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. 2022 Jul 1;100(7):491–497. [Article in French]

Rétention des compétences suite à l’apprentissage par simulation dans le syndrome coronarien aigu versus arrêt cardiaque

Skill retention following simulation learning in acute coronary syndrome versus cardiac arrest

Hanen Ghazali 1, Islem Ouaness 2, Khedija Zaouch 3, Rym Hamed 4, Chermiti Ines 1, Hela Manai 5
PMCID: PMC9703463  PMID: 36571736

Résumé

Introduction : L’acquisition des compétences dans des situations critiques est souvent problématique pour les jeunes médecins de famille (MF). L’apprentissage par simulation semble être la technique de choix. Peu d’études ont étudié le maintien des compétences acquises en simulation.

Objectif : Etudier la rétention des compétences acquises en simulation à distance de l’apprentissage.

Méthodes : Etude prospective randomisée. Inclusion des MF exerçant aux urgences. Formation théorique sur la prise en charge (PEC) de l’arrêt cardiaque (ACR) et du syndrome coronarien aigu avec sus décalage du segment ST (SCA). Randomisation des participants en 2 groupes pour recevoir une formation en simulation à la PEC de l’ACR (groupe ACR) et du SCA (groupe SCA). Evaluation des groupes par un scénario commun à T0 (le jour de la simulation) et à T1 (1 mois après). Etude de l’évolution des notes entre T0 et T1.

Résultats : Inclusion Groupe ACR : T0 (n=19), T1 (n=13), Groupe SCA : T0 (n=14), T1 (n=9). A T0, les participants formés sur simulateur avaient des résultats significativement supérieurs à ceux du groupe témoin: 14,92 ± 2 (groupe ACR) vs. 7,51± 3,37 (groupe SCA), p<0,001 pour le scénario ACR et 11 ± 2 (groupe ACR) vs. 13± 2 (groupe SCA), p=0,03 pour le scénario SCA. A T1, le groupe SCA maintient ses connaissances pour le scénario SCA. Pour le groupe ACR, une baisse significative des notes était notée pour le scénario ACR.

Conclusion: Notre étude confirme le bénéfice pédagogique de la simulation. Ce bénéficie n’est maintenu que pour le SCA.

Mots clés: Simulation médicale, pédagogie, syndrome coronaire aigu avec sus décalage du segment ST, arrêt cardiaque, rétention

LISTE DES ABREVIATIONS

ACR: Arrêt Cardio Respiratoire

BAV: Bloc auriculo-ventriculaire

CEE : Choc électrique externe

CESU : Centre d’enseignement des soins d’urgences

CNT: Compétences non techniques

CT  : Compétences techniques

DEF : Défibrillation

DIAG : Diagnostic

ET : Ecarts type

FV : Fibrillation ventriculaire

MCE : Massage cardiaque externe

MF  : Médecins de famille

PEC : Prise en charge thérapeutique

SAED : Situation antécédents évaluation demande

SAMU : Service d’aide médicale urgente

SCA ST+ : Syndrome Coronarien Aigu avec Sus Décalage du Segment ST

VENT : Ventilation

INTRODUCTION :

L’acquisition des compétences techniques (CT) et non techniques (CNT) dans des pathologies mettant en jeu le pronostic vital est souvent problématique pour les jeunes résidents débutant leur formation aux urgences tels que ceux de médecine de famille.

A ce stade, l’enseignement théorique complété par une formation aux gestes sur mannequins procéduraux n’est pas suffisant. En effet, ils ne permettent pas de recréer des situations dynamiques et évolutives, faisant intervenir une multitude de compétences.

L’apprentissage par simulation est une des solutions apportées à cette problématique. Elle s’est imposée ces dernières années comme une méthode de formation plus performante que la formation théorique classique, aussi bien pour l’acquisition des CT que NT (1, 2, 3 ).

Cependant, d’autres aspects sont beaucoup moins clairs…

Une notion essentielle est la rétention, c’est-à-dire le fait que les connaissances et les compétences acquises persistent au long terme et ne soient pas rapidement perdues au fil du temps (4, 5, 6).

Peu d’études ont évalué ce bénéfice de la simulation et les résultats sont de plus controversés.

C’est dans ce contexte que s’intègre ce travail dont l’objectif était d’étudier la rétention des compétences acquises en simulation  à distance de l’apprentissage dans deux situations: le syndrome coronarien aigu (SCA) et l’arrêt cardiaque (AC).

METHODES 

Il s’agissait d’une étude prospective, longitudinale et randomisée ouverte avec groupe contrôle, menée dans l’unité de simulation du Centre d’enseignement des soins d’urgences du SAMU 01 (CESU) sur un mois (Décembre 2019-Janvier 2020).

Population de l’étude :

Critères d’inclusion :

Inclusion des résidents de médecine de famille (MF) exerçants dans les services des urgences, inscrits à la faculté de médecine en 1ère année.

Critères de non-inclusion :

N’ont pas été inclus dans l’étude les MF ayant eu des séances de simulation en santé auparavant.

Critères d’exclusion :

Ont été exclus les participants n’ayant pas assisté à toutes les étapes de la formation.

Déroulement de l’étude :

1ère étape : Recrutement des participants :

La participation des MF était réalisée, sur la base du volontariat. Une fois les candidats ont accepté de participer, leurs consentements écrits étaient recueillis aussi bien pour la formation initiale que pour les séances d’évaluation.

2ème étape : Formation théorique 2 semaines avant la séance de simulation :

Un rappel des dernières recommandations sur la prise en charge de l’AC et du SCA avec sus décalage du segment ST (ST+) était fait pour tous les participants (7, 8 ).

Un pré-test et un post-test étaient réalisés.

A la fin de la séance de formation théorique, les apprenants étaient randomisés en deux groupes selon une table de randomisation :

• Groupe « ACR » pour Arrêt Cardio Respiratoire, formé sur simulateur haute-fidélité (SHF) à la prise en charge de l’AC.

• Groupe « SCA ST+ » pour SCA ST+, formé sur SHF à la prise en charge du SCA ST+.

3ème étape : Formations pratiques sur SHF:

Les deux groupes étaient invités au CESU quinze jours après la formation théorique, sur deux jours consécutifs le premier jour pour le groupe ACR et le deuxième pour le groupe SCA ST+.

Tous les apprenants de chaque groupe étaient passés sur le SHF et étaient formés par le biais de scénarii standardisés.

• 4ème étape : Evaluation des compétences à T0 :

Chacun des apprenants des deux groupes était évalué de façon individuelle après la fin des séances des simulations le jour même (T0) avec un scénario commun portant sur la prise en charge d’un SCA ST+ avec BAV compliqué d’un ACR sur fibrillation ventriculaire (FV).

Une analyse par sous-groupes portant sur le diagnostic (DIAG), la prise en charge thérapeutique (PEC) et les compétences en communication (CNT) en utilisant l’outil SAED était réalisée pour les deux groupes.

Pour le scénario ACR sur FV, les items étaient réunis en 4 sous-groupes :

• « FV-DIAG » comprenant les items de la vérification de l’AC et celui du diagnostic de FV.

• « FV-PEC » comprenant les items réanimation cardiopulmonaire, choc électrique externe (CEE), ventilation (VENT), administration d’adrénaline et d’amiodarone (Drugs) avec la posologie, le temps d’administration, et le respect de l’algorithme de prise en charge de l’AC (algorithme).

• « FV-CT» comprenant les items massage cardiaque externe (MCE), VENT et CEE.

Pour le scénario SCA ST+ avec BAV, les items étaient également réunis en trois sous-groupes :

• « SCA ST+ BAV- DIAG » comprenant les items du diagnostic positif du SCA ST+ (anamnestiques, ECG) et le diagnostic de BAV 3ème degré compliquée d’un état de choc (clinique et ECG)

• « SCA ST+ BAV-PEC » comprenant les items du traitement anti-ischémiques (évaluation et traitement de la douleur, traitement de l’HTA par le Risordan au PSE), traitement de reperfusion (appel de la salle de cathétérisme, traitement anti-thrombotique, fibrinolyse et critères de succès) et traitement des complications (BAV 3ème degré).

Chaque groupe a servi de groupe témoin à l’autre pour la pathologie dans laquelle il n’a pas reçu de formation spécifique sur SHF.

• 5ème étape : Evaluation des compétences à un mois :

Les apprenants des 2 groupes étaient convoqués de façon individuelle à 1 mois à compter de la date de formation pratique initiale (T1).

A chaque évaluation, le même questionnaire d’évaluation des prérequis fait le jour de la formation théorique était réalisé.

L’environnement, les formateurs et les modalités d’évaluation étaient les mêmes que lors de la phase de formation initiale.

Critères d’évaluation :

Tous les participants étaient évalués selon les mêmes critères à l’aide de grilles d’évaluation validées par des formateurs en simulation cotées sur un total de 20 points pour chaque thème.

• Pour démontrer l’amélioration ou non des performances des apprenants de chaque groupe dans les différents niveaux de connaissances nous avons évalué leur moyenne générale.

• Et pour s’assurer du maintien des connaissances et leur pérennisation à distance de l’apprentissage par simulation nous avons étudié l’évolution des notes entre T0 et T1.

Analyse statistique :

L’étude statistique était réalisée à l’aide du logiciel SPSS dans sa version 25.

Nous avons procédé en premier lieu au calcul des fréquences pour les variables qualitatives et au calcul des moyennes pour les variables quantitatives.

Pour démontrer l’amélioration ou non des performances des apprenants de chaque groupe « ACR » versus « SCA ST+ » dans les différents niveaux de connaissances, nous avons comparé leurs moyennes sur 20 en utilisant le test t de Student.

Pour l’évaluation de l’évolution des notes entre les différents temps (T0 versus. T1), un test de Wilcoxon apparié était réalisé pour comparer les moyennes du même participant aux différents temps.

Le seuil de signification « p » était fixé à 0,05

RESULTATS :

Quarante-six MF ont participé à l’apprentissage théorique et qui étaient randomisés en 23 apprenants dans chaque groupe. Trente-trois MF ont participé à l’apprentissage par simulation  et 22 se sont présentés à l’évaluation à 1 mois (Figure 1 ).

Figure1 : Diagramme d’inclusion de l’étude.

Figure1 : Diagramme d’inclusion de l’étude

MG: Moyenne générale

Évaluation de la formation théorique :

• Résultats du pré-test et du post-test :

La moyenne globale sur 20 au prétest était de 7,64±2. La moyenne générale (Groupe ACR versus. groupe SCA ST+) étaient de 7,22 ± 2 versus. 8,21 ±2 respectivement (p=0,681).

La moyenne globale sur 20 au post-test était de 14,88±1,51. La moyenne générale (Groupe ACR versus. groupe SCA ST+) étaient de 14,76±1,67 versus. 15±1,32 respectivement (p=0,500).

En comparant les moyennes du pré-test versus. post-test, nous avons noté une amélioration significative de tous les niveaux de connaissances pour l’ensemble des deux groupes (Figure 2 ).

Figure 2 : Analyse des moyennes dupré-test et du post-test en fonction de chaque groupe.

Figure 2 : Analyse des moyennes dupré-test et du post-test en fonction de chaque groupe

• Résultats du test théorique à 1 mois :

La moyenne globale du test théorique à un mois était de 13,63±2,57. La moyenne générale (Groupe ACR versus. groupe SCA ST+) étaient 13,09 ± 2,85 versus. 14,41 ±2 respectivement (p=0,232).

La différence significative observée à T0 relative à l’item CNT, entre les deux groupes  n’était plus constatée à T1.

• Évolution des notes entre les deux temps :

En comparant les résultats du post-test à T0 par rapport à T1, nous avons noté l’absence d’amélioration des notes générales du post test (Groupe ACR: 14,76±1,67 versus. 13,09±2,85, p= 0,745 et Groupe SCA ST+ : 15±1,32 versus 14,41±2, p=0,854).

Impact de l’apprentissage par simulation :

• Résultats immédiats :

• Scénario ACR Sur FV :

Sur le scénario ACR sur FV, la moyenne générale du groupe ACR était significativement supérieure à celle du groupe SCA ST+ : 14,92 ± 2 versus 7,51± 3, p<0,001 respectivement.

Cette amélioration a porté sur le diagnostic de l’ACR (16,51±3,13 versus. 10,53±6,31, p<0,001), la conduite de la réanimation (13,90±2,53 versus. 7,59±3,15, p<0,001) et sur les compétences en communication (16,51±3,13 versus. 10,53±6,31, p<0,001).

• Scénario SCA avec BAV+ :

Sur le scénario SCA ST+ avec BAV, la moyenne générale du groupe SCA ST+, était significativement supérieure à celle du groupe ACR : 13± 2 versus 11 ± 2, p=0,031 respectivement.

Cette amélioration était portée sur la prise en charge des complications (12,37±2,74 versus. 8,91±2,46, p=0,001) et sur la communication (19,64±1,33 versus. 15,52±7,05, p=0,041), mais pas sur le diagnostic (14,66±2,72 versus. 13,67±3,05, p=0,262) ni sur la PEC (12,42±4,31 versus 10,20±2,97, p=0,451).

• Évaluation à 1 mois :

• Sur le scénario ACR Sur FV :

La moyenne générale du groupe ACR formé sur simulateur était supérieure à celle du groupe SCA ST+ mais sans différence significative : 13,96 ± 2,41 vs. 13,33± 2,94; p=0,602 respectivement.

• Sur le scénario SCA ST+ avec BAV :

La moyenne générale du groupe SCA ST+ formé sur simulateur était significativement supérieure à celle du groupe ACR : 13,25± 2,62 vs. 10,30 ± 3,51, p=0,03 respectivement.

• Évolution des notes entre les deux temps :
• Pour le Groupe ACR :

Pour le scénario ACR sur FV sur lequel le groupe est formé : nous n’avons pas noté une amélioration des notes (T0 vs. T1) sauf pour la maitrise de la défibrillation (Tableau 1 ).

Table 1. Tableau 1: Evolution desnotes du groupe ACR pour les scénarii ACR sur FV et SCA ST+ avec BAV auxdifférents temps d'évaluation.

Groupe ACR

T0

T1

P

Scénario ACR sur FV

Moyenne globale ±ET

14,94±2

13,96±2,42

<0,001

Moyenne FV DIAG±ET

17,43±2,73

12,42±4,11

<0,001

Moyenne FV PEC ±ET

13,90±2,53

13,74±3,27

<0,001

Moyenne FV CT ±ET

15,78±2,81

16,34±2,90

<0,001

-Moyenne FV VENT±ET

14,07±6,62

12,69±5,25

<0,001

Moyenne FV MCE ±ET

17,76±2,99

17,11±3,66

0,004

Moyenne FV DEF ±ET

5,52±4,33

17,78±3,27

<0,001

M oyenne FV ALGO ±ET

9,73±3,69

8,26±5,31

0,763

Moyenne FV DRUGS ±ET

15,26±7,72

14,61±6,60

<0,001

Scénario SCA ST+ avec BAV

Moyenne FV CNT±ET

16,51±3,13

15,86±2,94

<0,001

Moyenne globale±ET

11,25±2,48

10,30±3,51

<0,001

Moyenne SCAST+_DIAG ± ET

13,67±3,05

11,86±3,21

<0,001

Moyenne SCA ST+_ PEC ± ET

10,20±2,97

9,63±3,99

<0,001

Moyenne SCA ST+_anti-isché ± ET

11,90±4,60

10,38±6,06

0,082

Moyenne SCA ST+_Reperfusion ± ET

10,07±4,77

10,37±4,67

0,012

Moyenne SCA ST+_Compli ± ET

8,91±2,46

8,01±3,47

0,394

Moyenne SCA ST+_ CNT ± ET

15,52±7,05

14,61±7,77

<0,001

ACR : arrêt cardio-respiratoire, SCA ST+ : syndrome coronarien aigu ST+, FV : fibrillation ventriculaire, ET : écarts type, DIAG : diagnostic, PEC : prise en charge thérapeutique, CT : compétences techniques, VENT : ventilation, MCE : massage cardiaque externe, DEF : défibrillation externe, ALGO : algorithme, BAV : bloc auriculo-ventriculaire, anti-isché; anti-ischémique, Compli : complication, CNT : compétences non techniques

Pour le scénario SCA ST+ avec BAV sur lequel le groupe n’est pas formé sur simulateur : nous n’avons pas noté une amélioration des notes (T0 vs. T1) pour tous les niveaux de connaissances (Tableau 1 ).

• Pour le Groupe SCA ST+:

Pour le scénario ACR sur FV sur lequel le groupe n’est pas formé sur simulateur : nous avons noté une amélioration significative des notes (T0 vs. T1) pour toutes les compétences (Tableau 2 ).

Table 2. Tableau 2 :Evolution des notes du groupe SCA pour les scénarii ACR sur FV et SCA ST+ avec BAV aux différents tempsd'évaluation.

Groupe SCA ST+

T0

T1

P

Scénario ACR sur FV

Moyenne globale ±ET

7,51±3

13,33±2,94

<0,001

Moyenne FV DIAG ±ET

3,09±4,22

13,13±4,59

<0,001

Moyenne FV PEC ±ET

7,59±3,15

12,66±3,02

<0,001

Moyenne FV CT ±ET

9,64±3,85

15,34±3,69

<0,001

Moyenne FV VENT ±ET

4,82±4,43

13,33±5,59

<0,001

Moyenne FV MCE ±ET

14,10±6,01

18,61±2,82

<0,001

Moyenne FV DEF ±ET

9,82±4,35

14,72±4,32

<0,001

Moyenne FV ALGO ±ET

10 ±2,94

7,50±3,53

<0,001

Moyenne FV DRUGS ±ET

10±8,77

11,66±8,66

<0,001

Moyenne FV CNT ±ET

10,53±6,10

15,69±2,42

<0,001

Scénario SCA ST+ avec BAV

Moyenne globale ±ET

13,21±3,40

13,25±2,62

<0,001

Moyenne SCAST+_DIAG ± ET

14,66±2,72

14,44±2,90

0,1190

Moyenne SCA ST+_ PEC ± ET

12,42±4,31

12,95±2,73

<0,001

Moyenne SCA ST+_anti-isché ± ET

12,16±5,82

15,27±6,33

0,372

Moyenne SCA ST+_Reperfusion ± ET

12,37±6,55

13,14±3,62

0,234

Moyenne SCA ST+_Compli ± ET

12,37±2,74

10,75±2,15

0,824

Moyenne SCA ST+_ CNT ± ET

19,64±1,33

17,22±6,66

<0,001

ACR : arrêt cardio-respiratoire, SCA ST+ : syndrome coronarien aigu ST+, FV : fibrillation ventriculaire, ET : écarts type, DIAG : diagnostic, PEC : prise en charge thérapeutique, CT : compétences techniques, VENT : ventilation, MCE : massage cardiaque externe, DEF : défibrillation externe, ALGO : algorithme, SCA ST+ : Syndrome coronarien ST+, BAV : bloc auriculo-ventriculaire, ET : écart type, anti-isché; anti-ischémique, Compli : complication, CNT : compétences non techniques

Pour le scénario SCA ST+ avec BAV sur lequel le groupe est formé : nous avons noté un maintien des notes (T0 vs. T1) sauf pour le sous-groupe diagnostic, prise en charge de complications et acquisition des CNT (Tableau 2 ).

DISCUSSION :

Dans cette étude nous avons observé pour le groupe ACR, une baisse significative des notes à 1 mois de la formation par simulation et ceci pour tous les niveaux de compétences à l’exception de la maitrise de la défibrillation.

Par contre, le groupe SCA ST+ continue de s’améliorer à T1 par rapport à T0 sur leur prise en charge du scénario SCA ST+ sur lequel il est formé.

Les résultats des différentes études sur la rétention des connaissances en simulation sont toujours controversés.

Certaines suggèrent que la simulation améliore la rétention des connaissances. Boet et al. (9 ) ont évalué en 2011, sur un groupe de 38 anesthésistes, la rétention des compétences techniques liées à la cricothyroïdotomie. Leurs performances étaient meilleures aussi bien à 6 mois qu’à 12 mois et il était observé un maintien de cet apprentissage à 12 mois.

Une équipe canadienne a aussi confirmé le bénéfice sur le long terme de la simulation pour les internes d’anesthésie-réanimation travaillant dans un bloc de chirurgie cardiaque 10.

Une des explications avancées pour comprendre le mécanisme d’apprentissage de la formation sur simulateur est le concept de mémoire épisodique.

Il s’agit de la capacité d’un individu à se souvenir d’un événement vécu (sur simulateur) et de sa faculté à ressortir consciemment les informations mémorisées lorsqu’il revivra un événement identique (dans le réel) (11 ).

Toutefois, si la simulation doit s’intégrer dans la formation initiale et continue des médecins, deux éléments d’importance restent à préciser : la durée de la validité des formations sur simulateur et la fréquence des séances à réaliser afin de conserver le bénéfice de la formation.

Dans d’autres études, ce bénéfice de la simulation sur le court et le long terme n’a pas été retrouvé. En effet, dans l’étude de Loetal et al. (12 ), la rétention de la connaissance sur la prise en charge d’un arrêt cardiaque n’est pas différente selon que l’étudiant était formé par les moyens traditionnels ou par simulation.

Dans une étude évaluant la qualité de la prise en charge de l’ACR chez l’enfant, à un an de la formation par simulation, il était démontré une diminution des scores de la RCP spécialisée (13 ).

Ce même constat était aussi retrouvé dans une étude évaluant la réanimation de l’ACR chez l’adulte (14 ).

Dans notre étude, nous avons mis en évidence une baisse significative des notes à 1 mois de la formation par simulation pour le groupe ACR.

En effet, l’arrêt cardiaque est une pathologie peu fréquente en pratique courante aux urgences et la non répétition des séances de simulation entre les 2 périodes peut expliquer l’absence de rétention des connaissances à un mois pour cette pathologie.

Certaines études ont retrouvé aussi qu’une seule séance de simulation ne semble pas suffisante pour acquérir les compétences en arrêt cardiaque suggérant que plusieurs séances de simulation sont nécessaires pour progresser sur ce sujet (15 ).

Par contre, le groupe SCA ST+ continue de s’améliorer globalement à T1 par rapport à T0 sur leur prise en charge du scénario SCA ST+ sur BAV sur lequel il est formé.

Ceci peut être expliqué en partie par la grande carence des connaissances qu’avaient les participants en ce volet de prise en charge du SCA avant la formation. Ce qui a offert une plus grande marge de progression après la première séance de mise en situation simulée.

Mais aussi, par le fait que le SCA est une situation clinique fréquemment rencontrée aux urgences, dont la prise en charge est actuellement bien protocolisée dans la majorité des services d’urgences et l’enseignement au lit du malade garde une place importante dans le processus de formation de ce type de pathologie.

Ce qui permet aux jeunes médecins, tout au long de leur passage aux services d’urgence, une bonne maitrise de cette pathologie et avec des séances de simulations complémentaires leur performance sera certainement améliorée même avec une seule séance de simulation.

On peut conclure que l’intérêt pédagogique de la simulation, même de façon ponctuelle, est largement démontré. Mais il serait certainement bien plus bénéfique si ces formations pouvaient être renouvelées afin de garder un niveau de connaissances et de compétences optimal.

Il faudrait ainsi éviter de proposer des séances isolées de simulation aux futurs professionnels et il serait préférable d’inscrire la formation dans le temps, ainsi que dans un programme pédagogique de formation médicale initiale.

Limite de l’étude :

Comme tout travail notre étude présente des limites :

• Il s’agit d’une étude ouverte.

Chaque participant avait pleinement conscience du scénario sur lequel il était en train d’être évalué, ce paramètre étant difficilement modifiable.

Et les formateurs avaient connaissance du groupe auquel appartenaient les différents médecins de famille, et donc il y avait un risque d’être influencé et dans ce cas l’évaluation pouvait être subjective.

• La non exacte superposition des groupes.

• L’effectif global de notre échantillon était très faible avec nombre considérable de perdus de vue par rapport à la littérature

• Enfin, nous n’avons pas pu réaliser une étude de la rétention des connaissances acquises par la simulation sur le long terme (3 mois et 6 mois après la simulation). Ceci était dû à l’avènement de l’épidémie COVID-19. Un re-lancement de notre projet est en cours de réalisation.

CONCLUSIONS :

Notre étude confirme le bénéfice pédagogique de la formation par simulation versus un enseignement classique pour tous les domaines du savoir nécessaires à la bonne maitrise de la prise en charge de l’AC et du SCAST+.

Mais il serait certainement bien plus bénéfique si ces formations pouvaient être renouvelées afin de garder un niveau de connaissances et de compétences optimal.

Il faudrait ainsi éviter de proposer des séances isolées de simulation aux futurs professionnels et il serait préférable d’inscrire la formation dans le temps, ainsi que dans un programme pédagogique de formation médicale.

L’objectif ultime est l’intégration parfaite de l’apprentissage par simulation comme méthode pédagogique dans un processus global de formation des professionnelles de santé aussi bien en formation initiale que continue.

References

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