cette entraide spontanée a été l’instauration de formations flash ou de tuilage spontané. Malgré la pression, certaines tâches ont été sanctuarisées et développées. L’un des exemples emblématiques dans le milieu hospitalier est le développement de formations en réanimation par l’aménagement d’une chambre de simulation pour former les nouveaux arrivants aux matériels, aux méthodes et habitudes du service, et ce, dans un contexte de manque de lits pour les patients. Concernant les collectivités, le tuilage s’est effectué sur le creusage des caveaux au cimetière pour faire face à la recrudescence de décès : l’agent du service des sports a été formé aux tâches attribuées habituellement aux agents des services funéraires. Les formations qui peuvent paraître en situation habituelle chronophages et contraignantes, ont été mises en place de manière spontanée et rapide dans cette situation d’urgence.

5. Discussion

À l’image du virus qui s’introduit dans une cellule du corps humain, le COVID-19 s’est introduit dans les organisations : en se développant, il a poussé les systèmes dans leurs retranchements pour en tester leur robustesse à leur insu.

La Fig. 3 ci-dessous fait l’analogie du virus COVID-19 et les symptômes subis par les deux organisations, dans le processus de construction de la gestion de crise. Si la gestion de crise est un processus intuitif au départ dans la gestion de l’urgent, elle se construit au contact de la situation inconfortable.

Fig. 3.

Fig. 3

Réplication organisationnelle sur la situation de crise COVID-19.

5.1. Le rôle de l’expérience et de l’intuition dans la gestion de l’urgence

La gestion des situations d’urgence rencontrées a permis le développement de nouvelles pratiques professionnelles notamment sous l’angle de savoir-faire d’urgence (Fig. 3) ; ce sont des solutions créatives, en temps réel et sans délai selon un raisonnement plutôt intuitif, laissant parler les expériences de chacun. Ces savoir-faire bricolés et opportunistes sont intuitifs et proviennent dans la plupart des cas de détournements de ressources initiales au profit de nouveaux objectifs impulsés par la situation. Au regard des résultats (Fig. 2), nous pourrions conclure que le manque de moyens ou de ressources (dans des situations d’inconfort) seraient à l’origine de déclenchement de la créativité.

La gestion des situations d’urgence a permis l’émergence de nouvelles pratiques très intuitives tant dans le domaine hospitalier que dans celui des collectivités ; ces résultats s’inscrivent dans la lignée des travaux de Boehm (2018) : derrière ces pratiques intuitives se développe une nouvelle nature de savoir-faire : des savoir-faire improvisés (damage control). Bien conscients que les solutions ne sont pas idéales à ce moment-là, que le réalisable n’est pas l’optimal, que le système souffre de désorganisation, les opérateurs s’inscrivent dans des logiques « c’est mieux que rien » (Philipps et al., 2004). Le traitement rationnel de la situation s’est retrouvé face à une impasse, et inapproprié aux situations d’urgence rencontrées ; d’ailleurs l’échec des procédures et des protocoles en ont fait la démonstration une nouvelle fois. D’ailleurs, de récents travaux menés sur le COVID-19 de Ketelaars et al. (2021), (dans le cadre d’une recherche sur l’expérience des premiers intervenants humanitaires lors du COVID-19) confirment que l’imprévisibilité et l’instabilité de ce type de situation ont rendu impossible l’application de procédures : contrôler la situation dans toute sa complexité en tenant compte de son aspect dynamique était vain. Cet avis est partagé par d’autres recherches (Ansell & Bartenberger, 2017, p. 2).

Ce constat vient questionner la place de l’expertise et de la formation spécifique si la gestion des situations d’urgence s’effectue à partir de pensée intuitive. Quelques études corroborent nos propos dans des domaines diversifiés, comme dans le cadre de la médecine d’urgence et de l’intervention chirurgicale (Flin et al., 2007, Pauley et al., 2011), ou encore dans le cadre des recherches sur le raid polaire (Villemain & Lémonie 2021), qui montrent que dans une situation critique vécue, les solutions provenaient des moins expérimentés et experts du raid : les expériences de vie et professionnelles diversifiées se sont invitées dans la situation d’urgence pour apporter des solutions innovantes. Dans ce cas, la prise de décision ordonnée était impossible. Cette idée a été défendue dans les travaux de Curnin et al. (2020).

Ainsi, même si les prises de décision cohérentes entre les acteurs sont indispensables durant les situations de crise (Treurniet & Wolbers, 2021), elles sont pourtant prises à partir d’informations incomplètes (Maitlis & Christianson, 2014). C’est donc un leurre de penser que les décisions puissent être bien ordonnées, rationnelles et bien rangées (Richardson, 2005). Le sens donné à la situation se construit a posteriori de la situation d’urgence et se fonde essentiellement sur une démarche cartésienne (Weick, 1993). Or, selon la théorie du cours d’action (Theureau, 1992) ou encore les travaux de (Varela et al., 1993) tout laisse à penser que la construction de sens s’effectue non pas a posteriori de la situation, mais dans le cours de réalisation de l’action, c’est à dire pendant que les individus vivent la situation d’urgence, en interaction avec le corps et l’esprit.

Un abus de rationalisation de la réalité complexe (ou une réduction de la complexité dans ces moment-là), avec une lecture très cartésienne peut être inadaptée à la situation voire même l’aggraver (Guarnieri et al., 2015).

Ainsi, la crise du COVID-19 semble avoir été gérée en deux temps : Passée la situation d’urgence gérée à partir d’improvisation, une planification et une protocolisation des nouvelles pratiques professionnelles sont apparues, apportant parfois des transformations définitives.

La gestion de la crise, englobant une multitude de situations d’urgence, a contribué au développement de connaissances par rapport au travail, tant sur le plan humain qu’organisationnel. Ainsi la gestion des situations imprévues impensées par les systèmes émerge d’une combinaison entre le rationnel et l’intuitif.

5.2. La présomption d’ignorance nécessaire à la recherche de solutions créatives

La combinaison des deux processus de pensées intuitif et rationnel (cognitifs) nécessiterait d’envisager les formations des opérateurs aux situations critiques sous un autre angle. La recherche d’un plan d’action réalisable n’est pas nécessairement la meilleure décision du moment et la plus optimale (Phillips et al., 2004) et d’ailleurs Weick (1995), dans le cadre de ses travaux sur le sensemaking, indique que la prise de conscience est bien plus déclenchée par la plausibilité que par l’exactitude ; autrement dit le trop de certitude aveugle et empêche d’entrevoir la situation sous toutes ses facettes ; une part de doute est alors nécessaire à la prise de conscience et à la recherche de solution. Par ailleurs le cloisonnement des indices peut conduire à des erreurs de diagnostic et dans les prises de décision. Boudès et Laroche (2009) soulèvent cet aspect, suite à une analyse de la canicule de 2003 en France : il ne suffit pas d’une accumulation d’indices mais bien de savoir les lire et les articuler entre eux. Cest ce que Weick (2010 ) propose dans ses travaux, lorsqu’il conclut que l’individu doit développer des capacités pour mobiliser le bon cadre d’analyse, approprié à la situation. Il choisira son cadre dans les réservoirs de sens qu’il aura construit à travers les expériences (Laroche & Steyer, 2012). Entretenir un doute dans ces situations de crise permet de préserver une ouverture d’un champ des possibles ou une variété du réservoir de sens souligne Weick (2010), amenant l’émergence d’un dialogue sincère (Weick, 2009), une humilité situationnelle des leaders (Barton & Sutcliffe, 2009) ou encore laissant place à la présomption d’ignorance ; au lieu de ne pas être conscient qu’on ne sait pas car on pense tout savoir, si on partait du postulat que finalement on sait qu’on ne sait pas ?

Ce changement de posture est nécessaire à l’apprentissage et au développement, tant à l’échelle individuelle que du collectif. Le doute se fabrique au fur et à mesure que la compréhension de la situation se construit grâce à une posture de présomption d’ignorance, partant du postulat de savoir qu’on ne sait pas. Dans le cas du COVID-19, il s’agit bien de ne pas rester sur le même chemin d’avant COVID-19 (la vie d’avant) mais bien de construire une autre route pour se sortir de la situation critique (Darkow, 2018, Provan et al., 2020).

Nous avons mis en valeur deux temporalités dans la crise au sens large avec une phase d’urgence caractérisée par les contraintes entraînant le damage control et une phase de crise caractérisée par l’ajustement puis la reconfiguration. À notre connaissance il s’agit d’une première étude mettant en lumière ces deux phases reposant sur des caractéristiques temporelles différentes et donc des activités différentes. L’aspect linéaire sous-entendu par le terme de crise révèle finalement des temps différents qui sont à prendre en compte dans les formations par exemple ou encore pour le travail des cellules de crises.

5.3. Limites de cette étude

Notre étude propose une nouvelle conception de la crise au sens large par la mise en valeur d’un processus de gestion de crise en trois phases : la phase d’improvisation ou de damage control, la phase d’ajustement, la phase de reconfiguration. Nous avons par ailleurs étayé ce changement de paradigme de la crise par des exemples d’adaptation aux difficultés rencontrées par les opérateurs et les organisations. Cet aspect-là aurait probablement mérité d’être plus finement analysé afin de révéler les changements organisationnels conservés et opérationnels dans le « monde d’après », conséquence de la reconfiguration pandémique. Cela constitue une limite de notre étude mais notre travail ne se situe pas dans le « monde d’après » mais bien au moment critique de la crise sanitaire, au printemps-été 2020.

6. En conclusion

L’après urgent … un retour à la situation nominale.

Toutes ces reconfigurations ont créé de nouvelles relations et de nouveaux modes de fonctionnement dans les organisations impactant le travail. À l’image d’un cycle (et non d’une spirale comme les théories de la complexité le pensent), de nouvelles procédures ont été instaurées suite à cette expérience, nous replongeant dans le même fonctionnement que précédemment. Pour le monde hospitalier, les ruptures de molécules et leurs substitutions par d’anciennes molécules peut être une pratique réutilisable en cas de crise majeure. Ces exemples et bien d’autres constituent un creuset de connaissances et de savoir-faire qui pourraient être remobilisés en cas de nouvelle crise.

Les procédures et les principes ne peuvent être réduits qu’à des guides délimitant un périmètre d’action, inutilisable dans toutes les situations, et notamment dans les situations de crise. Ce constat avait déjà été soulevé par Weick en 2010. Et comme Darkow (2018) le souligne, tirer des leçons d’une crise ne permet pas de mieux gérer la suivante si on a conscience de la singularité des situations. Une approche rationnelle de la décision est bien souvent gratifiée dans la rédaction des procédures standardisées (Boehm, 2018). La question de formation sous-jacente porterait alors sur l’apprentissage des managers à manager à distance et à laisser des marges de manœuvre aux acteurs afin de leur permettre d’apprendre à improviser et à faire face aux situations imprévues peu probables.

Ce virus nous a permis alors de connaître les limites des organisations et jusqu’où elles pouvaient tenir dans des conditions d’inconfort jamais connues : le virus a mis à défaut la complétude de la connaissance, poussant les humains et ces systèmes vers, pour la plupart, ce dont ils redoutent le plus : l’incertitude, l’incontrôlabilité, l’agir dans la complexité. Dès lors un changement de paradigme s’impose pour pouvoir enrayer de telles situations, accepter que ces situations se reproduisent, poursuivre le chemin de la vie en s’ajustant avec souplesse et non dans la résistance. Car au final, la nature aura toujours le dernier mot.

Déclaration de liens d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

Footnotes

1

Entendre par fonctionnement habituel, hors situation dégradée.

2

Bien que nous ayons participé aux cellules de crise, nous n’avons pas intégré ce paramètre dans le recueil de données.

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